Vu la requête, enregistrée le 8 décembre 2011, présentée pour M. et Mme Dominique A, demeurant au ... ;
M. et Mme A demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0800166 du 5 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales restant à leur charge au titre de l'année 2001 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent :
- que la procédure de taxation d'office au terme de laquelle ont été établies les impositions litigieuses, est irrégulière, dès lors que le vérificateur ne pouvait régulièrement leur adresser une demande de justifications en se fondant sur la seule existence de versements d'espèces sur leur compte bancaire, même s'ils avaient pour effet de porter les crédits bancaires au-delà du double des revenus déclarés, dès lors qu'en l'absence de recherches plus approfondies sur l'origine de ces sommes, l'administration ne pouvait présumer qu'elles constituaient des revenus, et non des éléments de leur patrimoine ;
- que ces dépôts, qui trouvent leur origine dans des économies réalisées antérieurement à la période contrôlée, conservées sous formes d'espèces dans un coffre loué auprès d'une banque, étaient intervenus, en 2001, d'une part, aux fins d'acquérir un véhicule neuf, d'autre part, compte tenu de la nécessité de convertir ces devises en euros ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 mars 2012, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que la condition de mise en oeuvre de l'article L.16 résultant de la " règle du double " était en l'espèce très largement satisfaite ; qu'elle constituait à elle seule un élément suffisamment sérieux pour laisser présumer que M. et Mme A pouvaient avoir disposé, au titre de l'année en cause, de revenus plus importants que ceux déclarés ; que les jurisprudences dont ils se prévalent ne sont pas transposables au cas particulier; que l'origine patrimoniale des dépôts litigieux n'est pas sérieusement justifiée ;
Vu l'ordonnance en date du 6 avril 2012 fixant la clôture d'instruction au 20 avril 2012 en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2012 :
- le rapport de M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;
Considérant que M. et Mme A, alors retraités, qui ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, portant sur les années 2001 et 2002, ont, s'agissant de l'année 2001, été taxés d'office sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales à raison de crédits bancaires dont l'origine et la nature demeuraient, selon l'administration, injustifiées au terme de leurs réponses à la demande de justifications qui leur avait été adressée en vertu de l'article L. 16 du même livre des procédures fiscales ; que M. et Mme A relèvent appel du jugement du 5 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la décharge des impositions restant en litige ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...) " ; que son article L. 69 dispose : " Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 " ;
Considérant qu'en vertu de ces dispositions, l'administration peut, lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir qu'un contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés, lui demander des justifications et, s'ils s'abstient de répondre à cette demande ou n'apporte pas de justifications suffisantes, le taxer d'office à l'impôt sur le revenu ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le total des crédits portés sur les différents comptes bancaires de M. et Mme A en 2001 s'élevait à 106 968 euros, tandis que le montant de leurs revenus déclarés au titre de cette année était de 10 384 euros ; que si les sommes ainsi créditées sur les comptes des requérants provenaient notamment de dépôts d'espèces, pour des montants de 180 000 francs le 5 avril 2001, 2 000 francs le 15 novembre 2001, 340 000 francs le 11 décembre 2001, et 13 000 francs le 27 décembre 2001, cet écart était suffisant pour établir que M. et Mme A ont pu disposer, en 2001, de revenus plus importants que ceux qu'ils ont déclarés, et autorisait l'administration à leur adresser une demande de justifications, sur le fondement des dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en second lieu, que dès lors qu'en réponse à la demande de justifications, puis à la mise en demeure qui lui a succédé, M. et Mme A se sont bornés à alléguer que les sommes de 180 000 francs et de 340 000 francs provenaient de leurs économies personnelles conservées en espèces, dans un coffre, et que le dépôt du 5 avril 2001 était destiné à financer l'acquisition d'un véhicule ; que ces allégations, invérifiables, équivalent à une absence de réponse au sens de l'article L. 69, de nature à justifier la taxation d'office desdites sommes, en vertu des dispositions précitées de cet article ;
Sur le bien-fondé des impositions contestées :
Considérant qu'il appartient aux requérants, taxés d'office sur leurs revenus d'origine indéterminée au titre de l'année 2001, sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales et, au titre de l'année 2001, sur l'ensemble de leurs revenus en application du 1° de l'article L. 66 du même livre, d'établir l'exagération des bases imposables retenues par l'administration, conformément aux dispositions des articles L. 192 et L. 193 du livre des procédures fiscales ;
Considérant que pour justifier de la nature et de l'origine des sommes de 180 000 et 340 000 francs, restant seules en litige après l'admission partielle de leur réclamation, M. et Mme A se bornent, comme dit ci-dessus, à soutenir que les espèces ainsi déposées proviendraient de salaires perçus par M. A, entre 1980 et 1990, en Suisse en numéraire, qu'il aurait conservés pour partie, depuis lors, dans un coffre ; que ces allégations sont peu crédibles et en tout cas invérifiables, l'examen du contrat de location dudit coffre produit par les requérants n'étant au demeurant daté que de 1999 ; qu'à supposer même que la facture attestant de l'acquisition d'un véhicule Mercedes, le 13 avril 2001, pour le prix de 224 700 francs, suffise à justifier de l'emploi de la somme de 180 000 francs déposée la semaine précédant cet achat par les époux A, ce document ne saurait par lui-même permettre d'identifier la nature et l'origine des espèces ainsi déposées par ces derniers ; qu'enfin, si les requérants prétendent que les 340 000 francs restants ont été déposés le 27 décembre 2001 afin de convertir à temps ces devises en euros, une telle explication est, en tout état de cause, pour le moins peu crédible, dès lors, d'une part, qu'une telle convertibilité était garantie bien au-delà de cette échéance, d'autre part, que les devises prétendument thésaurisées par M. A provenaient, selon ses dires, de Suisse ; que, dans ces conditions, les requérants n'apportent la preuve, qui leur incombe, ni de la provenance et de la nature des fonds taxés en tant que revenus d'origine indéterminée, ni de l'exagération des bases d'imposition retenues en définitive par l'administration au titre de l'année 2001 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Dominique A et au ministre de l'économie, des finances et du commerce extérieur.
Délibéré après l'audience du 5 juin 2012 à laquelle siégeaient :
M. Chanel, président de chambre,
MM. Besson et Lévy Ben Cheton, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 26 juin 2012.
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N° 11LY02910
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