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14/03/1991 | FRANCE | N°89LY00584

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Pleniere, 14 mars 1991, 89LY00584


Vu la décision en date du 2 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 20 janvier 1989, par laquelle le président de la 8ème sous-section de la section du Conseil d'Etat a transmis à la cour, par application des dispositions de l'article 18 du décret n° 88-906, la requête présentée par M. Paul ORCEL demeurant à MEGEVE (Haute-Savoie) ;
Vu la requête, enregistrée le 1er juin 1988 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat présentée par M. ORCEL ;
M. ORCEL demande :
1°) que soit annulé le jugement en date du 17 mars 1988 par lequel le tribun

al administratif de Grenoble a rejeté sa demande en décharge des cotisatio...

Vu la décision en date du 2 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 20 janvier 1989, par laquelle le président de la 8ème sous-section de la section du Conseil d'Etat a transmis à la cour, par application des dispositions de l'article 18 du décret n° 88-906, la requête présentée par M. Paul ORCEL demeurant à MEGEVE (Haute-Savoie) ;
Vu la requête, enregistrée le 1er juin 1988 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat présentée par M. ORCEL ;
M. ORCEL demande :
1°) que soit annulé le jugement en date du 17 mars 1988 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1976, 1977 et 1979 sous les articles numéros 805045 à 805047 du rôle de 1983 ;
2°) qu'il lui soit accordé décharge des impositions contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 22 février 1991 :
- le rapport de M. LANQUETIN, conseiller ;
- et les conclusions de Mme HAELVOET, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que, contrairement à ce que soutient le requérant, le tribunal administratif a suffisamment répondu aux moyens dont il était saisi ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que si l'administration a adressé à M. ORCEL, le 7 octobre 1976, une demande de justifications portant notamment sur l'origine des fonds lui ayant permis d'acquitter, dans le courant de l'année 1976, une somme globale de 175 000 francs en remboursement de prêts qui lui avaient été consentis l'année précédente, cette demande ne procédait pas d'une vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble au titre de l'année 1976 et n'a d'ailleurs pas été suivie d'un redressement au titre de cette année ; que par suite, l'administration n'a pas méconnu les dispositions de l'article 1649 quinquies A 5 du code général des impôts repris à l'article L.50 du livre des procédures fiscales lui interdisant, après un tel contrôle, de procéder à des redressements pour la même période et pour le même impôt, en procédant à des redressements au titre de l'année 1976 à la suite de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble entreprise le 30 septembre 1980 au titre des années 1976 à 1979 ;
Considérant, en second lieu, que l'article 176 du code général des impôts, maintenant repris à l'article L 16 du livre des procédures fiscales ne limite pas au solde d'une balance de trésorerie l'objet des demandes de justifications que l'administration peut adresser au contribuable lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que celui-ci peut avoir des revenus plus importants que ceux qui font l'objet de sa déclaration ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient M. ORCEL, la circonstance que les demandes de justification qui lui ont été adressées le 6 novembre 1980 en ce qui concerne l'année 1976 et les 8 mai et 8 juillet 1981 en ce qui concerne chacune des années 1977 et 1979 portaient sur l'origine de crédits bancaires ou sur des transactions dont le contribuable avait précédemment fait état au vérificateur n'est pas de nature à les entacher d'irrégularité ;

Considérant, en troisième lieu, qu'en ce qui concerne l'année 1976, M. ORCEL, qui exerce l'activité de représentant salarié pour le compte de deux sociétés et assure également les fonctions de gérant non associé et non rémunéré d'une société à responsabilité ayant pour objet le négoce d'oeuvres d'art, n'a, en réponse à la demande de justification qui lui a été adressée le 6 novembre 1980, fourni aucune explication vérifiable sur l'origine des dépôts en espèces d'un montant total de 102 500 francs dont son compte à la société savoisienne de crédit a été crédité ; que, s'agissant de l'origine des fonds qui lui avaient permis de financer le versement de 200 000 francs à la société BIENALP et l'acquisition, à hauteur de 550 000 francs d'actions de la nouvelle société fermière du casino d'Annecy, s'il a fait état, dans sa réponse du 3 décembre 1980 du produit de prêts à hauteur de 400 000 francs et de la vente de pièces d'or et autres objets mobiliers ainsi que du remboursement de bons anonymes, il n'a apporté aucun début de justification de la réalité des prêts non plus que des ventes de tableaux et autres meubles allégués ; qu'ainsi, c'est à bon droit que, dans sa réponse aux observations du contribuable en date du 25 mai 1983 l'administration, après avoir admis, à concurrence de 300 000 francs, les éléments de justification apportés en ce qui concerne les fonds tirés de la vente de pièces d'or, a considéré que, pour le surplus, la réponse de M. ORCEL équivalait à un défaut de réponse ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'en ce qui concerne les années 1977 et 1979, M. ORCEL ayant, en réponse aux demandes de justification de l'origine des sommes dont ses comptes bancaires ont été crédités par remises de chèques ou versements en espèces, qui lui ont été adressées le 8 mai 1981, fait état de ventes d'oeuvres d'art et d'un véhicule, de négociation de bons de caisse et de remboursement de prêts, de nouvelles demandes de justification lui ont été adressées le 8 juillet 1981 portant notamment d'une part sur l'origine du versement en espèces sur ses comptes bancaires, d'autre part sur les dates d'entrée dans son patrimoine, d'un tableau de SIGNAC, d'un tableau de RENOIR et d'un bronze de DAUMIER qu'il avait vendus pendant les années en cause, enfin sur l'origine des fonds ayant permis de financer les apports d'un montant total de 350 000 francs effectués en 1979 à la société civile de SAINT-AMOUR ; que M. ORCEL a produit une attestation établie en 1981 par les enfants de M. X... selon laquelle ce dernier avait vendu en 1964 au requérant un tableau de SIGNAC et un tableau de RENOIR répondant aux mêmes intitulés que ceux vendus par lui respectivement en 1977 et en 1979 ; que compte tenu de cette attestation, la réponse de M. ORCEL ne pouvait, à hauteur du prix de vente de ces tableaux, être assimilée à un défaut de réponse sur l'origine des sommes dont ses comptes bancaires avaient été crédités ; que, dès lors, M. ORCEL est fondé à soutenir que la procédure de taxation d'office de revenus d'origine indéterminée dont il a fait l'objet au titre des années 1977 et 1979 est irrégulière en tant qu'elle a porté sur des sommes de, respectivement, 118 158 francs et 330 000 francs et à demander la décharge résultant de la réduction à due concurrence de ses bases d'imposition à l'impôt sur le revenu ; qu'en revanche, M. ORCEL n'a fourni aucune explication vérifiable sur la date d'entrée dans son patrimoine du bronze de DAUMIER non plus qu'établi un début de corrélation entre l'acquisition alléguée de bons anonymes avec le produit de la vente des tableaux de SIGNAC et de RENOIR et l'utilisation alléguée du produit de la cession de ces bons pour alimenter en espèces ses comptes bancaires et financer ses apports à la société civile de SAINT-AMOUR ; qu'il s'ensuit qu'à hauteur du surplus des sommes en définitive taxées d'office en tant que revenus d'origine indéterminée, telles qu'elles ont été arrêtées dans la réponse aux observations du contribuable en date du 25 mai 1983, la procédure d'imposition n'a pas été irrégulière ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant que pour obtenir la décharge des cotisations supplémentaires qui lui ont été assignées par voie de taxation d'office, M. ORCEL doit apporter la preuve de l'exagération de ces impositions ;
Considérant, en premier lieu, qu'eu égard à l'annualité des bases de l'imposition sur le revenu, M. ORCEL ne peut en tout état de cause, faire valoir comme élément de preuve la circonstance que l'établissement d'une balance de trésorerie unique pour les trois années en litige ferait apparaître une compensation entre les excédents et les insuffisances ;

Considérant, en second lieu, qu'en ce qui concerne l'année 1976, le requérant ne démontre ni qu'il aurait conservé jusqu'en 1976 les sommes qu'il affirme lui avoir été prêtées en mai 1975, ni par la seule production d'un certificat anonyme d'achat de pièces d'or en date du 15 janvier 1970, qu'il aurait vendu un nombre de pièces figurant dans son patrimoine à l'ouverture de la période vérifiée, supérieur à celui admis par l'administration ; que l'attestation à en-tête de la banque populaire savoisienne de Crédit précisant que son compte n° 849.227.01.10 S présentait un solde créditeur de 184 088,68 francs au 31 décembre 1975, ne peut être prise en considération dès lors que n'y est pas indiqué l'identité de la personne l'ayant délivrée ; qu'en ce qui concerne l'année 1977, il ne démontre pas avoir vendu à divers brocanteurs un matériel provenant d'un salon de coiffure acquis aux enchères ni avoir été propriétaire dès le début de la période vérifiée du bronze de DAUMIER vendu en 1977 ; qu'enfin, il n'a pas établi devant le juge de l'impôt que les apports en espèces sur ses comptes bancaires en 1977 et 1979 et ses apports à la société civile de SAINT-AMOUR en 1979 auraient pour origine le produit de la vente des tableaux de SIGNAC et de RENOIR ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. ORCEL est seulement fondé à demander la réduction, à concurrence de, respectivement 118 158 francs et 330 000 francs de ses bases d'imposition à l'impôt sur le revenu au titre des années 1977 et 1979 ainsi que la réformation en ce sens du jugement attaqué ; qu'en revanche, le surplus de ses conclusions ne saurait être accueilli ;
Article 1er : Les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu assignées à M. ORCEL au titre des années 1977 et 1979 sont réduites respectivement de 118 158 francs et de 330 000 francs.
Article 2 : M. ORCEL est déchargé des droits et pénalités correspondant à la réduction de bases ci-dessus définie.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 17 mars 1988 est réformé en ce qu'il a de contraire aux dispositions de la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. ORCEL est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Pleniere
Numéro d'arrêt : 89LY00584
Date de la décision : 14/03/1991
Sens de l'arrêt : Réduction
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02-05-02-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - TAXATION D'OFFICE - POUR DEFAUT DE REPONSE A UNE DEMANDE DE JUSTIFICATIONS (ART. 176 ET 179 DU CGI, REPRIS AUX ARTICLES L.16 ET L.69 DU LIVRE DES PROCEDURES FISCALES) -Réponse du contribuable - Notion de réponse suffisante - Réponses du contribuable : caractère suffisant (oui et non).

19-04-01-02-05-02-02 La réponse d'un contribuable à une demande de justifications ne pouvait, compte tenu d'une attestation suffisamment précise, être assimilée à hauteur du prix de vente de deux tableaux à un défaut de réponse sur l'origine des sommes dont ses comptes bancaires avaient été crédités. En revanche, le requérant n'établit pas un début de corrélation entre l'acquisition des bons anonymes avec le produit de la vente des deux tableaux et l'utilisation alléguée du produit de la cession de ces bons pour alimenter en espèces ses comptes bancaires. Dès lors, à hauteur du surplus des sommes taxées d'office en tant que revenus d'origine indéterminée telles qu'elles ont été arrêtées dans la réponse aux observations du contribuable, la procédure d'imposition n'a pas été irrégulière. L'attestation à en-tête d'une banque précisant que le compte du requérant présentait un solde créditeur au 31 décembre de l'année précédant celle de l'imposition litigieuse, ne peut être prise en considération dès lors qu'il n'y est pas indiqué l'identité de la personne l'ayant délivrée.


Références :

CGI 1649 quinquies A, 176
CGI Livre des procédures fiscales L50, L16


Composition du Tribunal
Président : Mme Latournerie
Rapporteur ?: M. Lanquetin
Rapporteur public ?: Mme Haelvoet

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1991-03-14;89ly00584 ?
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