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11/01/2022 | FRANCE | N°21BX01420

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 11 janvier 2022, 21BX01420


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de la Martinique de juger, d'une part que les décisions du 10 février 2020 par lesquelles le préfet de la Martinique l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire national pendant une durée de deux ans sont caduques, et d'autre part, que la décision du préfet de rejeter sa demande en vue de constituer une demande de titre de séjour est nulle et de nul effet.

Par une ordonnance n

2100138 du 16 mars 2021, le président du tribunal administratif de la Martiniqu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de la Martinique de juger, d'une part que les décisions du 10 février 2020 par lesquelles le préfet de la Martinique l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire national pendant une durée de deux ans sont caduques, et d'autre part, que la décision du préfet de rejeter sa demande en vue de constituer une demande de titre de séjour est nulle et de nul effet.

Par une ordonnance n° 2100138 du 16 mars 2021, le président du tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 mars 2021, M. A..., représenté par Me Monotuka, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 16 mars 2021 du président du tribunal administratif de la Martinique ;

2°) de dire et juger que les décisions du 10 février 2020 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont caduques et de nul effet ;

3°) de dire et juger que la décision du 29 janvier 2021 par laquelle le préfet a refusé sa demande de constituer un dossier de demande de titre de séjour est nulle et de nul effet ;

4°) d'enjoindre au préfet de lui remettre un dossier de demande de titre de séjour.

Il soutient que :

- pour rejeter sa demande comme irrecevable sur le fondement de l'article R. 222-1 4° du code de justice administrative, le président du tribunal s'est mépris sur la portée de ses conclusions qui tendaient au constat de la caducité des décisions attaquées, à la nullité de la décision refusant la remise d'un dossier de demande de titre de séjour et à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui remettre un titre de séjour au titre de la vie privée et familiale ;

- il s'est rendu le 29 janvier 2021 à la préfecture en vue de solliciter un dossier de demande de titre de séjour en qualité de parent d'un enfant né en France et il s'est vu opposer un refus au motif qu'il n'avait pas exécuté les mesures d'éloignement et d'interdiction de retour sur le territoire national de deux ans prises à son encontre le 10 février 2020 ;

- les décisions du 10 février 2020 n'ayant pas été exécutées, un an passé après leurs notifications, elles sont caduques et de nul effet.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Birsen Sarac-Deleigne a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant haïtien, né le 16 février 1991, est entré irrégulièrement en France le 1er mai 2019 selon ses déclarations. Il a présenté le 4 juin 2019 une demande d'admission au séjour au titre de l'asile qui a été rejetée par décision du 30 août 2019 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 28 octobre 2019. Par un arrêté du 10 février 2020, le préfet de la Martinique l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le pays de renvoi de cette mesure d'éloignement et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Le 29 janvier 2021, M. A... s'est présenté au guichet de la préfecture pour retirer un dossier de demande de titre de séjour. Il doit être regardé comme relevant appel de l'ordonnance du 16 mars 2021 par lequel le président du tribunal administratif de la Martinique a rejeté comme manifestement irrecevable sa demande tendant au constat de la caducité des arrêtés du 10 février 2020 et à l'annulation du refus du préfet de la Martinique de lui remettre un dossier de demande de titre de séjour.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

En ce qui concerne la recevabilité des conclusions tendant à ce que soit constatée la caducité des arrêtés du 10 février 2020 :

2. Si M. A... a demandé au tribunal de constater la caducité des arrêtés du 10 février 2020 par lesquels le préfet de la Martinique l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire pour une durée de deux ans, ces conclusions ne sont dirigées contre aucune décision par laquelle l'autorité administrative se serait prononcée sur une demande tendant à voir constater la caducité desdits arrêtés, le refus de remettre un formulaire de demande de titre de séjour par un agent de guichet ne pouvant être regardé comme constitutif d'une telle décision. Il n'appartient pas au juge de l'excès de pouvoir de constater directement et à titre principal la caducité de décisions administratives dont il n'est pas saisi. Ainsi, les conclusions susmentionnées sont irrecevables, ainsi que l'a estimé le premier juge.

En ce qui concerne la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision préfectorale refusant de remettre un dossier permettant de déposer une demande de titre de séjour :

3. Aux termes de l'article R. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Tout étranger, âgé de plus de dix-huit ans ou qui sollicite un titre de séjour (...) est tenu de se présenter (...) à la préfecture ou à la sous-préfecture, pour y souscrire une demande de titre de séjour du type correspondant à la catégorie à laquelle il appartient (...) ". Aux termes de l'article R. 311-4 du même code : " Il est remis à tout étranger admis à souscrire une demande de première délivrance ou de renouvellement de titre de séjour un récépissé qui autorise la présence de l'intéressé sur le territoire pour la durée qu'il précise (...) ".

4. Il résulte de ces dispositions que tout étranger, qui est tenu de se présenter en préfecture pour y souscrire une demande de titre de séjour, est en droit de demander et d'obtenir la délivrance d'un formulaire de demande. En l'espèce, M. A... soutient qu'il " s'est rendu le 29 janvier 2021 à la préfecture afin de solliciter un dossier de demande de titre de séjour, en sa qualité de parent d'un enfant né en France " et que le service de l'accueil des étrangers a refusé de lui remettre ledit dossier au motif qu'il n'avait pas exécuté les décisions du 10 février 2020 portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour pour une durée de deux mois. Toutefois, M. A... entendait se prévaloir, pour demander la délivrance d'un titre de séjour, de la naissance de son enfant le 11 août 2020, et l'interdiction de retour sur le territoire prise à son encontre ne mettait pas le préfet dans une situation de compétence liée pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour, alors même que l'intéressé n'avait pas quitté le territoire national ni sollicité l'abrogation de l'interdiction de retour sur le territoire. Dans ces conditions, le refus de délivrance d'un formulaire de demande de titre de séjour à M. A..., dont la demande de titre de séjour n'était pas, par principe, vouée au rejet, lui fait grief. Par suite, c'est à tort que le président du tribunal a rejeté comme irrecevable la demande dont il était saisi. L'ordonnance du 25 août 2020 est donc irrégulière dans cette seule mesure.

5. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de la Martinique tendant à l'annulation du refus verbal du 29 juin 2021 de remettre le formulaire de demande de titre de séjour

Sur la légalité de la décision verbale du 29 janvier 2021 refusant la remise d'un dossier de demande de titre de séjour :

6. Ainsi qu'il a été dit précédemment, tout étranger, qui est tenu de se présenter en préfecture pour y souscrire une demande de titre de séjour, est en droit de demander et d'obtenir la délivrance d'un formulaire et la circonstance que M. A... n'avait pas quitté le territoire français malgré l'obligation qui lui en avait été faite et qu'il n'avait pas demandé l'abrogation de l'interdiction de retour sur le territoire français ne plaçait pas l'administration en situation de compétence liée pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour. Il ne ressort par ailleurs d'aucune pièce du dossier que la demande de M. A... de délivrance d'un formulaire aurait été abusive. Dans ces conditions, le préfet n'a pu légalement refuser de lui remettre ce dossier au motif qu'il aurait fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français exécutoire. Le requérant est par suite fondé à demander l'annulation de ce refus qui lui a été opposé le 29 janvier 2021.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. En application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Martinique d'adresser, dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, une convocation à M. A... afin de lui remettre le formulaire de demande de titre de séjour qu'il sollicitait.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 2100138 du 16 mars 2021 du président du tribunal administratif de la Martinique est annulée en tant qu'elle rejette les conclusions de M. A... dirigées contre le refus de remise du formulaire de demande de titre de séjour.

Article 2 : La décision de refus de remise du formulaire de demande de titre de séjour prise le 29 janvier 2021 à l'encontre de M. A... au guichet de la préfecture de la Martinique est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Martinique d'adresser, dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, une convocation à M. A... afin de lui remettre le formulaire de demande de titre de séjour.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Martinique.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2021 laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Laury Michel, première conseillère,

Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 janvier 2022.

La rapporteure,

Birsen Sarac-DeleigneLa présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 21BX01420


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01420
Date de la décision : 11/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Procédure - Introduction de l'instance - Liaison de l'instance.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Birsen SARAC-DELEIGNE
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : MONOTUKA

Origine de la décision
Date de l'import : 18/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-01-11;21bx01420 ?
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