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22/08/2019 | FRANCE | N°17BX01602

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 22 août 2019, 17BX01602


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête n° 1501832, Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler le certificat d'urbanisme du 22 mai 2015 par lequel le maire de Lissac-sur-Couze a déclaré que la parcelle cadastrée section AC n° 111 ne pouvait pas être utilisée pour la réalisation d'une construction à usage d'habitation, d'annuler la décision implicite de rejet par le préfet de la Corrèze du recours hiérarchique formé contre ce certificat d'urbanisme et d'enjoindre à l'administration de statuer de

nouveau sur sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête n° 1501832, Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler le certificat d'urbanisme du 22 mai 2015 par lequel le maire de Lissac-sur-Couze a déclaré que la parcelle cadastrée section AC n° 111 ne pouvait pas être utilisée pour la réalisation d'une construction à usage d'habitation, d'annuler la décision implicite de rejet par le préfet de la Corrèze du recours hiérarchique formé contre ce certificat d'urbanisme et d'enjoindre à l'administration de statuer de nouveau sur sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Par une seconde requête n° 1501900, Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler le certificat d'urbanisme du 3 juin 2015 par lequel le préfet de la Corrèze a déclaré que le terrain correspondant aux parcelles cadastrées section AL n° 78 et n° 79 ne pouvait pas être utilisé pour la réalisation d'une construction à usage d'habitation, d'annuler la décision implicite de rejet par le préfet de la Corrèze du recours formé contre ce certificat d'urbanisme et d'enjoindre à l'administration de statuer de nouveau sur sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Par un jugement n° 1501832, 1501900 du 23 mars 2017, le tribunal administratif de Limoges a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 mai 2017 et un mémoire enregistré le 28 août 2018, Mme C..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 23 mars 2017 ;

2°) d'annuler les certificats d'urbanisme du 22 mai 2015 et du 3 juin 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Corrèze et au maire de Lissac-sur-Couze de procéder à une nouvelle instruction des certificats d'urbanisme concernant les parcelles cadastrées section AC n° 111 et section AL n° 78 et n° 79 dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de la commune de Lissac-sur-Couze une somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges n'ont pas pris en compte dans leur motivation le fait que le chemin qui dessert les parcelles cadastrées section AL n° 78 et n° 79 est aménagé et goudronné et reçoit tous les ouvrages de service public ;

- les certificats d'urbanisme attaqués sont insuffisamment motivés et notamment ne mentionnent pas l'état de l'ensemble des équipements publics ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la parcelle cadastrée section AC n° 111 ne se trouvait pas dans les parties actuellement urbanisées de la commune ;

- le certificat d'urbanisme relatif à la parcelle cadastrée section AC n° 111 semble entaché d'illégalité, laquelle se trouve plus particulièrement à rechercher dans la violation de la loi au fond ou l'erreur manifeste d'appréciation ;

- le certificat d'urbanisme négatif concernant la parcelle cadastrée section AC n° 111 méconnaît le principe d'égalité dès lors qu'une autre opération de division foncière est en cours dans le même secteur ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que les parcelles cadastrées section AL n° 78 et n° 79 ne se trouvaient pas dans les parties actuellement urbanisées de la commune ;

- les autorisations délivrées pour des projets situés à proximité constituent une violation des articles L.110 et R. 123-5 du code de l'urbanisme qui interdisent toute discrimination entre citoyens dans le classement de leurs terrains ;

- le certificat d'urbanisme négatif concernant les parcelles cadastrées section AL n° 78 et n° 79 méconnaît le principe d'égalité dans la mesure où plusieurs autorisations ont été délivrées concernant des terrains situés à proximité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juillet 2018, le ministre de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 12 septembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 4 octobre 2018 à 12h00.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... B...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... est propriétaire, sur le territoire de la commune de Lissac-sur-Couze (Corrèze), qui n'est pas couverte par un document d'urbanisme, de deux terrains, constitués l'un de la parcelle cadastrée section AC n° 111 et l'autre de deux parcelles cadastrées section AL n° 78 et n° 79. Le 3 avril 2015, elle a déposé deux demandes de certificat d'urbanisme sur le fondement des dispositions du b de l'article L. 410 du code de l'urbanisme en vue de déterminer si ces terrains pouvaient être utilisés chacun pour la construction d'une maison d'habitation. Par deux certificats d'urbanisme délivrés respectivement le 22 mai et le 3 juin 2015, le maire de Lissac-sur-Couze et le préfet de la Corrèze, intervenant au titre des avis contraires du maire, favorable à l'opération, et des services instructeurs, qui y étaient défavorables, ont déclaré que les deux terrains ne pouvaient pas être utilisés pour ces opérations. Mme C... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler ces décisions, ainsi que celles par lesquelles le préfet de la Corrèze a implicitement rejeté les recours qu'elle a formés à la suite de leur intervention. Elle relève appel du jugement du 23 mars 2017 par lequel le tribunal a rejeté ces demandes.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux points 10 et 11 du jugement attaqué, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments que faisait valoir Mme C..., notamment ceux relatifs aux caractéristiques de la voie desservant les parcelles concernées, ont suffisamment précisé les motifs qui les ont conduits à écarter les moyens tirés de ce que les parcelles en cause se situeraient dans les parties actuellement urbanisées de la commune. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait entaché d'un défaut de réponse à des moyens doit être écarté.

Sur la légalité des décisions attaquées :

3. Aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme applicable : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : / (...) b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus (...) ". Aux termes de l'article L. 111-1-2 du même code alors applicable : " I.- En l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers, ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, seuls sont autorisés, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : / 1° L'adaptation, le changement de destination, la réfection, l'extension des constructions existantes ou la construction de bâtiments nouveaux à usage d'habitation à l'intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d'une ancienne exploitation agricole, dans le respect des traditions architecturales locales ; / 2° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole, à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées, à la réalisation d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage, à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d'opérations d'intérêt national ; / 3° Les constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées et l'extension mesurée des constructions et installations existantes ; / 4° Les constructions ou installations, sur délibération motivée du conseil municipal, si celui-ci considère que l'intérêt de la commune, en particulier pour éviter une diminution de la population communale, le justifie, dès lors qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à la salubrité et à la sécurité publiques, qu'elles n'entraînent pas un surcroît important de dépenses publiques et que le projet n'est pas contraire aux objectifs visés à l'article L. 110 et aux dispositions des chapitres V et VI du titre IV du livre Ier ou aux directives territoriales d'aménagement précisant leurs modalités d'application (...) ". Aux termes de l'article R*. 111-14 du même code applicable : " En dehors des parties urbanisées des communes, le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature, par sa localisation ou sa destination : / a) A favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants, en particulier lorsque ceux-ci sont peu équipés (...) ".

4. Par ailleurs, aux termes de l'article R*. 410-14 du code de l'urbanisme alors applicable : " Dans les cas prévus au b de l'article L. 410-1, lorsque la décision indique que le terrain ne peut être utilisé pour la réalisation de l'opération mentionnée dans la demande, ou lorsqu'elle est assortie de prescriptions, elle doit être motivée ". Aux termes de l'article A. 410-5 du même code : " Lorsque la demande porte sur un certificat délivré en application du b de l'article L. 410-1, le certificat d'urbanisme indique : / a) Si le terrain peut ou non être utilisé pour la réalisation de l'opération précisée dans la demande ; / b) L'état des équipements publics existants ou prévus. / Lorsqu'il indique que le terrain ne peut pas être utilisé pour la réalisation de l'opération, le certificat précise les circonstances de droit et de fait qui motivent la décision et indique les voies et délais de recours ".

5. Il ressort de la motivation des certificats d'urbanisme attaqués que les terrains appartenant à Mme C... ont été regardés comme ne pouvant être utilisés pour les opérations envisagées aux motifs, d'une part, qu'ils étaient situés en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune mentionnées à l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme, et, d'autre part que les habitations projetées étaient de nature à favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants en méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-14 du même code.

6. En premier lieu, les certificats d'urbanisme litigieux mentionnent les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement et indiquent, contrairement ce que soutient Mme C..., l'état des réseaux publics existants.

7. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que les opérations envisagées par Mme C... sur les deux terrains litigieux, qui consistent en la construction de maisons d'habitation, seraient susceptibles d'entrer dans le champ d'application des dispositions citées au point 3 qui permettent dans certains cas l'édification de constructions en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune.

8. Par ailleurs, la parcelle cadastrée section AC n° 111 est située dans un vaste secteur compris entre les bourgs de " Le Pas noir ", " Gramont haut " et " Gramont bas ", qui est délimité par des voies communales et est resté largement à l'état naturel puisqu'il comporte seulement une douzaine de constructions, dont la plus proche se situe à 300 mètres au nord-ouest. En outre, cette parcelle est bordée de parcelles non construites, à l'exception de quelques autres au nord-est et au sud-est, qui sont également peu denses et se situent au-delà d'une des voies de circulation délimitant le secteur en cause. Par suite, et quelles que soient les caractéristiques des voies qui la desservent, cette parcelle ne peut être regardée comme se trouvant dans un secteur supportant un nombre et une densité de constructions suffisants pour relever des parties actuellement urbanisées de la commune.

9. S'agissant du terrain constitué des parcelles cadastrées section AL n° 78 et 79, il ressort des pièces du dossier qu'il ouvre à l'est sur une vaste zone restée à l'état naturel et se situe à l'extrémité sud d'un ensemble de constructions comprenant seulement un petit nombre de maisons édifiées en bordure d'un chemin, et qui est lui-même éloigné du bourg de plusieurs centaines de mètres. Par suite, alors même qu'il serait desservi par les réseaux publics, ce terrain ne peut non plus être regardé comme situé à l'intérieur des parties actuellement urbanisées de la commune au sens des dispositions précitées.

10. En troisième lieu, il résulte de ce qui précède que le maire de Lissac-sur-Couze et le préfet de la Corrèze étaient tenus de délivrer un certificat d'urbanisme mentionnant que ces terrains ne pouvaient pas être utilisés pour les opérations projetées. Par suite, ne peut être utilement soulevé le moyen tiré de ce qu'ils ne pouvaient se fonder, pour délivrer un certificat négatif, sur les dispositions de l'article R. 111-14 du code de l'urbanisme.

11. En quatrième lieu, le moyen tiré de ce que " le certificat d'urbanisme relatif à la parcelle cadastrée section AC n° 111 semble entaché d'illégalité, laquelle se trouve plus particulièrement à rechercher dans la violation de la loi au fond ou l'erreur manifeste d'appréciation " n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé et doit donc être écarté.

12. En cinquième lieu, la circonstance que des autorisations auraient été délivrées pour des projets situés à proximité des terrains concernés est en tout état de cause sans incidence sur la légalité des certificats d'urbanisme contestés, et Mme C... ne peut utilement se prévaloir du principe d'égalité devant la loi pour demander à bénéficier d'une décision qui serait contraire aux dispositions du code de l'urbanisme. Par ailleurs, les critiques qu'elle formule à l'encontre d'autorisations qui auraient été délivrées à des tiers sont en tout état de cause sans incidence sur la légalité des certificats d'urbanisme attaqués.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses requêtes.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

14. Le présent arrêt rejette les conclusions en annulation présentées par Mme C... et n'appelle, par suite, aucune mesure d'exécution. Les conclusions en injonction présentées par la requérante doivent donc être rejetées.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme que demande Mme C... à ce titre. Les conclusions présentées par la requérante au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative à l'encontre de la commune de Lissac-sur-Couze doivent être rejetées, celle-ci n'étant pas partie à la présente instance.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C..., au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Copie en sera adressée à la commune de Lissac-sur-Couze.

Délibéré après l'audience du 4 juillet 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

M. A... B..., premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 22 août 2019.

Le rapporteur,

David B...Le président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 17BX01602


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-025 Urbanisme et aménagement du territoire. Certificat d'urbanisme.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. David TERME
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : CHRISTOU CHRISTAKIS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Date de la décision : 22/08/2019
Date de l'import : 27/08/2019

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 17BX01602
Numéro NOR : CETATEXT000038948634 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-08-22;17bx01602 ?
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