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02/12/1992 | FRANCE | N°92LY00536

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4e chambre, 02 décembre 1992, 92LY00536


Vu le recours du ministre du budget, enregistré au greffe de la cour le 27 mai 1992 ; le ministre demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 23 décembre 1991 par lequel le tribunal administratif de Nice a accordé à la société à responsabilité limitée Sitting-Bull la réduction du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1980 au 31 décembre 1983 par avis de recouvrement du 26 novembre 1985 ;
2°) de remettre intégralement l'imposition contestée à la charge de la société Sitting-Bull ;
Vu l

es autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des ...

Vu le recours du ministre du budget, enregistré au greffe de la cour le 27 mai 1992 ; le ministre demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 23 décembre 1991 par lequel le tribunal administratif de Nice a accordé à la société à responsabilité limitée Sitting-Bull la réduction du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1980 au 31 décembre 1983 par avis de recouvrement du 26 novembre 1985 ;
2°) de remettre intégralement l'imposition contestée à la charge de la société Sitting-Bull ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 novembre 1992 :
- le rapport de M. COURTIAL, conseiller ;
- et les conclusions de M. BONNAUD, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que pour justifier du montant des recettes enregistrées par sa comptabilité des années 1980 à 1983, la société Sitting-Bull, qui exploitait à cette époque plusieurs magasins de vente de vêtements et d'articles de confection, n'a été en mesure de présenter qu'un brouillard de caisse ne comportant la désignation des articles vendus que par grandes catégories telles que : "vestes", "pantalons" ou "chemises", sans aucune autre référence ; qu'eu égard à la nature du commerce concerné et aux caractéristiques des articles vendus cette lacune faisait obstacle à la vérification de la concordance des ventes avec les achats comptabilisés ; que, pour ce seul motif, l'administration était en droit de recourir à la procédure de rectification d'office ; que, dès lors, c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur l'irrégularité constituée par le recours à cette procédure d'imposition pour prononcer la réduction des compléments de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la société ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société tant devant la cour que devant le tribunal administratif ;
Considérant que la procédure de rectification d'office alors en vigueur ne comportait pas l'obligation, pour l'administration, de mettre le contribuable en mesure de formuler ses observations au sujet des redressements notifiés ou de faire connaître son acceptation mais seulement de porter à sa connaissance trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions les bases ou les éléments de calcul de celles-ci en précisant les modalités de leur détermination ; que, par suite, la circonstance que le vérificateur ait remis en mains propres au gérant de la société la notification de redressements et ait aussitôt recueilli son acceptation sans lui laisser le temps de réfléchir n'est, en tout état de cause, pas susceptible d'entacher la procédure d'irrégularité ;
Sur le bien fondé des impositions :
Considérant que le contribuable imposé d'office auquel incombe la charge de la preuve peut, s'il n'est pas en mesure d'établir le montant exact de son chiffre d'affaires en s'appuyant sur une comptabilité probante, soit critiquer la méthode d'évaluation que l'administration a suivie en vue de démontrer que cette méthode aboutit à une exagération des bases d'imposition, soit soumettre à l'appréciation du juge de l'impôt une nouvelle méthode d'évaluation permettant de déterminer les bases d'imposition avec une précision meilleure que celle qui pouvait être atteinte par la méthode primitivement utilisée par l'administration ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que pour reconstituer les recettes le vérificateur a effectué un relevé des prix de 57 articles dans les deux magasins, dont 9 articles présents dans l'un et l'autre, que la société exploitait à Saint-Raphaël et Cannes en octobre 1984, à l'époque à laquelle le contrôle a eu lieu ; qu'il a rapproché les prix de vente toutes taxes comprises des prix d'achats hors taxes nets figurant sur les factures et obtenu ainsi un coefficient moyen de marge brute de 2,10 ; que pour l'évaluation des chiffres d'affaires taxables ledit coefficient, ramené à 2 pour 1980, 1981 et 1982 et 2,06 pour 1983, a été appliqué aux achats enregistrés par la comptabilité ; qu'un taux de démarque de 30 % a été admis pour tenir compte des soldes pratiqués ; qu'enfin les rétrocessions et ventes aux soldeurs étrangers ont été retenues conformément aux indications de la société ; que pour critiquer cette méthode ladite société soutient que, d'une part, le choix de l'échantillon, qui n'était pas selon elle véritablement représentatif de l'ensemble des opérations réalisées, conduit à une surestimation de la rentabilité de l'entreprise et que, d'autre part, il n'a pas été tenu compte, notamment au niveau des soldes, des difficultés commerciales éprouvées par l'entreprise de 1980 à 1982 et que traduisent la fermeture de trois magasins secondaires et surtout la modification de la politique d'achats ;
Considérant que si toute reconstitution théorique comporte une part inévitable d'approximation, la société Sitting-Bull ne démontre pas, en s'appuyant sur des éléments suffisamment précis et probants, que la constitution d'un échantillon plus représentatif des ventes réalisées au cours de la période vérifiée aurait permis d'obtenir un ou des coefficients inférieurs à ceux retenus en définitive par l'administration ; que la société ne démontre pas davantage que l'évolution de la politique d'achats, qui s'est traduite par une augmentation, admise par l'administration, des produits soldés en 1981 et 1982, a conduit à des réductions de prix de vente supérieures, en moyenne, au taux de 30 % susmentionné ; qu'enfin la société ne propose pas de méthode d'évaluation permettant de déterminer avec une précision meilleure que celle de l'administration les bases d'imposition ;
Sur les pénalités :
Considérant que les insuffisances de la comptabilité de la société Sitting-Bull et l'existence de minorations de recettes ne suffisent pas, dans les circonstances de l'espèce, à établir la mauvaise foi de l'intéressée pour l'application de l'article 1731 du code général des impôts ; qu'il convient, dès lors et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens relatifs aux pénalités, de substituer à celles-ci dans la limite de leur montant, les indemnités de retard prévues à l'article 1727 ;
Sur les conclusions de la société Sitting-Bull tendant au remboursement des frais non compris dans les dépens :
Considérant que le bien fondé de ces conclusions doit être apprécié au regard des dispositions applicables à la date du présent arrêt ;

Considérant qu'aux termes de l'article L 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que l'Etat n'est pas une partie perdante dans la présente instance ; que, dès lors, les conclusions de la société Sitting-Bull tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme au titre des frais irrépétibles ne peuvent qu'être rejetées ;
Article 1er : Les droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée auquel la société Sitting-Bull a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1980 au 31 décembre 1983 sont intégralement remis à sa charge.
Article 2 : Les indemnités de retard sont substituées, dans la limite du montant desdites pénalités, aux pénalités qui avaient été appliquées aux droits remis à la charge de la société Sitting-Bull.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 23 décembre 1991 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions du recours du ministre et les conclusions de la société Sitting-Bull sont rejetés.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4e chambre
Numéro d'arrêt : 92LY00536
Date de la décision : 02/12/1992
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - CONTROLE FISCAL.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - PROCEDURE DE TAXATION - TAXATION - EVALUATION OU RECTIFICATION D'OFFICE.


Références :

CGI 1731, 1727
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. COURTIAL
Rapporteur public ?: M. BONNAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1992-12-02;92ly00536 ?
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