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08/06/2021 | FRANCE | N°19BX00577

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 08 juin 2021, 19BX00577


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Gecas France a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer le remboursement du trop versé d'impôt sur les sociétés, acquitté au titre des années 2012 et 2013 pour des sommes respectives de 1 511 113 euros et 1 392 887 euros et d'assortir cette restitution des intérêts moratoires.

Par un jugement n° 1603576 du 18 décembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 févrie

r 2019, et des mémoires, enregistrés le 3 décembre 2019 et le 23 septembre 2020, la SARL Gecas F...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Gecas France a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer le remboursement du trop versé d'impôt sur les sociétés, acquitté au titre des années 2012 et 2013 pour des sommes respectives de 1 511 113 euros et 1 392 887 euros et d'assortir cette restitution des intérêts moratoires.

Par un jugement n° 1603576 du 18 décembre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 février 2019, et des mémoires, enregistrés le 3 décembre 2019 et le 23 septembre 2020, la SARL Gecas France, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 18 décembre 2018 ;

2°) de prononcer la restitution de la somme de 2 904 000 euros au titre du trop versé d'impôt sur les sociétés pour les exercices 2012 et 2013 ainsi que les intérêts y afférents ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif de Toulouse a commis une double erreur de droit en considérant, d'une part, que l'indemnité perçue ne visait pas à réparer un dommage économique subi par la société et, d'autre part, qu'il n'était pas tenu de tenir compte de l'analyse juridique des contrats de location au regard du droit anglais, et n'a aucunement motivé son jugement ; les conditions posées par la jurisprudence sont vérifiées dans la mesure où l'indemnité vise à compenser le supplément d'impôt sur les sociétés mis à sa charge, charge exclue des charges déductibles en vertu de l'article 213 du code général des impôts ;

- les indemnités versées en vertu d'une obligation de réparation et visant à compenser une perte ou une charge non déductible ne sont pas imposables ; en l'espèce, l'indemnité vise à compenser le supplément d'impôt sur les sociétés mis à la charge de la société, charge exclue des charges déductibles en vertu de l'article 213 du code général des impôts ;

- relever que certains locataires ont refusé d'acquitter l'indemnité litigieuse et en fonder une analyse juridique sur le caractère indemnitaire de ces sommes constitue une erreur de fait et de droit commise par le tribunal.

Par mémoires en défense, enregistrés les 26 août 2019, 18 septembre 2020 et 23 octobre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 24 septembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 26 octobre 2020 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C... B...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique,

- et les observations de Me A... représentant la SARL Gecas.

Une note en délibéré présentée par Me A..., pour la Sarl Gecas France, a été enregistrée le 11 mai 2021.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Gecas France dont le siège social est à Blagnac, exerce une activité de location d'aéronefs qu'elle prend à bail à des sociétés liées situées en Irlande pour les sous-louer à des sociétés aériennes tierces. Elle a refacturé aux sociétés locataires des aéronefs l'augmentation d'impôt sur les sociétés découlant de la mise en oeuvre de l'article 212 bis du code général des impôts. Estimant avoir à tort intégré ce produit exceptionnel dans ses bénéfices imposables, elle a présenté une réclamation à l'administration tendant à obtenir le remboursement de la fraction d'impôt sur les sociétés des exercices clos en 2012 et en 2013 découlant de l'imposition de ce produit exceptionnel. Sa réclamation ayant été rejetée le 18 juin 2016, la SARL Gecas France a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'ordonner le remboursement du trop-versé d'impôt sur les sociétés pour les exercices clos en 2012 et en 2013, pour des montants respectifs de 1 511 113 euros et 1 392 887 euros. La société Gecas France relève appel du jugement du 18 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

2. D'une part, aux termes de l'article 212 bis du code général des impôts issu de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 s'appliquant à l'impôt dû par les sociétés sur les résultats des exercices clos à compter du 31 décembre 2012 : " I. - Les charges financières nettes afférentes aux sommes laissées ou mises à disposition d'une entreprise non membre d'un groupe, au sens de l'article 223 A, sont réintégrées au résultat pour une fraction égale à 15 % de leur montant. / II. - Le I ne s'applique pas lorsque le montant total des charges financières nettes de l'entreprise est inférieur à trois millions d'euros. / III. - Pour l'application des I et II, le montant des charges financières nettes est entendu comme le total des charges financières venant rémunérer des sommes laissées ou mises à disposition de l'entreprise, diminué du total des produits financiers venant rémunérer des sommes laissées ou mises à disposition par l'entreprise. / Les charges et produits mentionnés au premier alinéa du présent III incluent le montant des loyers, déduction faite de l'amortissement, de l'amortissement financier pratiqué par le bailleur en application du I de l'article 39 C et des frais et prestations accessoires facturés au preneur en cas d'opération de crédit-bail, de location avec option d'achat ou de location de biens mobiliers conclue entre entreprises liées au sens du 12 de l'article 39. / IV. - Pour l'application du I, le montant des charges financières est diminué des fractions des charges financières non admises en déduction en application du IX de l'article 209 et de l'article 212. / (...) ".

3. D'autre part, les indemnités versées à un contribuable pour réparer une diminution subie par lui de ses valeurs d'actif, une dépense qu'il a exposée ou une perte de recette, dès lors que leur versement a été effectué non pour concourir à l'équilibre de l'exploitation, mais en vertu d'une obligation, qu'elle soit légale ou conventionnelle, de réparation incombant à la partie versante, ne constituent des recettes concourant à la formation du bénéfice imposable que si la perte ou la charge qu'elles ont pour objet de compenser est elle-même de la nature de celles qui sont déductibles pour la détermination du bénéfice imposable

4. La société Gecas France soutient que du fait de l'application de l'article 212 bis précité du code général des impôts, elle a subi, en raison de l'augmentation de sa base imposable, un préjudice économique constitué par un supplément d'impôt sur les sociétés non déductible, que les indemnités versées par les sociétés locataires, en application des contrats de location conclus en droit anglais, ont pour objet de compenser.

5. Cependant, il résulte de l'instruction que le surcoût fiscal supporté par la société requérante ne trouve pas son origine dans un comportement fautif de ses clients, qui lui aurait occasionné un préjudice, Par ailleurs, il est constant que ces derniers ne bénéficient d'aucun avantage de l'article 212 bis du code général des impôts. En outre, les conventions soumises au droit anglais, conclues par la SARL Gecas France avec les sociétés clientes PT. Cardig Air, PT Garuda Indonesia et PT Lion Mentari, respectivement les 8 novembre 2011, 17 février 2011 et 9 août 2007 comportent en leur article 5.7 une clause d'indemnisation fiscale prévoyant que " le locataire n'est pas tenu d'indemniser l'autre partie si l'impôt (...) avait été exigible (...) même si le contrat de bail n'avait pas été conclu (...) " qui, comme l'ont estimé à juste titre les premiers juges, ne sont pas de nature à révéler, au sens du droit français, l'existence d'un dommage subi par la Sarl Gecas France du fait de ses locataires. Enfin, le coût relatif au nouveau dispositif fiscal auquel se trouve confrontée la société requérante est identique pour toute société se trouvant dans une situation similaire et ne peut en conséquence être regardé comme étant un préjudice indemnisable.

6. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a regardé le produit exceptionnel correspondant aux sommes versées à la société requérante par ses locataires d'aéronefs afin de compenser l'augmentation de sa base imposable en raison de l'application de l'article 212 bis du code général des impôts comme étant seulement le résultat d'une négociation commerciale. A cet égard, la SARL Gecas France ne peut utilement critiquer le motif surabondant figurant dans le jugement attaqué, tiré de ce que certaines sociétés clientes auraient refusé d'acquitter l'indemnité litigieuse. Dès lors, la Sarl Gecas France n'est pas fondée à soutenir que les sommes en litige correspondraient au versement d'indemnités résultant d'une obligation de réparation au sens des principes énumérés au point 3 et qu'elles seraient déductibles pour la détermination de son résultat imposable.

7. Il résulte de ce qui précède, que la SARL Gecas France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande de restitution de la somme de 2 904 000 euros au titre du trop versé d'impôt sur les sociétés pour les exercices 2012 et 2013. Par suite, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Gecas France est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Gecas France et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 11 mai 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. C... B..., président-assesseur,

M. Stéphane Gueguein, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juin 2021.

Le rapporteur,

Dominique B... La présidente,

Evelyne Balzamo La greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX00577


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales. Détermination du bénéfice imposable.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Dominique FERRARI
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Date de la décision : 08/06/2021
Date de l'import : 15/06/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19BX00577
Numéro NOR : CETATEXT000043639649 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-06-08;19bx00577 ?
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