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29/10/2019 | FRANCE | N°19BX01810

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 29 octobre 2019, 19BX01810


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 31 janvier 2019 par lequel le préfet des Deux-Sèvres lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n°1900392 du 1er avril 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 1er mai 2019, Mme A... représentée par Me C... F...

, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 31 janvier 2019 par lequel le préfet des Deux-Sèvres lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n°1900392 du 1er avril 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 1er mai 2019, Mme A... représentée par Me C... F..., avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 1er avril 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 31 janvier 2019 du préfet des Deux-Sèvres ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, au préfet des Deux-Sèvres, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de dix jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation en tant qu'elle ne peut voyager vers son pays d'origine et qu'il lui est impossible de suivre un traitement adapté dans son pays d'origine ;

- l'arrêté porte atteinte au droit à la santé tel que prévu par l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme.

Par ordonnance du 12 juin 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 août 2019 à midi.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 juillet 2019.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. G... B....

Considérant ce qui suit :

1. Madame A..., ressortissante bissau-guinéenne née le 5 septembre 1974, est entrée irrégulièrement sur le sol national le 10 septembre 2016 selon ses déclarations. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile le 22 novembre 2017, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 2 novembre 2018. Par un courrier du 12 septembre 2018 Mme A... a sollicité son admission au séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison de son état de santé. Par un arrêté du 31 janvier 2019 le préfet des Deux-Sèvres lui a refusé la délivrance du titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme A... relève appel du jugement du 1er avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Par une décision du 18 juillet 2019 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux, Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Dans ces conditions, les conclusions de Mme A... tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet. Il n'y a donc plus lieu d'y statuer.

Sur l'arrêté du 31 janvier 2019 :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration : " La motivation (...) doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

4. L'arrêté du 31 janvier 2019 comporte les éléments de droit et de faits sur lesquels il se fonde. D'une part, l'arrêté vise la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, et le code du séjour de l'étranger et du droit d'asile notamment ses articles L. 211-1 et L. 511-1. Les articles L. 313-11 11°, L. 511-1 et L. 513-4 sont également reproduits au sein de l'arrêté. D'autre part, il indique expressément les éléments propres à la situation personnelle de Mme A... en particulier sa nationalité, ses conditions d'entrée en France, les rejets successifs de sa demande d'asile par l'OFPRA le 22 novembre 2017 puis par la CNDA le 2 novembre 2018. Il mentionne l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 18 janvier 2019 selon lequel si son état nécessite une prise en charge son défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, et qu'elle n'établit pas ne pas pouvoir voyager vers son pays d'origine. Il précise également que ses liens privés et familiaux ne sont pas caractérisés par leur ancienneté ou leur stabilité, alors qu'elle a vécu 45 ans hors de France, et que ses cinq enfants vivent dans son pays d'origine. Enfin, il est indiqué qu'elle ne peut prétendre à un titre de séjour de plein droit, qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale et qu'elle n'établit pas un risque de traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. Il résulte de ces éléments que le préfet ne s'est pas fondé sur le seul avis du collège des médecins de l'OFII qu'il n'avait pas à questionner en l'absence d'éléments contraires apportés par la requérante. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation en droit en fait de la décision attaquée doit être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".

6. Il ressort de l'arrêté litigieux que le préfet des Deux-Sèvres s'est notamment fondé sur l'avis émis par le collège des médecins de l'OFII du 18 janvier 2019 selon lequel si l'état de santé de Mme A... nécessite une prise en charge, son défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et qu'elle peut voyager sans risques vers son pays d'origine. Parmi les cinq certificats médicaux produits par Mme A..., seul celui établi par le docteur Parrat, généraliste, qui fait état d'une " affection cardiovasculaire nécessitant des soins réguliers et des thérapeutiques adaptées " évoque un retour impossible en Guinée Bissau mais sans pour autant en indiquer les raisons. Dans ces conditions, en estimant que l'état de santé de Mme A... ne nécessitait pas un traitement dont le défaut aurait pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et qu'elle pouvait voyager sans risques vers son pays d'origine, le préfet des Deux-Sèvres n'a pas méconnu les dispositions précitées.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. - 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

8. Mme A... soutient qu'au regard de la nécessité de poursuivre ses soins auxquels elle ne pourrait avoir accès dans son pays d'origine et vers lequel elle ne peut pas voyager, la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme, dont le droit à la santé fait partie intégrante. Toutefois la requérante ne peut se prévaloir que d'une brève durée de séjour en France et ne justifie d'aucune intégration ni d'aucun lien personnel et familial, alors que ses cinq enfants vivent dans son pays d'origine. De plus, il ressort de ce qui a été dit au point 6, qu'il n'est pas établi que le défaut de prise en charge de l'état de santé de Mme A... pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité ou que l'intéressée n'aurait pas effectivement accès à un traitement adapté dans son pays d'origine et vers lequel elle ne pourrait pas voyager sans risques. Dès lors le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 janvier 2019 du préfet des Deux-Sèvres. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles relatives aux frais d'instance doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire de Mme A... à l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Le surplus de la requête de Mme A... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée au préfet des Deux-Sèvres.

Délibéré après l'audience du 1er octobre 2019 à laquelle siégeaient :

M. G... B..., président,

Mme E... H..., présidente-assesseure,

Mme Déborah de Paz, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 29 octobre 2019

La présidente-assesseure,

Fabienne H...Le président-rapporteur,

Dominique B...Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°19BX01810


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX01810
Date de la décision : 29/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. NAVES
Rapporteur ?: M. Dominique NAVES
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : GATINEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 31/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-29;19bx01810 ?
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