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28/06/2012 | FRANCE | N°11LY01485

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 28 juin 2012, 11LY01485


Vu la requête, enregistrée le 16 juin 2011, présentée pour la SA ELECTRICITE RESEAU DISTRIBUTION FRANCE (ERDF) dont le siège est 102 Terrasse Boieldieu à Paris (92085) ;

ERDF demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803885 du 12 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon qui l'a condamnée à verser à Mme A une somme de 34 600 euros en réparation des préjudices résultant pour elle de l'accident de la circulation dont elle a été victime le 3 mars 2006 sur le chemin départemental n° 102 et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire

une somme de 311 141,21 euros en remboursement de ses débours ainsi que l'indem...

Vu la requête, enregistrée le 16 juin 2011, présentée pour la SA ELECTRICITE RESEAU DISTRIBUTION FRANCE (ERDF) dont le siège est 102 Terrasse Boieldieu à Paris (92085) ;

ERDF demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803885 du 12 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon qui l'a condamnée à verser à Mme A une somme de 34 600 euros en réparation des préjudices résultant pour elle de l'accident de la circulation dont elle a été victime le 3 mars 2006 sur le chemin départemental n° 102 et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire une somme de 311 141,21 euros en remboursement de ses débours ainsi que l'indemnité forfaitaire ;

2°) de rejeter la demande de Mme A devant le Tribunal ;

3°) subsidiairement, de condamner la société Gallot à la relever et garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;

4°) de mettre à la charge de Mme A et de la société Gallot le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- Mme A était usager du chemin départemental ;

- le chantier était bien signalé par les panneaux situés de part et d'autre ;

- le renversement des barrières par le vent peu avant l'accident, qui avait été signalé, n'était pas caractéristique d'un défaut d'entretien normal ;

- l'agent d'astreinte de la DDE n'a pas eu le temps d'intervenir avant que l'accident se produise ;

- une faute d'imprudence est imputable à la victime alors que la visibilité était bonne et qu'elle circulait vraisemblablement à vitesse excessive ;

- la société Gallot était responsable de la surveillance du chantier et de son balisage et doit la garantir sur le fondement de l'article 17 des conditions générales du marché ;

- les barrières déplacées par les agents d'EDF ont été remises en place après leur intervention ;

- elles n'ont pas résisté au vent violent qui les a renversées ;

- le matériel utilisé par la société Gallot n'était pas adapté ;

- l'accident dont a été victime l'intéressée est un accident de la circulation au sens de la loi du 5 juillet 1985, pour lequel elle a reçu des provisions dont elle doit justifier l'existence ;

- aucune pièce n'est produite montrant que toute indemnisation par l'assureur de l'autre véhicule impliqué lui aurait été refusée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 septembre 2011, présenté pour la société Gallot, qui conclut au rejet de la requête et, subsidiairement, à ce que les demandes de Mme A devant le Tribunal soient rejetées et, plus subsidiairement, à ce que ses demandes soient limitées, et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge d'ERDF ou qui mieux le devra, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- elle avait parfaitement rempli sa mission en installant notamment 7 barrières reliées entre elles ;

- la remise en place des barrières, qui n'a pas été faite correctement, ne peut lui être imputée ;

- l'accident est exclusivement de la responsabilité de l'intéressée ;

- les demandes de l'intéressée seront ramenées à de plus justes proportions ;

- sa responsabilité ne pourrait être retenue qu'à hauteur de 20 % ;

Vu le courrier du 4 janvier 2012 par lequel la Cour a mis en demeure Mme A, sur le fondement des articles R. 612-3 et R. 612-6 du code de justice administrative, de produire des conclusions ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 janvier 2012, présenté pour Mme A élisant domicile chemin du Cimetière à Soleymieux (42560), qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge d'ERDF au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, y compris les entiers dépens ;

Elle soutient que :

- elle avait la qualité de tiers à l'égard des travaux dès lors que les barrières n'étaient pas incorporées à la voie publique et que les travaux ne portaient pas sur des dépendances de la voie ;

- dès 5 h 30 du matin les barrières étaient couchées et l'accident est survenu à 7 h ;

- la présence d'objets sur la voie constitue un défaut d'entretien normal ;

- elle n'a commis aucune faute ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 février 2012, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la société ERDF et la société Gallot soient condamnées solidairement à lui verser une indemnité portée de 311 141,21 euros à 319 765,13 euros, outre les intérêts légaux et qu'une somme de 1 500 euros soit mise à leur charge solidaire au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'accident dont a été victime Mme A l'a exposée à des débours que la société ERDF et la société Gallot doivent lui rembourser ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 ;

Vu la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 juin 2012 :

- le rapport de M. Picard, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;

- les observations de Me Pouilly, avocat de ELECTRICITE RESEAU DISTRIBUTION FRANCE, de Me Dumas-Chavane, avocat de Mme A et de Me Didier, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire ;

Considérant que le 3 mars 2006, vers 7 heures du matin, Mme A, qui circulait sur la route départementale (RD) n° 102 au lieu-dit Frécon Vieux, a perdu le contrôle de son véhicule et percuté une voiture venant en sens inverse après avoir roulé sur des barrières de protection d'un chantier de réparation de câbles électriques souterrains, couchées sur la chaussée ; que, gravement blessée, elle a conservé des séquelles de cet accident ; qu'elle a recherché la responsabilité d'Electricité de France (EDF), en charge de ce chantier, devant le Tribunal administratif de Lyon qui, par un jugement du 12 avril 2011 a mis à la charge de la société ERDF, venue au droit de cet établissement, une indemnité de 34 600 euros en réparation des préjudices subis par Mme A, la condamnant également à rembourser les débours exposés par la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire à hauteur de 311 141,21 euros ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que cet accident a été provoqué par la présence sur le RD n° 102, dont Mme A était usager, d'un obstacle constitué par des barrières de chantier renversées sur la chaussée ; que si ERDF soutient que deux panneaux signalaient le chantier et que l'agent d'astreinte de la direction départementale de l'équipement n'a été prévenu de la présence de cet obstacle que très peu de temps avant l'accident, les pièces du dossier montrent que dans la nuit précédant la collision, les employés d'ERDF, qui avaient travaillé jusqu'à minuit environ pour réparer la ligne, avaient déplacé les barrières disposées dans l'après-midi du 2 mars 2006 par la société Gallot, chargée des travaux de terrassement, avant de les remettre en place, sans qu'ERDF n'apporte la preuve, lui incombant, qu'ils auraient pris toutes les précautions utiles pour éviter que lesdites barrières ne basculent sur la chaussée ; qu'il ne résulte notamment pas de l'instruction qu'ils auraient accroché fermement les barrières les unes aux autres et se seraient assurés que celles situées sur les côtés de la tranchée étaient bien enfoncées dans la terre alors que, cette nuit là, l'endroit était exposé à de fortes rafales de vent ; qu'ERDF ne démontre pas ainsi avoir normalement entretenu l'ouvrage public ;

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction, et notamment du procès-verbal de gendarmerie, que le véhicule de Mme A aurait roulé à une vitesse excessive ni que l'intéressée aurait commis une faute de conduite en n'opérant pas de manoeuvre pour éviter l'obstacle situé sur son passage, aucun élément du dossier n'établissant qu'elle aurait pu aisément le contourner alors qu'il était peu visible, que la voie était d'une largeur limitée et qu'un véhicule arrivait en sens inverse ; que, contrairement à ce que soutient ERDF, Mme A n'a donc commis aucune faute d'imprudence ou d'inattention susceptible d'atténuer la responsabilité de cette société ;

Considérant qu'il suit de là qu'ERDF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal l'a déclarée entièrement responsable des conséquences de l'accident dont a été victime Mme A ;

Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal a rejeté la demande de la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire tendant au remboursement des frais exposés au titre de soins dentaires conservateurs et prothétiques, pour un montant de 8 632,92 euros ; que l'expert désigné en référé indique que la fracture des deux incisives centrales nécessitera un traitement secondaire avec reconstitution par couronne en céramique pour un montant de 1 281,94 euros, sans faire état d'un renouvellement de ces soins ; qu'en l'absence d'autre pièce au dossier permettant de justifier du bien fondé des frais réclamés par la caisse, il y a donc seulement lieu de mettre la somme de 1 281,94 euros à la charge d'ERDF et, en conséquence, de porter à 312 423,15 euros l'indemnité allouée à la caisse en première instance ;

Considérant que s'il appartient au juge administratif de prendre les mesures nécessaires en vue d'empêcher que sa décision n'ait pour effet de procurer à la victime, par suite des indemnités qu'elle a pu ou qu'elle peut obtenir par ailleurs à raison des conséquences dommageables du même accident, une réparation supérieure au montant total du préjudice, il résulte de l'instruction que Mme A, dont les déclarations ne sont pas sérieusement remises en question par ERDF, n'a perçu aucune indemnité des assureurs des véhicules impliqués dans l'accident ; que, dès lors, ERDF n'est pas fondée à soutenir que, faute d'avoir diligenté une mesure d'instruction auprès de l'intéressée ou desdits assureurs, les premiers juges auraient sur ce point entaché le jugement attaqué d'irrégularité ;

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les barrières installées sur le chantier par la société Gallot auraient constitué un matériel inadapté à des conditions atmosphériques caractérisées par des vents violents ; que la société ERDF, qui ne démontre pas que ses employés auraient correctement remis en place les barrières manipulées pour les besoins de leur intervention, n'est donc pas fondée à appeler en garantie la société Gallot ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société ERDF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon l'a condamnée à réparer entièrement le préjudice subi par Mme A ; que la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire est seulement fondée à demander que la somme de 311 141,21 euros que le Tribunal lui a accordée soit portée à 312 423,15 euros ; que les conclusions qu'ERDF a présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent donc qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, en l'espèce, de mettre à la charge d'ERDF le paiement à Mme A et à la société Gallot chacune d'une somme de 1 500 euros sur ce même fondement ; qu'il n'y a pas lieu, en l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées à ce même titre par la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire ;

DECIDE :

Article 1er : La somme de 311 141,21 euros que, par l'article 3 du jugement du 12 avril 2011, le Tribunal administratif de Lyon a condamné ERDF à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire, est portée à 312 423,15 euros.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 12 avril 2011 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : ERDF versera à Mme A et à la société Gallot chacune une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La requête d'ERDF et le surplus des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à ELECTRICITE RESEAU DISTRIBUTION FRANCE, à Mme Annie A, à la société Gallot et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2012 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Steck-Andrez, président-assesseur,

M. Picard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 juin 2012.

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N° 11LY01485


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY01485
Date de la décision : 28/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-02-02-02 Travaux publics. Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics. Régime de la responsabilité. Qualité d'usager.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Vincent-Marie PICARD
Rapporteur public ?: M. POURNY
Avocat(s) : SCP MAURICE- RIVA-VACHERON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-06-28;11ly01485 ?
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