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19/12/2013 | FRANCE | N°13LY01367

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 19 décembre 2013, 13LY01367


Vu la requête, enregistrée le 31 mai 2013, présentée par le Préfet de la Savoie ;

Le préfet de la Savoie demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1300334 du 7 mai 2013 par lequel le Tribunal Administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 7 septembre 2012 par lequel il a refusé de délivrer à Mme D...un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

Le préfet soutient que :

1°) S'agissant de la décision de refus de séjour :

- Son signataire bénéficiait d'une délégation de signature rég

ulière ;

- L'avis du médecin de l'agence régionale de santé est régulier ;

- La décision ne viole...

Vu la requête, enregistrée le 31 mai 2013, présentée par le Préfet de la Savoie ;

Le préfet de la Savoie demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1300334 du 7 mai 2013 par lequel le Tribunal Administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 7 septembre 2012 par lequel il a refusé de délivrer à Mme D...un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

Le préfet soutient que :

1°) S'agissant de la décision de refus de séjour :

- Son signataire bénéficiait d'une délégation de signature régulière ;

- L'avis du médecin de l'agence régionale de santé est régulier ;

- La décision ne viole pas l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

2°) S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision refusant le titre de séjour étant légale, l'exception d'illégalité devra être rejetée ;

- la décision ne viole pas l'article L. 511-4, 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination est légale pour les mêmes raisons ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu l'ordonnance en date du 11 septembre 2013 fixant la clôture de l'instruction au 7 octobre 2013 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 octobre 2013, présenté pour MmeD..., qui conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation ;

Madame D...soutient que :

- La décision lui refusant un titre de séjour est illégale du fait de l'incompétence de son signataire et de l'irrégularité de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;

- Elle méconnaît l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aucun traitement approprié à son état de santé n'étant disponible à Madagascar ;

- Trois de ses enfants sont de nationalité française et la décision méconnait par suite les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnait pour les mêmes raisons l'article L. 511-4-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de retour doit être annulé par voie de conséquence de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire ;

Vu l'ordonnance en date du 8 octobre 2013 fixant la clôture de l'instruction au 23 octobre 2013 ;

Vu le mémoire enregistré le 23 octobre 2013, présenté pour MmeD..., qui demande, dans l'hypothèse ou la Cour annulerait le jugement, de confirmer la condamnation de l'Etat en première instance, sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance en date du 24 octobre 2013 fixant la clôture de l'instruction au 12 novembre 2013 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 novembre 2013 le rapport de M. Wyss, président ;

Sur les conclusions du préfet de l'Isère à fin d'annulation :

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le docteur Marie-José Communal qui a signé l'avis de l'agence régionale de santé, avait été habilitée, par décision du 25 avril 2012 du directeur général de l'agence régionale de santé Rhône-Alpes, produite pour la première fois en appel, à émettre les avis sur les demandes de cartes de séjour temporaire présentées sur le fondement de l'état de santé ; que dès lors, le préfet de Savoie est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur le motif tiré de l'absence de désignation de ce médecin par le directeur de l'agence régionale de santé pour annuler son arrêté du 7 septembre 2012 ;

2. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Madame D...tant devant le tribunal administratif de Grenoble que devant la Cour ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, que Mme B...A...qui a signé la décision de refus de séjour attaquée, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de la Savoie en date du 1er juin 2012 régulièrement publiée le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture de Savoie, à l'effet notamment de signer les décisions de refus de séjour ; que dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée manque en fait ;

4. Considérant, que le préfet de la Savoie a produit l'avis en date du 6 juillet 2012 du médecin de l'agence régionale de santé ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'avis n'aurait pas été recueilli manque en fait ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...)11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) " ;

6. Considérant que pour refuser la délivrance du titre de séjour sollicité, le préfet de la Savoie s'est fondé sur l'avis du médecin de l'agence régionale de santé en date du 6 juillet 2012, indiquant que l'état de santé de la requérante nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que le traitement approprié existe dans le pays d'origine de la requérante, Madagascar, et précise que Mme D...peut voyager en avion ; que si MmeD..., qui souffre de diabète associé à une hypertension artérielle, conteste l'appréciation portée par le préfet de la Savoie sur la possibilité pour elle d'accéder effectivement à un traitement médical approprié dans son pays, le certificat médical du Dr Ramanantsoa dont elle se prévaut, indique seulement que l'hôpital où il exerce est surchargé de patients ; que cette attestation ne permet pas de conclure à une indisponibilité des soins à Madagascar ; que dans ces conditions, le préfet de la Savoie, en refusant de délivrer à la requérante un titre de séjour, n'a pas méconnu les dispositions précitées ; qu'il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme D...;

7. Considérant que Mme D...fait valoir qu'elle est mère de quatre enfants dont trois vivent en France et sont de nationalité française ; que cependant, il ressort des pièces du dossier que Madame D...n'est entrée en France que le 19 juin 2011, à l'âge de 67 ans ; qu'elle n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où résident notamment son quatrième enfant et son mari dont elle n'établit pas être séparée ; que dès lors, en refusant de délivrer un titre de séjour à MmeD..., le préfet de la Savoie n'a pas porté à son droit à mener une vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée par rapport au but poursuivi et n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision de refus de séjour sur la situation personnelle de la requérante ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant, en premier lieu, que, comme il a été dit ci-dessus, la décision refusant de délivrer un titre de séjour à Mme D...n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre, doit être écarté ;

9. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " ;

10. Considérant, comme il a été dit précédemment, que Madame D...ne démontre pas l'impossibilité de recevoir à Madagascar des soins adaptés à son état de santé ; que dès lors, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 doit être écarté ;

11. Considérant, en dernier lieu, que compte tenu des éléments précédemment exposés, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette décision sur sa situation personnelle ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

12. Considérant que, compte tenu de ce qui précède, les décisions refusant à Mme D... un titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français ne sont pas entachées d'illégalité ; que, dès lors, l'intéressée n'est pas fondée à soulever, par la voie de l'exception, l'illégalité desdites décisions à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme D...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1300334 du tribunal administratif de Grenoble en date du 7 mai 2013 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme C...D...devant le Tribunal administratif de Grenoble, ainsi que ses conclusions d'appel, sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à MmeD..., au préfet de la Savoie et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Wyss, président,

- M. Mesmin d'Estienne, président assesseur,

- Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique le 19 décembre 2013.

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N° 13LY01367 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: M. Jean Paul WYSS
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : PIEROT

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 19/12/2013
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 13LY01367
Numéro NOR : CETATEXT000028349009 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-12-19;13ly01367 ?
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