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18/11/2010 | FRANCE | N°10LY00036

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 18 novembre 2010, 10LY00036


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 12 janvier 2010, présentée pour M. Ejup A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0705009, en date du 2 juin 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet du Rhône, du 21 décembre 2006, portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de réexaminer sa situation, dans le délai de trente jours à co

mpter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 12 janvier 2010, présentée pour M. Ejup A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0705009, en date du 2 juin 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet du Rhône, du 21 décembre 2006, portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de réexaminer sa situation, dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient qu'eu égard en particulier au caractère indispensable de sa présence aux côtés de sa compagne malade mais également à ses capacités d'insertion professionnelle, la décision portant refus de délivrance de titre de séjour a été prise en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que, pour les mêmes motifs, cette décision méconnaît les dispositions de l'article 7-4 du décret du 30 juin 1946 ainsi que les énonciations des circulaires du 12 mai 1998, du 12 décembre 2002 et du 31 octobre 2005 ; qu'il est considéré comme un espion et un traître aux services des serbes par des groupes armés albanais et que la décision préfectorale contestée méconnaît, par suite, les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article 13 de la loi du 25 juillet 1952 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 21 juillet 2010 à la Cour, présenté pour le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête et demande à la Cour que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge de M. A, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la décision portant refus de délivrance de titre de séjour ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 modifiée relative au droit d'asile et à l'asile territorial ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 novembre 2010 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) et qu'aux termes de l'article R. 313-21 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui a repris les dispositions de l'article 7-4 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié : Pour l'application du 7° de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. ;

Considérant que M. A, ressortissant du Kosovo, est entré en France à la date déclarée du 29 juillet 2002 ; qu'il a déposé une demande d'admission en qualité de réfugié qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par une décision du 19 mars 2003, confirmée par la Commission des recours des réfugiés le 18 juillet 2003 ; que le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, par une décision du 27 mai 2004, a rejeté sa demande d'asile territorial et que, par décision du 11 juin 2004, le préfet de la Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; que M. A a alors sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont le bénéfice lui a été refusé par décision du préfet du Rhône du 21 décembre 2006, en litige dans le présent contentieux ; que, pour contester cette dernière décision, M. A fait valoir qu'il dispose de bonnes capacités d'insertion sociale et professionnelle en France et que sa présence aux côtés de sa compagne est indispensable à cette dernière, qui souffre de troubles psychologiques et est titulaire d'un titre de séjour en qualité d'étrangère malade ; que, toutefois, s'il est établi, par les pièces médicales versées au dossier que la concubine de M. A bénéficie d'une prise en charge médico-psychologique en France, le caractère indispensable de la présence du requérant auprès de cette dernière n'est pas démontré par les pièces versées au dossier, qui sont insuffisamment circonstanciées sur ce point ; que, par suite, et alors que M. A a vécu jusqu'à l'âge de trente-quatre ans au Kosovo, où demeurent toujours notamment son épouse et leurs quatre enfants mineurs, respectivement âgés de 12, 9, 8 et 7 ans ainsi que d'autres membres de sa famille proche, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; qu'elle n'a, ainsi, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen tiré de la violation de l'article R. 313-21 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut également qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur la situation personnelle du requérant ;

Considérant, en troisième lieu, que M. A ne peut pas utilement se prévaloir des énonciations contenues dans les circulaires ministérielles des 12 mai 1998, 19 décembre 2002 et 31 octobre 2005, qui sont dépourvues de caractère réglementaire ;

Considérant, en quatrième lieu, que M. A ne peut pas invoquer utilement les risques et menaces qui pèseraient sur lui en cas de retour au Kosovo, à l'encontre de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour contestée, qui n'emporte pas, par elle-même, obligation pour l'intéressé de retourner dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance, par cette décision, des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en cinquième lieu, que M. A, à qui le ministre de l'intérieur a refusé le bénéfice de l'asile territorial le 27 mai 2004, ne peut pas invoquer utilement les dispositions de l'article 13 de la loi du 25 juillet 1952 modifiée, relatives à l'asile territorial, à l'encontre de la décision contestée du 21 décembre 2006 par laquelle le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance du titre de séjour qu'il avait sollicité sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

Sur les conclusions du préfet du Rhône tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A une quelconque somme que ce soit à verser à l'Etat au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le préfet du Rhône sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Ejup A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 3 novembre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Fontbonne, président assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 novembre 2010.

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N° 10LY00036


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY00036
Date de la décision : 18/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : BIDAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-11-18;10ly00036 ?
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