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07/04/2021 | FRANCE | N°18BX02370

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 07 avril 2021, 18BX02370


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner la commune de Bergerac à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral et la somme de 9 000 euros annuellement au titre du préjudice financier qu'il estime avoir subis du fait de l'illégalité fautive de la décision du maire le mutant d'office à compter du 1er mars 2016 sur un poste de chargé de mission " sécurité ".

Par un jugement n° 1604637 du 18 avril 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rej

eté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enreg...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner la commune de Bergerac à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral et la somme de 9 000 euros annuellement au titre du préjudice financier qu'il estime avoir subis du fait de l'illégalité fautive de la décision du maire le mutant d'office à compter du 1er mars 2016 sur un poste de chargé de mission " sécurité ".

Par un jugement n° 1604637 du 18 avril 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 18 juin 2018, 14 août 2019, 29 octobre 2020 et 25 février 2021, M. A..., représenté par la selafa cabinet Cassel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) à titre principal, de condamner la commune de Bergerac à lui verser la somme totale de 25 000 euros en réparation du préjudice financier et du préjudice moral qu'il estime avoir subis du fait de l'illégalité fautive de la décision du maire le mutant d'office, à compter du 1er mars 2016, sur un poste de chargé de mission " sécurité " ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la commune de Bergerac à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral et de 9 000 euros annuellement au titre du préjudice financier qu'il estime avoir subis du fait de l'illégalité fautive de la décision du maire le mutant d'office, à compter du 1er mars 2016, sur un poste de chargé de mission " sécurité " ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Bergerac la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier car le tribunal s'est trompé sur l'objet des conclusions dont il était saisi : il a identifié ses conclusions indemnitaires comme portant sur la somme de 14 000 euros alors qu'en réalité, il avait demandé la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral et 9 000 euros par an, en réparation de son préjudice financier résultant de la perte de rémunération consécutive à la perte de responsabilité ;

- l'illégalité de sa mutation engage la responsabilité de la commune de Bergerac alors même qu'elle reposerait sur un vice de procédure tenant au défaut de consultation de la commission administrative paritaire ;

- en effet, en plus de l'omission de cette procédure préalable, il n'a pas été mis en mesure de consulter son dossier et a, de ce fait, été privé d'une garantie ;

- ce moyen n'est pas nouveau en appel ;

- le respect de ces procédures aurait pu influencer le sens de la décision ;

- sa mutation n'est pas liée à l'intérêt du service ;

- elle est entachée d'un détournement de pouvoir et constitue une sanction déguisée ;

- le défaut de saisine de la commission administrative paritaire, qui aurait dû émettre un avis sur sa mutation, le non-respect des droits de la défense, les conditions dans lesquelles il a été évincé de la police municipale, sans aucune procédure, ni aucune garantie, lui ont causé un choc psychologique, l'ayant plongé dans une dépression dont il n'est pas guéri à ce jour ;

- son état de santé le rend inapte à l'exercice de ses fonctions ;

- ces illégalités lui ont causé un préjudice direct et certain, notamment un préjudice moral qu'il évalue à la somme de 10 000 euros ;

- compte tenu que son manque financier s'élève sur les années 2016 à 2019 à 13 531,69 euros, l'évaluation de son préjudice financier à la somme de 15 000 euros n'est pas manifestement excessive.

Par des mémoires enregistrés les 5 juillet et 29 août 2019, la commune de Bergerac, représentée par le cabinet Noyer-Cazcarra, avocats, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de M. A... ;

2°) de mettre à sa charge la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun moyen n'est fondé.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

-la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... B...,

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteure publique,

- et les observations de Me C..., représentant la commune de Bergerac.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... A... a été recruté le 1er novembre 1982 en qualité d'agent contractuel par la commune de Bergerac et titularisé le 1er février 1983. En avril 2005, il a été nommé responsable du service de la police municipale. A la suite de tensions au sein de ce service, le maire a avisé M. A... au cours d'un entretien qui s'est déroulé le 29 janvier 2016 de sa décision de lui confier de nouvelles fonctions en matière de sécurité sur un poste de chargé de mission. Cette décision a été formalisée par un courrier en date du 12 février 2016 précisant que ce changement d'affectation interviendrait à compter du 1er mars 2016. Estimant que la décision du 12 février 2016 était entachée d'illégalité, il a adressé à la commune de Bergerac une réclamation indemnitaire par une lettre du 22 août 2016 afin d'obtenir réparation des préjudices résultant selon lui de sa mutation prononcée d'office. Sa réclamation ayant fait l'objet d'une décision implicite de rejet, il a saisi le tribunal administratif de Bordeaux d'une demande tendant à la condamnation de la commune de Bergerac à lui verser la somme de 14 000 euros en réparation de ses préjudices. M. A... relève appel du jugement du 18 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. A supposer même que le tribunal aurait considéré à tort que la demande indemnitaire de M. A... ne portait que sur la somme de 14 000 euros, cette circonstance affecterait le bien-fondé du jugement et non sa régularité. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement est irrégulier.

Sur les conclusions indemnitaires de M. A... :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 52 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires à la fonction publique territoriale susvisée : " L'autorité territoriale procède aux mouvements des fonctionnaires au sein de la collectivité ou de l'établissement ; seules les mutations comportant changement de résidence ou modification de la situation des intéressés sont soumises à l'avis des commissions administratives paritaires (...) ".

4. Il résulte de l'instruction que l'affectation de M. A... aux fonctions de chargé de mission " sécurité " par la décision du 12 février 2016 a entraîné une modification de ses attributions et de ses responsabilités, notamment ses tâches d'encadrement. Elle a ainsi comporté, au sens des dispositions précitées, une modification de la situation de l'intéressé rendant nécessaire la consultation de la commission administrative paritaire sur les effets de la mesure. Or, il est constant que cette commission n'a pas émis d'avis sur cette affectation prononcée d'office. L'irrégularité qui a consisté, de la part de l'autorité investie du pouvoir de nomination, à s'en dispenser a privé M. A... d'une garantie et a vicié la décision d'affectation. En prononçant ce changement d'affectation sans procéder à la consultation de la commission administrative paritaire, le maire a commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Bergerac.

5. En second lieu, M. A... soutient que sa mutation d'office est intervenue sans qu'il ait été mis à même de consulter son dossier individuel.

6. Il résulte de l'instruction, notamment des attestations d'agents de la police municipale placés, au moment des faits, sous l'autorité de M. A... qu'il régnait depuis plusieurs mois un climat conflictuel au sein du service de la police municipale. Le changement d'affectation de M. A... a donc été décidé dans l'intérêt du service en raison d'un climat conflictuel au sein du service. Par ailleurs, les fonctions de chargé de mission en matière de sécurité, nouvellement créées et sur lesquelles M. A... a été affecté à compter du 1er mars 2016, répondaient à un besoin du service notamment à la nécessité de coordonner l'action du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance. En outre, ces fonctions correspondent à celles que son cadre d'emploi lui donne vocation à exercer et ce changement d'affectation n'a pas d'incidence sur la rémunération de l'intéressé. Par suite, et alors même que cette mutation a entrainé une diminution de ses responsabilités, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision du 12 février 2016 constituerait une sanction déguisée, prise en méconnaissance des règles applicables au contentieux disciplinaire, qu'il s'agisse de la consultation préalable de son dossier ou du respect d'une procédure contradictoire préalable. Par conséquent, il n'est pas fondé à soutenir que la décision de mutation d'office contestée aurait été prise en méconnaissance de son droit à la communication de son dossier individuel et que ce vice constituerait une autre illégalité de nature à engager la responsabilité de la commune de Bergerac.

7. En troisième lieu, il ne résulte pas de l'instruction que son changement d'affectation serait entaché d'un détournement de pouvoir.

8. Si l'illégalité d'une décision peut constituer une faute de service susceptible d'engager la responsabilité de la commune, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait été prise à l'égard de l'intéressé.

9. Il appartient au juge de rechercher, en forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des pièces produites par les parties, si la même décision aurait pu légalement être prise dans le cadre d'une procédure régulière.

10. Il résulte de ce qui précède que le changement d'affectation de M. A... a été pris dans l'intérêt du service. Par ailleurs, ses nouvelles fonctions correspondent à celles que son cadre d'emploi lui donne vocation à exercer. Pour les mêmes motifs qu'énoncés au point 6, son changement d'affectation n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Ainsi, la même décision aurait pu être prise à l'issue de la consultation de la commission administrative paritaire. Par suite, l'illégalité fautive commise par la commune de Bergerac n'est pas de nature à ouvrir à M. A... un droit à réparation des préjudices allégués.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande indemnitaire.

Sur les frais d'instance :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Bergerac, qui n'a pas la qualité de partie perdante la somme que demande M. A... au titre de ses frais d'instance. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. A... la somme que demande la commune de Bergerac au titre de ses frais d'instance.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... et les conclusions de la commune de Bergerac présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et à la commune de Bergerac.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2021 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme E... B..., première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 avril 2021.

Le président,

Didier ARTUS

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 18BX02370


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX02370
Date de la décision : 07/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: Mme Déborah DE PAZ
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : SCP NOYER - CAZCARRA

Origine de la décision
Date de l'import : 13/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-04-07;18bx02370 ?
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