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12/03/2020 | FRANCE | N°18DA01069,18DA01179

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 12 mars 2020, 18DA01069,18DA01179


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le centre hospitalier universitaire de Rouen à lui verser la somme totale de 66 753 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable, et leur capitalisation, en réparation de l'ensemble des préjudices subis à la suite de l'intervention chirurgicale réalisée le 12 juillet 2013.

Par un jugement n° 1500602 du 10 avril 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure

devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 28 mai 2018 sous le n° 18DA01069, M....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le centre hospitalier universitaire de Rouen à lui verser la somme totale de 66 753 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable, et leur capitalisation, en réparation de l'ensemble des préjudices subis à la suite de l'intervention chirurgicale réalisée le 12 juillet 2013.

Par un jugement n° 1500602 du 10 avril 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 28 mai 2018 sous le n° 18DA01069, M. B... E..., représenté par Me D... F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Rouen à lui verser la somme totale de 66 753 euros en réparation des préjudices qu'il a subis, avec intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable et capitalisation de ceux-ci ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Rouen une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

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II. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 8 juin 2018 et 29 mai 2019, sous le n° 18DA01179, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Eure, représentée par Me C... A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce même jugement ;

2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Rouen à lui verser une somme de 140 726,96 euros, avec intérêts au taux légal et capitalisation de ceux-ci, en remboursement de ses débours ;

3°) de condamner cet établissement à lui verser une somme de 1 080 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Rouen une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

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Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., alors âgé de cinquante-quatre ans, présentant des douleurs de l'hypochondre droit, associées à des nausées et des troubles de la digestion, a subi, le 12 juillet 2013, une cholécystectomie par voie endoscopique au centre hospitalier universitaire de Rouen. A la suite de la survenue d'une lésion de l'aorte, une laparotomie a été pratiquée en urgence afin de suturer la plaie. M. E... relève appel du jugement du 10 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Rouen à lui verser la somme totale de 66 753 euros, en réparation de l'ensemble des préjudices subis à la suite de cette intervention chirurgicale. La caisse primaire d'assurance maladie de l'Eure relève appel du même jugement qui a rejeté sa demande tendant au remboursement de ses débours exposés pour son assuré pour un montant de 140 726,96 euros.

2. La requête n° 18DA01069 présentée par M. E... et la requête n° 18DA01179 présentée par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Eure présentent à juger des questions semblables. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Rouen :

3. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute (...) ".

4. Il résulte tout d'abord de l'instruction, en particulier de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Rouen, que l'indication opératoire de cholécystectomie était justifiée par la symptomatologie clinique d'origine biliaire présentée par M. E.... Il ressort du même rapport que l'expert, après avoir rappelé les règles à respecter en ce qui concerne la pose à l'aveugle du premier trocart, tube creux de coelioscopie permettant l'introduction d'une fibre optique reliée à une caméra, qui sont la réalisation d'un pneumo-péritoine avec une pression suffisante d'au moins 12 ml de mercure chez un patient à l'horizontal avec un angle de 45° par rapport au plan sagittal, a estimé, notamment au vu du compte-rendu opératoire et de la feuille de surveillance anesthésique per-opératoire, que l'ensemble des précautions et recommandations avait été respecté par l'équipe chirurgicale. Si M. E... a été victime d'une plaie vasculaire au niveau de l'aorte, l'expert précise que, selon la littérature médicale, quelle que soit la technique chirurgicale utilisée sous contrôle de la vue ou à l'aveugle, aucune d'entre elle ne permet d'éviter le risque de plaie vasculaire ou digestive et aucune ne présente une supériorité par rapport à l'autre. Il indique également que la prévalence des plaies de gros vaisseaux lors de l'introduction d'un premier trocart à l'aveugle est évaluée selon la littérature entre 0,04 et 0,5 pour 1 000 et qu'il s'agit donc d'une complication rare. Il estime qu'aucun manquement n'a été commis et que M. E... a été victime d'un accident médical non fautif. Il ne résulte pas de ces éléments, qui ne sont contredits par aucun autre élément médical, que la réalisation technique de l'acte chirurgical n'aurait pas été conforme aux règles de l'art. Dans ces conditions, M. E... a été victime d'un aléa thérapeutique inhérent à la mise en oeuvre de la technique chirurgicale par coelioscopie sans qu'aucune maladresse fautive ne puisse être retenue. Par suite, le centre hospitalier universitaire de Rouen n'a commis aucune faute dans la prise en charge médicale de M. E... de nature à engager sa responsabilité, comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges.

Sur le droit à information de M. E... :

5. Aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. (...) / Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. / Cette information est délivrée au cours d'un entretien individuel. (...) En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen (...) ".

6. M. E... soutient qu'il n'a pas été informé du risque de perforation de l'aorte et qu'il y a ainsi, un manquement à l'obligation d'information du patient. Cependant, il résulte de l'instruction, et notamment de l'expertise, que lors de la consultation avec le praticien hospitalier qui s'est déroulée le 4 juin 2013, M. E... a été informé des modalités de l'intervention et de ses complications principales ainsi que cela ressort de la lettre adressée le 4 juin 2013 par le chirurgien au médecin traitant de M. E.... En outre, selon les dires du même expert, il ressort du dossier de consultation que ce praticien a réalisé un schéma explicatif de cette intervention et que les risques opératoires ont été expliqués au patient. Il résulte de ces éléments que, si ne figure pas au dossier le formulaire de consentement éclairé de ce dernier, le centre hospitalier universitaire de Rouen établit cependant qu'une information claire et accessible sur les risques possibles encourus lors de l'opération et les modalités de celle-ci a été donnée à M. E... lors des consultations en pré-opératoire. En outre, le chirurgien a fait preuve de pédagogie en illustrant ses propos par un schéma. Par suite, il n'est pas établi que M. E..., qui s'est au demeurant borné à indiquer à l'expert qu'il ne se souvenait pas avoir été informé des risques de l'intervention, aurait reçu une information insuffisante. M. E... n'est ainsi pas fondé à soutenir que la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Rouen serait engagée à ce titre.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... et la caisse primaire d'assurance maladie de l'Eure ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leurs demandes. Doivent être rejetées par voie de conséquence, leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. E... et de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Eure sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E..., à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Eure et au centre hospitalier universitaire de Rouen.

4

N°18DA01069,18DA01179


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA01069,18DA01179
Date de la décision : 12/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation.


Composition du Tribunal
Président : Mme Courault
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : SELARL EBC AVOCATS ; SELARL EBC AVOCATS ; SELARL EBC AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-03-12;18da01069.18da01179 ?
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