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09/04/2019 | FRANCE | N°17DA00003

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3 (bis), 09 avril 2019, 17DA00003


Vu la procédure suivante :

Par une décision n° 395557 du 23 décembre 2016, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai n° 14DA00114 du 22 octobre 2015 en tant qu'il se prononce sur l'indemnisation du préjudice ayant résulté du refus d'inscrire Mme F...sur le tableau de garde du centre hospitalier interdépartemental de Clermont-de-l'Oise et a renvoyé l'affaire à la cour dans la limite de la cassation ainsi prononcée.

Par un mémoire, enregistré le 1er mars 2017, le centre hospitalier interdépartemental de Clermont-de-l'Oise, repr

senté par Me G...C..., persiste dans ses conclusions initiales avec les même...

Vu la procédure suivante :

Par une décision n° 395557 du 23 décembre 2016, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai n° 14DA00114 du 22 octobre 2015 en tant qu'il se prononce sur l'indemnisation du préjudice ayant résulté du refus d'inscrire Mme F...sur le tableau de garde du centre hospitalier interdépartemental de Clermont-de-l'Oise et a renvoyé l'affaire à la cour dans la limite de la cassation ainsi prononcée.

Par un mémoire, enregistré le 1er mars 2017, le centre hospitalier interdépartemental de Clermont-de-l'Oise, représenté par Me G...C..., persiste dans ses conclusions initiales avec les mêmes moyens.

Par des mémoires, enregistrés les 13 février 2018 et 4 mars 2019, Mme F...persiste dans ses conclusions initiales par les mêmes moyens. Elle demande, en outre, que la somme de 18 524,10 euros demandée en réparation du dommage résultant de son refus d'inscription sur le tableau de garde du CHI de Clermont-de-l'Oise soit portée à 99 158,40 euros.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- l'arrêté du 30 avril 2003 relatif à l'organisation et à l'indemnisation de la continuité des soins et de la permanence pharmaceutique dans les établissements publics de santé et dans les établissements publics d'hébergement pour personnes âgées dépendantes ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Julien Sorin, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public,

- et les observations de Me D...A..., représentant MmeF..., et de Me H... E..., représentant le CHI de Clermont-de-l'Oise.

Une note en délibéré présentée pour Mme F...a été enregistrée le 21 mars 2019.

Une note en délibéré présentée pour le CHI de Clermont-de-l'Oise a été enregistrée le 26 mars 2019.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B...F...a été nommée praticien hospitalier à compter du 1er septembre 2004 en qualité de psychiatre et affectée au CHI de Clermont-de-l'Oise, secteur de psychiatrie infanto-juvénile de Seguin Sud à l'hôpital école de Montataire. Placée en disponibilité pour convenances personnelles du 15 novembre 2007 au 14 novembre 2008, elle a reçu à son retour une double affectation, son temps de travail étant consacré pour moitié à des consultations ambulatoires au pôle de psychiatrie infanto-juvénile de Seguin Sud-Ouest, centre médico-psychologique de Breteuil, et pour moitié à des fonctions s'inscrivant dans le cadre de la conduite des évaluations des pratiques professionnelles au sein du CHI. Mme F...a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, de condamner le CHI de Clermont-de-l'Oise à l'indemniser de la perte de diverses primes et indemnités, et, d'autre part, d'enjoindre à ce centre hospitalier de l'inscrire sur les tableaux de gardes hospitalières et de lui verser les indemnités prévues par le 4° de l'article D. 6152-23-1 du code de la santé publique. Le tribunal administratif a rejeté sa demande par un jugement du 21 novembre 2013. Par un arrêt du 22 octobre 2015, la cour administrative d'appel de Douai a rejeté l'appel formé par Mme F...contre ce jugement. Par une décision du 15 juin 2016, le Conseil d'Etat a admis les conclusions du pourvoi de Mme F...dirigées contre cet arrêt en tant seulement qu'il se prononce sur l'indemnisation du préjudice causé par le refus de l'inscrire sur le tableau des gardes du centre hospitalier. Par une décision du 23 décembre 2016, il a annulé cet arrêt dans cette mesure et a renvoyé l'affaire à la cour dans la limite de la cassation ainsi prononcée.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 6152-27 du code de la santé publique : " Le praticien peut accomplir, sur la base du volontariat au-delà de ses obligations de service hebdomadaires, un temps de travail additionnel donnant lieu soit à récupération, soit à indemnisation, dans les conditions prévues aux articles R. 6152-23 et R. 6152-26 ". L'article R. 6152-23 du même code dispose que " les praticiens perçoivent après service fait (...) 2° Des indemnités et allocations dont la liste est fixée par décret (...) ". Aux termes de l'article D. 6152-23-1 du même code : " Les indemnités et allocations mentionnées au 2° de l'article R. 6152-23 sont : 1° Des indemnités de participation à la permanence des soins ou de réalisation de périodes de travail au-delà des obligations de service hebdomadaires : (...) b) Des indemnités forfaitaires pour tout temps de travail additionnel accompli, sur la base du volontariat, au-delà des obligations de service hebdomadaires ; / c) Des indemnités correspondant aux astreintes et aux déplacements auxquels elles peuvent donner lieu. / Les indemnités mentionnées aux deux alinéas précédents sont versées lorsque, selon le choix du praticien, le temps de travail additionnel, les astreintes et les déplacements ne font pas l'objet d'une récupération ".

3. Par ailleurs, l'article 4 de l'arrêté du 30 avril 2003 susvisé dispose que " les praticiens hospitaliers (...) peuvent, sur la base du volontariat, assurer des périodes de temps de travail additionnel au-delà de leurs obligations de service dans les conditions fixées par leurs statuts respectifs ". L'article 5 du même arrêté dispose que " le directeur, avec la commission de l'organisation de la permanence des soins, prépare l'organisation des activités et du temps de présence médicale, pharmaceutique et odontologique, après consultation des chefs de service et de département ou des responsables de structure. / Cette organisation est arrêtée annuellement par le directeur après avis de la commission médicale d'établissement. Elle tient compte de la nature, de l'intensité des activités et du budget alloué à l'établissement ". L'article 6 du même arrêté dispose que " la commission médicale d'établissement met en place une commission relative à l'organisation de la permanence des soins ". L'article 9 du même arrêté dispose que " la participation des praticiens à la permanence des soins : A. - Dans le cadre d'un service quotidien de jour suivi d'une permanence sur place, la participation des praticiens se fait de la manière suivante : 1. Les praticiens hospitaliers, les praticiens à temps partiel, les assistants et les assistants associés, les praticiens attachés, les praticiens attachés associés, les praticiens contractuels et les praticiens adjoints contractuels effectuent leurs obligations de service conformément aux dispositions respectives de l'article 30 du décret n° 84-131 du 24 février 1984 susvisé, de l'article 22 du décret du 29 mars 1985 susvisé, de l'article 3 du décret du 28 septembre 1987 susvisé, de l'article 7 du décret du 1er août 2003 visé ci-dessus, de l'article 4-1 du décret du 27 mars 1993 susvisé et de l'article 11 du décret du 6 mai 1995 susvisé. / Les périodes de travail accomplies au titre des obligations de service la nuit, le samedi après-midi, le dimanche ou jour férié donnent lieu au versement d'une indemnité ou d'une demi-indemnité de sujétion. / Un praticien doit justifier, en moyenne sur quatre mois, d'avoir accompli l'ensemble de ses obligations de service, de jour et de nuit. / Le cas échéant, sur la base du volontariat, ces personnels peuvent effectuer des périodes de temps de travail additionnel, le jour ou la nuit, en sus de leurs obligations de service hebdomadaires. Ces périodes donnent lieu au versement d'une indemnité forfaitaire lorsqu'elles ne font pas l'objet d'une récupération ou d'un versement au compte épargne-temps (...) ".

4. Il résulte de ces dispositions que si les praticiens hospitaliers ne détiennent pas un droit à effectuer des périodes de temps de travail additionnel, en sus de leurs obligations de service hebdomadaires, afin de participer à la permanence des soins, l'administration hospitalière ne saurait légalement refuser une telle participation que pour des motifs tenant à l'intérêt du service, à sa bonne organisation, ou à la situation particulière du praticien concerné reposant sur des motifs disciplinaires, professionnels ou médicaux. Aucune disposition, ni aucun principe ne l'autorise en revanche à conditionner cette participation à l'exercice par le praticien hospitalier de missions de nature déterminées au sein du centre hospitalier.

5. En l'espèce, en premier lieu, l'affectation de MmeF..., à la suite de son retour de disponibilité pour convenances personnelles, sur deux sites distincts à des fonctions de consultations ambulatoires, ne saurait légalement s'opposer, par elle-même, à la participation de l'intéressée aux missions de permanence des soins par ailleurs assurées par l'hôpital. Le motif invoqué par le CHI de Clermont-de-l'Oise tenant à cette double affectation est ainsi entaché d'erreur de droit et ne saurait par suite légalement justifier le refus opposé à MmeF....

6. En deuxième lieu, le CHI de Clermont-de-l'Oise n'apporte aucun élément de nature à établir en quoi la participation de Mme F...aux activités de permanence des soins serait de nature à porter atteinte à la bonne organisation ou à l'intérêt du service, notamment en ce qu'elle " aurait conduit à accroître les délais d'attente imposés aux patients suivis par un psychiatre sur cette structure de consultation de proximité " en raison des heures de repos générées par la participation à la permanence de soins, alors qu'en vertu de l'article 4 de l'arrêté susvisé du 30 avril 2003, " une période de temps de travail additionnel peut être, au choix du praticien, rémunérée, récupérée ou versée au compte épargne-temps ". Ce second motif de refus n'est ainsi pas légalement justifié.

7. En troisième lieu, le CHI de Clermont-de-l'Oise n'établit pas plus que la situation personnelle de MmeF..., dont il est invoqué sans plus de précision l'affectation sur deux sites différents, s'opposerait, pour des motifs disciplinaires, professionnels ou médicaux, à sa participation aux missions de permanence des soins. A cet égard, si le CHI invoque les nombreuses absences de MmeF..., celles-ci, à les supposer établies, ne sauraient, par elles-mêmes, fonder, durant plus de deux années, un refus d'inscription sur le tableau des gardes.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme F...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation du CHI de Clermont-de-l'Oise à l'indemniser de la perte des indemnités liées à la participation aux missions réalisées dans le cadre de la permanence des soins.

Sur le préjudice subi, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions indemnitaires de Mme F...formulées en appel :

9. Il résulte de l'instruction que Mme F...aurait pu prétendre à une participation bimensuelle à la permanence des soins entre les mois de janvier 2009, compte tenu de son retour de disponibilité le 14 novembre 2008, et de mars 2012. Il y a toutefois lieu de tenir compte, sur la même période, d'une part, des absences nombreuses et non contestées de l'intéressée et, d'autre part, de ce que les permanences en cause donnent lieu au versement d'une indemnité forfaitaire lorsqu'elles ne font pas l'objet d'une récupération ou d'un versement au compte épargne-temps. Il sera ainsi fait une juste appréciation du préjudice subi en l'évaluant à la somme de 17 850 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 juillet 2011, date de la réception par le CHI de Clermont-de-l'Oise de la demande préalable.

Sur les frais liés à l'instance :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de MmeF..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le CHI de Clermont-de-l'Oise demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de CHI de Clermont-de-l'Oise une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme F...et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le CHI de Clermont-de-l'Oise est condamné à verser à Mme F...la somme de 17 850 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 juillet 2011.

Article 2 : Le jugement n° 1200263 du 21 novembre 2013 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le CHI de Clermont-de-l'Oise versera à Mme F...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...et au centre hospitalier interdépartemental de Clermont-de-l'Oise.

4

N°17DA00003


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 17DA00003
Date de la décision : 09/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-11-01-03 Fonctionnaires et agents publics. Dispositions propres aux personnels hospitaliers. Personnel médical. Praticiens à temps plein.


Composition du Tribunal
Président : Mme Courault
Rapporteur ?: M. Julien Sorin
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : SCP YVES RICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-04-09;17da00003 ?
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