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10/10/2019 | FRANCE | N°17BX00849

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 10 octobre 2019, 17BX00849


Vu la procédure suivante :

Par un arrêt avant dire droit du 7 février 2019 statuant sur la requête, enregistrée le 8 mars 2017, présentée par Mme C... A..., tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de la Martinique du 13 décembre 2016 en tant qu'il a rejeté la demande de contre-expertise médicale et d'indemnité provisionnelle ainsi que sa demande d'indemnisation au titre du préjudice matériel et en ce qu'il a limité l'indemnisation de son préjudice corporel à la somme de 11 100 euros, la cour a, en premier lieu, annulé le jugement n° 1000808 du 13

décembre 2016 du tribunal administratif de la Martinique, en deuxième li...

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt avant dire droit du 7 février 2019 statuant sur la requête, enregistrée le 8 mars 2017, présentée par Mme C... A..., tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de la Martinique du 13 décembre 2016 en tant qu'il a rejeté la demande de contre-expertise médicale et d'indemnité provisionnelle ainsi que sa demande d'indemnisation au titre du préjudice matériel et en ce qu'il a limité l'indemnisation de son préjudice corporel à la somme de 11 100 euros, la cour a, en premier lieu, annulé le jugement n° 1000808 du 13 décembre 2016 du tribunal administratif de la Martinique, en deuxième lieu, rejeté les conclusions de Mme A... tendant à la désignation d'un nouvel expert et en dernier lieu, invité Mme A... à chiffrer le montant définitif de ses prétentions indemnitaires.

Par un mémoire, enregistré le 11 mars 2019, Mme C... A..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) de condamner la commune de Fort-de-France à lui verser une somme de 55 000 euros au titre du préjudice corporel et 100 000 euros au titre du préjudice matériel ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Fort-de-France une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., alors âgée de 61 ans, a fait une chute devant l'entrée de l'hôtel de ville de Fort-de-France le 7 décembre 2006. Par un jugement avant-dire-droit du 13 mars 2014, le tribunal administratif de la Martinique a jugé que la commune de Fort-de-France était entièrement responsable des préjudices subis par la requérante et que l'expertise du Dr Désiré, désigné en référé, devait être regardée comme irrégulière du fait des relations que celui-ci entretenait avec le GAN, assureur de la commune. Il a, par le même jugement, ordonné une nouvelle expertise afin de décrire l'état initial antérieur de l'intéressée, son état actuel, le lien entre celui-ci et l'accident initial et de manière générale, évaluer les préjudices susceptibles de donner lieu à indemnisation. Le nouvel expert désigné a rendu son rapport le 29 novembre 2015. Par un jugement n° 1000808 du 13 décembre 2016, le tribunal a condamné la commune de Fort-de-France à verser à Mme A... une somme de 11 100 euros en réparation des préjudices subis. Mme A... demande l'annulation du jugement du 13 décembre 2016 en tant qu'il a rejeté sa demande de contre-expertise médicale présentée le 28 avril 2016 et d'indemnité provisionnelle, ainsi que sa demande d'indemnisation au titre du préjudice matériel, et en ce qu'il a limité l'indemnisation de son préjudice corporel à la somme de 11 100 euros. Par un arrêt avant dire droit du 7 février 2019, la cour a, en premier lieu, annulé le jugement n° 1000808 du 13 décembre 2016 du tribunal administratif de la Martinique, en deuxième lieu, rejeté les conclusions de Mme A... tendant à la désignation d'un nouvel expert et en dernier lieu, invité Mme A... à chiffrer le montant définitif de ses prétentions indemnitaires.

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne le lien de causalité :

2. Dans son rapport enregistré le 3 décembre 2015, le Dr Gbaguidi explique que l'accident du 7 décembre 2006 n'a entraîné ni lésions osseuses, ni ligamentaires au point de vue clinique et para clinique et que les études cliniques, radiologiques et les examens spécialisés ont montré que la blessée avait des antécédents notamment des lésions congénitales, une étroitesse du canal lombaire, des lésions dégénératives multiples et une neuropathie diabétique. L'appelante conteste les conclusions de l'expertise notamment l'existence de ces antécédents. Elle soutient que des lésions osseuses et ligamentaires ont été constatées par l'ensemble des médecins qui l'ont examinée après l'accident. Toutefois, il résulte de l'instruction, notamment des analyses, bilans, certificats médicaux versés aux débats et des expertises produites, notamment le rapport du docteur Jean-Baptiste du 21 juin 2013, que Mme A... présente une gonarthrose bilatérale sur genou valgum dont les lésions sont le fruit d'une évolution de plusieurs années, d'origine non traumatique en l'absence de fracture ayant modifié l'anatomie de l'articulation. Par ailleurs, Mme A... souffre d'une amyotrophie bilatérale importante des quadriceps en rapport avec la gonarthrose bilatérale et une neuropathie diabétique des membres inférieurs sans trouble de la sensibilité profonde. En outre, les différentes expertises montrent un état antérieur lombaire représenté par un canal lombaire étroit et des discopathies dégénératives. Si l'accident du 7 décembre 2006 a pu aggraver très transitoirement la gonarthrose et si les lombosciatiques récidivantes sont apparues peu de temps après cette date, il résulte de l'instruction que les chutes ultérieures sont la conjonction d'une instabilité liée à la gonarthrose bilatérale, d'une amyotrophie des quadriceps et d'une neuropathie sensitivo-motrice débutante d'origine diabétique, et ne sont pas, contrairement à ce que soutient l'appelante, en rapport avec les séquelles de l'accident du 7 décembre 2006. Par suite, l'accident est venu décompenser un état préexistant et n'entre que pour un pourcentage minime que l'expert évalue au maximum à cinq ou six centièmes de toutes les pathologies que présente Mme A....

En ce qui concerne les préjudices :

S'agissant des pertes de revenus :

3. Mme A... soutient qu'elle a subi un manque à gagner du fait de l'accident, en raison de l'arrêt de son activité d'élevage, au demeurant non établie, et demande, à ce titre, une indemnisation de 100 000 euros. Toutefois, il ressort du rapport d'expertise que si Mme A... est inapte à reprendre ses activités professionnelles, cette incapacité ne résulte pas de l'accident du 7 décembre 2006 mais est due à ses antécédents médicaux. Par suite, ce chef de préjudice ne peut donner lieu à indemnisation.

S'agissant du déficit fonctionnel temporaire :

4. Il ressort du rapport d'expertise que Mme A... a perdu connaissance, a souffert de contusions multiples, de plaies superficielles et de douleurs et que son état de santé peut être regardé comme consolidé depuis le 10 mars 2007. En outre, l'expert a fixé l'arrêt temporaire des activités professionnelles à une durée de quinze jours. Par suite, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à une somme de 900 euros.

S'agissant des souffrances endurées :

5. L'expert qualifie les souffrances endurées par Mme A... de modérées et les évalue à 3/7. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en allouant une somme de 4 200 euros.

S'agissant du préjudice esthétique :

6. Il ressort du rapport d'expertise que le préjudice esthétique est très léger et a été évalué à 1 sur une échelle de 7. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en fixant le montant de l'indemnisation due au titre de ce préjudice à une somme de 600 euros.

S'agissant du déficit fonctionnel permanent :

7. Il résulte de l'instruction que Mme A... était âgée de 61 ans à la date de l'accident et que l'expert a évalué le taux de l'atteinte permanente à l'intégrité physique et psychique à 6 %. Par suite, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à une somme de 6 000 euros.

8. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de condamner la commune de Fort de France à verser à Mme A... une somme de 11 700 euros, de laquelle devra être déduite la provision de 5 000 euros déjà versée par la commune.

Sur les droits de la caisse générale de la sécurité sociale de la Martinique :

9. La caisse générale de sécurité sociale de la Martinique demande le remboursement d'une somme de 32 053,87 euros en application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale. Toutefois, il résulte de l'instruction que les frais hospitaliers qu'elle a exposés correspondent à des hospitalisations postérieures à la date de consolidation de l'état de santé de Mme A..., fixée par l'expert au 10 mars 2007. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions de la caisse générale de sécurité sociale de la Martinique.

Sur les dépens :

10. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties (...) ".

11. Il résulte de ce qui précède que les frais de l'expertise, liquidés et taxés par ordonnance du président du tribunal administratif de la Martinique du 15 décembre 2015 à la somme de 850 euros, doivent être mis intégralement à la charge de la commune de Fort-de-France.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la commune de Fort de France au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Fort-de-France une somme de 1 500 euros à verser à Mme A... au titre des mêmes frais.

DECIDE :

Article 1er : La commune de Fort-de-France est condamnée à verser à Mme A... une somme de 11 700 euros de laquelle devra être déduite la provision de 5 000 euros.

Article 2 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 850 euros, sont mis à la charge de la commune de Fort-de-France.

Article 3 : La commune de Fort-de-France versera à Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des demandes est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., à la commune de Fort-de-France et à la Caisse générale de sécurité sociale de la Martinique.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

Mme D..., premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 10 octobre 2019.

Le rapporteur,

D...Le président,

Marianne HARDYLe greffier,

Cindy VIRIN

La République mande et ordonne au préfet de la Martinique, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17BX00849


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17BX00849
Date de la décision : 10/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Demandes et oppositions devant le tribunal administratif - Expertise.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Fondement de la responsabilité - Responsabilité sans faute - Responsabilité encourue du fait de l'exécution - de l'existence ou du fonctionnement de travaux ou d'ouvrages publics.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY-SABOURDY
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : DUHAMEL

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-10;17bx00849 ?
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