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05/01/2012 | FRANCE | N°11LY00926

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 05 janvier 2012, 11LY00926


Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 14 avril 2011 et régularisée le 18 avril 2011 et le mémoire complémentaire, enregistré le 20 juillet 2011, présentés pour M. Abdelatif A, domicilié au lieudit HLM Les Ayencins 1, allée 7, à Le-Péage-de-Roussilon (38550) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005761, du 23 mars 2011, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 24 novembre 2010, lui refusant la délivrance d'un certificat de résidenc

e algérien, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'...

Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 14 avril 2011 et régularisée le 18 avril 2011 et le mémoire complémentaire, enregistré le 20 juillet 2011, présentés pour M. Abdelatif A, domicilié au lieudit HLM Les Ayencins 1, allée 7, à Le-Péage-de-Roussilon (38550) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005761, du 23 mars 2011, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 24 novembre 2010, lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence algérien, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence algérien portant la mention vie privée et familiale dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de deux jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 050 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que les décisions lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence algérien et l'obligeant à quitter le territoire français sont entachées d'incompétence ; que ces deux décisions méconnaissent les dispositions du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant et sont en outre entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 novembre 2011, présenté par le préfet de l'Isère qui conclut au rejet de la requête en se référant à ses observations de première instance ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 2011 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Sur la légalité de la décision de refus de délivrance de certificat de résidence algérien :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces produites devant le Tribunal administratif par le PREFET DE L'ISERE que, par arrêté du 29 juillet 2010, publié le même mois au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Isère, le PREFET DE L'ISERE a donné délégation de signature à M. François Lobit, secrétaire général de la préfecture de l'Isère, pour signer tous actes, arrêtés, décisions, documents et correspondances administratives diverses, à l'exception des mesures concernant la défense nationale et celles concernant le maintien de l'ordre, des mesures des réquisition prises en application de la loi du 11 juillet 1938, des déclinatoires de compétence et arrêtés de conflits ; que la délégation de signature ainsi consentie, qui ne porte pas sur l'ensemble des compétences du préfet de l'Isère, concerne notamment les décisions de refus de séjour ; que, dans les termes où elle est rédigée, la délégation de signature dont justifiait M. François Lobit pour prendre l'arrêté litigieux ne saurait être regardée comme générale et imprécise ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié : (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, l'épouse de M. A, avec laquelle il s'est marié le 24 avril 1999, résidait en France depuis plusieurs années et était titulaire d'un certificat de résidence algérien valable du 4 août 2008 au 3 août 2018 ; que M. A se trouvait ainsi dans l'une des catégories d'étrangers dont la situation permettait la mise en oeuvre de la procédure de regroupement familial ; que, dès lors, M. A ne peut pas utilement soutenir que la décision lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence algérien a été prise en méconnaissance des stipulations précitées du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que M. A, ressortissant algérien né le 6 octobre 1974, se prévaut de l'intensité de ses attaches en France et de la qualité de son intégration au sein de la société française ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A, est entré sur le territoire métropolitain, sous couvert d'un visa de court séjour, le 14 mars 2009, moins de deux ans avant que ne soit prise la décision attaquée ; qu'à cette date, son épouse, également de nationalité algérienne et titulaire d'un certificat de résidence algérien valable dix ans, vivait en France avec leurs deux plus jeunes enfants, nés en France respectivement le 7 avril 2004 et le 25 mars 2008 ; que les deux époux avaient vécu séparés de 2003 à 2009, la femme en France avec leurs deux plus jeunes enfants et le mari en Algérie avec les deux aînés de leurs quatre enfants nés en Algérie, respectivement le 3 octobre 2000 et le 19 janvier 2002 ; que M. A avait conservé des attaches familiales fortes en Algérie, pays dans lequel il avait vécu jusqu'à l'âge de trente-cinq ans et où résidaient les deux aînés de ses enfants âgés de dix et de huit ans, sa mère, et ses huit frères et soeurs ; que les formalités nécessitées par l'instruction d'une demande de regroupement familial ne lui imposaient qu'une séparation temporaire d'avec son épouse d'autant que cette dernière avait déjà, par le passé, effectué plusieurs déplacements dans ce pays afin de rendre visite à son époux et à leurs deux premiers enfants et qu'il lui était loisible, en tant que de besoin, de s'y rendre à nouveau ; qu'en outre, rien ne s'opposait à la reconstitution de la cellule familiale en Algérie, pays dont les deux époux avaient la nationalité et où demeuraient, notamment, deux de leurs enfants mineurs ; que, dans ces conditions, la décision contestée n'a pas porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur la vie privée et familiale de M. A ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces dernières stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que M. A soutient que la décision attaquée a pour effet de le séparer durablement de ses enfants résidant en France ; que, toutefois, la décision refusant à M. A la délivrance d'un certificat de résidence algérien n'a pas, par elle-même, pour effet de le séparer de ses enfants ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, que pour les mêmes motifs que ceux énoncés dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision refusant à M. A la délivrance d'un certificat de résidence algérien, la décision du même jour l'obligeant à quitter le territoire français n'est pas entachée d'incompétence, n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en second lieu, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, M. A a vécu séparé de ses deux enfants nés en France et vivant auprès de leur mère depuis plusieurs années ; que, dans les circonstances particulières de l'espèce, eu égard au jeune âge de ses enfants et dès lors que ses deux premiers enfants résident toujours en Algérie, la décision obligeant M. A de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations précitées du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision désignant le pays de destination :

Considérant que les conclusions à fin d'annulation présentées par le requérant à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ne sont assorties d'aucun moyen distinct de ceux présentés au soutien des conclusions tendant à l'annulation des décisions refusant à M. A la délivrance d'un certificat de résidence algérien et l'obligeant à quitter le territoire français ; que, dès lors, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Abdelatif A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2011 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Chanel, président de chambre,

M. Besson, premier conseiller

Lu en audience publique, le 5 janvier 2012,

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N° 11LY00926


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : COUTAZ

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 05/01/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 11LY00926
Numéro NOR : CETATEXT000025146804 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-01-05;11ly00926 ?
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