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26/11/2019 | FRANCE | N°17BX02691

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 26 novembre 2019, 17BX02691


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise agricole à responsabilité limitée (Earl) Les Orphées et M. H... D..., son gérant, ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 13 avril 2015 par lequel le maire la commune de Nérigean a interdit la circulation sur la route du Pont d'Eychaud aux véhicules de plus de 3,5 tonnes.

Par un jugement n° 1502582 du 7 juin 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7

août 2017, et des mémoires enregistrés le 27 février et le 19 septembre 2019, l'Earl Les Orphée...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise agricole à responsabilité limitée (Earl) Les Orphées et M. H... D..., son gérant, ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 13 avril 2015 par lequel le maire la commune de Nérigean a interdit la circulation sur la route du Pont d'Eychaud aux véhicules de plus de 3,5 tonnes.

Par un jugement n° 1502582 du 7 juin 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 août 2017, et des mémoires enregistrés le 27 février et le 19 septembre 2019, l'Earl Les Orphées et M. D..., représentés par Me E..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 juin 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 avril 2015 du maire de la commune de Nérigean ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Nérigean le versement à chacun de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'arrêté n'est pas suffisamment motivé ;

- l'arrêté en litige n'a pas été pris pour des motifs de sécurité publique mais pour des considérations liées à l'état de la voirie, alors qu'une obligation d'entretien de celle-ci incombe à la commune, ce qui constitue un motif illégal ;

- l'objectif de sécurité publique poursuivi par cet arrêté ne pouvait justifier les interdictions de circulation à l'égard de certains véhicules, dès lors qu'un défaut d'entretien des routes par la commune est à l'origine de ces dégradations de la chaussée ;

- il est entaché de détournement de pouvoir car il vise à pallier les carences de la commune dans l'entretien des voies communales ;

- la sécurité des usagers pouvait être assurée par des solutions alternatives, qui consistent à faire réaliser des travaux ;

- s'ils ne contestent pas que le pont d'Eychaud est dans un état altéré, qui conduit à une perte de résistance aux charges, en revanche, ces désordres ne sont pas imputables au passage des camions ;

- la commune ne justifie pas le tonnage de 3, 5 tonnes retenu ;

- M. D... ne peut accéder librement à la parcelle n°86 ;

- l'interdiction n'est pas proportionnée aux bus poursuivis et porte atteinte à leur libre circulation et à la liberté du commerce.

Par des mémoires, enregistrés le 20 février 2018 et le 19 septembre 2019, la commune de Nérigean, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de l'Earl Les Orphées et de M. D... ;

2°) de mettre à la charge de L'Earl Les Orphées et de M. D..., chacun, la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 4 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 19 septembre 2019 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la voirie routière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F... C...,

- les observations de Me I... représentant l'Earl Les Orphées et M. D..., et les observations de Me A..., représentant la commune de Nérigean.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 13 avril 2015, le maire la commune de Nérigean a interdit la circulation sur la route du Pont d'Eychaud aux véhicules de plus de 3,5 tonnes. L'entreprise agricole à responsabilité limitée (Earl) Les Orphées et M. D..., son gérant, ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation de cet arrêté. Ils relèvent appel du jugement du 7 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 alors en vigueur : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...). ". Aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3. En premier lieu, l'arrêté attaqué du 13 avril 2015 vise les articles du code général des collectivités territoriales dont il fait application ainsi que le code de la route et le code de la voirie routière. Il précise que la mesure est prise pour des raisons de sécurité au vu des préconisations du rapport rendu par un cabinet d'études de BTP en date du 21 janvier 2015, lequel indique que plusieurs désordres majeurs ont été relevés sur le pont et montre qu'une limitation de tonnage est à retenir, compte-tenu de l'état d'altération de l'ouvrage. Enfin, le maire de Nérigean n'ayant pas motivé son arrêté par référence à ce rapport, mais en ayant repris sa teneur, il ne devait pas annexer ce rapport à l'arrêté. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté doit, en tout état de cause, être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 2213-1 du code général des collectivités territoriales : " Le maire exerce la police de la circulation sur (...) les voies de communication à l'intérieur des agglomérations, sous réserve des pouvoirs dévolus au représentant de l'Etat dans le département sur les routes à grande circulation ". Aux termes de l'article R. 141-3 du code de la voirie routière : " Le maire peut interdire d'une manière temporaire ou permanente l'usage de tout ou partie du réseau des voies communales aux catégories de véhicules dont les caractéristiques sont incompatibles avec la constitution de ces voies, et notamment avec la résistance et la largeur de la chaussée ou des ouvrages d'art ".

5. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport réalisé le 21 janvier 2015 par un cabinet de bâtiment et travaux publics, Ginger CEBTP, dont les éléments utiles ont été communiqués aux appelants, que les dégradations constatées sur le pont d'Eychaud, dont la voûte est constituée de pierres de taille calcaire, consistent en l'érosion d'une dizaine de pierres jusqu'à 10 cm de profondeur qui altère la capacité portante de l'ouvrage. Ce rapport préconise compte-tenu du niveau d'altération de l'ouvrage en l'état une limitation de tonnage à retenir correspondant à la catégorie 2, et plus précisément à l'interdiction pour tout type de véhicules de plus de 3,5 tonnes de circuler sur l'ouvrage. Dans ces conditions, alors même que l'interdiction édictée permettra également d'assurer la pérennité de l'ouvrage, l'arrêté du maire de Nérigean du 13 avril 2015 était justifié au regard des exigences de sécurité publique. Par suite, ce motif n'est pas illégal.

6. En troisième lieu, compte-tenu des exigences de sécurité publique dont il vient d'être dit qu'elles étaient établies, les circonstances à les supposer établies que l'interdiction de circulation aurait également pour objectif de pallier les défauts d'entretien de la voie par la collectivité et qu'elle serait justifiée par des raisons financières, n'est de nature ni à entacher d'illégalité l'arrêté, ni à révéler un détournement de pouvoir. Ces moyens doivent par suite, être écartés.

7. En quatrième lieu, l'interdiction de circuler pour les véhicules de plus de 3,5 tonnes sur la route du pont d'Eyraud à partir du panneau d'interdiction, soit depuis le chemin du château Fourens, seul endroit où le demi-tour est possible, a été rendue nécessaire sur cette portion de route pour permettre aux poids lourds de manoeuvrer dans des conditions normales de sécurité. Par ailleurs, l'interdiction de circuler pour les poids lourds sur cette portion de route, compte-tenu de l'existence d'un itinéraire alternatif sur la voie communale située à proximité, n'a pas eu pour effet de rendre impossible la circulation des poids lourds, ni d'empêcher les activités agricoles des appelants. Dès lors, cette mesure de police est nécessaire et proportionnée au but poursuivi.

8. En cinquième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points précédents, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté attaqué porterait une atteinte excessive, et par suite illégale, à la liberté d'aller et venir et à la liberté du commerce et de l'industrie.

9. Il résulte de tout de qui précède que l'Earl Les Orphées, et M. D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Nérigean du 13 avril 2015.

Sur les frais d'instance :

10. Ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Nérigean, qui n'a pas la qualité de partie perdante, la somme que demandent l'Earl Les Orphées et M. D... au titre de leurs frais d'instance. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Earl Les Orphées et de M. D... une somme de 1 500 euros au titre des frais d'instance.

DECIDE

Article 1er : La requête de l'Earl Les Orphées et de M. D... est rejetée.

Article 2 : L'Earl Les Orphées et M. D... verseront à la commune de Nérigean la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Earl Les Orphées, à M. H... D... et à la commune de Nérigean.

Délibéré après l'audience du 29 octobre 2019 à laquelle siégeaient :

M. G... J..., présidente,

Mme F... C..., premier-conseiller,

Mme Agnès Bourjol, conseiller.

Lu en audience publique, le 26 novembre 2019.

Le rapporteur,

Déborah C...La présidente,

Fabienne J...

Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N°17BX02691


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17BX02691
Date de la décision : 26/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-04-01-01 Police. Police générale. Circulation et stationnement. Réglementation de la circulation.


Composition du Tribunal
Président : Mme ZUCCARELLO
Rapporteur ?: Mme Déborah DE PAZ
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : CABINET LEXIA

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-11-26;17bx02691 ?
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