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03/07/2012 | FRANCE | N°11LY01379

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 03 juillet 2012, 11LY01379


Vu la requête, enregistrée le 1er juin 2011, présentée pour M. Salvatore A, domicilié ...), pour la SARL MEGI dont le siège est 91 chemin de la Saccunière à La Boisse (01120) et pour M. Joseph A, ... ;

Les requérants demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902189 du 31 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de la commune de Beynost en date du 25 octobre 2007 décidant d'exercer son droit de préemption urbain sur les parcelles cadastrées Section AE n°

451 et 452 ;

2°) d'annuler la délibération attaquée ;

3°) de condamner la c...

Vu la requête, enregistrée le 1er juin 2011, présentée pour M. Salvatore A, domicilié ...), pour la SARL MEGI dont le siège est 91 chemin de la Saccunière à La Boisse (01120) et pour M. Joseph A, ... ;

Les requérants demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902189 du 31 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de la commune de Beynost en date du 25 octobre 2007 décidant d'exercer son droit de préemption urbain sur les parcelles cadastrées Section AE n° 451 et 452 ;

2°) d'annuler la délibération attaquée ;

3°) de condamner la commune de Beynost à leur verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Les requérants soutiennent que M. Salvatore A et la SARL MEGI ont signé le 30 juillet 2007 avec M. Joseph A un compromis de vente concernant les parcelles cadastrées section AE n° 519 (actuellement n° 541) et n° 152 (actuellement n° 542) situées au lieudit " La Batonne " sur le territoire de la commune en cause ; que la parcelle n° 542 fait moins de 1 000 m² et l'autre parcelle est destinée à assurer une servitude de passage ; que suite à la déclaration d'aliéner, reçue le 5 septembre 2007, le conseil municipal a décidé par délibération du 25 octobre 2007 l'acquisition des parcelles concernées ; que, toutefois, M. Onofrédo C avait obtenu le 25 septembre 2006 un permis de construire sur la parcelle n° 542 afin d'y édifier une maison d'habitation ; qu'un marché de travaux avait été conclu avec la société MEGI en vue de la construction d'une maison individuelle ; qu'à ce jour, le terrassement et les fondations, les demandes de branchements ont été faits et les logettes ont été posées et payées ; que, de plus, la surélévation des murs pour atteindre la première dalle a été réalisée ; que suite à la décision de préemption la SARL MEGI a décidé, le 29 octobre 2007 de ne pas donner suite à la vente du terrain ; que la commune de Beynost a répondu le 24 janvier 2008, soit trois mois après, par la négative, à cette volonté ; que le 29 décembre 2008, les consorts A ont adressé un recours gracieux demandant le retrait de la délibération litigieuse ; que la commune n'a jamais répondu à cette demande ; qu'ils ont saisi le Tribunal administratif de Lyon ; que par jugement du 31 mars 2011 leur demande a été rejetée ; que s'agissant de la légalité externe de la délibération attaquée, celle-ci est entachée d'une erreur matérielle car elle fait mention d'un terrain nu ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus le terrain est partiellement construit ; que, par ailleurs, la délibération attaquée est sur le fond entachée d'illégalité dans la mesure où la commune ne dispose pas d'un projet suffisamment précis concernant les parcelles n° 541 et 542 ; que la commune aurait dû présenter un projet tangible justifiant l'exercice de son droit de préemption ; qu'en l'espèce, aucun projet n'est clairement présenté concernant lesdites parcelles ; que le renvoi de la délibération du conseil communautaire de la communauté de communes de Miribel et du Plateau en date du 3 juillet 2006 prescrivant la réalisation d'un programme local de l'habitat sans plus de précisions ne saurait être suffisante, dans la mesure où ce programme n'a jamais été approuvé ; que le tribunal administratif n'a pas, dès lors, tiré les conclusions qui s'imposaient au regard de la motivation de la décision attaquée ; que la décision de préempter n'a été prise qu'au regard de simples déclarations d'intention, très insuffisantes pour motiver la délibération ; qu'il n'y avait pas de projet réel en 2007 ; qu'on peut s'interroger sur la mise en oeuvre d'un programme de logements sociaux sur un terrain de moins de 1 000 m² ; que la commune a, à ce jour, laissé les parcelles en l'état ; que la commune a détourné la loi dans la mesure où elle n'a pas respecté le code de l'urbanisme ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 7 décembre 2011, le mémoire en défense présenté pour la commune de Beynost tendant au rejet de la requête et, en outre, à ce que les requérants soient condamnés à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient, s'agissant du caractère prétendument erroné de la déclaration d'intention d'aliéner qui indique que le terrain est nu alors qu'il serait partiellement construit, que les requérants n'ont jamais fait état de cette prétendue difficulté jusqu'à ce jour ; qu'ils n'expliquent pas en quoi de prétendus ouvrages sur le terrain vicieraient la délibération attaquée ; que, s'agissant de la motivation de la décision attaquée, la délibération indique que l'objectif de préemption s'inscrit dans une politique d'habitat social qui est de réaliser des logements sociaux ; que le maire a rappelé au conseil municipal que la commune était déficitaire en logements sociaux et qu'elle était, par suite, soumise aux prélèvements prévus par l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habilitation et que, pour remédier à cette situation, elle avait pris des mesures dans le cadre du plan local d'urbanisme approuvé le 27 septembre 2007 ; que la délibération attaquée n'est pas entachée de détournement de pouvoir ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2012 :

- le rapport de M. Bézard, président ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- les observations de Me Vignot, avocat des consorts A et de la société MEGI, et celles de Me Meusy, avocat de la commune de Beynost ;

Considérant que, par jugement en date du 31 mars 2011, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. Salvatore A, de la SARL MEGI et de M. Joseph A, qui tendait à l'annulation de la délibération du 25 octobre 2007 par laquelle le conseil municipal de Beynost a décidé d'exercer le droit de préemption urbain de cette commune sur les parcelles cadastrées section AE n° 451 et 452 situées au lieudit " La Batonne " ; que les consorts A et la SARL MEGI relèvent appel de ce jugement ;

Sur la légalité de la délibération du 25 octobre 2007 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. (...) Lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme local de l'habitat ou, en l'absence de programme local de l'habitat, lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme de construction de logements locatifs sociaux, la décision de préemption peut, sauf lorsqu'il s'agit d'un bien mentionné à l'article L. 211-4, se référer aux dispositions de cette délibération. Il en est de même lorsque la commune a délibéré pour délimiter des périmètres déterminés dans lesquels elle décide d'intervenir pour les aménager et améliorer leur qualité " et qu'aux termes de l'article L. 300-1 du même code : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels " ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées, que sauf dans l'hypothèse où une collectivité, titulaire du droit de préemption a adopté une délibération sur la mise en oeuvre d'un programme local de l'habitat, cette collectivité ne peut légalement exercer ce droit, d'une part, que si elle justifie à la date à laquelle elle l'exerce, de la réalité d'un projet d'action ou opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et, d'autre part, si elle fait apparaître la nature du projet dans la décision de préemption ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les premiers juges, après avoir relevé, à bon droit, que la délibération du 3 juillet 2006, adoptée par le conseil de la communauté de communes de Miribel et du Plateau, dont la commune de Beynost est membre, prescrivant l'élaboration d'un plan local de l'habitat ne pouvait légalement fonder la décision de préemption litigieuse, en l'absence d'adoption de ce plan à la date à laquelle est intervenue la délibération du conseil municipal, ont estimé suffisant l'exposé de l'objectif poursuivi par la commune et regardé celui-ci comme s'inscrivant dans le cadre d'une politique d'habitat social répondant à l'exigence de motivation posée par l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ; que, toutefois, si la délibération attaquée rappelle les objectifs de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain, dont l'article 55 fait obligation aux communes de réaliser des logements sociaux, constate que la commune est assujettie aux prélèvements obligatoires prescrits par l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation et indique, sans autre précision, que le plan local d'urbanisme, adopté le 27 septembre 2007, a entendu remédier à cette situation, la commune ne justifie pas, à la date de la délibération attaquée de la réalité d'une politique d'acquisition de terrains en vue de la mise en oeuvre d'un programme de logements sociaux alors, au surplus, que la parcelle n° 542 est d'une superficie assez modeste et mal adaptée pour répondre à un tel objectif ; qu'ainsi, la délibération du conseil municipal de Beynost décidant d'exercer le droit de préemption communal sur les parcelles AE 541 et AE 542 a méconnu les dispositions de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Salvatore A, la SARL MEGI et M. Joseph A, sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande dirigée contre la délibération du conseil municipal de Beynost du 25 octobre 2007 ; que ledit jugement doit être annulé ainsi que la délibération précitée ;

Considérant que pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme aucun autre moyen n'est de nature à entraîner l'annulation de la délibération attaquée ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la commune de Beynost, qui succombe dans l'instance, puisse obtenir le remboursement des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner cette même commune à payer la somme de 500 euros à M. Salvatore A, 500 euros à la SARL MEGI et 500 euros à M. Joseph A sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0902189 du Tribunal administratif de Lyon en date du 31 mars 2011 est annulé.

Article 2 : La délibération du conseil municipal de la commune de Beynost du 25 octobre 2007 est annulée.

Article 3 : La commune de Beynost est condamnée à verser 500 euros à M. Salvatore A, 500 euros à la SARL MEGI et 500 euros à M. Joseph A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Beynost tendant à l'application de l'article L. 761-1 sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Salvatore A, à M. Joseph A, à la SARL MEGI et à la commune de Beynost.

Délibéré après l'audience du 12 juin 2012, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président de chambre,

M. Bézard, président,

M. Zupan, président-assesseur.

Lu en audience publique, le 3 juillet 2012.

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N° 11LY01379

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Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-02-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Procédures d'intervention foncière. Préemption et réserves foncières. Droits de préemption.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. Alain BEZARD
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : DROITS ET TERRITOIRES - VIGNOT JEAN-CHARLES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Date de la décision : 03/07/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 11LY01379
Numéro NOR : CETATEXT000026163263 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-07-03;11ly01379 ?
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