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22/10/2020 | FRANCE | N°20BX01513

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 22 octobre 2020, 20BX01513


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 7 février 2018 par laquelle le directeur général du centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter du 9 février 2017, d'enjoindre à cette autorité de la placer en congé de maladie imputable au service à compter

du 9 février 2017, ou à défaut de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter

de la notification du jugement et sous

une astreinte de 100 euros par jour de retard, et de mettre

à la charge du CHU de Poitiers ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 7 février 2018 par laquelle le directeur général du centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter du 9 février 2017, d'enjoindre à cette autorité de la placer en congé de maladie imputable au service à compter

du 9 février 2017, ou à défaut de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter

de la notification du jugement et sous une astreinte de 100 euros par jour de retard, et de mettre

à la charge du CHU de Poitiers une somme de 1 500 euros en application de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 18000883 du 11 mars 2020, le tribunal administratif de Poitiers

a annulé la décision du 9 février 2018 du directeur général du CHU de Poitiers, a enjoint

à cette autorité de placer Mme A... en congé de maladie imputable au service dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement, a mis à la charge du CHU de Poitiers une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et a rejeté les conclusions présentées par le CHU

de Poitiers au titre des frais d'instance.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 mai 2020, le CHU de Poitiers, représenté par

la SCP KPL Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 mars 2020 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif

de Poitiers ;

3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il appartient à l'agent de rapporter la preuve de l'imputabilité d'une maladie ou d'une pathologie au service, en démontrant l'existence d'un lien de causalité direct et certain ; la seule probabilité que le contexte professionnel ait pu jouer un rôle dans la dégradation de l'état de santé de l'agent ne suffit pas à établir l'existence du lien de causalité ; un tel lien n'est pas établi lorsque l'accident ne fait que révéler une affection préexistante ;

- à la suite de l'accident survenu le 15 septembre 2015, qui a été déclaré imputable au service, Mme A... a repris ses fonctions en octobre 2015 ; les IRM réalisées en octobre 2015 et septembre 2016 n'ont rien détecté de particulier ; la présence d'exostoses n'a été découverte que lors d'un scanner réalisé le 2 janvier 2017 et a été imputée à une avulsion osseuse consolidée, soit à un antécédent ancien ; le Dr François, médecin agréé, a estimé qu'il n'existait pas de lien certain et exclusif entre l'accident du 15 septembre 2015 et la pathologie prise en charge à compter du 9 février 2017 ;

- il est justifié de la compétence de l'auteur de la décision en litige ;

- cette décision est motivée en droit comme en fait ;

- dès lors que la commission de réforme disposait d'un dossier complet sur la pathologie de l'agent, la circonstance qu'un médecin spécialiste n'était pas présent ne saurait entacher sa composition d'irrégularité ;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents des cours administratives d'appel, les premiers vice-présidents des cours et les présidents des formations de jugement des cours, ainsi que les autres magistrats ayant le grade de président désignés à cet effet par le président de la cour peuvent, en outre, par ordonnance, rejeter les conclusions à fin de sursis à exécution d'une décision juridictionnelle frappée d'appel, les requêtes dirigées contre des ordonnances prises en application des 1° à 5° du présent article ainsi que, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement ".

2. Mme A..., adjointe administrative hospitalière au CHU de Poitiers où elle exerçait les fonctions de secrétaire, a ressenti le 15 septembre 2015, en se relevant de la position accroupie, une vive douleur à la cheville gauche. Cet accident a été reconnu imputable au service, et l'intéressée a repris son activité après un arrêt de travail. Un scanner réalisé

le 2 janvier 2017 a révélé l'existence d'une excroissance osseuse tibio-fibulaire. Le Dr Toullec, spécialisé en chirurgie orthopédique et traumatologique, a proposé à Mme A... une ablation de ces deux exostoses, intervention qui a été réalisée le 29 mars 2017. Par une décision

du 7 février 2018, le directeur général du CHU de Poitiers a placé Mme A... en congé de maladie ordinaire à compter du 9 février 2017. Par un jugement du 11 mars 2020, le tribunal administratif de Poitiers a, sur la demande de Mme A..., annulé cette décision et enjoint à ladite autorité de placer Mme A... en congé de maladie imputable au service. Le CHU

de Poitiers relève appel de ce jugement.

3. L'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée dispose que : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. / (...) ".

4. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

5. Le CHU de Poitiers fait valoir que les réactions ostéophytiques mises à jour par le scanner réalisé en janvier 2017 et pour lesquelles Mme A... a subi en mars suivant une intervention d'ablation chirurgicale trouvent leur origine dans son état antérieur à l'accident de service du 15 septembre 2015, et notamment dans un traumatisme ancien de la cheville alors qu'elle était enfant. Le Dr François, médecin agréé ayant examiné Mme A... sur la demande du CHU de Poitiers, indique que les productions ostéophytiques préexistaient à l'accident

du 15 septembre 2015 et exclut en conséquence l'existence d'une " relation directe, certaine et exclusive " avec cet accident, tout en soulignant que l'accident de service a " dolorisé " l'état antérieur. Le Dr Masson, également mandaté par le CHU de Poitiers, mentionne également dans son rapport du 28 avril 2017 que l'état antérieur de Mme A... a pu être " réveillé " par l'accident de service du 15 septembre 2015. Il ressort par ailleurs des courriers

des 24 novembre 2016, 9 février 2017 et 4 mai 2017 du Dr Toullec, chirurgien orthopédiste spécialiste de la cheville, que lors de son accident de service du 15 septembre 2015,

Mme A... a présenté un traumatisme de la syndesmose qui a entraîné une saillie osseuse tibio-fibulaire ayant nécessité une ablation chirurgicale. Le certificat établi le 28 juin 2017

par le Dr Boissinot, rhumatologue, confirme cette analyse et indique que le traitement, entrepris en février 2017, de cette excroissance osseuse tibio-fibulaire, est en " relation directe

et certaine " avec l'accident de service du 15 septembre 2015. Dans ces conditions, et ainsi que l'ont estimé les premiers juges, la décision du 7 février 2018 par laquelle le directeur général

du CHU de Poitiers a placé Mme A... en congé de maladie ordinaire à compter

du 9 février 2017, et non plus en congé de maladie imputable au service, repose sur une inexacte application des dispositions citées au point 3.

6. Il résulte de ce qui précède que la requête d'appel du CHU de Poitiers, qui est manifestement dépourvue de fondement au sens des dispositions précitées du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, doit être rejetée selon la procédure qu'elles prévoient, y compris les conclusions au titre des frais d'instance.

DECIDE :

Article 1er : La requête du CHU de Poitiers est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au CHU de Poitiers. Copie en sera adressée

à Mme B... A....

La présidente de la 2ème chambre,

Catherine Girault

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

3

N° 20BX01513


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 20BX01513
Date de la décision : 22/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-07 Procédure. Pouvoirs et devoirs du juge.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP PIELBERG KOLENC

Origine de la décision
Date de l'import : 07/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-10-22;20bx01513 ?
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