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29/06/1994 | FRANCE | N°92LY01571

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4e chambre, 29 juin 1994, 92LY01571


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 18 décembre 1992, présentée pour la société Traitement et Revalorisation des Déchets Industriels (TREDI) dont le siège est situé ..., 95 Osny par Me X..., avocat ;
La société TREDI demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 14 octobre 1992 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer une somme de 312 426,80 francs assortie des intérêts légaux en règlement d'une créance contractuelle ;
2°) de prononcer la condamnation de l'Etat au pa

iement de la somme réclamée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n°7...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 18 décembre 1992, présentée pour la société Traitement et Revalorisation des Déchets Industriels (TREDI) dont le siège est situé ..., 95 Osny par Me X..., avocat ;
La société TREDI demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 14 octobre 1992 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer une somme de 312 426,80 francs assortie des intérêts légaux en règlement d'une créance contractuelle ;
2°) de prononcer la condamnation de l'Etat au paiement de la somme réclamée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n°75-633 du 15 juillet 1975 ;
Vu les articles 16 et 91 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 juin 1994 :
- le rapport de M. COURTIAL, conseiller ;
- les observations de Me CHENEAU substituant Me BRIARD, avocat de la société traitement et revalorisation des déchets industriels (TREDI) et de Me DELAY substituant Me GRANJON, avocat de la SCI PARIS-LYON-COTE D'AZUR ;
- et les conclusions de M. BONNAUD, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué et de l'ensemble du dossier de première instance que le tribunal administratif a suffisamment répondu à l'argumentation de la société TREDI relative aux conditions dans lesquelles il a été fait appel à ses services en août 1985 pour enlever des matières souillées par des polychlorobiphényles (PCB ou pyralène) à Vienne (Isère) ; que dans l'hypothèse où les premiers juges auraient commis, comme le soutient la société requérante, une erreur d'appréciation sur le rôle du sous-préfet de Vienne susceptible d'affecter la validité de la motivation du jugement dont le contrôle est opéré par l'effet dévolutif de l'appel, cette erreur resterait, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité du jugement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier du compte-rendu de la réunion qui a été tenue le 9 août 1985 en sous-préfecture de Vienne, que lors de la manutention le 6 août 1985, par un récupérateur de matériaux, d'un transformateur qui se trouvait dans des bâtiments appartenant à la société civile immobilière Paris-Lyon-Côte-d'Azur et qui contenait des PCB (pyralène), une centaine de litres de ce produit ont été accidentellement répandus sur le sol ; que le 9 août 1985 le sous-préfet de Vienne a demandé, par téléphone, à la société TREDI, entreprise qualifiée et agréée en ce domaine, de procéder dans les meilleurs délais à l'enlèvement de la terre et des matériaux souillés par le pyralène et à leur incinération ;
Considérant que la société TREDI fait valoir que le sous-préfet de Vienne, agissant en qualité d'autorité de police dans le cadre des dispositions de l'article 3 de la loi du 15 juillet 1975 relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux, a passé avec elle un contrat verbal de prestation de services et demande la condamnation de l'Etat au paiement du montant non contesté du coût des prestations effectuées dont elle n'a pu obtenir le paiement ;
Considérant qu'aux termes des articles 2 et 3 de la loi susvisée du 15 juillet 1975, dans leur rédaction alors applicable : "Art.2 - Toute personne qui produit ou détient des déchets, dans des conditions de nature à produire des effets nocifs sur le sol, la flore et la faune, à dégrader les sites ou les paysages, à polluer l'air ou les eaux, à engendrer des bruits et des odeurs et d'une façon générale à porter atteinte à la santé de l'homme et à l'environnement, est tenue d'en assurer ou d'en faire assurer l'élimination conformément aux dispositions de la présente loi, dans des conditions propres à éviter lesdits effets. L'élimination des déchets comporte les opérations de collecte, transport, stockage, tri et traitement nécessaires à la récupération des éléments et matériaux réutilisables ou de l'énergie ... Art. 3 - Au cas où des déchets sont abandonnés ... contrairement aux prescriptions de la présente loi et des règlements pris pour son application, l'autorité titulaire du pouvoir de police peut, après mise en demeure, assurer d'office l'élimination desdits déchets aux frais du responsable" ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le sous-préfet de Vienne est intervenu téléphoniquement à l'issue de la réunion susmentionnée qui s'est tenue le 9 août 1985 pour demander à la société TREDI de procéder à l'enlèvement des déchets toxiques ; qu'il n'est pas allégué que la société TREDI aurait été sollicitée antérieurement à cet appel téléphonique ou même postérieurement, mais avant l'exécution de la prestation, par la société civile immobilière Paris-Lyon-Côte-d'Azur ; que, dans ces conditions, nonobstant les circonstances que la société civile immobilière ait finalement versé une somme de 100 000 francs à la société TREDI et que son représentant ait admis lors de la réunion en sous-préfecture que la charge des frais d'enlèvement et de nettoyage lui incomberait, il doit être regardé comme établi que le sous-préfet de Vienne avait entrepris de faire assurer d'urgence et d'office l'élimination des déchets aux frais du responsable en vertu des dispositions légales précitées et avait passé à cet effet commande verbale de la prestation correspondante auprès de la société TREDI ; que cette dernière est fondée, dès lors, à obtenir la condamnation de l'Etat au paiement de la somme de 312 426,80 francs qu'elle réclame en paiement du solde de la prestation effectuée, assorti des intérêts légaux à compter du 7 décembre 1984, date à laquelle elle a saisi le préfet de l'Isère d'une réclamation, et à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation d'une somme au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser 4 000 francs au titre des dispositions susvisées ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 14 octobre 1992 est annulé.
Article 2 : L'Etat (ministère de l'environnement) est condamné à payer à la société TREDI une somme de trois cent douze mille quatre vingt six francs quatre vingt centimes (312 426, 80 francs). Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 7 décembre 1989.
Article 3 : L'Etat (ministère de l'environnement) est condamné à payer à la société TREDI une somme de quatre mille francs (4 000 francs) au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4e chambre
Numéro d'arrêt : 92LY01571
Date de la décision : 29/06/1994
Sens de l'arrêt : Annulation condamnation de l'état
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - NOTION DE CONTRAT ADMINISTRATIF - EXISTENCE OU ABSENCE D'UN CONTRAT - EXISTENCE - Contrat verbal - Demande téléphonique d'un sous-préfet à une entreprise spécialisée de procéder à l'enlèvement et à l'élimination de déchets toxiques.

39-01-01-01, 44-05, 49-05-02 Un sous-préfet ayant téléphoniquement demandé à une entreprise spécialisée de procéder à l'enlèvement et à l'élimination de déchets toxiques rentrant dans le champ d'application de l'article 2 de la loi du 15 juillet 1975 doit être regardé comme ayant passé, pour le compte de l'Etat avec cette société, un contrat verbal en vertu des dispositions de l'article 3 de cette loi prévoyant la substitution de l'autorité de police au producteur ou au détenteur des déchets en cas de carence de celui-ci. Par suite, et nonobstant les dispositions de cet article 3 qui prévoient que l'élimination d'office des déchets abandonnés est assurée aux frais du responsable, l'entreprise chargée de cette élimination a droit au paiement par l'Etat du montant des frais entraînés par celle-ci.

NATURE ET ENVIRONNEMENT - AUTRES MESURES PROTECTRICES DE L'ENVIRONNEMENT - Elimination des déchets (loi n° 75-633 du 15 juillet 1975) - Demande téléphonique d'un sous-préfet à une entreprise spécialisée de procéder à l'enlèvement et à l'élimination de déchets - Contrat verbal.

POLICE ADMINISTRATIVE - POLICES SPECIALES - POLICE SANITAIRE - Elimination des déchets toxiques - Pouvoir de substitution de l'autorité de police en cas de carence du producteur ou du détenteur (art - 2 et 3 de la loi du 15 juillet 1975) - Elimination demandée téléphoniquement par cette autorité à une entreprise spécialisée - Contrat verbal.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Loi 75-633 du 15 juillet 1975 art. 3, art. 2


Composition du Tribunal
Président : M. Megier
Rapporteur ?: M. Courtial
Rapporteur public ?: M. Bonnaud

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1994-06-29;92ly01571 ?
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