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11/01/2022 | FRANCE | N°21BX03315

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 11 janvier 2022, 21BX03315


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Dans une instance n° 1702381 Mme H... F... épouse A... et M. D... A..., agissant en leur nom propre et en leur qualité de représentants légaux de leurs trois enfants mineurs B..., E... et C..., et K... G..., ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner à titre principal le centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux, et à titre subsidiaire l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), à verser à M. et

Mme A... la somme totale de 17 277 125,07 euros ainsi que deux rentes annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Dans une instance n° 1702381 Mme H... F... épouse A... et M. D... A..., agissant en leur nom propre et en leur qualité de représentants légaux de leurs trois enfants mineurs B..., E... et C..., et K... G..., ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner à titre principal le centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux, et à titre subsidiaire l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), à verser à M. et Mme A... la somme totale de 17 277 125,07 euros ainsi que deux rentes annuelles de 227 424 euros versées trimestriellement, et à Mme G... une somme de 52 060,50 euros en réparation des préjudices en lien avec l'infection nosocomiale contractée par Mme A..., avec intérêts à compter du 17 février 2017 et capitalisation.

La caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants (RSI) a demandé au tribunal de condamner le CHU de Bordeaux à lui verser les sommes de 607 268,10 euros au titre de ses débours échus et de 547 681,29 euros au titre de ses frais futurs, outre les arrérages à échoir de la pension d'invalidité et de la majoration pour tierce personne.

Dans une instance n° 1803059, le CHU de Bordeaux a demandé au tribunal administratif de Bordeaux à titre principal de condamner l'ONIAM à lui verser la somme de 800 000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter des règlements qu'il a effectués en exécution d'ordonnances du juge des référés des 8 novembre 2016 et 3 mai 2017 et à titre subsidiaire d'ordonner une expertise médicale afin de rechercher si un manquement peut lui être reproché.

Par un jugement n°s 1702381, 1803059 du 28 décembre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux :

- a condamné l'ONIAM à verser 1°) à Mme A... une indemnité de 2 171 639,09 euros dont il convient de déduire la somme de 800 000 euros accordée à titre de provision, ainsi qu'une somme de 635 485 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs sous déduction du capital représentatif à échoir de la pension d'invalidité, avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'ONIAM de la demande préalable du 17 février 2017, et capitalisation des intérêts, 2°) à Mme A... une rente pour l'assistance d'une tierce personne de 132,30 euros par jour au prorata du nombre de jours passés par Mme A... au domicile familial, sous déduction de la prestation de compensation du handicap perçue, versée par trimestres échus et revalorisée par application des coefficients fixés à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale, avec intérêts au taux légal à compter du 13 juin 2017 pour les intérêts échus à cette date, et capitalisation des intérêts, 3°) à M. A... la somme de 56 144 euros avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'ONIAM de la demande préalable du 17 février 2017, et capitalisation des intérêts, 4°) à M. et Mme A... en leur qualité de représentants légaux les sommes de 38 502,32 euros au bénéfice de leur fils B..., de 35 000 euros au bénéfice de leur fils E... et de 36 440 euros au bénéfice de leur fils C..., avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'ONIAM de la demande préalable du 17 février 2017, et capitalisation des intérêts, 5°) à Mme G... la somme de 8 060 euros avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'ONIAM de la demande préalable du 17 février 2017, et capitalisation des intérêts ;

- a condamné le CHU de Bordeaux à verser à Mme A... la somme de 20 000 euros, à rembourser à l'ONIAM les sommes mises à la charge de ce dernier et à verser à la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants la somme de 607 268,10 euros ainsi que les frais futurs à débourser pour le compte de Mme A..., sur présentation de justificatifs ;

- a mis à la charge définitive de l'ONIAM les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 3 000 euros et condamné le CHU de Bordeaux à rembourser cette somme à l'ONIAM.

Procédure devant la cour :

Par un arrêt n° 19BX00714, 19BX00880 du 29 juin 2021, la cour administrative d'appel a annulé les articles 1er à 6 et les articles 8 et 9 du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 28 décembre 2018, a rejeté les conclusions d'appel de Mme A... relatives au rehaussement de l'indemnité allouée au titre du préjudice d'impréparation, avant de statuer sur le surplus de la demande indemnitaire de Mme A... et autres, a décidé qu'il serait procédé à une expertise par un collège de deux experts, en présence de Mme A..., du CHU de Bordeaux et de la CPAM du Puy-de-Dôme en vue de déterminer l'évaluation du préjudice en lien avec les conséquences de l'infection, a mis à titre provisionnel à la charge directe du CHU de Bordeaux la somme de 2 226 661,9 euros déjà perçue par Mme A... et des intérêts, a mis à titre provisionnel à la charge du CHU de Bordeaux les indemnités allouées aux points 28 à 32 de l'arrêt, à M. D... A... pour 56 144 euros, à M. et Mme A... pour 4 942,32 euros, à M. B... A..., M. E... A... et M. C... A... pour des montants de 35 000 euros chacun et à Mme G... pour 8 060 euros, a condamné le CHU de Bordeaux à verser à Mme A... une provision complémentaire de 500 000 euros, a condamné le CHU de Bordeaux à verser à la CPAM du Puy-de-Dôme une somme de 667 480,70 euros au titre de ses débours échus au 31 décembre 2020, a mis les frais de l'expertise ordonnée par le juge des référés, liquidés et taxés à la somme de 3 000 euros, à la charge définitive du CHU de Bordeaux et a réservé jusqu'en fin d'instance tous autres droits et moyens des parties.

Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2021, l'ONIAM, représenté par Me Birot, demande à la cour de rectifier l'erreur matérielle dont est affecté l'arrêt 19BX00714, 19BX00880 du 29 juin 2021 en ce qu'il ne l'a pas mis hors de cause.

Il soutient que dans les motifs de son arrêt, la cour a reconnu que l'entier préjudice des victimes devait être réparé au titre des manquements imputables au CHU de Bordeaux et a indiqué que l'ONIAM devait donc être mis hors de cause ; elle n'a cependant pas prononcé cette mise hors de cause dans le dispositif de l'arrêt ; il s'agit d'une erreur matérielle qui peut être rectifiée en application de l'article R. 833-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire, enregistré le 23 septembre 2021, le CHU de Bordeaux, représenté par Me Le Prado, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la cour a indiqué dans les motifs de l'arrêt que l'entière responsabilité du CHU de Bordeaux est engagée et que l'ONIAM doit être mis hors de cause et qu'ainsi, l'ONIAM se trouve entièrement libéré de toute condamnation au profit des consorts A... et G... ; l'arrêt en cause n'est donc entaché d'aucune erreur matérielle susceptible d'avoir exercé une influence sur le jugement de l'affaire.

Par un mémoire, enregistré le 8 décembre 2021, Mme H... A..., M. D... A..., E... A..., M. B... A... et Mme I... G..., représentés par Me Coviaux, déclarent s'en remettre à la décision de la cour quant à la rectification sollicitée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Elisabeth Jayat,

- les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public,

- et les observations de Me Coviaux, représentant Mme A..., M. D... A..., M. B... A... et Mme G....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., qui avait subi une interruption volontaire de grossesse avec pose d'un stérilet au centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux le 22 juillet 2011, a été victime d'un état septique ayant entraîné une défaillance multiviscérale et une nécrose tissulaire massive nécessitant des amputations ainsi que de nombreuses interventions complémentaires. Saisi par Mme A... et son conjoint M. A..., agissant en leur nom propre et en qualité de représentants légaux de leurs trois enfants et par Mme G..., mère de Mme A..., le tribunal administratif de Bordeaux a retenu l'origine nosocomiale de l'infection, en a déduit que l'indemnisation de la victime devait être mise à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), mais a admis l'entière responsabilité pour faute du CHU de Bordeaux. Il a condamné le CHU à rembourser les débours de la caisse en lien avec cette faute à hauteur de 607 268,10 euros, outre les frais futurs sur justificatifs, et à indemniser le préjudice d'impréparation de Mme A... à hauteur de 20 000 euros. Il a condamné l'ONIAM à indemniser les autres préjudices de Mme A..., pour 2 807 124,09 euros, sous déduction du capital de la pension d'invalidité, outre une seule rente pour l'assistance d'une tierce personne, ainsi que les préjudices des membres de sa famille pour un montant total de 174 146 euros, et accordé les intérêts capitalisés. Le tribunal a enfin condamné le CHU de Bordeaux à rembourser l'ONIAM, a mis les frais d'expertise à la charge de l'ONIAM et condamné le CHU de Bordeaux à les rembourser, et a rejeté le surplus des demandes. Mme A..., M. A... et Mme G... ont fait appel de ce jugement en tant qu'il a condamné d'abord l'ONIAM alors que leurs conclusions principales étaient dirigées contre le CHU de Bordeaux, et en tant qu'il n'a pas fait intégralement droit à leurs demandes. Ils ont également demandé à la cour, d'ordonner une nouvelle expertise médicale relative à la détermination des préjudices subis et de condamner le CHU de Bordeaux ou subsidiairement l'ONIAM à verser à Mme A... une provision complémentaire d'un montant de 500 000 euros, et à titre subsidiaire de faire droit à leurs conclusions indemnitaires dirigées principalement contre le CHU de Bordeaux et subsidiairement contre l'ONIAM. Le CHU de Bordeaux a relevé appel du même jugement en tant qu'il a retenu son entière responsabilité et demandé à la cour d'ordonner une nouvelle expertise afin de préciser le taux de perte de chance et de réévaluer les préjudices de Mme A.... Dans les deux instances, l'ONIAM a demandé à titre principal sa mise hors de cause, et à titre subsidiaire la confirmation du jugement en tant qu'il a condamné le CHU de Bordeaux à lui rembourser la totalité des sommes mises à sa charge, et la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme, venant aux droits de la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants, a demandé la condamnation du CHU de Bordeaux à lui rembourser l'intégralité de ses débours.

2. Par arrêt du 29 juin 2021, la cour a jugé, au point 16 des motifs de l'arrêt, que " l'entière responsabilité du CHU de Bordeaux est engagée. Par suite, l'ONIAM doit être mis hors de cause, ce qui implique l'annulation des articles 1er à 5 du jugement le condamnant à verser diverses sommes à Mme A... et autres, de l'article 6 mettant à sa charge les frais d'expertise, et par voie de conséquence de l'article 8 condamnant le CHU de Bordeaux à rembourser à l'ONIAM les sommes mises à sa charge par les articles 1er à 6 ". Le dispositif de l'arrêt prononce l'annulation de ces articles du jugement. La cour a par ailleurs confirmé la condamnation mise à la charge du CHU en première instance au titre du préjudice d'impréparation et mis à la charge directe de cet établissement et à titre provisionnel, la somme de 2 226 661,90 euros, déjà perçue par Mme A... et mise par le tribunal à la charge de l'ONIAM avec remboursement par le CHU. La cour a encore mis à la charge du CHU à titre provisionnel les sommes allouées aux membres de la famille de Mme A.... La cour a également ordonné une expertise relative à la détermination du préjudice autre que l'impréparation, au contradictoire de Mme A..., du CHU de Bordeaux et de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Puy-de-Dôme, à l'exclusion de l'ONIAM et mis une provision complémentaire de 500 000 euros à la charge du CHU. Elle a condamné le CHU de Bordeaux à verser à la CPAM du Puy-de-Dôme une somme de 667 480,70 euros au titre de ses débours échus au 31 décembre 2020. Enfin, la cour a mis les frais de l'expertise ordonnée par le juge des référés à la charge du CHU.

3. Aux termes de l'article R. 833-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'une décision d'une cour administrative d'appel ou du Conseil d'Etat est entachée d'une erreur matérielle susceptible d'avoir exercé une influence sur le jugement de l'affaire, la partie intéressée peut introduire devant la juridiction qui a rendu la décision un recours en rectification (...) ".

4. L'ONIAM demande la rectification de l'arrêt du 29 juin 2021 en tant qu'il ne prononce pas sa mise hors de cause dans son dispositif.

5. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la cour, eu égard aux termes des motifs de l'arrêt, a entendu mettre l'ONIAM hors de cause dans le litige relatif à l'accident médical dont Mme A... a été victime. Elle a, comme il a été dit, annulé les articles 1er à 6 du jugement du tribunal du 28 décembre 2018 portant condamnation de l'ONIAM à verser des indemnités à Mme A... et aux membres de sa famille et à supporter les frais d'expertise. En mettant à la charge directe du CHU la somme de 2 226 661,90 euros versée à Mme A..., à titre provisionnel, ainsi que les indemnités allouées aux membres de la famille de Mme A..., à titre provisionnel également, et les frais de l'expertise ordonnée en référé, la cour a implicitement mais nécessairement rejeté, à hauteur de ces sommes, les conclusions subsidiaires des victimes dirigées contre l'ONIAM. Elle n'a, en revanche, pas statué, dans le dispositif de l'arrêt, sur la charge du surplus des indemnités dues aux victimes, dont le montant est à déterminer après expertise. Par suite, la cour n'a pas, dans le dispositif de l'arrêt du 29 juin 2021, rejeté l'ensemble des conclusions de première instance et d'appel dirigées contre l'ONIAM. Ainsi, l'absence, dans le dispositif de l'arrêt, d'une mise hors de cause expresse de l'ONIAM est susceptible d'avoir exercé une influence sur le jugement de l'affaire. Il y a lieu, en conséquence, de rectifier l'arrêt du 29 juin 2021 en ajoutant, après l'article 1er du dispositif de l'arrêt, un article 2 ainsi rédigé : " L'ONIAM est mis hors de cause " et en numérotant de 3 à 15 les articles suivants numérotés 2 à 14.

DECIDE :

Article 1er : Le recours en rectification d'erreur matérielle de l'ONIAM est admis.

Article 2 : Après l'article 1er du dispositif de l'arrêt de la cour n° 19BX00714, 19BX00880 du 29 juin 2021, il est inséré un article 2 ainsi rédigé : " L'ONIAM est mis hors de cause ". Les articles suivants numérotés 2 à 14 sont numérotés 3 à 15.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à Mme H... F... épouse A..., à M. D... A..., à M. B... A..., à Mme I... G..., au centre hospitalier universitaire de Bordeaux, à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme et à la compagnie Allianz.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Laury Michel, première conseillère,

Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 janvier 2022.

La première assesseure,

Laury Michel

La présidente-rapporteure,

Elisabeth Jayat La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

3

N° 21BX03315


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-08-05 Procédure. - Voies de recours. - Recours en rectification d'erreur matérielle.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Date de la décision : 11/01/2022
Date de l'import : 18/01/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 21BX03315
Numéro NOR : CETATEXT000044993475 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-01-11;21bx03315 ?
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