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06/05/2021 | FRANCE | N°20BX04034

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 06 mai 2021, 20BX04034


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 23 juin 2020 par lequel la préfète de la Gironde a ordonné son transfert aux autorités autrichiennes.

Par un jugement n° 2002767 du 20 juillet 2020, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 décembre 2020 sous le n° 20BX04034, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour

:

1°) d'annuler le jugement du 20 juillet 2020 de la magistrate désignée par le président du tribu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 23 juin 2020 par lequel la préfète de la Gironde a ordonné son transfert aux autorités autrichiennes.

Par un jugement n° 2002767 du 20 juillet 2020, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 décembre 2020 sous le n° 20BX04034, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 20 juillet 2020 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 juin 2020 de la préfète de la Gironde ;

3°) d'enjoindre à l'État de prendre en charge sa demande d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté en litige a été signé par une autorité incompétente ;

- il est entaché d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;

- la préfète de la Gironde a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage de la clause de souveraineté sur le fondement de l'article 17 du règlement UE n° 604/2013.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 janvier 2021, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que M. C... est en fuite et que les moyens de sa requête ne sont pas fondés.

M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2020/013801 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux du 15 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant turc, déclare être entré en France le 13 janvier 2020. Le 20 janvier 2020, il a sollicité l'asile auprès de la préfecture de la Gironde. La consultation du fichier Eurodac a révélé que ses empreintes décadactylaires avaient été relevées en Autriche le 5 juin 2019. Par un arrêté du 23 juin 2020, la préfète de la Gironde a ordonné son transfert aux autorités autrichiennes. M. C... relève appel du jugement du 20 juillet 2020 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en litige.

2. En premier lieu, M. C... reprend, dans des termes similaires et sans critique utile du jugement, les moyens invoqués en première instance tirés de ce que l'arrêté en litige a été signé par une autorité incompétente et qu'il est entaché d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle. Il n'apporte aucun élément de droit ou de fait nouveau, ni aucune pièce nouvelle à l'appui de ces moyens auxquels le premier juge a suffisamment et pertinemment répondu. Il y a lieu, dès lors, d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par ce dernier.

3. En second lieu, aux termes de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) / 2. L'État membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'État membre responsable, ou l'État membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre État membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre État membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. (...). ". Ces dispositions sont éclairées par le point 17 du préambule du même règlement qui dispose que : " Il importe que tout État membre puisse déroger aux critères de responsabilité, notamment pour des motifs humanitaires et de compassion, afin de permettre le rapprochement de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent et examiner une demande de protection internationale introduite sur son territoire ou sur le territoire d'un autre État membre, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères obligatoires fixés dans le présent règlement. ". Enfin, aux termes de l'article 2 du même règlement : " Aux fins du présent règlement, on entend par : (...) g) " membres de la famille ", dans la mesure où la famille existait déjà dans le pays d'origine, les membres suivants de la famille du demandeur présents sur le territoire des États membres : / - le conjoint du demandeur, ou son ou sa partenaire non marié(e) engagé(e) dans une relation stable, lorsque le droit ou la pratique de l'État membre concerné réserve aux couples non mariés un traitement comparable à celui réservé aux couples mariés, en vertu de sa législation relative aux ressortissants de pays tiers, / - les enfants mineurs des couples visés au premier tiret ou du demandeur, à condition qu'ils soient non mariés et qu'ils soient nés du mariage, hors mariage ou qu'ils aient été adoptés au sens du droit national, / - lorsque le demandeur est mineur et non marié, le père, la mère ou un autre adulte qui est responsable du demandeur de par le droit ou la pratique de l'État membre dans lequel cet adulte se trouve, / - lorsque le bénéficiaire d'une protection internationale est mineur et non marié, le père, la mère ou un autre adulte qui est responsable du bénéficiaire de par le droit ou la pratique de l'État membre dans lequel le bénéficiaire se trouve (...) ". Il résulte de ces dispositions que la faculté laissée à chaque État membre de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement précité, est discrétionnaire et ne constitue pas un droit pour les demandeurs d'asile.

4. M. C... fait valoir que le préfet a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage de la clause discrétionnaire prévue par les dispositions précitées dès lors que son père et sa soeur ont également formulé une demande d'asile les 6 novembre et 20 décembre 2019. Toutefois, l'intéressé, qui est majeur, ne peut être considéré comme un membre de la famille au sens du g) de l'article 2 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. En outre, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que M. C... entretiendrait avec son père ou sa soeur des liens d'une particulière intensité. Par suite, et alors que leurs demandes d'asile n'ont pas été enregistrées conjointement, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la préfète de la Gironde aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage de la clause discrétionnaire prévue à l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. C..., qui s'est soustrait à l'exécution de son transfert et a été déclaré en fuite le 12 août 2020, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 juin 2020. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles tendant à l'application combinée des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président-rapporteur,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 mai 2021.

Le président de chambre,

Éric D...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 20BX04034


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 20BX04034
Date de la décision : 06/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-03


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Eric REY-BETHBEDER
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : CESSO

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-05-06;20bx04034 ?
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