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03/11/2011 | FRANCE | N°10LY02209

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 03 novembre 2011, 10LY02209


Vu la requête, enregistrée le 16 septembre 2010, présentée pour M. Lionel A, domicilié ...;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0804040 du 8 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à ce que le centre hospitalier universitaire (CHU) de Saint-Etienne soit condamné à lui verser une somme de 120 000 euros ;

2°) de prononcer la condamnation demandée ;

3°) de mettre à la charge du CHU de Saint-Etienne une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;<

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Il soutient que :

- il n'a pas été informé de l'existence du risque, qui ne peut être...

Vu la requête, enregistrée le 16 septembre 2010, présentée pour M. Lionel A, domicilié ...;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0804040 du 8 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à ce que le centre hospitalier universitaire (CHU) de Saint-Etienne soit condamné à lui verser une somme de 120 000 euros ;

2°) de prononcer la condamnation demandée ;

3°) de mettre à la charge du CHU de Saint-Etienne une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- il n'a pas été informé de l'existence du risque, qui ne peut être regardé comme rare, dont il a été victime ;

- le chirurgien a commis une faute dans la réalisation du geste chirurgical ;

- subsidiairement, il doit être indemnisé au titre des dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique ;

- il demeure atteint d'une incapacité partielle permanente de 10 % et a subi un préjudice d'agrément ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 juin 2011, présenté pour le CHU de Saint-Etienne qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- la faible gravité des risques, qui n'étaient en outre pas normalement prévisibles, ne justifiait pas que l'hôpital soit tenu d'en informer le patient ; en tout état de cause, le requérant ne se serait pas soustrait à l'intervention s'il avait été informé de ces risques ;

- aucune faute médicale n'a été commise ;

- sa responsabilité sans faute ne saurait être retenue, et il ne peut davantage être tenu à indemnisation au titre de la solidarité nationale ;

- subsidiairement, le préjudice d'agrément n'est pas justifié ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 août 2011, présenté pour l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), qui conclut au rejet de la requête ou, subsidiairement, à ce que les pièces du dossier de première instance lui soient communiquées, afin de lui permettre de se défendre ;

Vu les pièces dont il résulte que la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Saint-Etienne, qui n'a pas produit d'observations, a été régulièrement mise en cause ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience du 13 octobre 2011, qui s'est déroulée hors la présence du public, en application de l'article L. 731-1 du code de justice administrative :

- le rapport de M. Clot, président ;

- et les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;

Considérant que M. A a fait l'objet, au centre hospitalier universitaire (CHU) de Saint-Etienne, d'une cure chirurgicale coelioscopique d'une anomalie de la jonction pyélo-urétérale sur rein en fer à cheval , réalisée le 29 novembre 2002 ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. A tendant à ce que ce centre hospitalier soit condamné à lui verser une somme totale de 120 000 euros, en réparation de séquelles qu'il conserve de cette intervention ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment des rapports des 22 octobre 2004 et 18 janvier 2006 de l'expertise réalisée contradictoirement à la demande de la SHAM, assureur du CHU, produits par le requérant, que le syndrome d'éjaculation rétrograde dont il est atteint procède d'un aléa thérapeutique et non d'une faute dans la réalisation de l'intervention ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable en l'espèce : Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. (...) / Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. / Cette information est délivrée au cours d'un entretien individuel. / (...) En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des rapports de l'expert que M. A était atteint d'une malformation congénitale affectant les voies urinaires, à l'origine de douleurs chroniques, qui se sont aggravées en crises douloureuses dans la période qui a précédé l'intervention ; que l'intervention dont M. A a fait l'objet a permis de remédier à cette situation, mais s'est en revanche accompagnée d'une lésion de filets nerveux, entraînant des troubles éjaculatoires ; que le sapiteur consulté par l'expert indique que compte tenu de ce que l'existence de reins en fer à cheval et les complications liées aux risques anatomiques de la dissection de la zone isthmique du rein sont rarement observées, la littérature médicale ne mentionne pas de troubles de l'éjaculation consécutifs à un telle intervention ; qu'ainsi, il n'existe pas de risque inhérent au traitement de la malformation que présentait l'intéressé ; que le sapiteur précise toutefois que la littérature médicale montre un nombre important de troubles de l'éjaculation consécutifs à un intervention dans cette zone particulièrement sensible ; que, dès lors, les médecins ont commis une faute en négligeant d'informer M. A de ce risque fréquent ou grave normalement prévisible ; que toutefois, l'intéressé souffrait de douleurs chroniques liées à un risque d'infection et pouvant, selon le document produit devant le tribunal administratif par le centre hospitalier, provoquer la destruction progressive du rein ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'il existait une alternative thérapeutique ; que, par suite, la faute commise n'a pas entraîné, dans les circonstances de l'espèce, de perte d'une chance pour M. A, de se soustraire au risque qui s'est réalisé ; qu'aucune indemnisation n'est, par conséquent, due à ce titre ;

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable en l'espèce : I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute (...) II. - Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'incapacité permanente ou de la durée de l'incapacité temporaire de travail. / Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'incapacité permanente supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret ; qu'aux termes de l'article D. 1142-1 du même code, dans sa rédaction applicable : Le pourcentage mentionné au dernier alinéa de l'article L. 1142-1 est fixé à 24 %. / Un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale présente également le caractère de gravité mentionné à l'article L. 1142-1 lorsque la durée de l'incapacité temporaire de travail résultant de l'accident médical, de l'affection iatrogène ou de l'infection nosocomiale est au moins égale à six mois consécutifs ou à six mois non consécutifs sur une période de douze mois. / A titre exceptionnel, le caractère de gravité peut être reconnu : / 1° Lorsque la victime est déclarée définitivement inapte à exercer l'activité professionnelle qu'elle exerçait avant la survenue de l'accident médical, de l'affection iatrogène ou de l'infection nosocomiale ; / 2° Ou lorsque l'accident médical, l'affection iatrogène ou l'infection nosocomiale occasionne des troubles particulièrement graves, y compris d'ordre économique, dans ses conditions d'existence ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert que l'incapacité permanente partielle résultant des séquelles dont M. A demeure atteint ne dépasse pas 10 % ; que ces séquelles n'ont en elles-mêmes entraîné aucune incapacité temporaire ; qu'à défaut de toute conséquence professionnelle ou économique exceptionnelle, l'état de M. A ne relève pas du régime d'indemnisation au titre de la solidarité nationale défini par les dispositions précitées du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CHU de Saint-Etienne, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, une somme quelconque au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Lionel A, au centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne, à l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d'assurance maladie de Saint-Etienne.

Délibéré après l'audience du 13 octobre 2011 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Steck-Andrez, président-assesseur,

M. Poitreau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 novembre 2011.

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N° 10LY02209


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY02209
Date de la décision : 03/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Service public de santé - Établissements publics d'hospitalisation - Responsabilité sans faute.

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Service public de santé - Établissements publics d'hospitalisation - Responsabilité pour faute simple : organisation et fonctionnement du service hospitalier - Existence d'une faute - Manquements à une obligation d'information et défauts de consentement.

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Service public de santé - Établissements publics d'hospitalisation - Responsabilité pour faute médicale : actes médicaux - Absence de faute médicale de nature à engager la responsabilité du service public - Exécution du traitement ou de l'opération.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: M. POURNY
Avocat(s) : CAUET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-11-03;10ly02209 ?
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