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14/02/1991 | FRANCE | N°89LY00707

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Pleniere, 14 février 1991, 89LY00707


Vu la décision en date du 19 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1989, par laquelle le président de la 7ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête visée ci-après ;
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 12 août 1988 présentée par M. X... demeurant ... et le mémoire complémentaire enregistré au greffe de la cour le 7 août 1989 présenté pour M. X... par la société d'avocats Porte-Briza

rd-Collomb-Ricquart ; M. X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugeme...

Vu la décision en date du 19 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1989, par laquelle le président de la 7ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête visée ci-après ;
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 12 août 1988 présentée par M. X... demeurant ... et le mémoire complémentaire enregistré au greffe de la cour le 7 août 1989 présenté pour M. X... par la société d'avocats Porte-Brizard-Collomb-Ricquart ; M. X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 17 juin 1988 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des année 1977, 1979 et 1980 ;
2°) de prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu mis à sa charge au titre des années 1977 à 1980 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 31 janvier 1991 :
- le rapport de M. Gailleton, conseiller ;
- les observations de Me Ricquart avocat de M. Jean-François X... ;
- et les conclusions de M. Richer, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :
Considérant que par une décision en date du 26 décembre 1989 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de la Savoie a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence d'une somme de 22 141 francs, du complément d'impôt sur le revenu auquel M. X... a été assujetti au titre de l'année 1979 ; que les conclusions de la requête de M. X... sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur les conclusions relatives à l'année 1978 :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les conclusions de M. X... tendant à la décharge du complément d'impôt sur le revenu qui lui a été assigné au titre de l'année 1978, lequel n'a d'ailleurs pas été contesté par la réclamation qu'il a adressée au directeur des services fiscaux de la Savoie qui ne concernait que les seules années 1977, 1979 et 1980, sont présentées pour la première fois en appel ; qu'elles ne sont, par suite, pas recevables ;
Sur les conclusions relatives aux années 1977, 1979, 1980 :
En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée imposés au titre de l'année 1977 :
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'aucun texte ne faisait obligation à l'administration d'avertir M. X... du caractère non contraignant de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble engagée à son encontre le 30 juin 1981 non plus que d'établir contradictoirement avec lui la balance de trésorerie dont, sur le fondement de l'article 176 du code général des impôts , elle lui a, le 20 novembre 1981, demandé de justifier le solde ;
Considérant, en second lieu, que la demande de justifications susmentionnée portait sur un excédent de disponibilités employées de 273 440 francs ; qu'en réponse à cette demande M. X..., faisant valoir qu'il vivait avec sa mère, a établi le 18 décembre 1981 une autre balance prenant en compte l'ensemble des disponibilités employées et dégagées par lui-même et par sa mère, dont l'excédent de 40 738 francs des disponibilités dégagées résultait de la prise en compte d'économies antérieures d'un montant de 450 000 francs détenues en début d'année sous forme de bons de caisse au sujet desquels il n'apportait aucune précision vérifiable ; qu'une telle réponse, équivalait, dans les circonstances de l'espèce, à un défaut de réponse ; que, dès lors, et sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le service, poursuivant la procédure contradictoire, ait admis certaines des explications présentées par le contribuable après la notification de redressements du 24 décembre 1981 en limitant le redressement au titre des revenus d'origine indéterminée à 210 271 francs, l'administration est en droit de se prévaloir devant le juge de l'impôt à hauteur de cette somme, de la procédure de taxation d'office prévue par les dispositions combinées des articles 176 et 179 du code général des impôts ;

Considérant enfin que, si M. X... fait valoir que l'avertissement qui lui a été adressé mentionnait le montant des revenus d'origine indéterminée dans la catégorie des revenus non commerciaux, cette erreur, qui ne concerne qu'un document destiné à l'information du contribuable, postérieurement à l'établissement de l'impôt, est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;
Sur le bien-fondé :
Considérant, en premier lieu, que M. X... qui constituait un foyer fiscal distinct de celui de sa mère ne peut utilement soutenir que l'administration aurait dû faire masse de leurs revenus et dépenses respectifs ; qu'il ne justifie pas de la réalité des transferts de fonds dont il aurait pu bénéficier de la part de sa mère ; qu'il n'établit pas davantage par les attestations bancaires qu'il produit, qu'il aurait détenu, comme il le soutient, une somme de 450 000 francs sous forme de bons de caisse antérieurement au 1er janvier de l'année 1977, ni qu'il aurait cédé ces bons en totalité ou en partie au cours de cette année ; qu'en revanche, il doit être regardé comme établissant que la prime d'assurance vie incluse dans les disponibilités employées pour un montant de 6 600 francs n'a en fait pas été payée, que le montant des impôts payés au cours de cette année s'élève à 14 012 francs et non à 16 445 francs et que l'évaluation de ses dépenses de train de vie est excessive à concurrence de 15 000 francs ;
Considérant, en second lieu, que n'est susceptible d'être taxée d'office en tant que revenus d'origine indéterminée par application des dispositions des article 176 et 179 du code général des impôts maintenant reprises aux articles L.16 et L.69 du livre des procédures fiscales qu'une somme qui a fait l'objet d'une demande de justifications dans les conditions et sous la sanction prévue auxdits articles ; que, dès lors, le ministre ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L.203 du livre des procédures fiscales pour demander qu'une somme de 250 000 francs, dont, selon lui, le vérificateur aurait à tort tenu compte au titre des disponibilités dégagées en minorant d'autant le solde de la balance de trésorerie sur lequel portait la demande de justifications adressée à M. X..., soit admise en compensation de la réduction de base totale de 24 033 francs ci-dessus indiquée ;
En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée imposés au titre des années 1979 et 1980 :
Considérant que, comme pour l'année 1977, le service a adressé à M. X..., sur le fondement de l'article 176 du code général des impôts, des demandes de justifications relatives aux excédents, constatés pour chacune des deux années 1979 et 1980, des disponibilités employées sur celles dégagées ; que lesdites demandes ont été reçues par M. X... le 25 novembre 1981 ; qu'au vu de la réponse du contribuable, le service a adressé à celui-ci une notification des redressements envisagés au titre des revenus d'origine indéterminée qu'il a reçue le 24 décembre 1981, soit avant l'expiration du délai de trente jours prévu à l'article 176 du code ;

Considérant qu'eu égard à la sanction qui s'attache légalement au défaut de réponse, ou à une réponse équivalent à un défaut de réponse, à une demande de justifications adressée au contribuable sur le fondement de l'article 176 du code général des impôts maintenant repris à l'article L.16 du livre des procédures fiscales, celui-ci ne peut être réputé avoir renoncé, du fait d'une première réponse, à faire parvenir au service une réponse complémentaire avant l'expiration du délai dont il bénéficie en vertu de la loi ; qu'ainsi M. X... est fondé à soutenir qu'en le privant de l'intégralité du délai de trente jours prévu à l'article 176 du code général des impôts l'administration a entaché la procédure d'imposition d'une erreur substantielle de nature à entraîner la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti à raison des sommes taxées d'office en tant que revenus d'origine indéterminée, lesquelles, à la suite du dégrèvement partiel prononcé en cours d'instance au titre de l'année 1979 s'élèvent à 174 633 francs pour 1979 et 221 162 francs pour 1980 ;
En ce qui concerne la qualification des rémunérations perçues par M. X... :
Considérant qu'aux termes du 1er alinéa de l'article 62 du code général des impôts alors applicable : "Les traitements, remboursements forfaitaires de frais et toutes autres rémunérations allouées ... aux gérants majoritaires des sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes ... sont soumis à l'impôt sur le revenu au nom de leurs bénéficiaires s'ils sont admis en déduction des bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés par application de l'article 211 ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X..., associé de la S.A.R.L. "La Bonne Brioche", qui exploitait un fonds de commerce de boulangerie pâtisserie, a abandonné au début de l'année 1977 au profit de sa mère également associée les fonctions de gérant qu'il exerçait jusqu'alors ; que, toutefois, le requérant, qui détenait avec sa mère la quasi totalité des parts de la société, ne conteste pas avoir gardé seul la signature du compte bancaire de l'entreprise familiale ; qu'il doit dès lors, dans les circonstances de l'espèce, être regardé comme étant resté associé à l'administration de cette entreprise et ayant continué d'exercer un contrôle effectif sur sa gestion ; que, par suite, M. X... était membre d'une gérance majoritaire au sens de l'article 62 du code général des impôts et que, dès lors, les rémunérations qu'il a perçues de la société "La Bonne Brioche" pendant les années 1977 et 1979 étaient imposables dans la catégorie prévue par les dispositions législatives précitées ; que par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non recevoir opposée par le ministre chargé du budget, M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande en décharge des droits supplémentaires résultant de l'imposition dans la catégorie des rémunérations de gérant majoritaire des sommes déclarées par lui dans la catégorie des traitements et salaires ;

Sur les pénalités :
Considérant que les rappels de droits n'ont en fait été assortis que des intérêts de retard prévus à l'article 1729 du code général des impôts ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, l'absence de caractère contraignant d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble ne fait pas légalement obstacle à l'application desdits intérêts ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est seulement fondé à demander la réduction, à concurrence des sommes susindiquées, de ses bases d'imposition à l'impôt sur le revenu au titre des années 1977 et 1979 et la décharge du complément d'impôt sur le revenu au titre de l'année 1980, ainsi que la réformation en ce sens du jugement attaqué ; qu'en revanche le surplus de ses conclusions ne saurait être accueilli ;
Article 1er : A concurrence de la somme de 22 141 francs, en ce qui concerne le complément d'impôt sur le revenu auquel M. X... a été assujetti au titre de l'année 1979, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. X....
Article 2 : Les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu assignées à M. X... au titre des années 1977 et 1979 sont respectivement réduites de 24 033 francs et de 174 633 francs.
Article 3 : M. X... est déchargé des droits et intérêts de retard correspondant à la réduction des bases d'imposition fixées à l'article 2, ainsi que du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 1980.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 17 juin 1988 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Pleniere
Numéro d'arrêt : 89LY00707
Date de la décision : 14/02/1991
Sens de l'arrêt : Non-lieu à statuer réduction
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02-05-02-02,RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - TAXATION D'OFFICE - POUR DEFAUT DE REPONSE A UNE DEMANDE DE JUSTIFICATIONS (ART. 176 ET 179 DU CGI). -Réponse du contribuable - Notion de défaut de réponse - Réponse assimilable à un défaut de réponse produite avant l'expiration du délai de 30 jours prévu à l'article 176 du C.G.I. - Notification de redressement reçue par le contribuable à l'intérieur de ce délai - Procédure d'imposition entachée d'une erreur substantielle (1).

19-04-01-02-05-02-02 En raison de la gravité de la sanction qui s'attache légalement à un défaut de réponse à une demande de justifications adressée au contribuable sur le fondement de l'article 176 du CGI maintenant repris à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, l'intéressé ne peut, du fait de l'envoi d'une première réponse, être réputé avoir renoncé à faire parvenir au service une réponse complémentaire avant l'expiration du délai de 30 jours dont il dispose légalement. En lui notifiant un redressement avant l'expiration de ce délai, l'administration entache donc la procédure d'imposition d'une erreur substantielle de nature à entraîner la décharge de l'imposition.


Références :

CGI 176, 179, 62, 1729
CGI Livre des procédures fiscales L16, L69, L203

1. Comp. CE, 1983-12-09, X, n° 37080 ;

CE, 1990-10-17, Jeneste, n° 97253 ;

cf. CE, Section, 1991-02-08, Association CNAI, n° 61025


Composition du Tribunal
Président : Mme Latournerie
Rapporteur ?: M. Gailleton
Rapporteur public ?: M. Richer

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1991-02-14;89ly00707 ?
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