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17/12/2009 | FRANCE | N°06LY01658

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 17 décembre 2009, 06LY01658


Vu la requête, enregistrée le 31 juillet 2006 au greffe de la Cour, présentée pour la société anonyme (SA) GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE, ayant son siège social 102 cours Lafayette à Lyon (69003), représentée par son président-directeur général ;

La SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement nos 0405647 - 0405757, en date du 6 juin 2006, par lequel le Tribunal administratif de Lyon, après l'avoir déchargée de la pénalité de l'article 1763 A du code général des impôts, a rejeté sa demande en décharge des cotisati

ons supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet ...

Vu la requête, enregistrée le 31 juillet 2006 au greffe de la Cour, présentée pour la société anonyme (SA) GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE, ayant son siège social 102 cours Lafayette à Lyon (69003), représentée par son président-directeur général ;

La SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement nos 0405647 - 0405757, en date du 6 juin 2006, par lequel le Tribunal administratif de Lyon, après l'avoir déchargée de la pénalité de l'article 1763 A du code général des impôts, a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt, ainsi que des autres pénalités y afférentes, auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1997, 1998 et 1999, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de précompte mobilier, et des pénalités y afférentes, qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er mars 1996 au 31 janvier 2000 ;

2°) de prononcer les décharges demandées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- qu'elle n'a pas disposé d'un délai suffisant entre la réception de l'avis de vérification de comptabilité et le début des opérations sur place, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ; que les indications figurant dans l'avis de vérification de comptabilité du 9 mars 2000 donnaient à penser qu'en matière de taxe sur la valeur ajoutée, seule la période du 1er mars 1998 au 31 janvier 2000, qui était mentionnée précisément, ferait l'objet du contrôle ; qu'en conséquence, le contrôle de taxe sur la valeur ajoutée portant sur la période du 1er mars 1996 au 28 février 1998 est irrégulier au regard tant de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales qu'au regard de la charte du contribuable vérifié, rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du même livre ; que les indications données par l'administration dans ses écrits sont opposables sur le fondement des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales ; que le jugement attaqué est erroné sur ce point ; qu'après avoir adressé, le 9 mars 2000, à la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE un premier avis de vérification de sa comptabilité portant sur l'ensemble des déclarations fiscales et opérations susceptibles d'être examinées et portant sur la période du 01/03/1996 au 28/02/1998 et les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée de la période du 1er mars 1998 au 31 janvier 2000 , le vérificateur a, le 21 mars 2000, jour de la première opération sur place de la vérification annoncée par le premier avis, remis au responsable de la société rencontré sur place un second avis de vérification portant sur l'ensemble des déclarations fiscales et opérations susceptibles d'être examinées et portant sur la période du 01/03/1998 au 28/02/1999 ; qu'en réalité la vérification de comptabilité de l'impôt sur les sociétés de cette période a commencé le 21 mars 2000, c'est-à-dire le jour même de la remise de l'avis de vérification ; qu'ainsi la société a été privée de tout délai entre la remise de l'avis et le début des opérations concernant cette période ; qu'elle a été privée du débat oral et contradictoire auquel elle avait droit ; que les opérations concernant le précompte mobilier n'ont pu être régulièrement vérifiées, en l'absence de toute déclaration ; que le précompte a été vérifié pour des périodes non annoncées par l'avis de vérification de comptabilité ; que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la société était recevable à contester le précompte ; qu'il y a eu erreur sur le redevable de l'impôt sur les sociétés et du précompte, seule la société-mère du groupe intégré fiscalement auquel appartient la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE pouvant être désignée comme redevable de ces impôts ; que le rapport de l'administration à la Commission départementale des impôts contient des mensonges et des erreurs ; que l'avis rendu par la commission est donc irrégulier ;

- que la comptabilité tenue par l'entreprise n'est pas irrégulière ; que la rupture des numéros de tickets Z s'explique par les remises à zéro de la caisse bis tandis que la rupture des numéros d'encaissement client s'explique par des ouvertures du tiroir caisse qui génère un numéro d'encaissement client sans qu'aucune recette ne soit réalisée ; que les ruptures de numéros d'encaissement client constatées par le vérificateur résultent des défectuosités de la carte logique et de l'imprimante de la caisse, d'une utilisation non conforme aux prescriptions du constructeur, la caisse étant débranchée au-delà de 24 heures et n'étant pas mise en charge pendant 24 à 48 heures avant toute nouvelle utilisation, et de l'ancienneté de la machine ; qu'un rapprochement des ventes au détail avec ses achats et ses stocks demeure possible ; que l'examen des justificatifs de son chiffre d'affaires de ventes en gros et demi-gros pourrait y suppléer ; que le service des impôts doit prouver que les paiements traçables enregistrés sur la caisse bis pour les périodes au cours desquelles aucun ticket Z n'a été produit ont été ensuite enregistrés sur la caisse principale en contrepartie d'espèces, ou que les recettes correspondant aux numéros d'encaissement clients manquants ont été enregistrées sur des comptes bancaires au nom de la société ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré les 7 et 8 mars 2007, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir que la procédure suivie est régulière ; que l'avis de vérification de comptabilité a été reçu en temps utile par la société ; que ses mentions n'étaient pas ambigües et couvraient bien tant l'impôt sur les sociétés que la taxe sur la valeur ajoutée de l'ensemble de la période vérifiée ; que l'exigence de débat oral et contradictoire a été respectée ; que la procédure suivie relative au précompte a été régulière ; qu'il n'y a pas eu d'erreur sur la personne redevable de l'impôt sur les sociétés et du précompte, la société n'établissant pas avoir opté pour l'intégration fiscale ; que l'avis de la commission départementale des impôts n'a pu être entaché par des erreurs commises dans le rapport de l'administration, à cette commission ; qu'il n'y a pas eu d'erreur dans les indications fournies à la commission ; qu'au cours des exercices et périodes vérifiées, la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE utilisait deux caisses enregistreuses dont une principale et une autre servant d'appoint aux heures de pointe ; que ces deux caisses n'étaient pas reliées entre elles et que seule la caisse principale fonctionnait en permanence ; que les rouleaux de caisse présentés au vérificateur ne précisaient pour aucune des caisses le mode de règlement client ; qu'aucune anomalie n'a été constatée pour la caisse principale alors que l'examen des tickets récapitulatifs Z de la seconde caisse, dite caisse bis , a montré de nombreuses ruptures dans la chronologie et la numérotation des tickets intervenant de manière quasi-systématique, et également des ruptures totalement aléatoires dans la continuité des numéros d'encaissement clients excluant toute erreur de manipulation, dès lors qu'une suite régulière desdits numéros entre deux rouleaux de caisse successifs était parfois observée ; que le vérificateur a relevé l'absence de désignation des articles ou familles d'articles vendus par les rouleaux de caisse empêchant ainsi de rapprocher les ventes des achats et des stocks de la société requérante ; que ces éléments permettaient d'écarter comme non probante la comptabilité tenue par la société ; que le vérificateur a reconstitué le chiffre d'affaires de la société en ajoutant aux recettes déclarées les recettes estimées omises, déterminées, après dépouillement exhaustif des tickets de caisse, en multipliant le nombre de numéros d'enregistrements manquants par le montant moyen des achats des clients constaté à la lecture des bandes de caisse présentées ; que, conformément à l'avis de la commission départementale des impôts, les chiffres de recettes ainsi obtenus ont été réduits par application d'une réfaction de 60 % pour tenir compte des seuls achats clients en espèces ; que les rehaussements ont encore subi une diminution de 12 % destinée à prendre en compte les dysfonctionnements techniques de la caisse bis ; que cette reconstitution n'est pas excessive ; que la société n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, que les chiffres d'affaires et les résultats que lui a assignés en définitive le service des impôts sont exagérés ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 25 avril 2007, présenté pour la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE, tendant aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens, et qui fait en outre valoir que la comparaison des marges qu'elle réalise avec les marges obtenues par des entreprises similaires implantées, comme elle, dans les Halles de Lyon, ne font pas ressortir d'anomalies et que les marges relevées après rehaussements sont irréalistes ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 septembre 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui conclut comme précédemment au rejet de la requête, par les mêmes moyens, et en soulignant en outre que le taux de marge de la société vérifiée après contrôle reste très proche de celui constaté avant les rehaussements, et que les autre entreprises choisies comme termes de comparaison par la société requérante ne vendent pas exactement les mêmes produits et que la part relative des ventes en gros et demi-gros qu'elles réalisent n'est pas connue ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 30 septembre 2009, présenté pour la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE, tendant aux mêmes fins que la requête et le précédent mémoire en réplique, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 octobre 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut à ce que soit prononcé un non-lieu à hauteur des sommes, en droits et pénalités, de 95 438 euros en matière d'impôt sur les sociétés, de 7 156 euros en matière de contribution additionnelle de 10 % et de 5 025 euros en matière de précompte, et, pour le surplus, comme précédemment, au rejet de la requête, par les mêmes moyens ;

Il fait valoir qu'il est fait droit au moyen de la requête relatif à l'erreur commise sur la personne du redevable légal de l'impôt sur les sociétés et du précompte et que les dégrèvements correspondants ont été prononcés à hauteur des montants indiqués ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 1er décembre 2009, présenté pour la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE, prenant acte des dégrèvements prononcés, et, pour le surplus, tendant aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 décembre 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut, comme précédemment, à ce que soit prononcé un non-lieu à hauteur des sommes, en droits et pénalités, de 95 438 euros en matière d'impôt sur les sociétés, de 7 156 euros en matière de contribution additionnelle de 10 % et de 5 025 euros en matière de précompte, et, pour le surplus, au rejet de la requête, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 décembre 2009 :

- le rapport de M. Bernault, président ;

- et les conclusions de M. Raisson, rapporteur public ;

Considérant que la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE, qui réalise pour moitié de son chiffre d'affaires des ventes en demi-gros à des professionnels et pour moitié des ventes au détail dans un magasin situé aux Halles de Lyon (69003), a fait l'objet d'une vérification de comptabilité visant l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos les 28 février 1997, 1998 et 1999, le précompte dû au titre des années 1997 et 1998 et les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée de la période du 1er mars 1998 au 31 janvier 2000 ; qu'après rejet de la comptabilité présentée, le vérificateur a reconstitué le chiffre d'affaires de l'entreprise ; que les redressements correspondants, atténués suivant l'avis émis par la commission départementale des impôts, ont donné lieu à des suppléments d'impôt sur les sociétés (années 1997, 1998 et 1999) et de contribution additionnelle mis en recouvrement le 31 décembre 2002, et à un précompte (années 1997 et 1998) recouvré par deux avis de mise en recouvrement du 15 octobre 2002, ainsi qu'à un rappel de taxe sur la valeur ajoutée (période du 1er mars 1998 au 31 janvier 2000) authentifié par un avis de mise en recouvrement du 15 octobre 2002 ; que ces impositions ont été assorties de la majoration pour mauvaise foi ; qu'en outre la société s'est vue appliquer la pénalité prévue par l'article 1763 A du code général des impôts ; que, l'administration des impôts n'ayant pas statué dans le délai de six mois sur la réclamation élevée contre ces impositions et pénalités par l'entreprise, celle-ci a saisi le Tribunal administratif de Lyon de deux requêtes visant ces rappels et pénalités ; qu'elle fait appel du jugement du 6 juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lyon, après l'avoir, par l'article 1 de son dispositif, déchargée de la pénalité de l'article L. 1763 A du code général des impôts, a rejeté le surplus de ses demandes ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par des décisions postérieures à l'introduction de l'appel, l'administration des impôts a prononcé, sur les impositions restant en litige, des dégrèvements s'élevant, en droits et pénalités, aux sommes de 95 438 euros en matière d'impôt sur les sociétés, de 7 156 euros en matière de contribution additionnelle de 10 % et de 5 025 euros en matière de précompte ; qu'à hauteur de ces montants, la requête de la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE a perdu son objet ; que seuls désormais restent en litige les droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée mis au nom de cette société au titre de la période du 1er mars 1996 au 31 janvier 2000 ;

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis au nom de la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE :

Sur la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. (...) ; qu'un représentant de la société a signé l'accusé de réception de l'avis de vérification de comptabilité adressé sous pli recommandé à l'entreprise le 9 mars 2000 ; que cet accusé de réception a été retourné au service des impôts par La Poste le 14 mars 2000 ; qu'ainsi la société doit être réputée avoir disposé d'un délai suffisant entre la réception de cet avis et le début des opérations sur place, qui n'ont commencé que le 21 mars suivant ; que l'absence de datation de la signature de l'accusé de réception, en méconnaissance de la réglementation postale applicable, demeure sans incidence sur la régularité de la procédure fiscale ;

Considérant, en deuxième lieu, que la société fait valoir que les indications, figurant dans l'avis de vérification de comptabilité du 9 mars 2000, donnaient à penser qu'en matière de taxe sur la valeur ajoutée, seule la période sur 1er mars 1998 au 31 janvier 2000, qui était mentionnée précisément, ferait l'objet du contrôle, et qu'en conséquence le contrôle de taxe sur la valeur ajoutée portant sur la période du 1er mars 1996 au 28 février 1998 est irrégulier au regard tant de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales qu'au regard de la charte du contribuable vérifié, rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du même livre ; que, cependant, les mentions portées sur l'avis faisaient état de la vérification de l'ensemble des impôts de la période en cause, sans en exclure la taxe sur la valeur ajoutée ; que le moyen manque donc en fait ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'après avoir adressé, le 9 mars 2000, à la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE un premier avis de vérification de sa comptabilité portant sur l'ensemble des déclarations fiscales et opérations susceptibles d'être examinées et portant sur la période du 01/03/1996 au 28/02/1998 et les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée de la période du 1er mars 1998 au 31 janvier 2000 , le vérificateur a, le 21 mars 2000, jour de la première opération sur place de la vérification annoncée par le premier avis, remis au responsable de la société rencontré sur place un second avis de vérification portant sur l'ensemble des déclarations fiscales et opérations susceptibles d'être examinées et portant sur la période du 1/03/1998 au 28/02/1999 ; que la société requérante soutient qu'en réalité la vérification de comptabilité de l'impôt sur les sociétés de cette période a commencé le 21 mars 2000, c'est-à-dire le jour même de la remise de l'avis de vérification, et qu'ainsi elle a été privée de tout délai entre la remise de l'avis et le début des opérations concernant cette période ;

Considérant que, contrairement à ce qu'estime le ministre, et comme l'indiquait le vérificateur dans sa réponse aux observations du 22 décembre 2000, il ne ressort pas de l'instruction que le contrôle n'ait pas porté indistinctement, dès le 21 mars 2000 sur les éléments communs à l'impôt sur les sociétés et à la taxe sur la valeur ajoutée, les deux vérifications s'avérant en l'espèce indissociables ; que, toutefois, il résulte des indications fournies par la société dans ses observations formulées le 14 décembre 2000 sur les rehaussements que le contrôle de l'impôt sur les sociétés ne l'a pas amenée à présenter au vérificateur d'autres documents comptables que ceux déjà fournis pour le contrôle de la taxe sur la valeur ajoutée, dont elle avait été avisée le 9 mars 2000 ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, l'extension de vérification de comptabilité annoncée par l'avis, d'ailleurs à une date très proche du début des opérations sur place, qui se sont étalées du 21 mars au 19 octobre 2000, n'a eu aucune incidence procédurale et n'a pu, en particulier, la priver de la possibilité de se faire assister d'un conseil, ou de réunir ou finaliser des documents ou des justifications ; qu'elle n'allègue d'ailleurs pas n'avoir pu de ce fait présenter des documents ou fournir au vérificateur des explications ou justifications utiles, ni que ces circonstances l'auraient soumise à des contraintes particulières ; qu'ainsi elle n'a pas été privée d'une garantie substantielle assurée par le livre des procédures fiscales ou par la charte du contribuable vérifié ; que le moyen doit donc être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, que la société requérante soutient avoir été privée du débat oral et contradictoire auquel doit donner lieu toute vérification de comptabilité en raison de la confusion des deux procédures relatives à l'impôt sur les sociétés et à la taxe sur la valeur ajoutée, qui entraînerait l'impossibilité de contrôler, pour chacune d'elle, le nombre des visites sur place et donc de s'assurer que chaque procédure a bien comporté un dialogue suffisant ; que ce moyen, purement conjectural, doit être écarté dès lors que le contrôle a eu lieu au siège de la société, qu'il est constant qu'il a donné lieu à plusieurs visites sur place, et que la preuve de l'absence d'un débat suffisant pour chacun des impôts concernés n'est pas apportée par la société, alors que les contrôles des diverses impositions en cause étaient étroitement liés ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la notification prévue à l'article L. 57, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces redressements. Lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de rectification contradictoire l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai (...) ; qu'aux termes de l'article L. 57 du même livre : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ;

Considérant, d'une part, que si la notification de redressement en date du 23 octobre 2000 n'indique pas explicitement sur sa première page que les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée du 1er mars 1996 au 28 février 1998 avaient été contrôlées, elle fait apparaître en page 2 parmi les redressements envisagés, la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er mars 1996 au 31 janvier 2000 ; que, par ailleurs, la seconde notification de redressement adressée à la société le 28 octobre 2001 n'a pas d'autre objet que de motiver l'application des pénalités de mauvaise foi, en lieu et place des pénalités pour manoeuvres frauduleuses notifiées précédemment, aux redressements finalement maintenus par le service et, en second lieu, de motiver l'application de l'amende prévue à l'article 1763 A du code général des impôts ; que, par conséquent, cette seconde notification n'avait pas à préciser les redressements maintenus dont ceux afférents à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er mars 1996 au 28 février 1998 ; qu'il en résulte que le moyen tiré du défaut de motivation des notifications de redressement manque en fait ;

Considérant, d'autre part, que la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir à l'appui de moyens relatifs à la procédure d'imposition, d'instructions, notes, prises de position ou écrits invoqués sur le fondement des dispositions des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en troisième part, que la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE soutient que l'intégralité des motifs retenus par le service pour procéder aux redressements en litige seraient infondés et que, par conséquent, les notifications de redressement en faisant état seraient insuffisamment motivées ; que, toutefois, une notification de redressement est suffisamment motivée lorsqu'elle indique l'impôt concerné, l'année, les bases et les motifs du redressement, peu importe que ces motifs soient pertinents voire même erronés dès lors qu'ils sont suffisamment précis pour mettre à même le contribuable de les discuter, ce qui est le cas en l'espèce ; que le moyen doit donc être rejeté ;

Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article L. 60 du livre des procédures fiscales : Le rapport par lequel l'administration des impôts soumet le différend qui l'oppose au contribuable à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, ainsi que tous les autres documents dont l'administration fait état pour appuyer sa thèse, doivent être tenus à la disposition du contribuable intéressé (...) ; qu'aux termes de l'article R. 60-3 du même livre : L'avis ou la décision de la commission départementale doit être motivé. Il est notifié au contribuable par l'administration des impôts. ; que la société requérante soutient que l'avis rendu par la commission départementale des impôts serait irrégulier, dès lors que le rapport de l'administration transmis à la Commission départementale des impôts aurait indiqué que les deux caisses enregistreuses de la société étaient identiques, ce qui est erroné ; que, si effectivement, les deux caisses enregistreuses vérifiées par la société ne sont pas identiques et que le rapport de l'administration a indiqué par erreur le contraire, il résulte de l'instruction et notamment du mémoire en défense produit par la société devant la commission départementale des impôts que les explications qu'elle souhaitait donner sur ce point ont pu être portées à la connaissance de la commission ; que la circonstance que la commission aurait commis des erreurs dans les appréciations qu'elle a portées sur le fonctionnement de l'enregistrement des caisses et sur l'état de la comptabilité demeure sans incidence sur la régularité de l'avis émis, et, par conséquent sur celle de la procédure de redressement ; que, par conséquent, le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Sur la charge de la preuve :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : (...) La charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge. ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction qu'au cours des exercices et périodes vérifiées, la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE utilisait deux caisses enregistreuses dont une principale et une autre servant d'appoint aux heures de pointe ; que ces deux caisses n'étaient pas reliées entre elles et que seule la caisse principale fonctionnait en permanence ; que les rouleaux de caisse présentés au vérificateur ne précisaient pour aucune des caisses le mode de règlement client ; qu'aucune anomalie n'a été constatée pour la caisse principale alors que l'examen des tickets récapitulatifs Z de la seconde caisse, dite caisse bis , a montré de nombreuses ruptures dans la chronologie et la numérotation des tickets intervenant de manière quasi-systématique, et également des ruptures totalement aléatoires dans la continuité des numéros d'encaissement clients excluant toute erreur de manipulation, dès lors qu'une suite régulière desdits numéros entre deux rouleaux de caisse successifs était parfois observée ; que le vérificateur a relevé l'absence de désignation des articles ou familles d'articles vendus par les rouleaux de caisse empêchant ainsi de rapprocher les ventes des achats et des stocks de la société requérante ; que si la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE soutient que la rupture des numéros de tickets Z s'expliquerait par les remises à zéro de la caisse bis tandis que la rupture des numéros d'encaissement client s'expliquerait par des ouvertures du tiroir caisse qui génèreraient un numéro d'encaissement client sans qu'aucune recette ne soit réalisée, ces allégations ne sont pas établies ; que la société requérante soutient, par ailleurs, que les ruptures de numéros d'encaissement client constatées par le vérificateur résulteraient des défectuosités de la carte logique et de l'imprimante de la caisse, d'une utilisation non conforme aux prescriptions du constructeur, la caisse étant débranchée au-delà de 24 heures et n'étant pas mise en charge pendant 24 à 48 heures avant toute nouvelle utilisation, et de l'ancienneté de la machine ; que, toutefois, ces éléments, à eux seuls, ne sauraient justifier les ruptures de numérotations constatées, alors qu'il incombe à l'entreprise d'utiliser correctement son matériel ; qu'il ne résulte pas de l'instruction, comme le soutient à tort la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE, qu'elle serait capable de justifier du détail de ses recettes et de leur mode de règlement par recoupement entre la bande de contrôle de la caisse bis et les tickets Z ; qu'elle n'établit pas non plus qu'un rapprochement des ventes au détail avec ses achats et ses stocks soit possible , ni que l'examen des justificatifs de son chiffre d'affaires de ventes en gros et demi-gros pourrait y suppléer ; qu'ainsi les erreurs et anomalies constatées étaient de nature, à elles seules, à enlever tout caractère probant à la comptabilité de la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE et autorisaient, en conséquence, le service des impôts à procéder à une reconstitution des recettes et des résultats, sans que le service des impôts ait à prouver que les paiements traçables enregistrés sur la caisse bis pour les périodes au cours desquelles aucun ticket Z n'a été produit auraient été ensuite enregistrés sur la caisse principale en contrepartie d'espèces, ou que les recettes correspondant aux numéros d'encaissement clients manquants auraient été enregistrées sur des comptes bancaires au nom de la société ;

Considérant, d'autre part, que les bases des impositions litigieuses ont été établies conformément à l'avis de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'il appartient donc à la société requérante de démontrer leur exagération ;

Sur le caractère exagéré de la reconstitution :

Considérant que le vérificateur a reconstitué le chiffre d'affaires de la société en ajoutant aux recettes déclarées les recettes estimées omises, déterminées, après dépouillement exhaustif des tickets de caisse, en multipliant le nombre de numéros d'enregistrements manquants par le montant moyen des achats des clients constaté à la lecture des bandes de caisse présentées ; que, conformément à l'avis de la commission départementale des impôts, les chiffres de recettes ainsi obtenus ont été réduits par application d'une réfaction de 60 % pour tenir compte des seuls achats clients en espèces ; que les rehaussements ont encore subi une diminution de 12 % destinée à prendre en compte les dysfonctionnements techniques de la caisse bis ;

Considérant, en premier lieu, que les taux de 54, 56 et 61 %, de marge de vente au détail recalculés par la société après rehaussements pour les exercices 1996-1997, 1997-1998 et 1998-1999, à les supposer exacts, ne sont pas manifestement excessifs par rapport aux taux dégagés au titre des mêmes exercices par la comptabilité de l'entreprise (51, 52, 56 %), et ne démontrent pas que le service des impôts aurait en définitive retenu des bases exagérée ;

Considérant, en second lieu, que la société fait état de la comparaison des taux de marge brute résultant des redressements pour les trois exercices en cause (42, 41 et 46 %) avec ceux de deux entreprises concurrentes opérant dans les mêmes Halles de Lyon, qui dégagent des marges de 26, 26 et 32 % , pour l'une, et de 32 % (exercice 1996-1997) et 31,90 % (exercice 1997-1998) pour l'autre ; que toutefois, comme l'indique le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, il s'agit d'entreprises vendant des produits différents (charcuterie lyonnaise et italienne) et dont le pourcentage de ventes en gros et demi-gros n'est pas connu ; que les termes de comparaison proposés par l'entreprise ne sont donc pas pertinents ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes relatives aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge, et aux pénalités y afférentes ;

Sur les conclusions de la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE tendant à ce qu'il soit fait application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions susvisées et de mettre à la charge de l'Etat au profit de la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE la somme de 1 500 euros ;

DECIDE :

Article 1er : A hauteur des sommes de 95 438 euros en matière d'impôt sur les sociétés et de 7 156 euros en matière de contribution additionnelle de 10 % (années 1997, 1998 et1999) et à hauteur de 5 025 euros en matière de précompte (période du 1er mars 1996 au 31 janvier 2000), il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE.

Article 2 : L'Etat paiera à la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SA GAST CHARCUTERIE ALSACIENNE et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2009, à laquelle siégeaient :

M. Bernault, président de chambre,

M. Montsec, président-assesseur,

Mme Besson-Ledey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 décembre 2009.

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N° 06LY01658


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06LY01658
Date de la décision : 17/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: M. François BERNAULT
Rapporteur public ?: M. RAISSON
Avocat(s) : HOIN

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-12-17;06ly01658 ?
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