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24/05/2012 | FRANCE | N°11LY00998

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 24 mai 2012, 11LY00998


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 avril 2011, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) RHONE ALPES ENVIRONNEMENT, dont le siège est au 12 rue Hébert à Grenoble (38000), représentée par Me Dominique Masselon, mandataire judiciaire, ès qualités de liquidateur à sa liquidation judiciaire ;

La SARL RHONE ALPES ENVIRONNEMENT demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0705775 du 2 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d

'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt, ainsi que les...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 avril 2011, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) RHONE ALPES ENVIRONNEMENT, dont le siège est au 12 rue Hébert à Grenoble (38000), représentée par Me Dominique Masselon, mandataire judiciaire, ès qualités de liquidateur à sa liquidation judiciaire ;

La SARL RHONE ALPES ENVIRONNEMENT demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0705775 du 2 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt, ainsi que les pénalités y afférentes, auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2003, 2004, 2005 et 2006 ;

2°) de prononcer la décharge desdites impositions auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 mars 2004 et 2005 en ce qu'elles concernent les frais kilométriques dont la déduction a été refusée, ainsi que les intérêts de retard y afférents ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La SARL RHONE ALPES ENVIRONNEMENT soutient que les indemnités kilométriques qu'elle a versées à M. A ne revêtent pas le caractère de frais généraux mais correspondent à la rémunération de prestations de services qu'il a fournies dans le cadre de sa profession d'agent commercial ; qu'il n'a jamais été contesté que la rémunération accordée à M. A dans le cadre de cette activité correspondait à des prestations effectives ; que leur montant, y compris les indemnités kilométriques, n'a pas été regardé comme excessif ; que, dans ces conditions, ces indemnités constituent, pour elle, des charges déductibles sans qu'il y ait lieu de rechercher si le nombre de kilomètres sur la base desquels ont été facturées les indemnités kilométriques était cohérent avec ceux effectivement parcourus par le véhicule Mercedes mentionné dans la déclaration de bénéfice non commercial de M. A ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 août 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les intérêts de retard ont fait l'objet d'une remise totale le 8 juillet 2011 en vertu des dispositions de l'article 1756-I du code général des impôts ; que l'administration a justifié que le montant des indemnités kilométriques facturé par M. A était excessif à hauteur de 3 393 euros pour l'exercice clos en 2004, et 8 537 euros pour l'exercice clos en 2005, compte tenu du nombre de kilomètres réellement parcourus par le véhicule Mercedes de M. A, seul véhicule utilisé par ce dernier en sa qualité d'agent commercial ; que la société ne produit aucun élément permettant de conférer, aux charges en cause, la nature de rémunérations, la proposition de rectification étant par ailleurs fondée sur la réintégration de charges non exposées dans l'intérêt de l'entreprise eu égard à l'écart entre le kilométrage facturé et celui réellement réalisé ; que la circonstance que les sommes en litige n'auraient pas eu pour effet de porter le montant de la rémunération à un niveau excessif est inopérante ;

Vu la lettre en date du 27 mars 2012 par laquelle les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 avril 2012 :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

Considérant que la SARL RHONE ALPES ENVIRONNEMENT, qui exerçait une activité d'entreprise générale de travaux du bâtiment et dont M. A était associé et gérant, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2003, 2004, 2005 et 2006 à l'issue de laquelle l'administration lui a notamment notifié des rectifications de ses bases imposables en matière d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt ; que la SARL RHONE ALPES ENVIRONNEMENT demande la réformation du jugement du 2 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt, ainsi que les pénalités y afférentes, auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2003, 2004, 2005 et 2006, en ce qui concerne la seule remise en cause par l'administration du caractère déductible d'une partie des indemnités kilométriques que lui avait facturées, au cours des exercices clos en 2004 et 2005, M. A, dans le cadre de son activité d'agent commercial ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par décision du 11 juillet 2011, postérieurement à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux a prononcé en faveur de la SARL RHONE ALPES ENVIRONNEMENT la remise de l'ensemble des intérêts de retard afférents à ces impositions supplémentaires, en vertu de l'article 1756-I du code général des impôts ; que, dans cette mesure, la requête est devenue sans objet ;

Sur le surplus des conclusions :

Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, rendu applicable en matière d'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1. Les frais généraux de toute nature (...) " ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application de ces dispositions, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du même code que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant que M. A a facturé à la SARL RHONE ALPES ENVIRONNEMENT des frais kilométriques relatifs à des déplacements professionnels qu'il aurait réalisés pour le compte de la requérante ; que ces indemnités kilométriques se sont élevées à un montant total de 12 232 euros facturé le 31 décembre 2002 correspondant à un parcours de 27 800 kilomètres réalisés au cours de la période du 1er avril au 31 décembre 2002, de 12 706,62 euros facturés le 30 décembre 2003 pour 28 112 kilomètres parcourus pendant la période du 1er avril au 31 décembre 2003, et de 12 348 euros facturés le 31 mars 2005 représentant 28 321 kilomètres parcourus ; que la société a regardé ces sommes comme constituant des charges déductibles de ses résultats des exercices clos les 31 mars 2003, 2004 et 2005 ; que l'administration a toutefois constaté, notamment à partir des mentions portées sur les déclarations de résultat de M. A relatives à son activité d'agent commercial, corroborées par les indications portées sur une des factures émise le 30 décembre 2003, qu'un seul véhicule, de marque Mercedes ML 400 CDI, d'une puissance fiscale de 18 cv était utilisé par M. A dans le cadre de cette activité d'agent commercial ; qu'elle a également constaté qu'au cours de ces mêmes périodes, M. A avait facturé à deux autres sociétés, Foncière du Dauphiné et Pierre et Nature dont il était aussi le gérant, des frais kilométriques relatifs à l'utilisation professionnelle de ce même véhicule ; que l'administration a alors relevé, à partir des factures d'entretien de ce véhicule Mercedes, que M. A avait réellement parcouru respectivement 68 688 kilomètres au cours de l'année 2003 et 42 141 kilomètres au cours de l'année 2005, alors que les frais kilométriques facturés par M. A, pour le compte de ces trois sociétés, correspondaient à des trajets de 70 280 kilomètres en 2003 et 90 205 kilomètres en 2005 ; que compte tenu de ces éléments, notamment de l'écart entre les kilométrages parcourus et ceux effectivement réalisés et de l'utilisation de ce véhicule par M. A pour réaliser des déplacements professionnels pour le compte de ces deux autres sociétés, l'administration a alors estimé, après avoir appliqué une réfaction de 25 p. 100 sur le kilométrage du véhicule pour tenir compte des déplacements privés de M. A, que ce dernier avait effectivement parcouru dans le cadre de son activité de prestataire de services pour le compte de la société requérante, 27 475 kilomètres au lieu de 28 112 kilomètres pour 2003 et 13 231 kilomètres au lieu de 28 321 kilomètres pour 2005 ; qu'elle a ainsi procédé à un rehaussement de son imposition de 3 393 euros au titre de l'exercice clos le 31 mars 2004 et de 8 537 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2005 correspondant à la partie des frais kilométriques excédant ceux relatifs aux kilométrages réellement réalisés qui ont été regardés par l'administration comme n'ayant pas été engagés dans l'intérêt de la société ;

Considérant que, pour expliquer les frais kilométriques litigieux, qui relèvent des " frais généraux de toute nature " visés par les dispositions du 1. de l'article 39 du code général des impôts, la SARL RHONE ALPES ENVIRONNEMENT se borne à soutenir que les indemnités kilométriques litigieuses sont afférentes à l'activité d'agent commercial de M. A qu'il a réalisée pour son compte, que l'administration a reconnu la réalité des prestations de services exécutées par M. A, sans produire d'élément concernant la réalisation des kilométrages professionnels litigieux et de nature à remettre en cause ceux exposés par l'administration ; qu'ainsi, l'administration apporte la preuve, qui lui incombe, de ce que ces dépenses n'ont pas été engagées dans l'intérêt de la société et, par suite, de l'existence d'un acte anormal de gestion résultant de la prise en charge par la SARL RHONE ALPES ENVIRONNEMENT de la partie des indemnités kilométriques excédant celles auxquelles pouvait prétendre M. A ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a réintégré, dans les résultats des exercices clos les 31 mars 2004 et 2005, cette fraction de frais kilométriques ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL RHONE ALPES ENVIRONNEMENT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus de sa demande ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 11LY00998 de la SARL RHONE ALPES ENVIRONNEMENT relatives aux intérêts de retard.

Article 2 : Le surplus de la requête de la SARL RHONE ALPES ENVIRONNEMENT est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me Dominique Masselon, mandataire judiciaire, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL RHONE ALPES ENVIRONNEMENT et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 24 avril 2012 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Besson et Segado, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 24 mai 2012.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY00998
Date de la décision : 24/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

19-04-02-01-04-082 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Acte anormal de gestion.


Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE LYON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-05-24;11ly00998 ?
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