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23/09/2021 | FRANCE | N°20DA01935

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 23 septembre 2021, 20DA01935


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé l'admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé son pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire valable un an portant la mention " vie priv

ée et familiale " dans un délai d'un mois à compter du jugement, sous astrei...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé l'admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé son pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire valable un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer, dans un délai de huit jours à compter du jugement, une autorisation provisoire de séjour, dans l'attente du réexamen de sa situation, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros, à titre principal, à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et, à titre subsidiaire, à lui verser directement cette somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2000098 du 3 avril 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 décembre 2020, M. A..., représenté par Me Madeline, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé l'admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé son pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire, valable un an, portant la mention " salarié " ou " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, celui-ci renonçant à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant togolais né le 14 septembre 1989, est entré en France en février 2013, après avoir épousé dans son pays d'origine une ressortissante française. Le 21 décembre 2013, il s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire valable un an portant la mention " vie privée et familiale ", qui a été renouvelée deux fois. Il a fait l'objet, le 24 novembre 2016, d'un arrêté portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français. M. A... a sollicité son admission exceptionnelle au séjour par un courrier du 16 octobre 2018. Il relève appel du jugement du 3 avril 2020 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 octobre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, M. A... réitère, comme en première instance, son argument tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée. Il ne se prévaut, devant la cour, d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif de Rouen et à laquelle celui-ci a précisément répondu. En conséquence, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision est entachée d'insuffisance de motivation par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 312-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Font l'objet d'une publication les instructions, les circulaires ainsi que les notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives. Les instructions et circulaires sont réputées abrogées si elles n'ont pas été publiées, dans des conditions et selon des modalités fixées par décret. / Un décret en Conseil d'Etat pris après avis de la commission mentionnée au titre IV précise les autres modalités d'application du présent article. ". Aux termes de l'article L. 312-3 du même code : " Toute personne peut se prévaloir des documents administratifs mentionnés au premier alinéa de l'article L. 312-2, émanant des administrations centrales et déconcentrées de l'Etat et publiés sur des sites internet désignés par décret. / Toute personne peut se prévaloir de l'interprétation d'une règle, même erronée, opérée par ces documents pour son application à une situation qui n'affecte pas des tiers, tant que cette interprétation n'a pas été modifiée. / (...) ". Aux termes de l'article D. 312-11 : " Les sites internet mentionnés au premier alinéa de l'article L. 312-3 sont les suivants : / (...) www.interieur.gouv.fr ; (...) ". Aux termes de l'article R. 312-10 : " Les sites internet sur lesquels sont publiés les documents dont toute personne peut se prévaloir dans les conditions prévues à l'article L. 312-3 précisent la date de dernière mise à jour de la page donnant accès à ces documents ainsi que la date à laquelle chaque document a été publié sur le site. / Ces sites comportent, sur la page donnant accès aux documents publiés en application de l'article L. 312-3, la mention suivante : " Conformément à l'article L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration, toute personne peut se prévaloir de l'interprétation d'une règle, même erronée, opérée par les documents publiés sur cette page, pour son application à une situation qui n'affecte pas des tiers, tant que cette interprétation n'a pas été modifiée, sous réserve qu'elle ne fasse pas obstacle à l'application des dispositions législatives ou réglementaires préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement ".

4. Il résulte des dispositions précitées que, pour être opposable, une circulaire du ministre de l'intérieur adressée aux préfets doit faire l'objet d'une publication sur le site www.interieur.gouv.fr par le biais d'une insertion dans la liste définissant les documents opposables et comportant les mentions prescrites à l'article R. 312-10, et doit comporter un lien vers le document intégral publié sur le site " Légifrance.gouv.fr ", site relevant du Premier ministre.

5. Contrairement à ce que soutient l'appelant, la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a pas été publiée dans les conditions prévues au point 3. Si elle a fait l'objet d'une mise en ligne sur le site Légifrance le 1er avril 2019, elle ne figure toutefois pas parmi la liste des documents opposables. Sa publication ne comporte ainsi aucune date de déclaration d'opposabilité. En outre, les énonciations de la circulaire du 28 novembre 2012 constituent des orientations générales que le ministre de l'intérieur a adressées aux préfets pour les éclairer dans la mise en œuvre de leur pouvoir de régularisation. Par suite, M. A... ne saurait utilement se prévaloir de cette circulaire.

6. En troisième lieu, si M. A... se prévaut d'une présence en France depuis 2013, il ressort des pièces du dossier qu'il est retourné vivre au Togo entre les mois d'octobre 2015 et d'août 2016. Par ailleurs, il est séparé de son épouse française et n'apporte pas d'éléments de nature à établir le nouveau concubinage dont il se prévaut. En outre, M. A... n'établit pas être dépourvu d'attaches au Togo où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-trois ans. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision contestée doit être écarté.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ".

8. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a exercé différents stages et emplois dans le domaine de la surveillance et de la sécurité. Toutefois, en dépit de cette expérience et nonobstant la promesse d'embauche établie par la société Universal Security le 3 octobre 2018, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant son admission exceptionnelle au séjour tant au titre du travail que de la vie privée et familiale, eu égard à ce qui a été dit au point 6, le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, ce moyen doit être écarté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. En premier lieu, M. A... réitère, comme en première instance, son argument tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée. Il ne se prévaut, devant la cour, d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif de Rouen et à laquelle celui-ci a précisément répondu. En conséquence, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision est entachée d'insuffisance de motivation par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

10. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 8 que le moyen tiré de ce que la décision en litige doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté.

11. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 6, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

Sur la décision fixant le pays de destination :

12. La décision portant obligation de quitter le territoire n'étant pas entachée d'illégalité, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision contestée doit être écarté.

Sur la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :

13. En premier lieu, M. A... réitère, comme en première instance, son argument tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée. Il ne se prévaut, devant la cour, d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif de Rouen et à laquelle celui-ci a précisément répondu. En conséquence, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision est entachée d'insuffisance de motivation par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

14. En second lieu, aux termes du III l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger (...) / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ".

15. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement en date du 24 novembre 2016, confirmée par le jugement du tribunal administratif de Rouen du 7 mars 2017 et l'ordonnance de la cour administrative d'appel de Douai du 24 mai 2017, qu'il n'a pas exécutée. Ainsi qu'il a été dit au point 6, il n'établit pas les liens sur le territoire français dont il se prévaut alors qu'il a vécu au Togo jusqu'à l'âge de vingt-trois ans. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas tenu compte de sa situation personnelle avant de prononcer l'interdiction de retour en litige. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation dont serait entachée la décision contestée doit être écarté. Pour les mêmes motifs, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur d'appréciation doivent être écartés.

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 octobre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé l'admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé son pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. B... A... et à Me Madeline.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

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N°20DA01935

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01935
Date de la décision : 23/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Nil Carpentier-Daubresse
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SELARL EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-09-23;20da01935 ?
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