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27/09/2018 | FRANCE | N°18BX00451

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 27 septembre 2018, 18BX00451


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association de défense des propriétaires et riverains du quartier de la Croix-Rouge de Coutras (ADPCR) a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 6 juin 2016 par lequel le maire de la commune de Coutras a délivré à la SA Sodis Centre Leclerc le permis de démolir la maison individuelle située 13 rue François Mitterrand et ses annexes.

Par un jugement n° 16BX03457 du 7 décembre 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa requête.

Procédure devan

t la cour administrative d'appel :

Par une requête, enregistrée le 5 février 2018, l'Asso...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association de défense des propriétaires et riverains du quartier de la Croix-Rouge de Coutras (ADPCR) a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 6 juin 2016 par lequel le maire de la commune de Coutras a délivré à la SA Sodis Centre Leclerc le permis de démolir la maison individuelle située 13 rue François Mitterrand et ses annexes.

Par un jugement n° 16BX03457 du 7 décembre 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête, enregistrée le 5 février 2018, l'Association de défense des propriétaires et riverains du quartier de la Croix-Rouge de Coutras, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 juin 2016 par lequel le maire de la commune de Coutras a délivré à la SA Sodis Centre Leclerc le permis de démolir la maison individuelle située 13 rue François Mitterrand ;

3°) de mettre à la charge solidaire du pétitionnaire et de la commune de Coutras une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement n'est pas régulier dès lors que ni elle ni son conseil n'ont été convoqués à l'audience ;

- le dossier de demande ne comportait pas la date de construction du bâtiment à démolir, en méconnaissance de l'article R. 451-1 du code de l'urbanisme ;

- le plan de situation joint au dossier de demande était insuffisant au regard de l'article R. 451-2 du code de l'urbanisme dès lors qu'il ne permet pas de saisir les conséquences de la démolition sur l'environnement voisin et qu'il ne permet pas de déterminer quelles sont les règles d'urbanisme applicables ;

- le document photographique joint au dossier de demande ne permet pas d'avoir une vision globale du bâtiment destiné à être démoli, en méconnaissance de l'article R. 451-2 du code de l'urbanisme ;

- le plan de masse n'est pas coté en trois dimensions ;

- le permis attaqué se fonde sur un plan local d'urbanisme illégal dès lors que la dernière modification a été approuvée alors que la publicité réalisée autour de l'enquête publique a été insuffisante ;

- le projet ne respecte pas la vocation principale d'habitat de la zone UB du plan local d'urbanisme et le caractère pavillonnaire du quartier Croix-Rouge, dont il représentera 79 % de la surface ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article 4 du règlement de la zone UB du plan local d'urbanisme relatives à l'évacuation des eaux pluviales, en l'absence de toute précision du dossier sur le dispositif prévu ;

- l'absence de mesures concernant les eaux pluviales méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

Par lettre enregistrée au greffe de la cour le 17 avril 2018, la commune de Coutras informe la cour qu'elle n'entend pas présenter de mémoire en défense dès lors qu'elle n'a pas d'éléments complémentaires à apporter à ses écritures de première instance.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 avril 2018, la SA Sodis Centre Leclerc, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de l'association requérante une somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable ; l'objet social de l'association qui consiste à préserver le caractère pavillonnaire du quartier méconnaît la politique nationale d'urbanisme telle qu'elle a été redéfinie par la loi SRU et par la loi ALUR qui ont pour objectif d'assurer une plus grande mixité sociale ; le permis de démolir n'altère pas par lui-même le cadre de vie, l'environnement ou les principes de développement durable auxquels se réfèrent les statuts de l'association requérante ;

- si la date de construction du bâtiment à démolir a été omise, les photographies jointes au dossier ont permis de pallier cette omission ;

- le dossier de demande était suffisamment complet pour permettre à l'autorité administrative de se prononcer en toute connaissance de cause ;

- aucun des griefs invoqués à l'encontre du plan local d'urbanisme ne saurait prospérer, le tribunal les ayant écartés dans une autre instance par un jugement du 19 avril 2018 ;

- l'arrêté ne méconnaît pas les caractéristiques de la zone UB décrites dans le préambule du règlement, lequel ne revêt aucun caractère impératif ; au demeurant, si ce texte pourrait avoir une incidence sur un permis de construire, il n'en a aucune sur un permis de démolir ;

- les dispositions de l'article UB 4 du plan local d'urbanisme ne sont pas applicables à un permis de démolir ;

- la question de l'écoulement des eaux pluviales, au demeurant non étayée, ne concerne pas un permis de démolir et le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-2 ne peut qu'être écarté.

Par ordonnance du 5 juin 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 24 juin 2018 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant l'Association de défense des propriétaires et riverains du quartier de la Croix-Rouge de Coutras et de MeB..., représentant la SA Sodis Centre Leclerc.

Considérant ce qui suit :

1. Le 13 mai 2016, la société Sodis, gérant le Centre Leclerc de Coutras, a déposé une demande de permis de démolir une maison individuelle située 13 rue François Mitterrand à Coutras. Par arrêté du 6 juin 2016, le maire de Coutras a délivré le permis sollicité. L'Association de défense des propriétaires et riverains du quartier de la Croix-Rouge de Coutras relève appel du jugement n° 1603457 du 7 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce permis de démolir.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 711-2 du code de justice administrative : " Toute partie est avertie, par une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par la voie administrative mentionnée à l'article R. 611-4, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience. (...) L'avertissement est donné sept jours au moins avant l'audience. (...) ". Aux termes de l'article R. 431-1 du même code : " Lorsqu'une partie est représentée devant le tribunal administratif par un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2, les actes de procédure, à l'exception de la notification de la décision prévue aux articles R. 751-3 et suivants, ne sont accomplis qu'à l'égard de ce mandataire. ".

3. Si le jugement attaqué porte mention que les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience, aucune des pièces du dossier transmis par le tribunal administratif de Bordeaux ne vient attester que l'avis d'audience a été notifié à l'Association de défense des propriétaires et riverains du quartier de la Croix-Rouge de Coutras ou à son mandataire dans les conditions prévues par les dispositions rappelées ci-dessus du code de justice administrative, ni d'ailleurs, que ceux-ci aient été présents ou représentés à cette audience. Par suite, l'Association de défense des propriétaires et riverains du quartier de la Croix-Rouge de Coutras est fondée à soutenir que ce jugement est entaché d'un vice de procédure au regard des exigences fixées par l'article R. 711-2 du code de justice administrative et à en demander, pour ce motif, l'annulation.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par l'Association de défense des propriétaires et riverains du quartier de la Croix-Rouge de Coutras.

Sur la légalité du permis de démolir du 6 juin 2016 :

5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 451-1 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de démolir précise : (...) / c) La date approximative à laquelle le ou les bâtiments dont la démolition est envisagée ont été construits (...) ". S'il est constant que le dossier de demande ne comportait pas la date approximative de la construction du bâtiment à démolir, le dossier de demande comprenait des photographies représentant l'habitation à démolir et ses dépendances, ainsi que des plans indiquant leur localisation. Dans ces conditions, l'omission de la date approximative de construction de ces bâtiments n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur les règles d'urbanisme applicables au permis de démolir.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 451-2 du code de l'urbanisme : " Le dossier joint à la demande comprend : / a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l'intérieur de la commune ; / b) Un plan de masse des constructions à démolir ou, s'il y a lieu, à conserver ; / c) Un document photographique faisant apparaître le ou les bâtiments dont la démolition est envisagée et leur insertion dans les lieux environnants. ".

7. Le dossier de demande comportait un plan de situation permettant de localiser le terrain au sein de la commune ainsi qu'un plan de masse de la construction à démolir portant mention de sa longueur et de sa largeur et quatre photographies représentant les bâtiments destinés à être démolis. Aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que ces différents documents mentionnent leur échelle, leur orientation ou pour les photographies, que les angles de vue des photographies jointes au dossier soient précisés. Par suite, le dossier de demande était suffisamment complet pour permettre au service instructeur d'apprécier notamment l'insertion de ces bâtiments dans les lieux environnants. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 451-2 du code de l'urbanisme ne peut donc qu'être écarté.

8. En troisième lieu, si, après l'expiration du délai de recours contentieux, la contestation de la légalité d'un acte réglementaire peut être formée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure prise pour l'application de l'acte réglementaire ou dont ce dernier constitue la base légale, seule la légalité des règles fixées par cet acte, la compétence de son auteur et l'existence d'un détournement de pouvoir peuvent être utilement critiquées. Il n'en va pas de même des conditions d'édiction de cet acte, les vices de forme et de procédure dont il serait entaché ne pouvant être utilement invoqués que dans le cadre du recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'acte réglementaire lui-même et introduit avant l'expiration du délai de recours contentieux. Par suite, le moyen tiré de ce que le permis de démolir attaqué serait pris sur la base d'une modification illégale du plan local d'urbanisme, dès lors que l'avis d'enquête publique n'aurait pas été publié conformément aux articles R. 123-19 du code de l'urbanisme et R. 123-11 du code de l'environnement alors applicables, est inopérant.

9. En quatrième lieu, l'association requérante soutenait également que le projet ne respecte pas la vocation principale d'habitat de la zone UB du plan local d'urbanisme en permettant la réalisation du projet d'extension du centre Leclerc, en vue duquel a été délivré le permis de démolir attaqué, ensemble commercial qui représenterait à terme plus de 50 % de la superficie du quartier de la Croix-Rouge. Toutefois, en prévoyant qu'au sein de la zone UB, la vocation d'habitat est majoritaire, les auteurs du plan local d'urbanisme qui se référaient nécessairement à l'ensemble des zones affectées de ce classement, n'ont pas entendu proscrire la réalisation de constructions à usage de commerce, expressément autorisées en zone UB, fussent-elles majoritaires à l'échelle d'un quartier. Par suite, le moyen ne peut en tout état de cause qu'être écarté.

10. En cinquième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement de la zone UB du plan local d'urbanisme : " (...) Les eaux pluviales issues de toute construction ou installation nouvelle ou aménagement seront résorbées sur le terrain d'assiette. / Si la surface de la parcelle, la nature du sol ou la disposition des lieux ne permet pas de les résorber sur la parcelle, les eaux pluviales seront rejetées au réseau public (fossé, caniveau ou réseau enterré) de telle sorte que l'écoulement soit assuré sans stagnation (...) ". Ces dispositions relatives à la résorption des eaux pluviales ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'un permis de démolir.

11. Enfin, si l'association requérante soutient en dernier lieu que le permis de démolir a été délivré en méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, elle ne produit aucun élément de nature à caractériser les atteintes à la sécurité publique ou à la salubrité publique que serait susceptible d'entraîner le permis de démolir attaqué.

12. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée à la demande, que l'Association de défense des propriétaires et riverains du quartier de la Croix-Rouge de Coutras n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 6 juin 2016 par lequel le maire de la commune de Coutras a délivré à la SA Sodis Centre Leclerc le permis de démolir en litige.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de la commune de Coutras et de la société Sodis Centre Leclerc, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, les sommes demandées par la requérante au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de l'association requérante une somme de 500 euros à verser à la SA Sodis Centre Leclerc en application de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1603457 du tribunal administratif de Bordeaux du 7 décembre 2017 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par l'Association de défense des propriétaires et riverains du quartier de la Croix-Rouge de Coutras devant le tribunal administratif de Bordeaux ainsi que le surplus de ses conclusions présentées devant la cour sont rejetés.

Article 3 : L'Association de défense des propriétaires et riverains du quartier de la Croix-Rouge de Coutras versera à la société Sodis Centre Leclerc une somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Association de défense des propriétaires et riverains du quartier de la Croix-Rouge de Coutras, à la SA Sodis Centre Leclerc et à la commune de Coutras.

Délibéré après l'audience du 30 août 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

M. David Terme, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 septembre 2018.

Le rapporteur,

Jean-Claude PAUZIÈSLe président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Virginie MARTY

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

No 18BX00451


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18BX00451
Date de la décision : 27/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Autorisations d`utilisation des sols diverses. Permis de démolir.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PAUZIÈS
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : CABINET ARCC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-09-27;18bx00451 ?
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