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10/12/2020 | FRANCE | N°19DA01757

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 10 décembre 2020, 19DA01757


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 208,68 euros au titre des traitements bruts qui lui sont dus, avec intérêt au taux légal à compter du 26 avril 2018, date de réception du recours préalable en indemnisation, et capitalisation des intérêts à compter du 26 avril 2019 et à chaque échéance annuelle et, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 208,68 euros au titre des traitements bruts qui lui sont dus, avec intérêt au taux légal à compter du 26 avril 2018, date de réception du recours préalable en indemnisation, et capitalisation des intérêts à compter du 26 avril 2019 et à chaque échéance annuelle et, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1806429 du 20 juin 2019 le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 juillet 2019 et 20 juillet 2020, M. A... C..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 208,68 euros au titre des traitements bruts qui lui sont dus, avec intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2018, date de réception du recours préalable en indemnisation, et capitalisation des intérêts à compter du 26 avril 2019 et à chaque échéance annuelle ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 ;

- le décret n° 95-313 du 21 mars 1995 ;

- le décret n° 96-1156 du 26 décembre 1996 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

-le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 novembre 2020 :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président assesseur ;

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public ;

- et les observations de Me D..., pour M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C..., agent de constatation principal de 1ère classe des douanes et droits indirects, a exercé ses fonctions dans une zone urbaine sensible du 21 juin 1994 au 31 août 2004 et du 14 avril 2014 au 31 décembre 2014. Il est affecté à la recette interrégionale des douanes et droits indirects de Dunkerque depuis le 31 décembre 2010. Le 3 juin 2014 il a demandé le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté prévu par les dispositions de l'article 2 du décret du 21 mars 1995 relatif au droit de mutation prioritaire et au droit à l'avantage spécifique d'ancienneté accordés à certains agents de l'Etat affectés dans les quartiers urbains particulièrement difficiles. Toutefois le directeur interrégional des douanes et droits indirects de Lille a refusé de faire droit à sa demande par une décision du 12 février 2015. Par jugement du tribunal administratif de Lille du 6 décembre 2016, cette décision refusant le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté a été annulée. Par un arrêté du 23 janvier 2017, la situation administrative de M. C... a été régularisée pécuniairement. Cependant, ce dernier estimant que cette régularisation était insuffisante car ne portant que sur la période postérieure à 2014 compte tenu de l'application de la déchéance quadriennale prévue par la loi du 31 décembre 1968, a sollicité le versement de l'intégralité des rappels de rémunération auxquels il estimait avoir droit. M. C... relève appel du jugement du 20 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande de condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 2 208,68 euros au titre des traitements bruts qui lui sont dus.

2. Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 : " Sont prescrites, au profit de l'Etat (...) sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes les créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis (...) ". Aux termes de l'article 2 de cette loi : " la prescription est interrompue par : / Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant, ou paiement de la créance, alors même que l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du règlement (...) ". Aux termes de l'article 3 de cette loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement ".

3. Par ailleurs, aux termes de l'article 1er du décret du 21 mars 1995 : " Les quartiers urbains où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, mentionnés au quatrième alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et à l'article II de la loi du 26 juillet 1991 susvisée, doivent correspondre : (...) 3° En ce qui concerne les autres fonctionnaires civils de l'Etat, à des secteurs déterminés par arrêté conjoint du ministre chargé de la ville, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget. ". L'article 2 de ce même décret précise que : " Lorsqu'ils justifient de trois ans au moins de services continus accomplis dans un quartier urbain désigné en application de l'article 1er ci­ dessus, les fonctionnaires de l'Etat ont droit, pour l'avancement, à une bonification d'ancienneté d'un mois pour chacune de ces trois années et à une bonification d'ancienneté de deux mois par année de service continu accomplie au-delà de la troisième année. Les années de services ouvrant droit à l'avantage mentionné à l'alinéa précédent sont prises en compte à partir du 1er janvier 1995 pour les fonctionnaires mentionnés au 3° de l'article 1er et, pour les fonctionnaires mentionnés aux JO et 2° du même article, à partir du 1er janvier 2000. (...) ". L'article 1er du décret du 26 décembre 1996 fixant la liste des zones urbaines sensibles prévoit que : " Les grands ensembles et les quartiers d'habitat dégradés mentionnés au 3 de l'article 42 modifié de la loi du 4 février 1995 susvisée sont ceux figurant dans la liste annexée au présent décret. Les zones concernées sont délimitées par un trait de couleur rouge sur les plans au 1 / 25 000 annexés au présent décret ".

4. Lorsqu'un litige oppose un agent public à son administration sur le montant des rémunérations auxquelles il a droit, le fait générateur de la créance se trouve dans les services accomplis par l'intéressé. La prescription est acquise au début de la quatrième année suivant chacune de celles au titre desquelles ses services auraient dû être rémunérés.

5. Les fonctionnaires de l'Etat affectés pendant au moins trois ans consécutifs dans une zone urbaine sensible ont droit au bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté, ce qui est le cas de M. C.... Toutefois, le ministre de l'économie, des finances et de la relance lui a opposé la prescription quadriennale dont serait atteinte sa créance antérieure au 1er janvier 2010. Alors que M. C... n'a nullement été privé du statut de fonctionnaire ni n'a été privé d'être placé dans une situation statutaire régulière, le fait générateur de la créance dont il se prévaut est constitué par les services effectués du 21 juin 1994 au 31 août 2004 et du 14 avril 2014 au 31 décembre 2014 à la surveillance des brigades de la direction régionale de Dunkerque, zone classée quartier urbain particulièrement difficile à compter du 1er janvier 1996.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a sollicité le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté le 3 juin 2014. Or l'Etat est fondé à lui opposer que les créances dont il se prévaut sont, pour la période antérieure au 1er janvier 2010, prescrites par application de la loi du 31 décembre 1968. La circonstance qu'il ne se soit pas aperçu de l'erreur commise par l'administration pour le calcul de sa rémunération n'est pas, à elle seule, de nature à le faire légitimement regarder comme ignorant l'existence de sa créance au sens de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968. Il ne peut pas plus être regardé comme ayant légitimement ignoré l'existence des textes législatifs et règlementaires constitués par la loi du 26 juillet 1991, le décret du 21 mars 1995 et le décret du 26 décembre 1996, régulièrement publiés au Journal Officiel. L'arrêté du 23 janvier 2017 régularisant sa situation financière suite au jugement du tribunal administratif de Lille n'a eu ni pour objet, ni pour effet, de faire obstacle à l'application de la prescription prévue par la loi du 31 décembre 1968 précitée.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal de Lille a rejeté sa demande.

Sur les frais d'instance :

8. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

9. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par M. C... doivent dès lors être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me B... D... pour M. A... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

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N°19DA01757


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01757
Date de la décision : 10/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-06-02 Fonctionnaires et agents publics. Notation et avancement. Avancement.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : STIENNE-DUWEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-12-10;19da01757 ?
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