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10/10/2019 | FRANCE | N°18BX01718

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 10 octobre 2019, 18BX01718


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. D... C..., Mme H... F... et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler, pour excès de pouvoir, la délibération du 22 décembre 2016 par laquelle le conseil municipal de Brach a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune ou, à défaut, en tant seulement que les parcelles cadastrées B n° 7 et n° 474 sont classées en zone UK, celles cadastrées B n° 45 et n° 46 en secteur 1AUc et celle cadastrée B n° 728 en zone UE.

Par un jugement n° 1700740 du 1er mars 2018, le tribu

nal administratif de Bordeaux a annulé la délibération du 22 décembre 2016 par laquell...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. D... C..., Mme H... F... et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler, pour excès de pouvoir, la délibération du 22 décembre 2016 par laquelle le conseil municipal de Brach a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune ou, à défaut, en tant seulement que les parcelles cadastrées B n° 7 et n° 474 sont classées en zone UK, celles cadastrées B n° 45 et n° 46 en secteur 1AUc et celle cadastrée B n° 728 en zone UE.

Par un jugement n° 1700740 du 1er mars 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la délibération du 22 décembre 2016 par laquelle le conseil municipal de Brach a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune en tant que l'article UK 8 du règlement prévoit une distance minimale entre les constructions non contiguës de 4 mètres en contradiction avec le rapport de présentation.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 30 avril 2018 et 26 février 2019, M. D... C..., Mme H... F... et Mme A... C..., représentés par Me G..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 1er mars 2018 en tant qu'il n'a pas annulé la délibération du 22 décembre 2016 dans son intégralité ;

2°) d'annuler la délibération du 22 décembre 2016 par laquelle le conseil municipal de Brach a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune ;

3°) à titre subsidiaire, annuler la délibération du 22 décembre 2016 en tant qu'elle a classé les parcelles cadastrées B n° 474 et n° 7 en zone UK ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Brach une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le plan local d'urbanisme n'est pas cohérent avec les cinq orientations définies par le projet d'aménagement et de développement durables en ce que le règlement de la zone UK tend à interdire la réalisation de l'objectif de développement d'une offre d'hébergement touristique dans le bourg ; en outre, en contradiction avec l'orientation prévoyant de pérenniser les activités agricoles présentes sur la commune, le plan local d'urbanisme a transformé certaines zones N accueillant des activités agricoles en zone de développement urbain ;

- le règlement de la zone UK qui interdit toute construction autre que celles liées à la création d'un village de vacances classé en hébergement léger n'est pas cohérent avec les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) et notamment ceux relatifs au développement d'un " tourisme vert " ; les dispositions de l'article R. 151-30 du code de l'urbanisme ne sont pas respectées ;

- l'article UK 7 du règlement qui impose un retrait de 4 mètres des limites séparatives pour l'implantation des constructions et installations est en contradiction avec le rapport de présentation qui fixe un recul minimum de 5 mètres par rapport aux limites séparatives ; l'article UE 10 du règlement est en contradiction avec le rapport de présentation du plan local d'urbanisme ; les écarts entre le rapport de présentation et le règlement sont constitutifs d'une illégalité qui justifie de l'annulation du plan local d'urbanisme en ce que la question du recul ou de la hauteur des constructions envisagée affecte sensiblement la création architecturale et la futur image de la ville ;

- le conseil municipal de Brach a commis une erreur manifeste d'appréciation en ce que le plan local d'urbanisme classe les parcelles cadastrées B 474 et 7 en zone UK, interdisant l'exercice de l'activité d'hôtellerie de plein air ; la justification donnée dans le rapport de présentation est insuffisante et incompréhensible dès lors l'usage réservé à cette zone sera le même, quel que soit le mode d'hébergement.

Par un mémoire enregistré le 24 janvier 2019, la commune de Brach, représentée par le cabinet Noyer-Cazcarra, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des appelants d'une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 12 septembre 2019 :

- le rapport de Mme I...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant M. C..., Mme F... et Mme C... et les observations de Me E... représentant la commune de Brach.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... C... et Mme H... F..., propriétaires des parcelles cadastrées B n° 7 et 474 et Mme A... C..., propriétaire des parcelles cadastrées 45, 46 et 728, ont demandé l'annulation de la délibération du 22 décembre 2016 par laquelle le conseil municipal de Brach a approuvé l'élaboration du plan local d'urbanisme de la commune. Par un jugement n° 1700740 du 1er mars 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cette délibération en tant que l'article UK 8 du règlement prévoit une distance minimale entre les constructions non contiguës de 4 mètres en contradiction avec le rapport de présentation. M. D... C..., Mme H... F... et Mme A... C... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas annulé la délibération du 22 décembre 2016 dans son intégralité.

Sur la légalité de la délibération du 22 décembre 2016 :

2. En vertu de l'article L. 152-1 du code de l'urbanisme, " Le plan local d'urbanisme (...) comprend un rapport de présentation, un projet d'aménagement et de développement durables, des orientations d'aménagement et de programmation, un règlement et des annexes ". Aux termes de l'article L. 151-4 du même code : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement (...) ". L'article L. 151-5 du même code dispose que : " Le projet d'aménagement et de développement durables définit : / 1° Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques ; / 2° Les orientations générales concernant l'habitat, les transports et les déplacements, les réseaux d'énergie, le développement des communications numériques, l'équipement commercial, le développement économique et les loisirs, retenues pour l'ensemble de l'établissement public de coopération intercommunale ou de la commune.

Il fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain (...) ". Aux termes de l'article L. 151-8 du même code : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3 ". Aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ".

3. Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier du plan local d'urbanisme que la commune de Brach, essentiellement sylvicole, est caractérisée également par la présence d'une activité agricole, l'ensemble des espaces agricoles représentant 156 hectares, soit initialement 5 % du territoire communal. Afin de promouvoir une sauvegarde maximale des espaces agricoles, le plan local d'urbanisme a procédé au classement de 201 hectares en zone A, soit 7 % du territoire, à savoir une augmentation de la surface classée en zone A. Si les appelants font valoir que le classement des parcelles cadastrées 8, 9, 10 et 11 en zone naturelle contrevient à l'objectif de pérenniser les activités agricoles, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces parcelles présenteraient un potentiel agronomique, biologique ou économique. Le classement en zone N ne fait au demeurant pas obstacle à l'exploitation agricole des terres. En outre, si les parcelles 107, 113, 114, 651, 470, et 12 ont été classées en zone à urbaniser, le rapport de présentation précise que ces " espaces naturels ou forestiers (...) sont considérés comme étant stratégiques pour le développement urbain futur de la commune " en ce qu'ils sont notamment reliés au réseau d'assainissement collectif et à la station d'épuration. Ce classement répond par suite à l'objectif du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) de maitriser et d'harmoniser le développement de l'urbanisation. Enfin, si les appelants soulignent la qualité des prairies situées sur les parcelles 45 et 46, le classement de ces parcelles en zone AUc dont la vocation est d'accueillir des constructions destinées au commerce ou à des activités de service, est cohérent avec l'objectif du PADD de permettre l'accueil d'activités économiques sur la commune afin de limiter la dépendance de la commune par un développement endogène.

5. En second lieu, il ressort du règlement du plan local d'urbanisme que la zone UK correspond " au secteur destiné à la création d'un village de vacances classé en hébergement léger ". Contrairement à ce que soutiennent les appelants, la zone UK n'est pas en contradiction avec l'objectif du PADD de permettre le développement d'une offre d'hébergement touristique dans le bourg. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de l'incohérence au sein du plan local d'urbanisme.

6. Aux termes de l'article R. 151-30 du code de l'urbanisme : " Pour des raisons de sécurité ou salubrité ou en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, le règlement peut, dans le respect de la vocation générale des zones, interdire : / 1° Certains usages et affectations des sols ainsi que certains types d'activités qu'il définit ; / 2° Les constructions ayant certaines destinations ou sous-destinations ".

7. Il ressort du règlement du plan local d'urbanisme que la zone UK est destinée à l'implantation de constructions liées à un village de vacances classé en hébergement léger, dans laquelle est interdit tout autre type d'hébergement touristique de type hébergement de plein-air, caravanes ou résidences mobiles. Le PADD prévoit comme objectif de permettre le développement d'une offre d'hébergement touristique dans le bourg et met en exergue la stratégie de développement touristique définie dans le cadre du SCOT " Medoc 33 " qui, bien qu'en cours de réalisation, a été à bon droit prise en compte par le tribunal administratif, en ce qu'elle prévoit " un redéploiement des activités touristiques sur l'ensemble du territoire Médoc dont l'offre ne demande qu'à se diversifier, en intégrant la dimension de tourisme vert ou forestier ". Il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport de présentation du plan local d'urbanisme que l'interdiction instaurée par le règlement applicable à la zone UK est motivée par la volonté de la commune de Brach de proposer un hébergement différent de l'offre importante de campings sur les communes voisines (Carcans, Lacanau), projet justifié par le positionnement de la commune dans la traversée Médocaine Lacanau/Pauillac et au sein du Médoc forestier à mi-chemin entre l'océan, le vignoble et l'estuaire. Par ailleurs, le rapport de présentation du plan local d'urbanisme explique cette restriction afin d'éviter les conflits de voisinage et de favoriser l'accueil touristique sur une période plus longue et un projet architectural de qualité dans un environnement urbanisé. Enfin, contrairement à ce que soutiennent les appelants, l'implantation d'hébergement léger ne contrevient pas à l'objectif de développement du tourisme vert prôné par le PADD. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 151-30 du code de l'urbanisme.

8. Au soutien du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entaché le classement des parcelles B N° 7 et 474 en zone UK, les appelants ne se prévalent d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas utilement la réponse qui lui a été apportée par le tribunal administratif. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

9. Aux termes de l'article UK7 : " 7.1 - Les constructions ou installations devront être implantées en retrait de 4 m des limites séparatives ". Or, il ressort du rapport de présentation du plan local d'urbanisme qu'" afin de permettre l'intégration paysagère des constructions liées à l'hébergement touristique, un recul minimum de 5 m est fixé par rapport aux limites séparatives ". Toutefois, cette différence limitée à un mètre ne caractérise pas une contradiction manifeste entre le règlement et le rapport de présentation, d'autant que l'article UK7 prévoit également expressément que ce recul pourra atteindre 6 mètres lorsque les limites sont constituées de fossés.

10. Il ressort des pièces du dossier que le rapport de présentation explique qu'" une hauteur de 12 mètres est autorisée de façon à pouvoir accueillir un programme de constructions à usage d'équipements collectifs ". L'article UE 10 prévoit : " 10-1. La hauteur maximale des constructions nouvelles est fixée à 9 m sauf considérations techniques ou esthétiques dûment justifiée ". Ainsi, les limitations de hauteur des constructions en zone UE peuvent être adaptées en fonction de considérations techniques ou esthétiques. Par suite, la seule différence de hauteur des constructions en zone UE dans le rapport de présentation et le règlement ne caractérise pas une contradiction manifeste.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. C..., Mme F... et Mme C... ne sont fondés pas à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif n'a annulé la délibération du 22 décembre 2016 par laquelle le conseil municipal de Brach a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune qu'en tant que l'article UK 8 du règlement prévoit une distance minimale entre les constructions non contiguës de 4 mètres en contradiction avec le rapport de présentation.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Brach, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent les appelants au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de M. C..., Mme F... et Mme C... une somme globale de 1 500 euros à verser à la commune de Brach au titre des mêmes frais.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C..., Mme F... et Mme C... est rejetée.

Article 2 : M. C..., Mme F... et Mme C... verseront à la commune de Brach une somme globale de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., Mme H... F..., Mme A... C... et à la commune de Brach.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme I..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 octobre 2019.

Le rapporteur,

I... Le président,

Marianne HARDY

Le greffier,

Cindy VIRIN

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 18BX01718 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01-03-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU). Légalité des plans. Légalité interne. Appréciations soumises à un contrôle d'erreur manifeste.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY-SABOURDY
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : CABINET ARCC

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Date de la décision : 10/10/2019
Date de l'import : 15/10/2019

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18BX01718
Numéro NOR : CETATEXT000039203644 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-10;18bx01718 ?
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