La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/12/2013 | FRANCE | N°13LY00949

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 19 décembre 2013, 13LY00949


Vu la requête, enregistrée le 12 avril 2013 présentée pour M. D...F..., domicilié ... ;

M. F...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1204437 du 28 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 mai 2012 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées du 6 mai 2012 ;

3°) d'enjoindre au préfet

de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "...

Vu la requête, enregistrée le 12 avril 2013 présentée pour M. D...F..., domicilié ... ;

M. F...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1204437 du 28 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 mai 2012 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées du 6 mai 2012 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros TTC en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que ledit conseil renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle ;

M. F...soutient que :

Sur la décision de refus de titre de séjour :

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention de New-York sur les droits de l'enfant ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences de la décision de refus de titre de séjour sur sa situation personnelle ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention de New-York sur les droits de l'enfant ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du 12 février 2013, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. F...;

Vu l'ordonnance en date du 18 juin 2013 fixant la clôture d'instruction au 17 juillet 2013, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative;

Vu le mémoire, enregistré le 9 juillet 2013, présenté par le préfet de l'Isère qui conclut au rejet de la requête ;

Le préfet de l'Isère qui se réfère à son mémoire en défense produit en première instance, soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

Vu la pièce complémentaire, enregistrée le 20 novembre 2013, présentée pour M. F... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 novembre 2013 :

- le rapport de M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur ;

- les observations de Me E...représentant M.F... ;

1. Considérant que par un jugement en date du 28 décembre 2012, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de M. D...F..., de nationalité angolaise, tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 mai 2012 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que M. F...relève appel de ce jugement ;

Sur la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées des motifs des décisions défavorables qui les concernent. (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

3. Considérant que la décision du 6 mai 2012 portant refus de délivrance d'un titre de séjour à M. F...indique notamment que ce dernier, de nationalité angolaise, entré en France selon ses déclarations, le 17 février 2009, a d'abord sollicité son admission au titre de l'asile dans le cadre des dispositions de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté le 22 janvier 2010 sa demande, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 12 janvier 2011 ; qu'il a fait l'objet le 4 mars 2011 d'un arrêté de refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'il a sollicité le 22 décembre 2011 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'après avis du médecin de l'Agence régionale de santé, il apparaît qu'il peut effectivement bénéficier, dans son pays d'origine, d'un traitement approprié à son état de santé et qu'il ne remplit donc pas les conditions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour se voir délivrer un titre de séjour sur ce fondement, qu'il ne fait valoir aucune circonstance humanitaire exceptionnelle et que compte tenu de la brièveté de son séjour en France et dès lors qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où réside son autre enfant mineur, la décision ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'il résulte de ce qui précède que cette décision qui indique les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde est, par suite, suffisamment motivée ;

4. Considérant que M.F..., entré en France selon ses dires en 2009, fait valoir que ses attaches familiales sont désormais en France, pays dans lequel vit, d'une part, Mme H...G..., son épouse, également de nationalité angolaise, en situation régulière, d'autre part, l'enfant de cette dernière, le jeuneA..., né le 31 juillet 2008 et issu de l'union de Mme G... avec M.B..., ainsi enfin que la jeuneC..., née de leur union le 28 octobre 2011 ; que M. F...soutient que lui-même et son épouse ne sauraient reconstituer la cellule familiale et mener une vie privée et familiale normale ailleurs qu'en France et notamment dans leur pays d'origine, dès lors que tantA..., le premier enfant de son épouse, queC..., leur fille, sont nés en France et ont tous deux été élevés sur le territoire français ; que toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier, d'une part, que M.B..., le père de l'enfantA..., conserve un lien fort avec celui-ci et exerce sur ce dernier son autorité parentale et son droit de visite ; que, d'autre part, M. F...conserve de fortes attaches privées et familiales dans son pays d'origine où vit un autre de ses enfants ; que, dans ces conditions, rien ne s'oppose à ce que la vie familiale du requérant, de MmeG..., son épouse, de la jeune C...et du premier enfant de Mme G...puisse se poursuivre en Angola, pays dont ils ont tous la nationalité ; qu'ainsi, le refus de délivrer à M. F...un titre de séjour ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de celui-ci à mener une vie privée et familiale normale ;

5. Considérant que pour les mêmes raisons que celles exposées précédemment et dès lors que rien ne s'oppose à ce que la vie familiale du requérant, de Mme G...et de leur fille comme du premier enfant de Mme G...puisse se poursuivre en Angola, la décision de refus de séjour n'a pas ainsi méconnu les stipulations de l'article 3-1 de convention internationale sur les droits de l'enfant ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, que la décision de refus de délivrance de titre de séjour n'étant pas illégale, M. F...n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant et de l'erreur manifeste d'appréciation, qui reprennent les mêmes arguments que ceux développés à l'encontre de la décision de refus de séjour, ne peuvent qu'être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " ;

9. Considérant que le requérant n'est pas fondé à invoquer les dispositions de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que l'avis du médecin inspecteur de la santé publique indique que le défaut de prise en charge de sa pathologie ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que la seule production d'un certificat du docteur Bendrihem, du 19 mai 2010, du docteur Flamant, du 9 avril 2013, relevant l'existence chez M. F...d'un syndrome de stress post-traumatique ainsi que d'un certificat en date du 18 novembre 2013 du docteur Journet, postérieur à la décision attaquée et qui se borne à faire état, sans autres précisions, de consultations médicales régulières du requérant, ne permet pas de remettre en cause l'appréciation portée par le médecin de l'agence régionale de santé sur l'absence de nécessité d'une prise en charge médicale du requérant dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et sur l'existence d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé pour sa prise en charge médicale alors que la réalité des traumatismes subis en Angola et leur lien direct avec l'affection psychologique dont il souffre ne sont au demeurant pas établis ;

Sur la fixation du pays de destination :

10. Considérant, alors que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile n'ont pas considéré que les faits de persécutions allégués pouvaient être tenus pour établis et que les craintes énoncées pouvaient être regardées comme fondées, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. F...serait exposé, en cas de retour en Angola, à des menaces ou des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que tant la lettre manuscrite datée du 16 mars 2011 de la compagne de son plus jeune frère décédé, qui indique que plusieurs familles chercheraient à le tuer, que les courriers, datés de 2009 mais produits pour la première fois seulement en appel, informant son épouse de la disparition du frère de celle-ci ou rapportant que des menaces auraient été proférées en Angola à l'encontre de M. F...ou à l'encontre de son épouse ou encore de courriers plus récents évoquant le décès de son frère, de sa mère puis de la soeur de son épouse sont dénués de valeur probante et ne sont, par suite, pas de nature à établir la réalité des risques encourus en cas de retour en Angola ; qu'en conséquence M. F...n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant l'Angola comme pays de destination de sa reconduite méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cette décision n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. F...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de sa requête aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...F...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...F...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2013 à laquelle siégeaient :

M. Wyss, président de chambre,

M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

M. Dursapt, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 décembre 2013.

''

''

''

''

1

2

N° 13LY00949


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Textes applicables.

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.


Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: M. Olivier MESMIN d'ESTIENNE
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : FRERY

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 19/12/2013
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 13LY00949
Numéro NOR : CETATEXT000028379128 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-12-19;13ly00949 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award