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17/02/2011 | FRANCE | N°09LY02251

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 17 février 2011, 09LY02251


Vu la requête enregistrée le 22 septembre 2009 par laquelle le PREFET DE LA DROME demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605990 du 21 juillet 2009 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé sa décision du 20 juillet 2006 prononçant la fermeture administrative pour une durée de deux mois du débit de boisson qu'exploite la Société Domaine du Manson à Sauzet, sous l'enseigne L'Hacienda ;

2°) de rejeter le recours pour excès de pouvoir présenté au Tribunal par la Société Domaine du Manson contre ladite décision ;

Le PREFET DE LA D

ROME soutient que l'enquête de gendarmerie établit la matérialité d'une consommation ...

Vu la requête enregistrée le 22 septembre 2009 par laquelle le PREFET DE LA DROME demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605990 du 21 juillet 2009 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé sa décision du 20 juillet 2006 prononçant la fermeture administrative pour une durée de deux mois du débit de boisson qu'exploite la Société Domaine du Manson à Sauzet, sous l'enseigne L'Hacienda ;

2°) de rejeter le recours pour excès de pouvoir présenté au Tribunal par la Société Domaine du Manson contre ladite décision ;

Le PREFET DE LA DROME soutient que l'enquête de gendarmerie établit la matérialité d'une consommation excessive d'alcool et de drogue dans l'établissement, par l'auteur et la victime de l'accident de la circulation survenu le 25 mars 2006 ; que le gérant de l'établissement a d'ailleurs admis cette circonstance lors de son audition ; que la relaxe au pénal de celui-ci est sans incidence sur la légalité de la mesure litigieuse, dès lors qu'elle ne contredit pas les faits de consommation d'alcool et de drogue dans l'établissement ; que de nouvelles pièces établissent que six personnes au moins conduisant en état d'alcoolémie durant les nuits du 8 au 9 avril ou du 12 au 13 mai 2006 sortaient de l'Hacienda ; que ces faits sont attentatoires à la sécurité publique et justifient une fermeture administrative en vertu de l'article L. 3232-15 du code de la santé publique ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 janvier 2011 :

- le rapport de M. Arbarétaz, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique : 1. La fermeture des débits de boissons et des restaurants peut être ordonnée par le représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas six mois, à la suite d'infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements. (...) 2. En cas d'atteinte à l'ordre public, à la santé, à la tranquillité ou à la moralité publique, la fermeture peut être ordonnée par le représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas deux mois. (...) ; qu'au nombre des infractions aux lois relatives aux débits de boisson, figure, selon l'article R. 3353-1 du code : Le fait pour les débitants de boissons de donner à boire à des gens manifestement ivres ou de les recevoir dans leurs établissements est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 4ème classe ; que ces dispositions permettent, sur le fondement du 1 de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique de sanctionner le débitant qui a servi des boissons alcoolisées à tout consommateur présentant des signes évidents de perturbation du comportement ou qui lui en a servi dans de telles quantités que leur absorption rend inévitable l'apparition des symptômes de l'ivresse, sans égard aux conséquences de ces abus et, sur le fondement du 2 dudit article, de prendre une mesure de police tendant à prévenir le renouvellement de comportements imputables à l'exploitant qui, sans être nécessairement constitutifs d'infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements, sont néanmoins attentatoires à l'ordre public ;

Considérant que s'il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment des procès-verbaux de gendarmerie, que M. B aurait présenté des signes d'ivresse dans la nuit du 24 au 25 mars 2006, M. A, en revanche, avait absorbé des boissons fortement alcoolisées avant son arrivée à L'Hacienda et inhalé, dans des circonstances indéterminées, de la cocaïne ; que, dans cet établissement, il a consommé en première partie de soirée de nombreux verres de whisky ; que les effets de l'alcool qu'il avait d'ores et déjà absorbé conjugués aux effets des stupéfiants n'ont pas pu ne pas provoquer des troubles manifestes de son comportement lorsque lui a été de nouveau vendue au comptoir, une bouteille d'un demi-litre de vodka, vers 1h30 ; que son ivresse manifeste suffisait à justifier, en application des dispositions précitées du 1 de l'article L. 3332-15 et de l'article R. 3353-1 du code de la santé publique, une sanction de fermeture provisoire de l'établissement dans lequel les boissons lui ont été servies ;

Considérant que la décision de fermeture administrative repose également sur les résultats des contrôles d'alcoolémie pratiqués par la gendarmerie au cours des nuits du 8 au 9 avril et du 12 au 13 mai 2006 ; que s'il ressort des pièces produites en appel que six conducteurs présentant un taux d'alcoolémie par litre d'air expiré supérieur au plafond fixé par le code de la route avaient consommé de l'alcool à L'Hacienda, ils ne présentaient aucun signe manifeste d'ivresse ; qu'il n'est pas allégué que l'exploitant ou ses préposés les auraient encouragés à consommer avant de reprendre le volant ; que, par suite, l'atteinte à la sécurité publique constituée par la conduite sous l'empire d'un état alcoolique, bien que matériellement établie, n'est pas imputable au débitant de boissons et ne saurait fonder une mesure de fermeture prise au titre des pouvoirs de police du préfet en application du 2 de l'article L. 3332-15 précité du code de la santé publique ; que toutefois il résulte de l'instruction que le PREFET DE LA DROME aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur le premier motif ; qu'il résulte de ce qui précède qu'indépendamment des causes de l'accident survenu le matin du 25 mars 2006, dont M. A a été victime en tant que passager de M. B, le PREFET DE LA DROME est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal a annulé sa décision du 20 juillet 2006 prononçant la fermeture administrative pour une durée de deux mois du débit de boisson au motif que la matérialité d'une consommation excessive des personnes impliquées dans l'accident - ou de l'une d'elles - n'était pas établie ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens articulés devant le Tribunal par la Société Domaine du Manson ;

Considérant, en premier lieu, que l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 se borne à exiger de l'administration qu'elle mette l'intéressé à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, des observations orales avant de prendre une décision individuelle assujettie à l'obligation de motivation telle qu'une mesure de police ou une sanction administrative ; qu'il est satisfait à cette exigence dès lors que la personne concernée par le projet de décision a pu en contester utilement les motifs ;

Considérant que le PREFET DE LA DROME a invité le gérant de la Société Domaine du Manson à présenter ses observations par un courrier du 26 juin 2006 qui énonce précisément les motifs susceptibles d'entraîner une fermeture temporaire de l'établissement ; que l'entretien organisé en préfecture le 7 juillet 2006 a permis au gérant de compléter les justifications qu'il avaient exposées dans sa lettre du 13 juillet 2006 ; qu'il n'est pas soutenu que les services de la préfecture ne l'auraient pas informé de la teneur des témoignages recueillis au cours de l'enquête judiciaire sur le comportement des consommateurs soupçonnés d'avoir absorbé des quantités excessives d'alcool dans l'établissement, à défaut de lui avoir communiqué les procès-verbaux de gendarmerie dont certains étaient couverts par le secret de l'instruction ; que, par suite, ladite société a été mise en mesure de se défendre utilement et n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait été privée des garanties de la procédure contradictoire organisée par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

Considérant, en second lieu, que compte tenu de la gravité des faits qui ont justifié la mesure de fermeture, le PREFET DE LA DROME, en fixant la durée de cette fermeture à deux mois, n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des circonstances de l'espèce ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA DROME est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ; que pour les mêmes motifs, la demande d'annulation de la décision du 20 juillet 2006 prononçant la fermeture administrative pour une durée de deux mois de L'Hacienda doit être rejetée ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 065990 du Tribunal administratif de Grenoble en date du 21 juillet 2009 est annulé.

Article 2 : La demande d'annulation de la décision du 20 juillet 2006 prononçant la fermeture administrative pour une durée de deux mois de L'Hacienda présentée par la Société Domaine du Manson, est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et à la Société Domaine du Manson.

Délibéré après l'audience du 27 janvier 2011 à laquelle siégeaient :

M. du Besset, président de chambre,

Mme Verley Cheynel, président-assesseur,

M. Arbarétaz, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 février 2011.

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N° 09LY02251


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY02251
Date de la décision : 17/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05 Police administrative. Polices spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Philippe ARBARETAZ
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : ADJEDJ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-02-17;09ly02251 ?
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