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06/07/2021 | FRANCE | N°20BX02650

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 06 juillet 2021, 20BX02650


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 26 février 2020 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit.

Par un jugement n° 2000898 du 8 juillet 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12

août 2020, M. A..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 26 février 2020 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit.

Par un jugement n° 2000898 du 8 juillet 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 août 2020, M. A..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 8 juillet 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 février 2020 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous une astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai, subsidiairement de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ces délais ;

4°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

s'agissant du refus de délivrance d'un titre de séjour :

- il est entaché d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- le préfet qui s'est estimé à tort lié par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a méconnu l'étendue du champ de sa compétence ;

- il méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- l'illégalité du refus de titre de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français ;

- le préfet a méconnu les articles 2, 3, 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a méconnu le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

s'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- le préfet a méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2021, le préfet de la Vienne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... ressortissant guinéen né le 2 avril 1981, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 4 septembre 2016. Sa demande de reconnaissance du statut de réfugié a été rejetée par une décision du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 31 octobre 2017, confirmée le 8 juin 2018 par la Cour nationale du droit d'asile. M. A... a demandé, le 6 avril 2018, la délivrance d'un titre de séjour temporaire en qualité d'étranger malade. M. A... relève appel du jugement du 8 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Vienne du 26 février 2020, portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, l'appelant se borne à reprendre en appel les moyens tirés d'une insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier de sa situation, sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux. Dans ces conditions, il y a lieu, par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges, d'écarter ces moyens.

3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment des termes mêmes de la décision litigieuse, que le préfet qui s'est approprié l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, se serait estimé lié par cet avis. Par suite, le moyen tiré d'une erreur de droit en ce que le préfet aurait méconnu l'étendue du champ de ses compétences doit être écarté.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. ".

5. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif saisi de l'affaire, au vu des pièces du dossier et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi et de la possibilité d'y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

6. Il ressort des pièces du dossier, que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a rendu, le 28 novembre 2018, un avis selon lequel l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Les éléments médicaux produits à l'instance, notamment l'attestation d'un praticien hospitalier du 29 avril 2019 certifiant que l'intéressé est atteint d'une hépatite B à mutant pré-C à faible charge virale nécessitant une surveillance clinique, biologique et échographique tous les 6 mois en raison d'un risque carcinologique, ne peuvent suffire à infirmer l'avis émis collégialement par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Par suite, le préfet n'a pas méconnu les dispositions citées ci-dessus du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

8. Il ressort des pièces du dossier que la durée du séjour en France de M. A... est en majeure partie consécutive à l'instruction de sa demande d'asile en définitive rejetée. Il a déclaré être célibataire et avoir quatre enfants résidant en Guinée et est entré en France à l'âge de 35 ans. Par ailleurs, il ne justifie pas d'une particulière insertion dans la société française. Dans ces conditions, le préfet n'a pas, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

9. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour doit être écarté.

10. Pour les mêmes motifs que ceux qui ont été développés aux points 6 et 8 ci-dessus, les moyens tirés de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce, et des stipulations des articles 2, 3, 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

11. La décision fixant le pays de renvoi est régulièrement motivée en droit, notamment par le visa des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et par celui de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cette décision est également suffisamment motivée en fait par l'indication que l'intéressé, qui ne démontre pas être exposé personnellement à des peines ou traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, peut être éloigné à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays où il établit être légalement admissible. Il suit de là que le moyen tiré d'un défaut de motivation doit être écarté.

12. Ainsi que l'ont retenu les premiers juges, M. A... n'établit pas les risques personnels et actuels qu'il encourrait en cas de retour dans son pays d'origine. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, en conséquence, être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 10 juin 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

M. C... B..., président-assesseur,

Mme G... D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2021.

Le rapporteur,

Didier B...

La présidente,

Marianne HardyLa greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 20BX02650


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20BX02650
Date de la décision : 06/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SCP BREILLAT DIEUMEGARD MASSON

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-07-06;20bx02650 ?
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