La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/03/2021 | FRANCE | N°20BX00378

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 25 mars 2021, 20BX00378


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme Dietsmann technologies a demandé au tribunal administratif de Toulouse la restitution de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés prévue à l'article 235 ter ZCA du code général des impôts, à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 à concurrence, respectivement, des sommes de 23 333 euros et 59 999 euros, assorties des intérêts moratoires.

Par un jugement n° 1803710-n° 1803711 du 3 décembre 2019, le tribunal administratif de Tou

louse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme Dietsmann technologies a demandé au tribunal administratif de Toulouse la restitution de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés prévue à l'article 235 ter ZCA du code général des impôts, à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 à concurrence, respectivement, des sommes de 23 333 euros et 59 999 euros, assorties des intérêts moratoires.

Par un jugement n° 1803710-n° 1803711 du 3 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 février 2020 la société Dietsmann technologies, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 3 décembre 2019 ;

2°) de prononcer la restitution de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés prévue à l'article 235 ter ZCA du code général des impôts, à laquelle elle a été assujettie au titre des année 2013 et 2014 à concurrence, respectivement, des sommes de 23 333 euros et 59 999 euros, assorties des intérêts moratoires ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 5 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont regardé la réclamation formée à l'encontre de l'imposition concernée comme tardive et qu'ils ont également regardé comme irrecevable une action en répétition de l'indu ;

- ainsi, la jurisprudence de la Cour de cassation admet la possibilité d'une action en répétition de l'indu lorsque, comme en l'espèce, l'imposition n'est pas due, en vertu d'une règle supérieure à la loi fiscale ;

- en l'espèce, la décision du Conseil constitutionnel du 6 octobre 2017, qui juge inconstitutionnelles les dispositions de l'article 235 ter ZCA du code général des impôts et prévoit que cette inconstitutionnalité sera applicable à toutes les affaires non jugées définitivement, peut être considérée comme un événement au sens du c de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juillet 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête méconnaît l'autorité de la chose jugée et, par suite, doit être rejetée comme irrecevable ;

- les moyens soulevés dans la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative ;

- la décision du Conseil constitutionnel n° 2017-660 QPC du 6 octobre 2017.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rey-Bèthbéder, président-rapporteur,

- et les conclusions de Mme Aurélie Chauvin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société Diestmann technologies a acquitté la contribution de 3 % sur les revenus distribués prévue par l'article 235 ter ZCA du code général des impôts, à hauteur, au titre de l'année 2013, de 23 333 euros et, au titre de l'année 2014, de 59 999 euros. Cependant, par réclamation du 28 décembre 2017, en se prévalant de la décision du Conseil constitutionnel n° 2017-660 QPC du 6 octobre 2017, elle a sollicité la restitution de ces impositions.

2. La société précitée relève appel du jugement du 3 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la restitution des impositions précitées.

3. D'une part, par l'article 1er de sa décision n° 2017-660 QPC du 6 octobre 2017, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions du premier alinéa du I de l'article 235 ter ZCA du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015, selon lesquelles : " Les sociétés ou organismes français ou étrangers passibles de l'impôt sur les sociétés en France, à l'exclusion des organismes de placement collectif mentionnés au II de l'article L. 214-1 du code monétaire et financier ainsi que de ceux qui satisfont à la définition des micro, petites et moyennes entreprises donnée à l'annexe I au règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité sont assujettis à une contribution additionnelle à cet impôt au titre des montants qu'ils distribuent au sens des articles 109 à 117 du présent code ". Il résulte de l'article 2 du dispositif de cette décision, par renvoi au paragraphe 11 de ses motifs, que la déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de sa publication et est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date.

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 1901 du livre des procédures fiscales : " (...) Sont instruites et jugées selon les règles du présent chapitre toutes actions tendant à la décharge ou à la réduction d'une imposition ou à l'exercice de droits à déduction, fondées sur la nonconformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure. / Lorsque cette non-conformité a été révélée par une décision juridictionnelle ou un avis rendu au contentieux, l'action en restitution des sommes versées ou en paiement des droits à déduction non exercés ou l'action en réparation du préjudice subi ne peut porter que sur la période postérieure au 1er janvier de la troisième année précédant celle où la décision ou l'avis révélant la non-conformité est intervenu. / Pour l'application du quatrième alinéa, sont considérés comme des décisions juridictionnelles ou des avis rendus au contentieux les décisions du Conseil d'État ainsi que les avis rendus en application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, les arrêts de la Cour de cassation ainsi que les avis rendus en application de l'article L. 441-1 du code de l'organisation judiciaire, les arrêts du Tribunal des conflits et les arrêts de la Cour de justice des Communautés européennes se prononçant sur un recours en annulation, sur une action en manquement ou sur une question préjudicielle ". Et aux termes de l'article R. 196-1 du même livre : " Pour être recevables, les réclamations (...) doivent être présentées à l'administration des impôts au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle (...) / b) Du versement de l'impôt contesté (...) / c) De la réalisation de l'évènement qui motive la réclamation. Ne constitue pas un tel événement une décision juridictionnelle ou un avis mentionné aux troisième et cinquième alinéas de l'article L. 190. (...) ".

5. En premier lieu, il résulte des dispositions citées au point 4 ci-dessus que les décisions du Conseil constitutionnel ne sont pas au nombre des décisions juridictionnelles ou avis mentionnés aux troisième et cinquième alinéas de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, pour lesquels la deuxième phrase du c de l'article R. 196-1 du même livre écarte la qualification d'événement constituant le point de départ d'un nouveau délai de réclamation.

6. Toutefois, seuls doivent être regardés comme constituant le point de départ de ce délai les événements qui ont une incidence directe sur le principe même de l'imposition, son régime ou son mode de calcul. Une décision par laquelle le Conseil constitutionnel, statuant sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution, déclare inconstitutionnelle une disposition législative ne constitue pas en elle-même un tel événement susceptible d'ouvrir un nouveau délai de réclamation.

7. Il appartient au seul Conseil constitutionnel, lorsque, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, il a déclaré contraire à la Constitution la disposition législative ayant fondé l'imposition litigieuse, de prévoir si, et le cas échéant dans quelles conditions, les effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration sont remis en cause, au regard des règles, notamment de recevabilité, applicables à la date de sa décision.

8. En particulier, lorsque le Conseil constitutionnel précise, dans une décision déclarant une disposition législative contraire à la Constitution, que cette déclaration d'inconstitutionnalité est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à la date de publication de sa décision, cette déclaration peut être invoquée dans toutes les procédures contentieuses en cours, quelle que soit la période d'imposition sur laquelle porte le litige. Elle peut l'être aussi à l'appui de toute réclamation encore susceptible d'être formée eu égard aux délais fixés par les articles R. 196-1 et R. 196-2 du livre des procédures fiscales.

9. En l'espèce, la décision n° 2017-660 QPC précitée ne comporte aucune précision sur ses effets au regard des règles de recevabilité des réclamations présentées au titre des impositions mises en recouvrement antérieurement à la date de sa décision. Il suit de là que la réclamation présentée par la société Diestmann technologies, qui ne saurait se prévaloir de cette décision du Conseil constitutionnel, qui ne constitue pas un événement susceptible de lui ouvrir un nouveau délai de réclamation, reste soumise aux dispositions de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales. Présentée plus de deux ans après le paiement spontané des impositions concernées, cette réclamation était tardive.

10. En second lieu, et comme l'ont jugé les premiers juges, la société appelante n'est pas recevable à invoquer, sur le fondement du droit civil, une action en répétition de l'indu d'une créance fiscale dès lors qu'il résulte des dispositions de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales que les réclamations relatives aux impôts, contributions, droits et taxes sont régies par les seules dispositions de ce livre.

11. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la requête par le ministre, la société Dietsmann technologies n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la restitution des impositions litigieuses. Par voie de conséquence, ses conclusions relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme Diestmann technologies et au ministre de l'économie, des finances et de la relance. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 25 février 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

Mme A... C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 mars 2021.

Le président de chambre

Éric Rey-Bèthbéder

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 20BX00378


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-02-02-02 Contributions et taxes. Règles de procédure contentieuse spéciales. Réclamations au directeur. Délai.


Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Eric REY-BETHBEDER
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : ERNST et YOUNG, SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 25/03/2021
Date de l'import : 06/04/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 20BX00378
Numéro NOR : CETATEXT000043296316 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-03-25;20bx00378 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award