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28/06/2012 | FRANCE | N°11LY01253

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 28 juin 2012, 11LY01253


Vu la requête enregistrée le 20 mai 2011, présentée pour M. Bruno A, architecte, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700475 du 11 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 10 novembre 2006 par laquelle le maire de Saint-Bon Tarentaise a rejeté comme irrecevable l'offre qu'il a présentée dans le cadre du concours restreint organisé pour la passation d'un marché de maîtrise d'oeuvre portant sur le réaménagement urbain du centre bourg et lu

i a refusé toute indemnité, d'autre part, à la condamnation de la commune de S...

Vu la requête enregistrée le 20 mai 2011, présentée pour M. Bruno A, architecte, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700475 du 11 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 10 novembre 2006 par laquelle le maire de Saint-Bon Tarentaise a rejeté comme irrecevable l'offre qu'il a présentée dans le cadre du concours restreint organisé pour la passation d'un marché de maîtrise d'oeuvre portant sur le réaménagement urbain du centre bourg et lui a refusé toute indemnité, d'autre part, à la condamnation de la commune de Saint-Bon Tarentaise à lui verser la somme de 43 480 euros HT ou, subsidiairement, de 36 958 euros HT en réparation de son préjudice ;

2°) d'annuler la décision du 10 novembre 2006 portant rejet de son offre et refus de toute indemnité ;

3°) de condamner la commune de Saint-Bon Tarentaise à lui verser la somme de 43 480 euros HT ou, subsidiairement, de 36 958 euros HT ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Bon Tarentaise une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A soutient que le jugement attaqué est entaché d'omission à statuer sur le moyen tiré de la violation de l'article 74 du code des marchés publics par l'alinéa 2 de l'article 6 du règlement du concours ; sur le fond du litige, que la décision du 10 novembre 2006 est insuffisamment motivée en ce qu'elle formule en des termes identiques l'irrecevabilité des trois offres en concurrence ; que ce motif, tiré de l'insuffisante analyse de la maintenance, qui constituait le troisième critère du jugement des offres pondéré à 15 %, est matériellement erroné dès lors que l'offre comportait des propositions en matière d'isolation thermique, une analyse comparative des coûts de fonctionnement des deux systèmes de chauffage proposés et une analyse de l'entretien courant de la future mairie ; qu'en outre, le motif qui lui a été opposé méconnaît l'article 9 du règlement du concours qui ne mentionne ni les coûts de fonctionnement de la future mairie ni le prix du projet au nombre des critères de jugement des offres et ne comportait pas de budget prévisionnel de l'opération ; que la commune a d'ailleurs refusé de communiquer son budget prévisionnel aux candidats ; que le règlement n'exigeait pas des candidats une quantification de l'ensemble des coûts ; que la décision ne motive pas non plus la suppression de l'intégralité de la prime alors qu'en vertu de l'article 6 du règlement du concours, le jury avait l'obligation de se prononcer sur la prime à attribuer à chaque candidat ; qu'en vertu de l'article 74 du code des marchés publics, le dédommagement des frais d'études affecté d'un abattement plafonné à 20 % constitue un droit ; qu'en ce qu'il prévoit la possibilité, pour le pouvoir adjudicateur, de supprimer toute prime, l'alinéa 2 de l'article 6 du règlement de concours doit être écarté comme contraire à l'article 74 du code des marchés publics qui garantit l'allocation d'une prime, même lorsque l'offre est incomplète ; que la décision litigieuse, prise pour pallier les insuffisances du règlement du concours, est entachée de détournement de pouvoir ; que la somme qui lui est due s'élève, selon l'article 6 du règlement, à 43 480 euros HT ou à 36 958 euros HT après déduction de la part correspondant à la pondération du troisième critère ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 2 janvier 2012, présenté pour la commune de Saint-Bon Tarentaise (73124) Courchevel cedex ;

La commune de Saint-Bon Tarentaise conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de M. A une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Saint-Bon Tarentaise soutient que la décision de rejet de l'offre n'est pas soumise à obligation de motivation ; que l'autorité adjudicatrice est seulement tenue de communiquer les motifs de la décision sur demande du candidat ; qu'au surplus, le motif d'insuffisance de l'offre est indiqué avec précision ; que l'article 74 du code des marchés publics, que ne méconnaît pas l'alinéa 2 de l'article 6 du règlement de concours, n'ouvre droit au versement de tout ou partie de la prime qu'à la condition que l'offre réponde aux exigences de la consultation ; que l'offre du requérant ne comportait qu'une analyse générale des coûts de maintenance et de fonctionnement du projet, sans élément chiffré ; que le budget prévisionnel des travaux n'avait pas à être communiqué aux candidats et ne se confond pas avec le coût de fonctionnement des ouvrages réalisés ; qu'en prévoyant que les candidats devaient communiquer le coût de fonctionnement et de maintenance, le règlement du concours était suffisamment précis ; qu'un tel critère intéressait nécessairement le bâtiment de la nouvelle mairie ; que le rejet de toutes les offres résulte de l'application du règlement du concours et n'est entaché d'aucun détournement de pouvoir ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 juin 2012 :

- le rapport de M. Arbarétaz, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public ;

- et les observations de Me Balme, représentant M. A et de Me Troussiere, représentant la commune de Saint-Bon Tarentaise ;

Considérant que par un avis d'appel à la concurrence du 27 décembre 2005, la commune de Saint-Bon Tarentaise a, en application des articles 70 et 74 du code des marchés publics dans sa version alors en vigueur, lancé un concours restreint pour la passation d'un marché de maîtrise d'oeuvre portant sur la construction d'une nouvelle mairie et le réaménagement des espaces publics de voirie et de stationnement au centre du bourg ; que trois candidats ont finalement été admis à concourir, parmi lesquels M. A ; que suivant la proposition du jury réuni le 8 novembre 2006, le maire de Saint-Bon Tarentaise a, par décision du 10 novembre 2006, déclaré la consultation infructueuse, a informé M. A du rejet de son offre et du refus de lui allouer une prime le dédommageant de ses prestations au motif que l'analyse du coût de fonctionnement et de maintenance des futurs ouvrages, affectée d'une pondération de 15 % par le règlement de la consultation, n'était appuyée d'aucun élément précis ; que M. A relève appel du jugement par lequel le Tribunal a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 10 novembre 2006 et de condamnation de la commune de Saint-Bon Courchevel à lui verser la prime de participation au concours ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que si, dans ses écritures de première instance, M. A revendique le paiement de la prime de concours en se référant à l'article 74 du code des marchés publics dans sa version alors en vigueur, nonobstant l'alinéa 2 de l'article 6 du règlement de la consultation, il ne se prévaut pas de la violation de la première de ces dispositions par la seconde ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le Tribunal aurait omis d'y statuer ne peut qu'être écarté ;

Sur le fond du litige :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, que le moyen tiré du défaut de motivation de la décision du 10 novembre 2006, qui ne diffère pas de celui que M. A a invoqué en première instance, doit être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1er du règlement du concours : " Descriptif sommaire du projet : Edification d'un nouveau bâtiment d'environ 1 500 mètres carrés de S.H.O.N., réalisation d'un parking enterré de 80 places et d'autre part d'une aire de stationnement en plein air de 40 places minimum, réaménagement urbain global du secteur notamment en vue de sécuriser la traversée de Saint-Bon (...) " ; qu'aux termes du 1.2 de l'article 8 du même règlement relatif au contenu des pièces à remettre : " Mémoire explicatif (...) H) Coût de fonctionnement et de maintenance " ; qu'enfin, aux termes de l'article 9 du même règlement relatif aux critères de jugement des offres : " Les offres seront classées par le jury à partir des critères pondérés suivants : 50 % : Valeur technique et architecturale du projet (...) 35 % : Fonctionnement interne et distribution de l'ensemble des bâtiments ; 15 % : Economie de fonctionnement et de maintenance " ;

Considérant que, d'une part, les dispositions précitées exigeaient expressément des candidats qu'ils analysent le " coût " d'utilisation des ouvrages ; que ce terme ne pouvait être compris que comme leur imposant d'estimer les dépenses auxquelles s'exposerait la collectivité pour utiliser et maintenir en état de fonctionnement les équipements du programme, compte tenu de leur dimensionnement, de leur configuration et des choix techniques proposés par chaque candidat ; que, d'autre part, la nouvelle mairie faisant partie du programme du concours défini par l'article 1er du règlement, l'analyse du coût d'utilisation de ce futur bâtiment était nécessairement comprise dans le contenu obligatoire du mémoire explicatif, tel que le décrivait l'article 8 ; qu'enfin, la circonstance que la personne responsable du marché n'ait pas divulgué le budget prévisionnel de l'opération, qui se rapporte à la construction des ouvrages, est sans incidence sur l'estimation de leur coût d'utilisation qui dépend, ainsi qu'il vient d'être dit, des choix techniques proposés par les candidats ;

Considérant que le mémoire explicatif de l'offre remise par M. A ne chiffre pas, fût-ce par approximation, le coût d'utilisation des ouvrages dont il définit le dimensionnement et les principes de construction ; que ne saurait en tenir lieu l'analyse littérale des avantages comparés de deux systèmes de chauffage, du système de ventilation double flux ou d'un nouveau mode d'isolation externe du bâtiment ; que, par suite, le maire de Saint-Bon Tarentaise a pu, sans méconnaître le règlement du concours, rejeter ladite offre en la regardant comme incomplète ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 74 du code des marchés publics dans sa version alors en vigueur : " (...) / Les candidats ayant remis des prestations bénéficient d'une prime. L'avis d'appel à la concurrence indique le montant de cette prime. Le montant de la prime attribué à chaque candidat est égal au prix estimé des études à effectuer par les candidats telles que définies dans l'avis d'appel public à la concurrence et précisées dans le règlement du concours, affecté d'un abattement au plus égal à 20 % (...) " ; qu'aux termes de l'article 6 du règlement du concours : " Le montant maximal de l'indemnisation des candidats est de 43 480 euros par candidat admis à présenter une offre et qui aura été jugé avant l'audition, conforme aux exigences du règlement de consultation. / Le jury à la suite de l'analyse des offres déterminera le montant alloué à chaque candidat. Le montant de la prime pourra être réduit(e) voire supprimé(e) si l'offre apparaît incomplète ou ne répondant pas aux exigences formulées (...) " ;

Considérant qu'il résulte nécessairement de l'article 74 précité du code des marchés publics que les candidats qui ont été admis à participer à un concours restreint d'architecture et d'ingénierie ne sont en droit de bénéficier de la prime qu'à la condition que les études remises soient conformes au règlement du concours ; qu'il suit de là, d'une part, qu'en prévoyant que l'auteur d'une offre non conforme aux spécifications du concours ne recevrait aucune prime, le 2e aliéna de l'article 6 précité dudit règlement n'a pas méconnu les dispositions du code des marchés publics relatives au dédommagement des maîtres d'oeuvre et, d'autre part, qu'en suivant la proposition du jury qui, après avoir constaté la non-conformité de l'offre de M. A en matière de coût d'entretien des ouvrages compris dans le projet, a préconisé de ne pas l'indemniser en se référant au 2e aliéna de l'article 6 du règlement, le maire de Saint-Bon Tarentaise n'a entaché sa décision d'aucune violation des dispositions sus-analysées ;

Considérant, en quatrième lieu, que la seule circonstance que les trois offres en concurrence, dont celle de M. A, aient été rejetées pour le même motif ne permet pas d'établir que la décision litigieuse du 10 novembre 2006 aurait été prise pour un motif étranger aux buts envisagés par le code des marchés publics et serait entachée de détournement de pouvoir ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, d'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions de M. A doivent être rejetées ; que, d'autre part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Saint-Bon Tarentaise ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Bon Tarentaise au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Bruno A, à la commune de Saint-Bon Tarentaise et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2012 à laquelle siégeaient :

M. du Besset, président de chambre,

Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

M. Arbarétaz, premier conseiller ;

Lu en audience publique, le 28 juin 2012.

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N° 11LY01253

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Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Formation des contrats et marchés - Mode de passation des contrats.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Fondement de la responsabilité - Responsabilité pour faute.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Philippe ARBARETAZ
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : BALME

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 28/06/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 11LY01253
Numéro NOR : CETATEXT000026089750 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-06-28;11ly01253 ?
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