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09/03/2021 | FRANCE | N°19BX02724

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 09 mars 2021, 19BX02724


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Gironde a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler le certificat d'urbanisme délivré le 14 mai 2018 par le maire de Soulac-sur-Mer à la société à responsabilité limitée Martin Geomètres Experts indiquant que la division d'une parcelle cadastrée D 330, située au lieu-dit Lilhan-Ouest, en deux lots en vue de la construction de maisons à usage d'habitation est réalisable, ainsi que la décision du 9 juillet 2018 par laquelle le maire a refusé de retirer cet acte.
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Gironde a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler le certificat d'urbanisme délivré le 14 mai 2018 par le maire de Soulac-sur-Mer à la société à responsabilité limitée Martin Geomètres Experts indiquant que la division d'une parcelle cadastrée D 330, située au lieu-dit Lilhan-Ouest, en deux lots en vue de la construction de maisons à usage d'habitation est réalisable, ainsi que la décision du 9 juillet 2018 par laquelle le maire a refusé de retirer cet acte.

Par un jugement n° 1803921 du 30 avril 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé ces décisions du 14 mai 2018 et du 9 juillet 2018.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 juin 2019, la commune de Soulac-sur-Mer, représentée par le Cabinet d'avocats Noyer-Cazcarra, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) de rejeter le déféré du préfet de la Gironde ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le projet en cause est une simple opération d'urbanisme et non une opération d'extension de l'urbanisation dès lors qu'il s'implante dans un espace déjà urbanisé et qu'il ne saurait caractériser une densification sensible du quartier contribuant à modifier ses caractéristiques ; le projet est conforme aux dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 septembre 2020, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la construction projetée constitue une extension à l'urbanisation, le projet se situant dans une zone d'urbanisation diffuse et non en continuité avec une agglomération ou un village existant, en méconnaissance de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020, et notamment son article 5 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant la commune de Soulac-sur-Mer.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée Martin Géomètres Experts a déposé auprès de la mairie de Soulac-sur-Mer, le 24 mars 2018, une demande de certificat d'urbanisme pour la division d'une parcelle cadastrée section D n° 330, située au lieu-dit Lilhan-Ouest, en vue de la création de deux lots à bâtir. Le 14 mai 2018, le maire de Soulac-sur-Mer lui a délivré un certificat indiquant que l'opération envisagée était réalisable. Par une lettre du 2 juillet 2018, le sous-préfet de Lesparre-Médoc a, dans le cadre du contrôle de légalité, formé un recours gracieux contre cette décision. Par un courrier du 9 juillet 2018, le maire de Soulac-sur-Mer a refusé de retirer sa décision. La commune de Soulac-sur-Mer relève appel du jugement du 30 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé le certificat d'urbanisme du 14 mai 2018, ainsi que la décision du 9 juillet 2018.

2. Aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme : " Les dispositions du présent chapitre déterminent les conditions d'utilisation des espaces terrestres, maritimes et lacustres : 1° Dans les communes littorales définies à l'article L. 321-2 du code de l'environnement ; (...) ". L'article L. 121-3 du même code, dans sa version alors en vigueur dispose : " Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, défrichements, plantations, aménagements, installations et travaux divers, la création de lotissements, l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes, l'établissement de clôtures, l'ouverture de carrières, la recherche et l'exploitation de minerais et les installations classées pour la protection de l'environnement. ". Aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision litigieuse : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. ".

3. Il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions, mais que, en revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages. L'exigence de continuité étant directement applicable aux autorisations d'occupation ou d'utilisation du sol, l'autorité administrative qui se prononce sur une demande d'autorisation d'urbanisme dans une commune littorale doit vérifier, à moins que le terrain d'assiette du projet soit situé dans une zone destinée à l'accueil d'un hameau nouveau intégré à l'environnement, si, à la date à laquelle elle statue, l'opération envisagée est réalisée " en continuité avec les agglomérations et villages existants ", et ce alors même que le plan local d'urbanisme, en compatibilité avec les orientations des schémas de cohérence territoriale et des schémas de secteur ou, en l'absence de ces schémas, avec les dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme, le cas échéant précisées par une directive territoriale d'aménagement ou par un document en tenant lieu, aurait ouvert à l'urbanisation la zone dans laquelle se situe le terrain d'assiette.

4. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est constitué par la parcelle cadastrée section D n° 330, située allée Michel Montaigne au lieu-dit Lilhan-Ouest sur le territoire de Soulac-sur-Mer, commune littorale au sens de l'article L. 321-2 du code de l'environnement. Ce secteur prend la forme d'un groupe d'une vingtaine de maisons, distant de plus de deux kilomètres du centre-bourg de Soulac-sur-Mer et de trois kilomètres du lieu-dit de l'Amélie et à cinq cents mètres du lieu-dit Le Lilhan, au sein d'une zone forestière. L'urbanisation dans ce secteur n'est pas caractérisée par une densité significative des constructions, au regard tant du faible nombre de constructions à usage d'habitation implantées le long de l'avenue Michel Montaigne que des espaces vides de constructions qui jouxtent la parcelle au Nord et au Sud-Ouest. La seule circonstance que la commune a engagé de lourds investissements afin d'équiper le secteur en réseaux de voirie, d'éclairage public et d'assainissement des eaux usées et pluviales n'est pas de nature à qualifier ce secteur d'espace urbanisé. Dans ces conditions, le projet envisagé, qui est situé dans une zone d'urbanisation diffuse, constitue une extension de l'urbanisation qui ne s'inscrit pas en continuité avec une agglomération ou un village existant, ni dans un hameau nouveau intégré à l'environnement. Par suite, dès lors que ce projet méconnait l'exigence de continuité fixée par les dispositions citées ci-dessus de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, le maire ne pouvait légalement délivrer le certificat d'urbanisme sollicité alors même que la parcelle est située en zone UD, d'urbanisation diffuse, du plan local d'urbanisme de la commune et qu'elle serait incluse dans un secteur défini comme constituant un espace urbanisé par le schéma de cohérence territoriale de la Pointe du Médoc. Dès lors, en délivrant le certificat d'urbanisme litigieux, le maire de Soulac-sur-Mer a méconnu les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Soulac-sur-Mer n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé, à la demande du préfet de la Gironde, le certificat d'urbanisme délivré le 14 mai 2018 à la société à responsabilité limitée Martin Géomètres Experts ainsi que la décision du 9 juillet 2018 par laquelle le maire a refusé de retirer ce certificat.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme sollicitée par la commune de Soulac-sur-Mer.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Soulac-sur-Mer est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, à la commune de Soulac-sur-Mer et à la société à responsabilité limitée Martin Géomètres Experts.

Copie en sera transmise au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 4 février 2021 à laquelle siégeaient :

Mme C... A..., présidente,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 mars 2021.

La présidente,

Marianne A...

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX02724 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX02724
Date de la décision : 09/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-001-01-02-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Règles générales d'utilisation du sol. Règles générales de l'urbanisme. Prescriptions d'aménagement et d'urbanisme. Régime issu de la loi du 3 janvier 1986 sur le littoral.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY-SABOURDY
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SCP NOYER - CAZCARRA

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-03-09;19bx02724 ?
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