La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/09/2020 | FRANCE | N°20BX01126

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 29 septembre 2020, 20BX01126


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... B... épouse J... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 18 avril 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1904333 du 20 février 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enr

egistrée le 25 mars 2020 et le 20 août 2020, Mme F... B... épouse J..., représentée par Me E..., ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... B... épouse J... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 18 avril 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1904333 du 20 février 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrée le 25 mars 2020 et le 20 août 2020, Mme F... B... épouse J..., représentée par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 20 février 2020 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté pris à son encontre par le préfet de la Haute-Garonne le 18 avril 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision de refus de séjour attaquée est entachée d'une erreur de droit en ce qu'elle lui oppose le caractère irrégulier de son entrée sur le territoire français ;

- l'arrêté attaqué a été édicté par une autorité incompétente faute d'existence d'une délégation de signature du préfet de la Haute-Garonne au bénéfice de Mme G..., de preuve de sa publication et de justification de l'absence ou de l'empêchement du préfet ;

- il est entaché d'un défaut de motivation ;

- le préfet de la Haute-Garonne a omis d'examiner sa situation au regard des stipulations des 2) et 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- la décision portant éloignement du territoire français est dépourvue de base légale compte tenu de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- elle remplit les conditions pour prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des 2) et 5) de l'article 6 l'accord franco-algérien et le refus de séjour qui lui a été opposé méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; c'est à tort que le tribunal lui a opposé l'absence de demande sur ces fondements alors qu'elle avait fait état de son mariage avec un ressortissant français ;

- il ne pouvait lui être demandé de justifier d'une communauté de vie avec son époux avant le mariage ;

- elle justifie également d'une présence en France de plus de dix années, ce qui lui ouvre droit à la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; les premiers juges ont ajouté des exigences non prévues par les textes en permettant à l'administration d'apprécier les preuves présentées pour justifier la durée de son séjour de 19 ans et ont irrégulièrement écarté l'attestation du médecin recensant l'historique de ses consultations ;

- l'obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juin 2020, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... épouse J... ne sont pas fondés.

Mme B... épouse J... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 avril 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme H... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... épouse J..., ressortissante algérienne née le 23 juin 1972, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour auprès des services de la préfecture de la Haute-Garonne le 17 mai 2018. Par un arrêté du 18 avril 2019, le préfet de ce département la lui a refusée, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme J... relève appel du jugement du 20 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Il ressort de la demande de titre de séjour de Mme B... épouse J... qu'elle a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence au titre de l'ancienneté de sa résidence en France en mentionnant les stipulations du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Elle a également fait état de son espoir de vivre auprès de son mari français épousé un an auparavant et de pouvoir exercer une activité professionnelle. Sa demande devait ainsi être regardée comme reposant sur trois fondements, alors même qu'elle n'a pas mentionné les stipulations du 2) de l'article 6 ni celles du b) de l'article 7 du même accord. Le préfet s'est borné, dans la décision attaquée, à examiner d'une part l'ancienneté de son séjour en pointant l'insuffisance des justifications sur la période de 2010 à 2014, et d'autre part la perspective d'un emploi, en relevant l'absence de pièces justifiant la délivrance d'une carte salariée, sans se prononcer sur les conséquences à tirer du mariage depuis plus d'un an avec un ressortissant français. Par suite, Mme B... épouse J... est fondée à soutenir que le préfet ne s'est pas prononcé sur l'ensemble de sa situation et à demander l'annulation de la décision de refus de séjour du 18 avril 2019. L'annulation de cette décision entraîne, par voie de conséquence, celle des décisions du même jour portant obligation de quitter le territoire français et fixation d'un pays de renvoi, prises sur son fondement.

3. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que Mme B... épouse J... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. (...) ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. (...) ". Aux termes de l'article L. 911-3 de ce code : " La juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et

L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet ".

5. Eu égard à la nature de l'illégalité entachant la décision de refus de séjour litigieuse, il y a seulement lieu d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer la situation de Mme B... épouse J... dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais exposés à l'occasion du litige :

6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 20 février 2020 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 18 avril 2019 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer la situation de Mme B... épouse J... dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... B... épouse J... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme K... I..., président,

Mme A... D..., présidente-assesseure,

Mme C... H..., conseillère.

Lu en audience publique, le 29 septembre 2020.

La rapporteure,

Kolia H...

La présidente,

Catherine I...

Le greffier,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 20BX01126


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX01126
Date de la décision : 29/09/2020
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Kolia GALLIER
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : SADEK

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-09-29;20bx01126 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award