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29/07/2020 | FRANCE | N°18BX04465

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 29 juillet 2020, 18BX04465


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... et M. E... B... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de Brandonnet a refusé d'exécuter la délibération du 2 février 2014 du conseil municipal de cette commune relative à la vente à leur profit de la parcelle n° 18 appartenant à la commune, d'enjoindre au maire de Brandonnet de signer l'acte de cession de la parcelle n° 18 et de condamner la commune à leur verser une somme de 10 000 euros en réparation du préjudice qu'il

s estiment avoir subi.

Par un jugement n° 1604024 du 9 octobre 2018, le tri...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... et M. E... B... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de Brandonnet a refusé d'exécuter la délibération du 2 février 2014 du conseil municipal de cette commune relative à la vente à leur profit de la parcelle n° 18 appartenant à la commune, d'enjoindre au maire de Brandonnet de signer l'acte de cession de la parcelle n° 18 et de condamner la commune à leur verser une somme de 10 000 euros en réparation du préjudice qu'ils estiment avoir subi.

Par un jugement n° 1604024 du 9 octobre 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 décembre 2018 et 21 juin 2019, Mme C... et M. B..., représentés par Me A..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 9 octobre 2018 ;

2°) d'annuler la délibération du 25 mars 2015 et la décision implicite par laquelle le maire de Brandonnet a refusé d'exécuter la délibération du 2 février 2014 ;

3°) d'enjoindre au maire de Brandonnet de procéder aux démarches nécessaires pour signer l'acte de cession de la parcelle n° 18 ;

4°) de condamner la commune de Brandonnet à leur verser une somme de 10 000 euros en réparation du préjudice qu'ils estiment avoir subi ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Brandonnet une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le maire ne justifie d'aucune convocation adressée aux conseillers municipaux en méconnaissance de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales ; le conseil municipal a été insuffisamment informé sur la délibération à prendre en violation des articles L. 2121-11, L. 2121-12, L. 2121-13, L. 2121-13-1, L. 2121-19, L. 2121-27-1 et D. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ;

- la délibération du 25 mars 2015 est insuffisamment motivée, l'intérêt public de la décision n'étant pas évoqué ;

- la délibération du 25 mars 2015 est entachée de détournement de pouvoir dès lors que le but de l'auteur de l'acte est de favoriser des particuliers à leur détriment ;

- le maire a commis une erreur manifeste d'appréciation en ce que l'élargissement de la voirie est dépourvu d'utilité publique et ne répond pas à un intérêt général ;

- la décision implicite par laquelle le maire a refusé d'exécuter la délibération du 2 février 2014 méconnait les dispositions de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales ;

- l'absence de respect de la décision du 2 février 2014 leur a causé un préjudice certain et direct en ce que la commune les a soumis à une manoeuvre qui les a empêchés de réaliser leur projet de vivre en toute quiétude.

Par un mémoire, enregistré le 23 mai 2019, la commune de Brandonnet, représentée par Me F..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des appelants d'une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable en application de l'article R. 411-1 du code de justice administrative en ce qu'elle ne contient pas de moyen d'appel et se borne à développer le même argumentaire qu'en première instance ;

- la demande d'annulation de la délibération du 25 mars 2015 présentée pour la première fois en appel est irrecevable ;

- la demande d'annulation de la décision implicite de refus du maire d'exécuter la délibération du 2 février 2014 est tardive en ce qu'elle est intervenue le 8 septembre 2016, plus d'un an après son édiction et que les requérants en avaient connaissance ;

- le moyen tiré par voie d'exception, de l'illégalité de la délibération du 25 mars 2015, est irrecevable dès lors qu'elle ne constitue pas un acte règlementaire, ne forme pas avec la décision implicite du maire du 11 avril 2015 une opération complexe, et est devenue définitive ;

- les moyens développés par les appelants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le décret n° 2001-492 du 6 juin 2001 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme G...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public ;

- et les observations de Me F..., représentant la commune de Brandonnet.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 2 février 2014, le conseil municipal de Brandonnet a décidé de vendre la parcelle cadastrée n° 18 de 217 m², située dans le hameau du Cros, à Mme C... et M. B... moyennant le prix de 1,50 euros le mètre carré. Par un courrier du 7 octobre 2014, le notaire de la commune a informé les intéressés de la volonté du maire de signer concomitamment à cet acte de cession une promesse de vente d'une partie de terrain leur appartenant en vue d'élargir la voirie dans ce hameau. Par un courrier du 9 février 2015, reçu le 11 février 2015 en mairie, Mme C... et M. B... ont mis en demeure le maire de la commune d'exécuter cette délibération du 2 février 2014. Toutefois, par une délibération du 25 mars 2015, le conseil municipal de Brandonnet a suspendu la procédure relative à la cession de la parcelle n° 18 au profit des intéressés et a décidé de reprendre une procédure de cession amiable de cette parcelle qui inclurait simultanément l'élargissement de la voirie communale au sein du hameau de Cros. Mme C... et M. B... relèvent appel du jugement du 9 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision implicite née du silence gardé par le maire de Brandonnet sur leur demande tendant à l'exécution la délibération du 2 février 2014 et à la condamnation de la commune à les indemniser du préjudice qu'ils estiment avoir subi en conséquence de cette inexécution.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la délibération du 25 mars 2015 :

2. Les conclusions présentées par Mme C... et M. B... tendant à l'annulation de la délibération du 25 mars 2015, qui n'ont pas été soumises aux premiers juges, ont le caractère de conclusions nouvelles en cause d'appel et sont par suite, comme le soutient la commune de Brandonnet, irrecevables.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite née le 11 avril 2015 :

3. Le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance.

4. Les règles énoncées au point 3, relatives au délai raisonnable au-delà duquel le destinataire d'une décision ne peut exercer de recours juridictionnel, qui ne peut en règle générale excéder un an sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, sont également applicables à la contestation d'une décision implicite de rejet née du silence gardé par l'administration sur une demande présentée devant elle, lorsqu'il est établi que le demandeur a eu connaissance de la décision. La preuve d'une telle connaissance ne saurait résulter du seul écoulement du temps depuis la présentation de la demande. Elle peut en revanche résulter de ce qu'il est établi, soit que l'intéressé a été clairement informé des conditions de naissance d'une décision implicite lors de la présentation de sa demande, soit que la décision a par la suite été expressément mentionnée au cours de ses échanges avec l'administration, notamment à l'occasion d'un recours gracieux dirigé contre cette décision. Le demandeur, s'il n'a pas été informé des voies et délais de recours dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 19 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, dispose alors, pour saisir le juge, d'un délai raisonnable qui court, dans la première hypothèse, de la date de naissance de la décision implicite et, dans la seconde, de la date de l'événement établissant qu'il a eu connaissance de la décision.

5. Il ressort des termes du recours gracieux présenté par Mme C... et M. B... le 1er septembre 2015 qu'au plus tard à cette date, ils avaient connaissance de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de Brandonnet à la suite de leur demande, adressée le 9 février 2015, tendant à l'exécution de la délibération du 2 février 2014. En l'absence de circonstances particulières, il résulte de ce qui a été dit aux point 3 et 4 que les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née le 11 avril 2015, enregistrées au greffe du tribunal administratif de Toulouse le 8 septembre 2016, soit plus d'un an après le recours gracieux formé le 1er septembre 2015, étaient tardives et, par suite, irrecevables.

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... et M. B... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision née le 11 avril 2015.

Sur les conclusions indemnitaires :

7. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... et M. B... n'ont pas présenté de demande tendant au versement d'une indemnité en réparation du préjudice qu'ils estiment avoir subi du fait de l'illégalité de la décision rejetant leur demande tendant à l'exécution de la délibération du 2 juin 2014. Dès lors, le contentieux n'étant pas lié, les conclusions indemnitaires n'étaient pas recevables. Par suite, Mme C... et M. B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leurs conclusions indemnitaires.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

8. Le présent arrêt, qui confirme le jugement du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il rejette les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite née le 11 avril 2015 n'implique aucune mesure particulière d'exécution. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Brandonnet, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que les appelants demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... et M. B... une somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Brandonnet.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... et M. B... est rejetée.

Article 2 : Mme C... et M. B... verseront à la commune de Brandonnet une somme globale de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C..., à M. E... B... et à la commune de Brandonnet.

Délibéré après l'audience du 9 juillet 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme G..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 juillet 2020.

Le rapporteur,

G... Le président,

Marianne Hardy

Le greffier,

Stéphan Triquet

La République mande et ordonne au préfet de l'Aveyron en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX04465


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-01-07 Procédure. Introduction de l'instance. Délais.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY-SABOURDY
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : DUPEY

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Date de la décision : 29/07/2020
Date de l'import : 15/08/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18BX04465
Numéro NOR : CETATEXT000042184410 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-07-29;18bx04465 ?
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