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22/12/2020 | FRANCE | N°19BX01622

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 22 décembre 2020, 19BX01622


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet des Pyrénées-Atlantiques a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 13 février 2018 par lequel le maire d'Urrugne ne s'est pas opposé à la déclaration préalable présentée par M. G... E... relative à la division de la parcelle cadastrée CA n° 180p en vue de construire.

Par un jugement n° 1801884 du 5 mars 2019, le tribunal administratif de Pau a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 avril 2019,

la commune d'Urrugne, représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet des Pyrénées-Atlantiques a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 13 février 2018 par lequel le maire d'Urrugne ne s'est pas opposé à la déclaration préalable présentée par M. G... E... relative à la division de la parcelle cadastrée CA n° 180p en vue de construire.

Par un jugement n° 1801884 du 5 mars 2019, le tribunal administratif de Pau a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 avril 2019, la commune d'Urrugne, représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 5 mars 2019 ;

2°) de rejeter la demande présentée par le préfet des Pyrénées-Atlantiques devant le tribunal administratif de Pau ;

3°) à titre subsidiaire, de prononcer le sursis à statuer dans l'attente de la régularisation de l'arrêté du 13 février 2018 ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors que le préfet ne justifie pas avoir notifié le recours gracieux au pétitionnaire dans le délai de quinze jours francs en application des dispositions de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- les premiers juges ont considéré à tort que le projet constitue une extension de l'urbanisation qui ne s'inscrit pas en continuité avec les agglomérations et villages existants de sorte qu'il méconnait les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ;

- les premiers juges ont commis une erreur de droit en refusant de faire usage des pouvoirs qu'ils tiennent des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme aux fins de sursis à statuer pour lui permettre de régulariser l'arrêté en litige.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 octobre 2019, le préfet des Pyrénées-Atlantiques conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la commune d'Urrugne ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et notamment son article 5 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... B...,

- et les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 13 février 2018, le maire d'Urrugne ne s'est pas opposé à la déclaration préalable présentée par M. E... relative à la division de la parcelle cadastrée CA n° 180p en vue de construire. Par une lettre du 23 avril 2018, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a demandé au maire d'Urrugne de retirer cet arrêté. Après le refus exprès du maire par une lettre du 6 juin 2018, le préfet a déféré cet acte au tribunal administratif de Pau. La commune d'Urrugne relève appel du jugement du 5 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Pau a annulé l'arrêté du 13 février 2018.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. (...) L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. / La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le préfet des Pyrénées-Atlantiques a invité le maire d'Urrugne, dans le cadre de son contrôle de légalité, à retirer son arrêté du 13 février 2018 par une lettre envoyée par télécopie le 24 avril 2018. Une copie de cette lettre a été adressée par pli recommandé à M. E.... Si le tampon postal apposé lors du dépôt de ce recommandé est peu lisible, il permet tout de même d'établir que cette lettre a été adressée à M. E... le 3 mai 2018, soit dans le délai de quinze jours suivant la date du 24 avril 2018. Dès lors, et ainsi que l'ont retenu les premiers juges, le préfet des Pyrénées-Atlantiques justifie avoir accompli les formalités prescrites par les dispositions précitées de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme.

Sur la légalité de l'arrêté du 13 février 2018 :

4. Aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. ". D'une part, il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions, mais que, en revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages. D'autre part, un projet de construction peut être regardé comme réalisé en continuité avec une agglomération existante pour l'application de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme lorsqu'il se situe à proximité immédiate d'un camping si les constructions soumises à autorisation qui se trouvent dans ce camping assurent la continuité avec l'ensemble des constructions avoisinantes et si la construction projetée est elle-même dans la continuité des constructions du camping.

5. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est constitué par la parcelle cadastrée section CA n° 180p, située le long du chemin d'Itsengabe, dans un secteur composé d'une trentaine de maisons implantées de façon non structurée le long de ce chemin et de la route de la Glacière, distant de plus de 3 kilomètres du centre-bourg d'Urrugne et entouré de vastes espaces demeurés à l'état naturel situés en zone Ncu du plan local d'urbanisme, soit une " zone naturelle à protéger en raison de la qualité des sites et milieu naturels et paysagers du littoral ". Si la commune se prévaut de l'implantation, au nord de la parcelle d'assiette, d'un camping, il ressort toutefois des pièces du dossier que celui-ci se trouve à plus de 200 mètres de la parcelle en cause et est séparé de celle-ci par des espaces demeurés à l'état naturel. Par ailleurs, le terrain d'assiette du projet, qui jouxte certes des parcelles construites mais aussi des espaces naturels, ne peut être regardé comme constituant une " dent creuse " au sein d'un espace urbanisé. Ainsi, une telle configuration caractérise une urbanisation diffuse qui ne constitue ni un village, ni une agglomération au sens de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, sans que la commune puisse utilement se prévaloir des travaux de l'Institut national de la statistique et des études économiques relatifs à la notion d'unité urbaine, qui ne sont pas pertinents pour caractériser l'existence d'une agglomération au sens des dispositions précitées, ni de la circulaire du 14 mars 2006 relative à l'application de la loi Littoral qui a été abrogée. Enfin, la commune d'Urrugne ne peut davantage se prévaloir utilement de la circonstance qu'elle a, par le passé, délivré des autorisations d'urbanisme pour des projets situés sur des parcelles alentours sans qu'elles ne soient contestées. Dans ces conditions, et ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, l'arrêté de non-opposition à déclaration préalable litigieux a été pris en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

6. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé ".

7. Aux termes de l'alinéa 2 de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 : " Dans les secteurs déjà urbanisés autres que les agglomérations et villages identifiés par le schéma de cohérence territoriale et délimités par le plan local d'urbanisme, des constructions et installations peuvent être autorisées, en dehors de la bande littorale de cent mètres, des espaces proches du rivage et des rives des plans d'eau mentionnés à l'article L. 121-13, à des fins exclusives d'amélioration de l'offre de logement ou d'hébergement et d'implantation de services publics, lorsque ces constructions et installations n'ont pas pour effet d'étendre le périmètre bâti existant ni de modifier de manière significative les caractéristiques de ce bâti. Ces secteurs déjà urbanisés se distinguent des espaces d'urbanisation diffuse par, entre autres, la densité de l'urbanisation, sa continuité, sa structuration par des voies de circulation et des réseaux d'accès aux services publics de distribution d'eau potable, d'électricité, d'assainissement et de collecte de déchets, ou la présence d'équipements ou de lieux collectifs. (...) ".

8. Ainsi qu'il a été dit au point 5, le projet ne s'insère pas dans un secteur déjà urbanisé mais dans un espace d'urbanisation diffuse, de sorte que la décision de non-opposition en litige ne pourrait pas être régularisée sur le fondement des nouvelles dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme citées ci-dessus. Il n'y a donc pas lieu, contrairement à ce que soutient la commune, de faire application des dispositions précitées de l'article L. 600-5-1 de l'urbanisme.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la commune d'Urrugne n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a annulé, à la demande du préfet des Pyrénées-Atlantiques, l'arrêté du 13 février 2018 de non-opposition à déclaration préalable présentée par M. E....

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par la commune d'Urrugne au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune d'Urrugne est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Urrugne, à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et à M. G... E....

Copie en sera transmise au préfet des Pyrénées-Atlantiques.

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme F... A..., présidente,

M. D... B..., président-assesseur,

Mme Charlotte Isoard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 décembre 2020.

Le président,

Marianne A...

La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX01622 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX01622
Date de la décision : 22/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-045 Urbanisme et aménagement du territoire. Autorisations d`utilisation des sols diverses. Régimes de déclaration préalable.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SELARL CABINET CAMBOT

Origine de la décision
Date de l'import : 09/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-12-22;19bx01622 ?
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