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26/09/2013 | FRANCE | N°12LY01667

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 26 septembre 2013, 12LY01667


Vu la requête, enregistrée le 25 juin 2012, présentée pour l'association nationale de la pharmacie vétérinaire d'officine, représentée par son président en exercice, dont le siège social est 24 rue de Vintimille à Paris (75009) ;

L'association nationale de la pharmacie vétérinaire d'officine demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101182 du 24 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la région Auvergne du 18 avril 2011 portant renouvellement de l'agrémen

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Vu la requête, enregistrée le 25 juin 2012, présentée pour l'association nationale de la pharmacie vétérinaire d'officine, représentée par son président en exercice, dont le siège social est 24 rue de Vintimille à Paris (75009) ;

L'association nationale de la pharmacie vétérinaire d'officine demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101182 du 24 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la région Auvergne du 18 avril 2011 portant renouvellement de l'agrément d'un groupement visé à l'article L. 5143-7 de code de la santé publique à la société coopérative CIRHYO ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté préfectoral susmentionné ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les dispositions du code de la santé publique applicables aux groupements agréés autorisaient la délivrance de médicaments vétérinaires qu'ils détiennent par des personnes n'ayant la qualité ni de vétérinaire ni de pharmacien, que ces médicaments soient soumis ou non à prescription, alors qu'il ressort des travaux préparatoires de la loi du 29 mai 1975 dont sont issues les dispositions des articles L. 5143-6 et suivants dudit code qu'en application de ces dispositions, les médicaments vétérinaires détenus par les groupements agréés et soumis à prescription ne peuvent être délivrés que par un pharmacien ou un vétérinaire ;

- contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges, le contrôle effectué par le vétérinaire ou le pharmacien visé par les dispositions de l'article L. 5143-8 du code de la santé publique n'a ni pour objet ni pour effet d'autoriser les groupements agréés à recourir à des personnes n'ayant pas la qualité de vétérinaire ou de pharmacien pour la délivrance des médicaments à prescription, ce contrôle devant porter sur l'activité pharmaceutique dans son ensemble, nécessaire à la bonne exécution du programme sanitaire d'élevage, et non pas sur l'acte individuel de délivrance qui constitue le prolongement de l'acte médical de prescription ;

- si le contrôle visé par l'article L. 5143-8 du code de la santé publique devait être regardé comme se rapportant à l'acte individuel de délivrance prolongeant l'acte médical de prescription, le dispositif organisé par le groupement CIRHYO est illégal dès lors que le contrôle ne peut être utile et effectif puisqu'il est effectué a posteriori et après une délivrance par des préposés dépourvus de la qualification nécessaire pour concourir à l'opération de délivrance, seuls les préparateurs en pharmacie et les assistants vétérinaires ayant qualité pour seconder un pharmacien ou un vétérinaire ;

- l'interprétation donnée par les premiers juges des dispositions de l'article L. 5143-8 du code de la santé publique ne peut être conforme à ces dispositions sans révéler l'inconstitutionnalité de celles-ci au regard des droits et libertés garantis par la Constitution, en particulier la protection de la santé publique ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision n° 364366 du 1er mars 2013 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par l'association nationale de la pharmacie vétérinaire d'officine ;

Vu l'ordonnance du 14 mai 2013 fixant au 21 juin 2013 la date de clôture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 juin 2013, présenté par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- il résulte seulement des débats parlementaires de la loi du 29 mai 1975 que la délivrance des médicaments vétérinaires détenus par les groupements agréés doit être réalisée sous le contrôle effectif d'une personnalité qualifiée pour le faire, c'est-à-dire d'un vétérinaire ou d'un pharmacien participant effectivement à la direction technique du groupement et qui est personnellement responsable du respect des dispositions législatives et réglementaires concernant les médicaments vétérinaires ;

- en l'absence de norme législative ou réglementaire imposant un niveau de qualification aux assistants des vétérinaires des groupements agréés, il ne peut être reproché à l'arrêté en litige une erreur d'appréciation sur ce point ;

- il ne peut être reproché à l'arrêté en litige d'avoir renouvelé l'agrément du groupement CIRHYO dont le vétérinaire ne procéderait qu'à un contrôle a priori de la délivrance de médicaments, alors qu'il existe trois types de contrôle opéré par ledit vétérinaire : a priori, en continu et a postériori ;

- le moyen tiré de l'inconstitutionnalité des dispositions de l'article L. 5143-8 du code de la santé publique devra être écarté dès lors que le Conseil d'Etat a jugé qu'il n'y avait pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question portant sur la constitutionnalité de ces dispositions ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 juin 2013, présenté pour la société coopérative CIRHYO, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'association nationale de la pharmacie vétérinaire d'officine la somme de 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle se réfère à l'argumentaire développé par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 juin 2013, présenté pour l'association nationale de la pharmacie vétérinaire d'officine, qui maintient les conclusions de sa requête par les mêmes moyens ;

Vu l'ordonnance du 4 juillet 2013 reportant au 19 juillet 2013 la date de clôture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 septembre 2013:

- le rapport de M. Seillet, président-assesseur ;

- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

1. Considérant que par un arrêté n° 56/2011 du 18 avril 2011, le préfet de la région Auvergne a renouvelé, pour une période de cinq ans, l'agrément délivré auparavant à la société coopérative CIRHYO, en sa qualité de groupement visé à l'article L. 5143-7 du code de la santé publique ; que l'association nationale de la pharmacie vétérinaire d'officine demande à la Cour d'annuler le jugement du 24 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté du 18 avril 2011 du préfet de la région Auvergne ;

Sur la légalité de l'arrêté du préfet de la région Auvergne du 18 avril 2011 :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 5143-6 du code de la santé publique : " Les groupements reconnus de producteurs, les groupements professionnels agricoles dont l'action concourt à l'organisation de la production animale et qui justifient d'un encadrement technique et sanitaire suffisant et d'une activité économique réelle d'une part, les groupements de défense sanitaire d'autre part, peuvent, s'ils sont agréés à cet effet par l'autorité administrative, acheter aux établissements de préparation, de vente en gros ou de distribution en gros, détenir et délivrer à leurs membres, pour l'exercice exclusif de leur activité, les médicaments vétérinaires à l'exclusion de ceux contenant des substances ayant fait l'objet d'obligations particulières au titre de l'article L. 5144-1. / Toutefois, ces groupements peuvent également acheter en gros et détenir ceux des médicaments contenant des substances prévues à l'article L. 5144-1 qui figurent sur une liste arrêtée conjointement par les ministres chargés de l'agriculture et de la santé et sur proposition de l'Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail et qui sont nécessaires à la mise en oeuvre des programmes sanitaires d'élevage visés à l'article L. 5143-7. Ces produits sont délivrés aux adhérents du groupement sur présentation d'une ordonnance du vétérinaire du groupement, qui revêt la forme d'une prescription détaillée, adaptant aux caractéristiques propres de chaque élevage, le programme sanitaire agréé. " ; qu'aux termes de l'article L 5143-7 du même code : " Les groupements visés à l'article L. 5143-6 doivent être agréés par l'autorité administrative, sur proposition de commissions comprenant en nombre égal des représentants de l'administration, des représentants des organisations professionnelles agricoles et des représentants des vétérinaires et pharmaciens. (...) " ; qu'aux termes de l'article L 5143-8 dudit code : " L'acquisition, la détention et la délivrance des médicaments détenus par les groupements visés à l'article L. 5143-6 doivent être faites sous le contrôle d'un vétérinaire ou d'un pharmacien participant effectivement à la direction technique du groupement. Dans tous les cas, ce pharmacien ou vétérinaire est personnellement responsable de l'application des dispositions législatives et réglementaires concernant les médicaments vétérinaires sans préjudice, le cas échéant, de la responsabilité solidaire du groupement. " ;

3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées des articles L. 5143-6 et L. 5143-8 du code de la santé publique que, dans le cadre de groupements reconnus de producteurs au sens de ces dispositions, la délivrance des médicaments détenus par eux, comme leur acquisition et leur détention, doit être faite sous le contrôle d'un vétérinaire ou d'un pharmacien participant effectivement à la direction technique du groupement et, pour les médicaments vétérinaires contenant des substances ayant fait l'objet d'obligations particulières au titre de l'article L. 5144-1, nécessaires à la mise en oeuvre des programmes sanitaires d'élevage visés à l'article L. 5143-7, que ladite délivrance doit être opérée sur présentation d'une ordonnance du vétérinaire du groupement, qui revêt la forme d'une prescription détaillée, adaptant aux caractéristiques propres de chaque élevage le programme sanitaire agréé ; qu'il n'en résulte pas, toutefois, contrairement à ce que soutient l'association requérante, que seul un vétérinaire du groupement aurait qualité pour procéder à la délivrance de ces médicaments ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que les vétérinaires de la société coopérative CIRHYO procèdent à un contrôle de l'acquisition, de la détention et de la délivrance des médicaments détenus par ce groupement a priori, par le contrôle des commandes, des stocks, la formation des personnes déléguées et l'identification des médicaments, en continu, par une supervision tous les quinze jours, et a posteriori, par un contrôle des stocks avec, le cas échéant, une analyse des non conformités ; qu'ainsi, l'association nationale de la pharmacie vétérinaire d'officine ne démontre pas l'absence de caractère effectif d'un tel contrôle, au regard des dispositions précitées de l'article L 5143-8 du code de la santé publique ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne résulte ni des dispositions de l'article L. 4241-1 du code de la santé publique, relatives à la qualité des préparateurs en pharmacie pour seconder les pharmaciens, ni de celles de l'article L. 241-6 du code rural et la pêche maritime, relatives à la qualité des assistants des vétérinaires pour pratiquer la médecine et la chirurgie des animaux, que les personnes qui, au sein de la société coopérative CIRHYO, participent à la délivrance des médicaments que ce groupement détient, n'auraient pas qualité pour ce faire, au regard des dispositions applicables des articles L. 5143-6 et L. 5143-8 du code de la santé publique ;

6. Considérant, en dernier lieu, que par sa décision du 1er mars 2013 susvisée, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a estimé que la question prioritaire de constitutionnalité, soulevée par l'association nationale de la pharmacie vétérinaire d'officine, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions de l'article L. 5143-8 du code de la santé publique, était dépourvue de caractère sérieux et a décidé qu'il n'y avait pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ; que dès lors, le moyen tiré de l'inconstitutionnalité de cet article doit être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la région Auvergne n'a commis ni erreur de droit ni erreur d'appréciation en renouvelant, par l'arrêté du 18 avril 2011 en litige, l'agrément précédemment accordé à la société coopérative CIRHYO ; que, par suite, l'association nationale de la pharmacie vétérinaire d'officine n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à ce que soit mis à la charge de l'Etat les dépens de l'instance, comprenant sa contribution pour l'aide juridique ;

Sur les conclusions de la société coopérative CIRHYO tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association nationale de la pharmacie vétérinaire d'officine la somme de 400 euros que réclame la société coopérative CIRHYO au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'association nationale de la pharmacie vétérinaire d'officine est rejetée.

Article 2 : L'association nationale de la pharmacie vétérinaire d'officine versera la somme de 400 euros à la société coopérative CIRHYO au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association nationale de la pharmacie vétérinaire d'officine, au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, et à la société coopérative CIRHYO.

Délibéré après l'audience du 5 septembre 2013 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 septembre 2013.

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N° 12LY01667


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-05-03 Agriculture et forêts. Produits agricoles. Élevage et produits de l'élevage.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : CLAISSE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 26/09/2013
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 12LY01667
Numéro NOR : CETATEXT000028018137 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-09-26;12ly01667 ?
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