La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/10/2021 | FRANCE | N°19BX03487

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 28 octobre 2021, 19BX03487


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision du 14 mars 2018 par laquelle le président du conseil régional de La Réunion lui a refusé le bénéfice de l'aide à la mobilité vers des pays étrangers et d'enjoindre à la région de La Réunion de lui attribuer cette aide pour un montant de 4 600 euros.

Par un jugement n° 1800456 du 18 janvier 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de La Réunion a fait droit à sa demande.

Procédure dev

ant la cour :

Par une ordonnance n° 428772 du 17 août 2019, enregistrée le 12 septembre 2019, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision du 14 mars 2018 par laquelle le président du conseil régional de La Réunion lui a refusé le bénéfice de l'aide à la mobilité vers des pays étrangers et d'enjoindre à la région de La Réunion de lui attribuer cette aide pour un montant de 4 600 euros.

Par un jugement n° 1800456 du 18 janvier 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de La Réunion a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une ordonnance n° 428772 du 17 août 2019, enregistrée le 12 septembre 2019, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article R. 351-1 du code de justice administrative, la requête enregistrée le 12 mars 2019 présentée par la région de La Réunion.

Par cette requête et des mémoires enregistrés les 5 juin 2019 et 14 septembre 2020, la région de La Réunion, représentée par la SCP Colin - Stoclet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de Mme B... ;

3°) de mettre à la charge de Mme B... une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement du tribunal administratif est irrégulier dès lors que la requête ne relevait pas des litiges visés à l'article R. 222-13 du code de justice administrative ;

- ce jugement est insuffisamment motivé s'agissant de l'examen de la demande d'injonction ;

- le tribunal a jugé à tort que la formation suivie en Chine par Mme B... constituait une formation diplômante dès lors que le certificat délivré à l'issue de cette formation ne peut être regardé comme un diplôme et que la notion de " cursus diplômant de formation initiale " au sens du règlement de l'aide en litige doit nécessairement être apprécié au regard de la définition de diplôme au sens du code de l'éducation ;

- c'est à tort que le tribunal a considéré que Mme B... remplissait les conditions pour bénéficier de cette aide alors qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier et il n'était d'ailleurs pas allégué par l'intéressée qu'elle remplissait l'ensemble des autres conditions pour l'obtenir ; l'injonction ne pouvait porter que sur un réexamen.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2021, Mme B..., représentée par la SCP Buk Lament-Robillot, conclut au rejet de la requête et demande une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la région ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christelle Brouard-Lucas,

- et les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., qui était inscrite à l'Université " East China Normal University " de Shanghai pour y suivre une formation dénommée " standard chinese language program ", a présenté au titre de l'année universitaire 2017/2018 une demande d'aide à la mobilité vers les pays étrangers, instaurée par une délibération de la commission permanente du conseil régional de La Réunion du 27 juin 2017. Elle a demandé au tribunal administratif de La Réunion l'annulation de la décision du 14 mars 2018 par laquelle le président du conseil régional a rejeté cette demande. Par un jugement n° 1800456 du 18 janvier 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de La Réunion a annulé cette décision et enjoint à la région de verser à Mme B... l'aide demandée. La région de La Réunion relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 222-1 du code de justice administrative : " Les jugements des tribunaux administratifs (...) sont rendus par des formations collégiales, sous réserve des exceptions tenant à l'objet du litige ou à la nature des questions à juger. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 222-13 du même code, dans sa version en vigueur à la date du jugement attaqué : " Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue en audience publique et après audition du rapporteur public, sous réserve de l'application de l'article R. 732-1-1 : 1° Sur les litiges relatifs aux prestations, allocations ou droits attribués au titre de l'aide ou de l'action sociale, du logement ou en faveur des travailleurs privés d'emploi, mentionnés à l'article R. 772-5 ; 2° Sur les litiges relatifs à la notation ou à l'évaluation professionnelle des fonctionnaires ou agents publics ainsi qu'aux sanctions disciplinaires prononcées à leur encontre qui ne requièrent pas l'intervention d'un organe disciplinaire collégial ; 3° Sur les litiges en matière de pensions ; 4° Sur les litiges en matière de consultation et de communication de documents administratifs ou d'archives publiques ; 5° Sur les litiges relatifs aux impôts locaux et à la contribution à l'audiovisuel public, à l'exception des litiges relatifs à la contribution économique territoriale ; 6° Sur les litiges relatifs aux refus de concours de la force publique pour exécuter une décision de justice ; 7° Sur les requêtes contestant les décisions prises en matière fiscale sur des demandes de remise gracieuse ; 8° Sur les litiges relatifs aux bâtiments menaçant ruine ou aux immeubles insalubres ; 9° Sur les litiges relatifs au permis de conduire ; 10° Sauf en matière de contrat de la commande publique sur toute action indemnitaire ne relevant pas des dispositions précédentes, lorsque le montant des indemnités demandées n'excède pas le montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15. ".

3. Les conclusions présentées par Mme B... devant le tribunal administratif de La Réunion tendant à l'annulation de la décision du président du conseil régional de La Réunion du 14 mars 2018 lui refusant le bénéfice de l'aide à la mobilité vers des pays étrangers n'entrent dans aucun des cas mentionnés à l'article R. 222-13 du code de justice administrative, et n'entrent notamment pas dans le champ de l'aide ou de l'action sociale visée au 1° de cet article, et devaient en conséquence faire l'objet d'un jugement rendu par le tribunal administratif en formation collégiale. Dès lors, le jugement attaqué, qui a été rendu par un magistrat statuant seul, est irrégulier.

4. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres irrégularités invoquées par la requérante, qu'il y a lieu d'annuler ce jugement et de statuer, par voie d'évocation, sur la demande de Mme B....

Sur les conclusions à fin d'annulation :

5. Le règlement du dispositif d'accompagnement et suivi des jeunes en mobilité, lycéens et étudiants au titre de l'année universitaire 2017-2018, approuvé par la délibération de la commission permanente du conseil régional de La Réunion du 27 juin 2017, prévoit parmi les règles d'attribution de l'aide à la mobilité vers les pays étrangers pour l'année que l'étudiant doit " être inscrit dans un cursus diplômant de formation initiale dans un pays étranger ". La décision de refus en litige est fondée sur le motif que la formation " standard chinese language program " suivie par Mme B... au sein de l'université " East China Normal University ", située à Shanghai, ne pouvait être regardée comme un cursus diplômant au sens de ce règlement.

6. Il ressort des pièces du dossier que la formation suivie par Mme B..., ouverte aux personnes de 16 à 60 ans disposant d'un passeport valide, qui est destinée aux étudiants qui veulent mieux connaître la culture chinoise et améliorer leurs compétences en langue chinoise, n'est soumise à aucune condition préalable de niveau scolaire ou de diplôme. La répartition des étudiants par classe intervient uniquement sur la base des tests de placement réalisés par l'institution et le certificat délivré à l'issue de cette formation a pour seul objet d'attester du suivi de la formation et des résultats obtenus, qui peuvent ensuite être éventuellement valorisés dans le cadre d'un cursus diplômant. A cet égard la page du site internet de la " East China Normal University " produite par la requérante distingue les programmes de formation en langue des admissions en premier cycle et dans les cycles supérieurs, ce qui est d'ailleurs confirmé par le courriel de l'université produit par la région. Ainsi, quand bien même la formation suivie est organisée en plusieurs niveaux, comporte plus de 400 heures de cours et délivre un certificat final sur la base d'un contrôle des connaissances sous forme de contrôle continu et terminal, elle ne peut être regardée comme un cursus diplômant de formation initiale au sens du règlement précité. Par suite, la région, qui ne s'est pas fondée sur l'article L. 613-1 du code de l'éducation, et n'a pris en compte l'absence d'équivalence avec un diplôme français que dans le cadre de l'application d'un faisceau d'indices, n'a commis ni erreur de droit ni erreur d'appréciation en refusant pour ce motif l'aide à la mobilité vers les pays étrangers.

7. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme B... doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la région de La Réunion, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de la région de La Réunion présentée sur le même fondement.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 18 janvier 2019 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de La Réunion est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de La Réunion et ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de la région de La Réunion présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la région de La Réunion et à Mme A... B....

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme Christelle Brouard-Lucas, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 octobre 2021.

La rapporteure,

Christelle Brouard-LucasLa présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au préfet de La Réunion, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX03487 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX03487
Date de la décision : 28/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

30-02-05-07-01 Enseignement et recherche. - Questions propres aux différentes catégories d'enseignement. - Enseignement supérieur et grandes écoles. - Statut des étudiants. - Bourses.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Christelle BROUARD-LUCAS
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SCP COLIN STOCLET

Origine de la décision
Date de l'import : 09/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-10-28;19bx03487 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award