La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/10/2021 | FRANCE | N°21BX01194

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 21 octobre 2021, 21BX01194


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 12 avril 2019 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, ainsi que la décision du 13 juin 2019 de rejet de son recours gracieux formé contre cette décision.

Par un jugement n° 1905071-2001031 du 15 juillet 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 mars et 28 juin 202

1, et des pièces complémentaires, enregistrées le 12 avril 2021, M. B..., représenté par Me Geor...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 12 avril 2019 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, ainsi que la décision du 13 juin 2019 de rejet de son recours gracieux formé contre cette décision.

Par un jugement n° 1905071-2001031 du 15 juillet 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 mars et 28 juin 2021, et des pièces complémentaires, enregistrées le 12 avril 2021, M. B..., représenté par Me Georges, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 juillet 2020 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 avril 2019 du préfet de la Gironde ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux présenté le 13 juin 2019 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer le titre de séjour sollicité ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi sur l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté litigieux est entaché d'une erreur de droit quant à l'application du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 371-2 du code civil ; cet arrêté est également entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions ;

- cet arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juin 2021, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Elle confirme les termes du mémoire transmis en première instance.

Par une décision n° 2020/014504 du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Bordeaux du 11 février 2021, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code civil ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Nathalie Gay, rapporteure,

- Et les observations de Me Mathey, pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant tunisien né le 19 mai 1997, est entré en France le 2 décembre 2016, selon ses déclarations. Le 31 août 2018, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 12 avril 2019, le préfet de la Gironde a rejeté sa demande de titre de séjour. Le 13 juin 2019, M. B... a formé un recours gracieux à l'encontre de cet arrêté. Il doit être regardé comme relevant appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ainsi que de la décision du 27 décembre 2019 rejetant son recours gracieux.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 6° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ". En vertu de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est père d'une enfant française née le 29 mai 2018, qu'il a reconnue par anticipation le 22 novembre 2017. Par un jugement du 25 juillet 2019, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bordeaux a confié l'exercice exclusif de l'autorité parentale à la mère " compte tenu du faible investissement du père dans la vie de son enfant " et du fait qu'il était " peu présent " dans sa vie. Il a également limité son droit de visite à deux heures, un samedi sur deux, dans un point rencontre, et a fixé la pension alimentaire à la somme de 80 euros par mois. Si M. B... produit dix mandats de transfert d'argent à son ancienne compagne, dont six effectués entre février et septembre 2019 et quatre entre mai et septembre 2020, soit postérieurement aux décisions litigieuses, pour des montants compris entre 80 euros et 240 euros, ainsi que des tickets de caisse et des factures justifiant l'achat de vêtements et de jouets pour sa fille pour des montants compris entre 18 euros et 189 euros, il ressort des pièces du dossier que ces virements, quand bien même ils seraient réguliers, n'ont débuté qu'à compter du 22 février 2019, soit neuf mois après la naissance de sa fille. Par ailleurs, l'intéressé ne justifie d'aucun virement d'octobre 2019 à avril 2020, soit pendant sept mois. En outre, M. B... n'établit pas, par les autres pièces qu'il produit, qu'il voit réellement sa fille et qu'il exerce le droit de visite qui lui a été accordé par le juge aux affaires familiales dans son jugement du 25 juillet 2019. En effet, les quatre attestations de son ancienne compagne, dont trois sont postérieures aux décisions litigieuses, se bornent à indiquer qu'il lui verse effectivement une pension alimentaire de 80 euros. Si deux d'entre elles indiquent qu'il rend régulièrement visite à sa fille au domicile de la mère, elles sont peu circonstanciées et ne permettent pas de tenir pour établie une participation effective de M. B... à l'éducation de sa fille. Il en est de même des photographies produites, non datées. Au surplus, si l'intéressé se prévaut de la convention parentale qu'il aurait signée avec son ancienne compagne prévoyant l'exercice conjoint de l'autorité parentale et un droit de visite et d'hébergement, à défaut d'accord, à un week-end sur deux et la moitié des vacances scolaires, ainsi que de la requête conjointe en homologation de cette convention qu'ils auraient introduite devant le juge aux affaires familiales, ces documents, datés du 4 avril 2021 et du 9 avril 2021, sont postérieurs aux décisions litigieuses, et par suite sans incidence sur la légalité des décisions contestées qui s'apprécie à la date de leur édiction. Dans ces conditions, l'appelant ne justifie pas, à la date des décisions litigieuses, contribuer à l'entretien et à l'éducation de son enfant depuis sa naissance ou depuis au moins deux ans. Par suite, c'est sans méconnaître les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 371-2 du code civil, ni commettre d'erreur manifeste d'appréciation, que la préfète de la Gironde a refusé de délivrer à M. B... le titre de séjour sollicité.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Il ressort des pièces du dossier, ainsi que cela a été dit au point 3, que M. B... n'établit pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille depuis sa naissance ou depuis au moins deux ans. En outre, M. B..., qui est entré irrégulièrement en France, est célibataire, sans emploi et ne justifie pas d'un logement stable. Il n'allègue pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident toujours ses parents et un membre de sa fratrie et où il a vécu la majeure partie de sa vie. Par ailleurs, l'intéressé ne fait état d'aucune intégration socioprofessionnelle particulière sur le territoire français. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet de la Gironde aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Dans ces conditions, les décisions litigieuses n'ont pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ces mêmes circonstances ne permettent pas davantage de faire regarder les décisions contestées comme étant entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle et familiale de M. B....

6. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. (...) ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

7. Ainsi qu'il a été dit au point 3, les éléments produits par M. B... ne permettent pas d'établir qu'il participait, à la date des décisions contestées, effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille depuis sa naissance ou depuis au moins deux ans. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet de la Gironde doivent être écartés.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 avril 2019 et de la décision du 27 décembre 2019. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise pour information à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 23 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

Mme Nathalie Gay, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 octobre 2021.

La rapporteure,

Nathalie Gay

Le président

Éric Rey-BèthbéderLa greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

3

N° 21BX01194


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : GEORGES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 21/10/2021
Date de l'import : 02/11/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 21BX01194
Numéro NOR : CETATEXT000044238752 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-10-21;21bx01194 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award