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24/05/2012 | FRANCE | N°11LY02410

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 24 mai 2012, 11LY02410


Vu I, sous n° 11LY02410, la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 3 octobre 2011 et régularisée le 7 octobre 2011, présentée pour Mme Dzelije , épouse , domiciliée au centre d'hébergement La Relève, 8, rue de l'Octant à Echirolles (38130) ;

Mme demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005939, du 31 mars 2011, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 27 septembre 2010, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le terri

toire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel elle...

Vu I, sous n° 11LY02410, la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 3 octobre 2011 et régularisée le 7 octobre 2011, présentée pour Mme Dzelije , épouse , domiciliée au centre d'hébergement La Relève, 8, rue de l'Octant à Echirolles (38130) ;

Mme demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005939, du 31 mars 2011, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 27 septembre 2010, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente de cet examen, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler dans le délai de deux jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Elle soutient qu'après s'être vue opposer un refus d'admission provisoire au séjour en qualité de demandeur d'asile, sur le fondement du 2° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle n'a pas déposé de nouvelle demande de titre et que la décision lui refusant l'admission au séjour est donc entachée d'erreur de droit ; que deux de ses frères résident régulièrement en France et que son époux est menacé en Serbie ; que cette décision de refus est donc également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'enfin, elle viole les stipulations du 1° de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que l'obligation de quitter le territoire français dont est assortie la décision de refus d'autorisation provisoire de séjour est entachée d'erreur de droit au regard du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est également contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi qu'à celles du 1° de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; qu'enfin, la décision désignant le pays de renvoi est contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations ;

Vu l'ordonnance du 22 août 2011, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Lyon a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme ;

Vu II, sous n° 11LY02411, la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 3 octobre 2011 et régularisée le 7 octobre 2011, présentée pour M. Adnan , domicilié chez ADA, n° 1560, 6, rue Berthe de Boissieux, BP 285 à Grenoble (38009) ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100580, du 21 avril 2011, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 27 septembre 2010, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente de cet examen, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler dans le délai de deux jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il invoque, à l'appui de sa requête, les mêmes moyens que ceux, énoncés ci-dessus, soulevés par son épouse dans sa propre requête ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations ;

Vu l'ordonnance du 22 août 2011, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Lyon a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2012 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Considérant que les requêtes susvisées concernent deux époux et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il soit statué par un seul arrêt ;

Sur les décisions de refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier de Mme que cette dernière, de nationalité serbe, a déposé auprès du préfet de l'Isère, le 19 janvier 2010, une demande d'admission provisoire au séjour en qualité de demandeur d'asile, en vue de solliciter le bénéfice du statut de réfugié ; que, par décision du 29 janvier 2010, le préfet de l'Isère a refusé de l'admettre provisoirement au séjour en France le temps de l'instruction de sa demande d'asile, en considérant que sa demande entrait dans le champ d'application du 2° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison de l'inscription de la Serbie sur la liste des pays d'origine sûrs ; que, par décision du 25 mars 2010, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté la demande d'asile de Mme ; que l'intéressée a formé un recours, non suspensif, contre cette décision, enregistré à la Cour nationale du droit d'asile le 28 avril 2010 ; que, d'autre part, M. soutient qu'antérieurement à l'arrêté en litige, le préfet de l'Isère a également refusé de l'admettre provisoirement au séjour en considérant que sa demande entrait dans le champ d'application du 2° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par décision du 6 mai 2010, la Cour nationale du droit d'asile a confirmé la décision de rejet de sa demande d'asile prise le 24 février 2009 par l'Office français des réfugiés et apatrides ; qu'ainsi, les décisions de refus de séjour du 27 septembre 2010 du préfet de l'Isère en litige, qui ont été édictées alors que la qualité de réfugié avait été refusée aux époux , doivent être regardées comme prises en réponse à une demande d'admission au séjour en qualité de demandeur d'asile, la reconnaissance du statut de réfugié impliquant la délivrance immédiate d'une carte de résident ; que, dès lors, contrairement aux allégations des requérants, les décisions de refus de séjour contestées ne sont pas entachées d'erreur de droit ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers que M. , ressortissant serbe né en 1980, est entré irrégulièrement en France le 23 août 2008, selon ses déclarations ; que Mme , son épouse, de même nationalité que lui, l'a rejoint le 18 janvier 2010, selon ses déclarations, avec leur enfant né en Serbie le 30 avril 2009 ; qu'ils font valoir que deux frères de Mme résident régulièrement en France et soutiennent qu'ils ne peuvent pas retourner dans leur pays d'origine en raison des menaces qui pèsent sur M. du fait de son engagement passé au sein de l'armée de libération de Presevo, Medvegj et Bujanoc ; que, toutefois, M. et Mme , qui ont tous deux été déboutés de leurs demandes d'asile, sont en situation irrégulière sur le territoire français, où ils sont présents depuis seulement huit mois en ce qui concerne Mme et son enfant, et deux ans en ce qui concerne M. ; que leur enfant est en bas âge et qu'ils ne démontrent pas être dans l'impossibilité de mener une vie privée et familiale normale en Serbie, où ils conservent des attaches ; que, par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions du séjour en France de M. et Mme , les décisions contestées n'ont pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; qu'elles n'ont, en conséquence, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

Considérant, qu'ainsi qu'il a déjà été dit, M. et Mme , se trouvent tous deux en situation irrégulière sur le territoire français et il n'existe pas d'obstacle avéré à ce que le couple et son enfant repartent ensemble, dans leur pays d'origine, pour y poursuivre leur vie familiale ; que, par suite, les décisions en litige n'ont pas méconnu l'intérêt supérieur de l'enfant du couple protégé par les stipulations du 1° de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Considérant, enfin, que, pour les motifs énoncés ci-dessus, ces décisions ne sont pas entachées d'erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur la situation personnelle de M. et Mme ;

Sur les obligations de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. " ;

Considérant, qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, les décisions prises par le préfet de l'Isère, le 27 septembre 2010, doivent être regardées comme des décisions refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. et Mme et non pas comme des décisions leur refusant l'admission provisoire au séjour en qualité de demandeur d'asile ; que, dès lors, le préfet de l'Isère pouvait légalement les assortir de décisions obligeant les époux à quitter le territoire français dans le délai d'un mois ;

Considérant, en second lieu, que pour les mêmes motifs que ceux retenus ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité des décisions de refus de titre de séjour, les décisions obligeant M. et Mme à quitter le territoire français n'ont méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du 1° de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur les décisions désignant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

Considérant que si M. et Mme soutiennent qu'ils ne peuvent pas vivre en sécurité en Serbie, leur pays d'origine, en raison des menaces pesant sur M. , ils n'apportent, à l'appui de leurs allégations, aucun élément probant de nature à établir l'existence de risques actuels et personnels de traitements inhumains et dégradants dans ce pays ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance, par les décisions désignant la Serbie comme pays de renvoi, des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugement attaqués, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes ; que leurs conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par eux et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Adnan , à Mme Dzelije et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2012 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Rabaté, président assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 mai 2012.

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N° 11LY02410 - 11LY02411


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : PIEROT

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 24/05/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 11LY02410
Numéro NOR : CETATEXT000025955673 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-05-24;11ly02410 ?
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