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25/06/2020 | FRANCE | N°18BX02689

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 25 juin 2020, 18BX02689


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 9 juillet 2018, la société ESCC Distribution et la société Charendis, représentées par Me D..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 9 mai 2018 par lequel le maire de Toulouse a délivré à la société Lidl un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la création d'un supermarché à l'enseigne Lidl d'une surface de vente de 1 420 mètres carrés ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Toulouse une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du

code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le permis de construire atta...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 9 juillet 2018, la société ESCC Distribution et la société Charendis, représentées par Me D..., demandent à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 9 mai 2018 par lequel le maire de Toulouse a délivré à la société Lidl un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la création d'un supermarché à l'enseigne Lidl d'une surface de vente de 1 420 mètres carrés ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Toulouse une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le permis de construire attaqué a été signé par une autorité incompétente ;

- le dossier de demande est incomplet dès lors que l'évaluation des flux de circulation est elle-même incomplète et obsolète, et qu'il ne comprend aucun développement concernant les conséquences du projet en termes d'animation de la vie locale ni l'appel aux entreprises locales pour la construction du bâtiment ni pour l'usage des matériaux de construction ;

- le projet porte atteinte à l'objectif d'aménagement du territoire dès lors qu'il aura des effets négatifs sur l'animation de la vie urbaine ainsi que sur les flux de transports ;

- le projet n'est pas compatible avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale de la grande agglomération toulousaine ;

- la superficie dédiée aux emplacements de stationnement méconnaît les dispositions de l'article L. 111-19 du code de l'urbanisme ;

- le permis de construire attaqué est entaché d'un vice de procédure dès lors qu'à défaut de réponse de l'autorité environnementale dans le délai de trente-cinq jours prévu par les dispositions de l'article R 122-3 du code de l'environnement, le permis de construire devait faire l'objet d'une évaluation environnementale préalable en application des dispositions de l'article R. 122-2 du même code ;

- le projet porte atteinte à l'objectif de développement durable dès lors qu'il ne s'intègre pas dans l'environnement urbain existant et présente une faible qualité architecturale, qu'il entraînera l'imperméabilisation d'une zone naturelle, sera générateur de nuisances visuelles, olfactives et sonores pour le voisinage et ne comprend aucun développement concernant l'appel aux entreprises locales pour la construction du bâtiment ni pour l'usage des matériaux de construction ;

- le projet méconnaît l'objectif de protection des consommateurs dès lors qu'il ne préservera pas le tissu commercial du centre urbain.

Le 22 août 2018, la Commission nationale d'aménagement commercial a transmis à la cour les éléments du dossier d'instruction des recours administratifs préalables formés à l'encontre du projet.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 août 2018, la société Lidl, représentée par la Selarl Leonem, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des sociétés requérantes une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de l'incompatibilité du projet avec les orientations du document d'orientation et d'objectifs applicables aux pôles commerciaux correspondant au niveau 1 dispositions du schéma de cohérence territoriale est inopérant, ces dispositions étant inapplicables en l'espèce ;

- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-19 du code de l'urbanisme est inopérant et non fondé ;

- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 122-2 du code de l'environnement est irrecevable et non fondé ;

- les autres moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 mai 2019, la commune de Toulouse, représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des sociétés requérantes une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de l'incompatibilité du projet avec les orientations du document d'orientation et d'objectifs applicables aux pôles commerciaux correspondant au niveau 1 dispositions du schéma de cohérence territoriale est inopérant, ces dispositions étant inapplicables en l'espèce ;

- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-19 du code de l'urbanisme est inopérant et irrecevable ;

- le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 122-2 du code de l'environnement est inopérant et irrecevable ;

- les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... B...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

- et les observations de Me G..., représentant la commune de Toulouse.

Considérant ce qui suit :

1. Le 30 mai 2017, la société Lidl a déposé une demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la création, sur le territoire de la commune de Toulouse, d'un supermarché à l'enseigne Lidl d'une surface de vente de 1 420 mètres carrés, par transfert et extension de 909 mètres carrés de surface de vente d'un magasin Lidl existant de 511 mètres carrés de surface de vente, distant d'un kilomètre du terrain d'assiette du projet. Le 29 mars 2018, la Commission nationale d'aménagement commercial, saisie sur recours des sociétés CA Pollet, Reynaulor II et ESCC Distribution, a donné un avis favorable au projet. Le 30 mai 2018, le maire de Toulouse a délivré à la société Lidl le permis de construire correspondant. Les sociétés ESCC Distribution et Charendis demandent l'annulation de ce permis de construire en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.

Sur le vice d'incompétence :

2. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... F..., signataire de la décision attaquée, a reçu délégation, par un arrêté du maire de Toulouse du 9 juillet 2015 transmis en préfecture le jour même, en sa qualité d'adjointe au maire, à l'effet notamment de signer les décisions intervenant en matière d'urbanisme et comprenant les permis de construire. Cet arrêté mentionne en outre qu'il a été publié par affichage en mairie le 9 juillet 2015. Par suite, le moyen tiré de ce que le permis de construire attaqué serait illégal faute pour la commune de justifier d'une délégation régulière de son signataire doit être écarté.

Sur l'incomplétude du dossier :

3. Aux termes de l'article R. 752-6 du code de commerce dans sa rédaction applicable : " La demande est accompagnée d'un dossier comportant les éléments suivants : / (...) 4° Effets du projet en matière d'aménagement du territoire. / Le dossier comprend une présentation des effets du projet sur l'aménagement du territoire, incluant les éléments suivants : / a) Contribution à l'animation des principaux secteurs existants ; / (...) c) Evaluation des flux journaliers de circulation des véhicules générés par le projet sur les principaux axes de desserte du site, ainsi que des capacités résiduelles d'accueil des infrastructures de transport existantes ; / (...) 5° Effets du projet en matière de développement durable. / Le dossier comprend une présentation des effets du projet en matière de développement durable, incluant les éléments suivants : / (...) c) Le cas échéant, fourniture d'une liste descriptive des produits et équipements de construction et de décoration utilisés dans le cadre du projet et dont l'impact environnemental et sanitaire a été évalué sur l'ensemble de leur cycle de vie (...) ".

4. En premier lieu, la circonstance que des logements déjà réalisés dans la rue Edmond Rostand ne figurent pas sur l'une des photographies utilisées dans l'étude de trafic produite par la société pétitionnaire, réalisée en janvier 2017, soit quatre mois avant le dépôt de la demande de permis de construire, pour indiquer les réserves de capacité des voies de desserte du projet, n'est pas de nature à faire regarder cette étude en elle-même comme obsolète ou entachée d'inexactitude. Par ailleurs, il ressort de cette étude que les flux de circulation ont été analysés à partir d'un diagnostic établi sur la base de comptages automatiques effectués du 10 au 16 janvier 2017 et de relevés des flux directionnels à quatre carrefours situés à proximité du projet le 10 janvier 2017 entre 17h et 18h et aucun élément ne vient étayer l'affirmation des sociétés requérantes selon laquelle ce diagnostic ne prendrait pas en compte les flux résultant de la présence d'un dépôt des véhicules de transport en commun situé à proximité du projet litigieux, laquelle ne peut être regardée comme établie par la seule production d'une photographie aérienne de ce dépôt. En deuxième lieu, il résulte des dispositions précitées que la société pétitionnaire n'était pas tenue à peine d'irrégularité de sa demande de fournir une liste descriptive des produits et équipements de construction utilisés dans le cadre du projet et dont l'impact environnemental et sanitaire a été évalué sur l'ensemble de leur cycle de vie. Enfin, en se bornant à faire valoir que " le pétitionnaire ne développe aucune argumentation sur l'apport du projet à l'égard des commerces de proximité ", les sociétés requérantes n'établissent aucune insuffisance du dossier de demande, lequel comprend des développements concernant la contribution du projet à l'animation des principaux secteurs existants ainsi que l'indication des principaux pôles commerciaux et activités commerciales situés à proximité. Dès lors, le moyen tiré de ce que le dossier de demande était incomplet et entaché d'erreurs et d'omissions doit être écarté.

Sur la compatibilité du projet avec le schéma de cohérence territoriale de la grande agglomération toulousaine :

5. En premier lieu, le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale de la grande agglomération toulousaine définit les pôles commerciaux comme un ensemble d' " au moins deux commerces de plus de 300 m² de surfaces de vente chacun, distants de moins de 150 mètres l'un de l'autre " et précise " en revanche, les grandes surfaces isolées et les pôles non alimentaires de moins de 5 000 mètres carrés de surface commerciale ne sont pas identifiés comme pôle commercial ". Il ressort des pièces du dossier que le projet litigieux ne se situe pas à moins de 150 mètres d'un commerce d'une surface commerciale supérieure à 300 mètres carrés. Par suite, la société requérante ne peut utilement se prévaloir des dispositions de ce document qui concernent l'implantation des pôles commerciaux intermédiaires. En deuxième lieu, si la société requérante invoque les dispositions de ce document qui prévoient que l'offre de niveau 1, de rayonnement communal, " peut se développer en cohérence avec l'organisation en bassins de vie " et que " l'objectif est de favoriser le développement de l'offre en petits commerces en synergie avec une offre en grandes surfaces limitée à 8 000 mètres carrés de surface commerciale ", l'application de cette disposition à la commune de Toulouse est expressément écartée par le document d'orientation et d'objectifs. Par ailleurs, aux termes de la prescription 86 de ce même document : " Dans les pôles secondaires, pôles de services, centres urbains, un développement des grandes surfaces peut se faire dans la limite d'une offre totale sur la commune de 20 000 m² SC et de 50 000 m² SC dans les secteurs de Toulouse ", et il n'est pas contesté que le projet ne conduit pas à dépasser ces seuils, ainsi que l'a relevé le ministre chargé de l'urbanisme. Compte tenu de la localisation du projet, à proximité de l'autoroute A62 et non loin de la limite nord-est de la commune de Toulouse, de la faible ampleur de sa zone de chalandise, qui n'est pas critiquée, et de la circonstance que le supermarché Lidl existant doit être repris, le projet ne peut être regardé comme compromettant la réalisation de l'objectif de développer le maillage commercial de centre-ville et de centre-bourg et d'assurer l'attractivité du centre-ville de Toulouse. Enfin, eu égard au développement de sa zone d'implantation, le projet peut être regardé à l'inverse comme satisfaisant à l'objectif de privilégier les développements dans les nouveaux lieux de densité. Par suite, le moyen tiré de ce que le projet serait incompatible avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale de la grande agglomération toulousaine doit être écarté.

Sur la méconnaissance de l'article L. 752-6 du code de commerce :

6. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce dans sa rédaction applicable : " I. - L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / (...) c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. / (...) 3° En matière de protection des consommateurs : / (...) b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains (...) ". Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce. L'autorisation d'exploitation commerciale ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi.

En ce qui concerne l'objectif d'aménagement du territoire :

7. Il ressort des pièces du dossier que le projet va permettre de requalifier une parcelle à l'état de friche supportant cinq bâtiments, dont deux maisons abandonnées, et que la société Lidl a conclu les 6 et 7 mars 2018 avec la société " Le cours des halles " une promesse de vente de son droit au bail concernant le local commercial et le parking constituant le magasin Lidl existant objet du transfert, évitant ainsi que son emplacement ne se transforme lui-même en friche commerciale. Par ailleurs, si la société requérante fait valoir que des commerces de proximité se situent non loin du projet, lequel sera susceptible de leur nuire, elle ne conteste pas que l'offre du magasin Lidl existant ne sera pas diversifiée et que, seuls, sa présentation et son confort d'achat seront améliorés. Il n'est pas davantage contesté que le projet, dont la zone de chalandise a connu un accroissement démographique de 94% entre 1999 et 2013, se situe dans un quartier à dominante d'habitat mixte en forte mutation. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le tissu commercial du centre-ville de Toulouse souffrirait de fragilité, compte tenu que la commune de Toulouse n'a pas bénéficié récemment de fonds du FISAC et que le taux de vacances commerciales y est de 5%. Enfin, les sociétés requérantes ne peuvent utilement faire valoir que la densité d'équipements commerciaux de la zone de chalandise à l'enseigne Lidl serait déjà élevée, et la seule circonstance qu'une partie de la clientèle du projet proviendrait des flux de circulation de la RD 188 qui relie la gare ferroviaire et le centre-ville ne suffit pas en elle-même à considérer qu'il serait susceptible de porter atteinte à l'animation de la vie urbaine.

8. L'étude de trafic jointe au dossier de demande indique que le trafic dans la zone est important mais ne fait pas apparaître de congestion, que la réalisation du projet devrait engendrer un accroissement modéré des flux de circulation, évalué à 290 véhicules par jour dont 29 en heure de pointe du soir, et conclut que le projet aura un impact minime sur les conditions de circulation et maintiendra des réserves de capacité suffisantes sur ses différentes voies de desserte. En se bornant à affirmer que le projet sera de nature " à générer des difficultés de trafic et des accidents compte tenu du lieu d'implantation ", la société requérante ne fournit aucun élément permettant de remettre en cause les conclusions de cette étude, et ne démontre pas davantage qu'il serait accidentogène ou que des aménagements seraient nécessaires pour garantir la sécurité des usagers du projet, compte tenu notamment de la largeur de sa principale voie de desserte, le boulevard André Netwiller.

9. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que le projet méconnaîtrait l'objectif d'aménagement du territoire doit être écarté.

En ce qui concerne l'objectif de développement durable :

10. Si la construction projetée présente un caractère relativement imposant par rapport aux bâtiments situés dans son environnement proche, ce dernier, composé essentiellement d'habitats collectifs ou pavillonnaires discontinus, ne présente aucune caractéristique remarquable. Le projet a par ailleurs fait l'objet d'une certaine recherche dans le choix de ses matériaux, briques rouges pour la vêture basse et tuiles rouges en toiture, retenus pour s'harmoniser avec la tradition architecturale toulousaine, et prévoit également qu'un écran végétal sera installé le long de la voie publique afin de masquer le parking ainsi qu'une jardinière le long de la façade sur laquelle les logements voisins ont une vue afin d'en diminuer l'impact visuel. D'autre part, la surface végétalisée sera d'une superficie de 2 570 mètres carrés, soit 32% de l'emprise foncière, et 55 arbres de haute tige doivent être plantés. Le projet prévoit en outre que 55% des emplacements de stationnement, soit 71, seront situés sous la surface commerciale en rez-de-chaussée, limitant ainsi l'imperméabilisation des sols. Enfin, la société pétitionnaire a prévu de limiter les nuisances visuelles par un système d'éclairage progressif et une extinction de celui-ci après le départ du personnel, la mise en place d'un quai de déchargement isolé acoustiquement ainsi que des livraisons par des camions et équipements certifiés " PIEK ", soit respectant un seuil d'émission sonore inférieur à 60 db. Dès lors, en dépit de la proximité de certaines habitations environnantes et des nuisances qu'il est susceptible d'engendrer, le moyen tiré de ce que le projet méconnaîtrait l'objectif de développement durable doit être écarté.

En ce qui concerne l'objectif de protection du consommateur :

11. La société requérante se borne sur ce point à renvoyer à ses développements concernant les effets du projet sur l'animation de la vie urbaine. Il y a lieu d'écarter ce moyen pour les motifs exposés au point 7 ci-dessus.

Sur les autres moyens :

12. Il ressort des pièces du dossier que le projet a fait l'objet d'une dispense d'étude d'impact après examen au cas par cas par décision de l'autorité environnementale du 18 juin 2017 en application des dispositions des articles R. 122-2 et R. 122-3 du code de l'environnement. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner sa recevabilité, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

13. Aux termes de l'article L. 600-1-4 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'il est saisi par une personne mentionnée à l'article L. 752-17 du code de commerce d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis de construire mentionné à l'article L. 425-4 du présent code, le juge administratif ne peut être saisi de conclusions tendant à l'annulation de ce permis qu'en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale. Les moyens relatifs à la régularité de ce permis en tant qu'il vaut autorisation de construire sont irrecevables à l'appui de telles conclusions (...) ". Aux termes de l'article L. 111-19 du même code alors applicable : " Nonobstant toute disposition contraire du plan local d'urbanisme, l'emprise au sol des surfaces, bâties ou non, affectées aux aires de stationnement annexes d'un commerce soumis à l'autorisation d'exploitation commerciale prévue aux 1° et 4° du I de l'article L. 752-1 du code de commerce et à l'autorisation prévue au 1° de l'article L. 212-7 du code du cinéma et de l'image animée, ne peut excéder un plafond correspondant aux trois quarts de la surface de plancher des bâtiments affectés au commerce. Les espaces paysagers en pleine terre, les surfaces des aménagements relevant de l'article L. 3114-1 du code des transports, les surfaces réservées à l'auto-partage et les places de stationnement destinées à l'alimentation des véhicules électriques ou hybrides rechargeables sont déduits de l'emprise au sol des surfaces affectées au stationnement. La surface des places de stationnement non imperméabilisées compte pour la moitié de leur surface (...) ".

14. Il résulte des dispositions précitées du premier alinéa de l'article L. 600-1-4 du code de l'urbanisme que, lorsque le juge est saisi par un professionnel dont l'activité est susceptible d'être affectée par un projet d'aménagement commercial d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis de construire, mentionné à l'article L. 425-4 du même code, les moyens relatifs à la régularité de ce permis en tant qu'il vaut autorisation de construire sont irrecevables. Par suite, la société requérante n'est pas recevable à se prévaloir des dispositions de l'article L. 111-19 du code de l'urbanisme pour contester le permis de construire attaqué en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.

15. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 9 mai 2018 par lequel le maire de Toulouse a délivré à la société Lidl un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale.

Sur les frais liés au litige :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Toulouse, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent les sociétés requérantes au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de ces dernières une somme de 1 500 euros à verser, d'une part, à la commune de Toulouse, et, d'autre part, à la société Lidl, à ce titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête des sociétés ESCC Distribution et Charendis est rejetée.

Article 2 : Les sociétés ESCC Distribution et Charendis verseront une somme de 1 500 euros à la commune de Toulouse et une somme de 1 500 euros à la société Lidl en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société ESCC Distribution, à la société Charendis, à la commune de Toulouse, à la société Lidl et au ministre de l'économie et des finances (Commission nationale d'aménagement commercial).

Délibéré après l'audience du 28 mai 2020 à laquelle siégeaient :

M. Didier Salvi, président,

M. A... B..., premier conseiller,

Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 juin 2020.

Le président,

Didier Salvi

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18BX02689


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18BX02689
Date de la décision : 25/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-043 Urbanisme et aménagement du territoire. Autorisations d`utilisation des sols diverses. Autorisation d`exploitation commerciale (voir : Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique).


Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: M. David TERME
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : LEONEM AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-06-25;18bx02689 ?
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