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14/10/2010 | FRANCE | N°09LY01147

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 14 octobre 2010, 09LY01147


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 27 mai 2009, présentée pour la SARL ROUX CHRISTOPHE, dont le siège est lieu-dit Gratillon à Merle-Leignecq (42380), représentée par son gérant en exercice ;

La SARL ROUX CHRISTOPHE, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700366, en date du 31 mars 2009, du Tribunal administratif de Lyon, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de la contribution sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en

2002 et 2003, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharg...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 27 mai 2009, présentée pour la SARL ROUX CHRISTOPHE, dont le siège est lieu-dit Gratillon à Merle-Leignecq (42380), représentée par son gérant en exercice ;

La SARL ROUX CHRISTOPHE, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700366, en date du 31 mars 2009, du Tribunal administratif de Lyon, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de la contribution sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2002 et 2003, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge desdites cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et contribution sur cet impôt, ainsi que des pénalités y afférentes ;

La SARL ROUX CHRISTOPHE soutient que, concernant les dépenses relatives aux travaux de reconstruction des bâtiments qu'elle louait, au titre d'un bail commercial conclu avec M. A et qui ont été détruits en 2002 par un incendie, elle était dans l'obligation d'effectuer ces travaux, ayant souscrit une assurance pour ces bâtiments ; que leur coût, qui s'est élevé à 137 670 euros, a été passé en " charge exceptionnelle " et le remboursement de l'assurance en " produit exceptionnel " ; que, n'étant pas propriétaire du terrain, elle n'avait pas à amortir les nouveaux bâtiments ; que l'administration fiscale n'a pas été pénalisée par cette opération ; que le bâtiment n'a pas été construit sur le sol d'autrui ; qu'il est toujours propriété de M. A ; que les constructions n'étant pas originellement inscrites à l'actif du bilan, l'option pour l'étalement des indemnités d'assurance n'a pas été possible ; que, si l'étalement des indemnités d'assurance avait été demandé, la méthode préconisée par l'administration aurait eu pour conséquence un amortissement du bâtiment avec paiement immédiat de l'impôt sur les sociétés sur les indemnités d'assurance perçues ; que, concernant l'acquisition de nouvelles machines et d'outillages, s'il est exact que le matériel aurait dû être amorti et n'aurait pas dû être enregistré en " charge exceptionnelle ", le remboursement de l'assurance aurait dû être étalé sur la durée d'amortissement de ce matériel ; que la solution qu'elle a retenue n'est pas conforme à la loi qui n'offrait pas plusieurs solutions ; que le choix effectué ne peut être analysé comme une décision de gestion ; qu'elle a commis une erreur dont elle demande la rectification ; que la décision qu'elle a prise a eu pour conséquence la constatation d'un déficit exceptionnel de 3 293 euros en 2002 et de 19 500 euros en 2003 et d'un résultat exceptionnel de 67 095 euros en 2004 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 31 décembre 2009, le mémoire en défense présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la requête, qui ne comporte aucune critique du jugement, est irrecevable ; que, subsidiairement, si l'article 39-1 du code général des impôts dispose que le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, les dépenses qui se traduisent par une augmentation de l'actif de l'entreprise ne peuvent être comprises parmi les charges immédiatement déductibles du bénéfice imposable, qu'il s'agisse de dépenses se traduisant par l'entrée dans l'actif d'un nouvel élément ou de dépenses entraînant une augmentation de la valeur d'une immobilisation existante ; que le service a estimé que les sommes comptabilisées en charge par la SARL requérante, à hauteur de 298 758 euros en 2002 et 19 500 euros en 2003, constituaient des éléments de son actif immobilisé et les a réintégrées dans ses bénéfices, en application des articles 39-1 et 38-2 du code général des impôts et de l'article 38 quater de l'annexe III à ce code ; qu'en effet, s'agissant des dépenses relatives aux travaux de reconstruction, même si la société n'était pas propriétaire des biens incendiés, les dépenses de reconstruction des bâtiments passées en charge ne se sont pas traduites par une diminution de son actif net ; qu'elles n'ont pas disparu au premier usage et vont servir d'une manière durable pour l'activité de l'entreprise ; que, selon l'article 39 D du code général des impôts, l'amortissement de constructions et aménagements sur le sol d'autrui doit être réparti sur la durée normale d'utilisation de chaque élément ; qu'ainsi, l'entreprise qui édifie des constructions ou aménagements sur le sol d'autrui doit en porter le prix de revient à l'actif de ses bilans, alors même que ses droits sur ces constructions ou aménagements ne sont pas ceux d'un propriétaire ; que les travaux qui ne constituent pas de simples dépenses d'entretien, de réparation ou de renouvellement ne peuvent être compris parmi les charges déductibles d'une société, même si elle n'est pas propriétaire des locaux dans lesquels ces travaux sont effectués ; que, s'agissant de l'acquisition de nouvelles machines, l'étalement de l'indemnité d'assurance sur la durée d'amortissement des biens n'est prévu par aucune disposition ; que, toutefois, les indemnités d'assurance destinées à compenser la perte d'éléments de l'actif immobilisé doivent être assimilées à des plus-values ou des moins-values de cession ; que le dispositif d'étalement prévu à l'article 39 quaterdecies 1 ter du code général des impôts est optionnel et n'a aucun caractère impératif ; que l'exercice, par un contribuable, au titre d'une année d'imposition, d'une option qui lui est ouverte a le caractère d'une décision de gestion qui lui est opposable ; qu'il en va de même lorsque le contribuable ne formule pas une option prévue par la loi ; que la société requérante, qui n'a pas opté, lors du dépôt de sa déclaration, pour l'étalement de la plus-value constatée lors de la perception de l'indemnité d'assurance, ne pouvait plus en demander le bénéfice ultérieurement ; qu'elle ne peut davantage invoquer les conséquences financières préjudiciables de sa décision ;

Vu, enregistré le 16 février 2010, le mémoire en réplique présenté pour la SARL ROUX CHRISTOPHE qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ; elle soutient, en outre, que sa requête est motivée et n'est pas irrecevable ; que, concernant les dépenses relatives aux travaux de reconstruction, le Tribunal ne s'est pas prononcé sur le fond et a rejeté la demande de dégrèvement en donnant pour seul motif l'accroissement de l'actif, sans tenir compte de la réalité de l'opération ; que, concernant l'acquisition de nouvelles machines, le Tribunal ne s'est pas prononcé sur la notion d'erreur ni sur sa rectification ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 septembre 2010 :

- le rapport de Mme Besson-Ledey, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Monnier, rapporteur public ;

Considérant que la SARL ROUX CHRISTOPHE exerce une activité de sciage et de rabotage du bois dans des bâtiments donnés en location par M. A ; qu'elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière d'impôt sur les sociétés, sur les années 2002 à 2004, au terme de laquelle elle s'est vu notifier, le 14 novembre 2005, une proposition de rectification de sa comptabilité, après la réintégration, par l'administration fiscale, dans son résultat imposable, au titre des années 2002 et 2003, de charges, dont elle a refusé la déduction, correspondant aux travaux de reconstruction, après un incendie en 2002, des bâtiments loués et à l'acquisition de nouvelles machines et d'outillages ; que ladite société relève appel du jugement du Tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de la contribution sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2002 et 2003, ainsi que des pénalités y afférentes ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée par le ministre :

En ce qui concerne les travaux de reconstruction des bâtiments loués par la SARL ROUX CHRISTOPHE pour l'exercice de son activité :

Considérant, d'une part, qu'aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apports et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances de tiers, les amortissements et les provisions justifiés " ; qu'aux termes de l'article 39 dudit code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ; 2° (...) les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions, seuls peuvent être compris dans les frais généraux et constituer des charges d'un exercice déterminé les travaux de réparation et d'entretien qui concourent à maintenir en état d'usage ou de fonctionnement, jusqu'à l'expiration de leur durée d'amortissement, les différents éléments de l'actif immobilisé de l'entreprise ; qu'en revanche, les travaux qui ont pour objet de renouveler divers équipements ou d'en prolonger la durée au-delà de la période normale d'amortissement peuvent seulement être inscrits à un compte d'immobilisation pour faire l'objet d'un amortissement ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 39 D du même code : " L'amortissement des constructions et aménagements édifiés sur le sol d'autrui doit être réparti sur la durée normale d'utilisation de chaque élément (...) " ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que, si une entreprise locataire est en droit de faire figurer dans ses charges d'exploitation immédiatement déductibles les frais d'entretien et de réparation qui lui incombent, cette entreprise est en revanche tenue de porter à l'actif de ses bilans les dépenses de la nature de celles évoquées ci-dessus qu'elle effectue sur le sol d'autrui, alors même que ses droits sur ces constructions et aménagements ne sont pas ceux d'un propriétaire ;

Considérant que, consécutivement à un incendie survenu en 2002, ayant détruit les bâtiments loués par la SARL ROUX CHRISTOPHE pour l'exercice de son activité, cette dernière a fait procéder à la reconstruction totale des bâtiments détruits ; que ces travaux, de par leur importance et leur coût, ont eu pour effet d'accroître la valeur et d'augmenter sensiblement la durée probable d'utilisation de l'actif immobilisé et ne peuvent, dès lors, être regardés comme ayant le caractère de simples travaux d'entretien et de réparation ; qu'il s'ensuit, même si la SARL ROUX CHRISTOPHE n'est que locataire et sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'elle était tenue d'assurer les bâtiments, que les dépenses qu'elle a supportées pour leur reconstruction ne peuvent donner lieu qu'à amortissement dans les conditions prévues à l'article 39 D du code général des impôts précité ; que c'est donc à bon droit, en application du 2 de l'article 38 du code général des impôts, que l'administration fiscale a refusé d'admettre en déduction au titre des charges des années litigieuses le coût des travaux dont s'agit ;

En ce qui concerne les dépenses d'acquisition de nouvelles machines et d'outillages :

Considérant que la SARL ROUX CHRISTOPHE, qui admet qu'elle aurait dû amortir les frais d'acquisition de nouvelles machines et d'outillages qu'elle a exposés en 2002, soutient que l'indemnité d'assurance qui lui a été versée en dédommagement des dégâts qui ont été occasionnés à son matériel, à la suite de l'incendie de 2002, devait faire l'objet d'un étalement sur la durée d'amortissement de ce matériel ;

Considérant qu'aux termes du 1 ter de l'article 39 quaterdecies du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " Par dérogation aux dispositions du 1, la plus-value nette à court terme afférente à des biens amortissables, réalisée à la suite de la perception d'indemnités d'assurances ou de l'expropriation d'immeubles figurant à l'actif, peut être répartie, par fractions égales, sur plusieurs exercices à compter de celui suivant la réalisation de la plus-value (...) " ;

Considérant que la répartition, sur la durée d'amortissement du matériel, de l'imposition en litige, liée à la perception de l'indemnité d'assurance, impliquait une option expresse de la SARL contribuable, dont il est constant qu'elle ne l'a pas exercée ; que, ce faisant, la société intéressée a pris une décision de gestion qui lui est opposable ; que, par suite, nonobstant les conséquences financières résultant de ses écritures comptables initiales, la SARL ROUX CHRISTOPHE n'est pas fondée à demander le bénéfice d'un étalement du montant de l'indemnité d'assurance concernée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL ROUX CHRISTOPHE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué qui, ayant statué au fond et répondu de manière circonstanciée aux moyens invoqués, n'est entaché d'aucune irrégularité, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL ROUX CHRISTOPHE est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL ROUX CHRISTOPHE et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 23 septembre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président

M. Raisson et Mme Besson-Ledey, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 14 octobre 2010

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N° 09LY01147


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: Mme Laurence BESSON-LEDEY
Rapporteur public ?: M. MONNIER
Avocat(s) : LEONARDO

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 14/10/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 09LY01147
Numéro NOR : CETATEXT000023038540 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-10-14;09ly01147 ?
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