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13/03/2012 | FRANCE | N°10LY02357

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 13 mars 2012, 10LY02357


Vu la requête, enregistrée le 5 octobre 2010, présentée pour la SA CRYOPLANTES dont le siège social est situé zone industrielle 23 rue du Moirond à Domène (38420) ;

La SA CRYOPLANTES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604242 du 10 août 2010 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er avril 2000 au 31 août 2004 et des intérêts de retard y afférents ;

2°) de prononcer la décha

rge de ces impositions et intérêts de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme...

Vu la requête, enregistrée le 5 octobre 2010, présentée pour la SA CRYOPLANTES dont le siège social est situé zone industrielle 23 rue du Moirond à Domène (38420) ;

La SA CRYOPLANTES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0604242 du 10 août 2010 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er avril 2000 au 31 août 2004 et des intérêts de retard y afférents ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et intérêts de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la TVA sur les prestations de services étant exigible lors de l'encaissement, le service ne pouvait assujettir à la TVA des prestations réalisées et facturées au cours d'une période prescrite mais réglées pendant la période vérifiée ; que la prescription court à partir du fait générateur de l'imposition ; qu'étant confrontée à des difficultés insurmontables, eu égard au coût d'une procédure judiciaire, pour recouvrer la facture émise à l'attention de la société luxembourgeoise Biotech industry et qui a donné lieu à une facture rectificative, elle pouvait déduire la TVA correspondante ; que la TVA n'a pu être recouvrée sans avoir été facturée ; que les prestations de services ayant été réalisées pour un assujetti situé dans un autre Etat membre, les opérations auraient dû être exonérées ; que l'instruction 3 A-5-97 du 28 septembre 1997 récapitule les règles applicables en cas de prestations successivement réalisées sur des marchandises destinées à être livrées dans l'autre Etat membre où est situé le donneur d'ordre ; que la motivation de la proposition de rectification est succincte ; que le jugement n'est pas assez motivé ; que ses activités n'aboutissent pas à la transformation des produits concernés ; que le sous-traitant français ne peut établir la réalité du transport hors de France ; que les principes de neutralité et d'effectivité ont été bafoués ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 janvier 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat tendant au rejet de la requête ;

Il soutient que la proposition de rectification est suffisamment motivée ; que le droit de reprise s'exerce par rapport au moment où la taxe devient exigible et non au fait générateur ; que l'administration était en droit, sans méconnaître les règles relatives à la prescription, de notifier le 9 décembre 2004 la TVA relative à des factures encaissées après le 1er avril 2000 dans la mesure où cette TVA était devenue exigible après cette date, quelles que soient les dates de réalisation ou de facturation des opérations ; que les opérations de broyage de végétaux sont des prestations de transformation de biens meubles corporels entrant dans le champ d'application de l'article 259 A 4° bis du code général des impôts ; que ces biens transformés étant ensuite acheminés vers d'autres entreprises situées en France pour subir d'autres opérations, le société n'établit pas que ces biens ont ensuite été expédiés ou transportés hors de France ; que la circonstance que le société luxembourgeoise ne soit pas en mesure de récupérer le TVA correspondante est sans incidence ; que si les mesures de simplification décrites dans l'instruction 3 A-5-97 du 28 septembre 1997 permettent au donneur d'ordre de ne pas se faire identifier à la TVA dans chaque Etat où est effectuée une prestation de services, la société requérante n'a pas établi l'expédition ou le transport des biens, après exécution de sa prestation ou des prestations successives, à destination de la société luxembourgeoise dans l'Etat membre qui lui a attribué le numéro d'identification sous lequel le service lui a été rendu ; que la TVA rappelée étant comprise dans le chiffre d'affaires encaissé au cours des années contrôlées, elle ne saurait être considérée comme de la TVA afférente à des créances irrécouvrables, la facturation rectificative ne devant donner lieu à aucun paiement supplémentaire de la part de la société luxembourgeoise ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 février 2012 :

- le rapport de M. Besson, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

Considérant que la SA CRYOPLANTES, dont l'activité de cryobroyage consiste à refroidir des produits à très basse température pour les rendre friables et les broyer, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er avril 2000 au 31 août 2004 à l'issue de laquelle des rectifications lui ont été proposées en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'elle fait appel du jugement n° 0604242 du 10 août 2010 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités y afférentes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'aux termes de l'article R.* 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, afin de permettre au contribuable de formuler ses observations ;

Considérant que la proposition de rectification du 9 décembre 2004 adressée à la SA CRYOPLANTES indique la nature, le montant et la base légale des rectifications envisagées ainsi que les factures concernées et les prestations exonérées à tort de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'elle permettait ainsi à la requérante d'engager valablement une discussion avec l'administration ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Quant à la prescription :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 176 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : " Pour les taxes sur le chiffre d'affaires, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible conformément aux dispositions du 2 de l'article 269 du code général des impôts. (...) Dans le cas où l'exercice ne correspond pas à une année civile, le délai part du début de la première période sur laquelle s'exerce le droit de reprise en matière d'impôt sur le revenu et d'impôt sur les sociétés et s'achève le 31 décembre de la troisième année suivant celle au cours de laquelle se termine cette période " ; que l'article L. 189 du même livre dispose : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification (...) " ; qu'aux termes de l'article 269 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " 2 La taxe est exigible : (...) c) Pour les prestations de services, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur autorisation du directeur des services fiscaux, d'après les débits (...) " ;

Considérant que le délai de reprise de l'administration courant, en vertu des dispositions précitées, à compter du moment où la taxe devient exigible et non par rapport au fait générateur, l'administration était en droit, sans méconnaître les règles relatives à la prescription, de proposer, le 9 décembre 2004, des rectifications concernant la taxe sur la valeur ajoutée relative à des factures encaissées après le 1er avril 2000 dans la mesure où, quelles que soient les dates de réalisation ou de facturation des opérations en cause, cette taxe était alors devenue exigible ;

Quant à l'assujettissement des prestations réalisées :

Considérant qu'aux termes de l'article 259 A du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " Par dérogation aux dispositions de l'article , le lieu des prestations suivantes est réputé se situer en France : (...) 4° bis Travaux et expertises portant sur des biens meubles corporels : a. lorsque ces prestations sont matériellement exécutées en France, sauf si le preneur a fourni au prestataire son numéro d'identification à la taxe sur la valeur ajoutée dans un autre Etat membre de la Communauté européenne et si les biens sont expédiés ou transportés hors de France (...) " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les prestations de broyage de végétaux réalisées par la SA CRYOPLANTES pour le compte de la société luxembourgeoise Biotech industry ont porté sur des biens meubles corporels qui ont ensuite été acheminés vers d'autres entreprises situées en France pour subir d'autres opérations, sans que la contribuable n'avance le moindre élément permettant de tenir pour établi que ces biens auraient finalement été expédiés ou transportés hors de France ; que si les mesures de simplification décrites dans l'instruction 3 A-5-97 du 28 septembre 1997 permettent au donneur d'ordre de ne pas se faire identifier à la taxe sur la valeur ajoutée dans chaque Etat où est effectuée une prestation de services, elles prévoient également que " 43. Le prestataire doit prouver par tout moyen que les services rendus ont porté sur un bien qui a fait l'objet d'un transport ou d'une expédition hors du territoire national après exécution de la prestation (...) " ; que c'est dès lors à bon droit que l'administration a assujetti les opérations en cause à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Quant à la créance irrécouvrable :

Considérant qu'aux termes de l'article 272 du code général des impôts dans sa rédaction applicable : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a été perçue à l'occasion de ventes ou de services est imputée ou remboursée dans les conditions prévues à l'article 271 lorsque ces ventes ou services sont par la suite résiliés ou annulés ou lorsque les créances correspondantes sont devenues définitivement irrécouvrables (...) L'imputation ou la restitution est subordonnée à la justification, auprès de l'administration, de la rectification préalable de la facture initiale (...) " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la taxe sur la valeur ajoutée rappelée étant comprise dans le chiffre d'affaires encaissé au cours de la période contrôlée, elle ne peut être regardée comme afférente à des créances irrécouvrables, la facturation rectificative dont se prévaut la société requérante ne devant donner lieu à aucun paiement supplémentaire de la société luxembourgeoise Biotech industry ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA CRYOPLANTES, dont le moyen tiré de la méconnaissance des principes de neutralité et d'effectivité n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions litigieuses ; que doivent être rejetées, en conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SA CRYOPLANTES est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA CRYOPLANTES et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 14 février 2012 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Besson et Segado, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 13 mars 2012.

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N° 10LY02357


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-06-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Thomas BESSON
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : SOCIETE FISCALYS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 13/03/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10LY02357
Numéro NOR : CETATEXT000025580281 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-03-13;10ly02357 ?
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