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06/05/2022 | FRANCE | N°22DA00071

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 06 mai 2022, 22DA00071


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 20 juillet 2021 par lequel la préfète de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2102756 du 21 octobre 2021, le magistrat d

signé par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédur...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 20 juillet 2021 par lequel la préfète de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2102756 du 21 octobre 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 janvier 2022, Mme B..., représentée par Me Antoine Tourbier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2021 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le premier juge a omis de répondre au moyen tiré de ce que sa famille sera séparée en raison des nationalités différentes du couple ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français est illégale dès lors que la mesure d'éloignement est elle-même illégale.

La requête a été communiquée à la préfète de l'Oise, qui n'a pas produit de mémoire.

Par une ordonnance du 21 février 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 11 mars 2022, à 12 heures.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 avril 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante macédonienne née le 5 novembre 1982, est entrée en France le 2 septembre 2018 afin d'y solliciter l'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 28 juin 2019 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée le 8 novembre 2019 par la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 2 octobre 2019, le préfet de l'Oise l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. Par une ordonnance n° 20DA00153 du 29 juillet 2020, la cour a rejeté le recours de Mme B... tendant à l'annulation de cet arrêté. Par un nouvel arrêté du 20 juillet 2021, la préfète de l'Oise a refusé d'admettre Mme B... au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Mme B... relève appel du jugement du 21 octobre 2021 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le premier juge, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments invoqués à l'appui du moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, n'a pas entaché son jugement d'une omission à statuer en ne répondant pas à l'un des arguments avancés selon lequel la famille pourrait être séparée du fait que Mme B... a une nationalité différente de son conjoint. Par suite, le moyen tiré de l'omission à statuer doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

3. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté contesté, Mme B... résidait en France depuis moins de trois ans. Si elle fait état de la présence en France de son époux et de ses enfants, celui-ci a également fait l'objet le même jour d'une obligation de quitter le territoire français. Il ressort notamment de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que, le couple vivait ensemble au Kosovo avec leurs enfants. Si l'époux de Mme B... est de nationalité différente, aucun obstacle avéré ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue hors de France. L'appelante ne justifie d'aucune insertion sociale ou professionnelle. Dès lors, compte tenu des conditions et de la durée du séjour en France de l'intéressée, la préfète de l'Oise n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

4. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

5. Mme B... allègue sans toutefois l'établir que leurs enfants sont scolarisés en France depuis leur arrivée. A supposer établie cette scolarisation, elle n'invoque en tout état de cause aucun obstacle à ce qu'ils poursuivent une scolarisation hors de France. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

6. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 5 que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'illégalité.

Sur la décision fixant le pays de destination :

7. Mme B..., dont au demeurant la demande d'asile a été rejetée, se borne à alléguer encourir des risques en cas de retour dans son pays d'origine sans apporter plus de précisions ni d'éléments probants. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et de sauvegarde des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur l'interdiction de retour sur le territoire pour une durée de deux ans :

8. Il résulte du point 6 que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français serait illégale du fait de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., au ministre de l'intérieur et à Me Antoine Tourbier.

Copie en sera adressée pour information à la préfète de l'Oise.

Délibéré après l'audience publique du 7 avril 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mai 2022.

Le président-assesseur,

Signé : M. C...

La présidente de chambre,

présidente-rapporteure,

Signé : G. BorotLa greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

C. Huls-Carlier

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00071
Date de la décision : 06/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Ghislaine Borot
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : AARPI QUENNEHEN - TOURBIER

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-05-06;22da00071 ?
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