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13/10/2016 | FRANCE | N°14BX03695

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 13 octobre 2016, 14BX03695


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté en date du 14 septembre 2011 par lequel le maire de la commune de Bessines leur a refusé un permis de construire modificatif concernant un immeuble situé rue des Taillées au lieu-dit " Les Vallées " à Bessines.

Par un jugement n° 1102510 du 23 octobre 2014, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 23 dé

cembre 2014, 15 septembre 2015 et le 12 janvier 2016, M. et MmeB..., représenté par MeA..., dem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté en date du 14 septembre 2011 par lequel le maire de la commune de Bessines leur a refusé un permis de construire modificatif concernant un immeuble situé rue des Taillées au lieu-dit " Les Vallées " à Bessines.

Par un jugement n° 1102510 du 23 octobre 2014, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 23 décembre 2014, 15 septembre 2015 et le 12 janvier 2016, M. et MmeB..., représenté par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1102510 du tribunal administratif de Poitiers du 23 octobre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de la commune de Bessines du 14 septembre 2011 refusant de délivrer un permis de construire modificatif concernant un immeuble situé rue des Taillées au lieu-dit " Les Vallées " à Bessines ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'arrêté du 14 septembre 2011 n'est pas suffisamment motivé en droit ;

- le refus de permis de construire est illégal, un permis tacite étant intervenu à l'expiration d'un délai de deux mois courant à compter de leur demande le 6 juillet 2011 sans que la commune puisse se prévaloir sur ce point de la prolongation du délai de 6 mois prévue en cas de consultation de l'architecte des bâtiments de France, dès lors que ce dernier a informé la commune dès le 23 août 2011 qu'il n'avait pas d'avis à rendre ;

- le permis de construire initial n'était pas devenu caduc ; en effet, l'interruption du chantier de construction de leur habitation est indépendante de leur volonté et résulte uniquement du fait de l'administration qui a édicté deux arrêtés interruptifs de travaux ; ces arrêtés ont été contestés devant la juridiction administrative et à la date de notification des arrêts de la cour administrative d'appel de Bordeaux rejetant les requêtes, le permis de construire initial n'était pas périmé ; ils ont également bénéficié d'un permis tacite le 27 juillet 2008 qui a été retiré le 18 juin 2009 par le maire de la commune sur recours de tiers, l'arrêté de retrait a été contesté devant le juge administratif et le délai de validité du permis de construire modificatif ne pouvait recommencer à courir qu'à compter de la notification du jugement se prononçant sur la légalité de la décision de retrait.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 octobre 2015, la commune de Bessines, représentée par la SCP Pielberg-Kolenc, conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de M. et Mme B...la somme de 2 000 euros sur le fondement sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté est suffisamment motivé en droit ;

- le délai de six mois prévu par les dispositions de l'article R. 423-28 du code de l'urbanisme ne prend pas fin avec l'édiction de l'avis de l'architecte des bâtiments de France, cet article indiquant expressément que dès lors que l'architecte des bâtiments de France doit être consulté, le délai d'instruction est majoré de 6 mois sans aucune autre restriction ;

- si le délai de péremption du permis de construire peut être interrompu par des décisions de l'administration, le juge administratif considère que le délai de validité d'un permis ne peut être interrompu par un arrêté ordonnant l'interruption de travaux illégalement entrepris ; les travaux ont été arrêtés à compter de la réception du premier arrêté portant interruption des travaux irrégulièrement réalisés et n'ont jamais repris depuis ; dans ces conditions, comme plus d'une année s'est écoulée depuis le 15 juin 2009, l'autorisation de construire est périmée, qu'il s'agisse du permis de construire initial ou du permis de construire modificatif.

Par ordonnance du 21 octobre 2010, la clôture d'instruction a été fixée au 12 janvier 2016 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès ;

- et les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B...sont propriétaires d'une parcelle cadastrée section AL n°103 située au lieudit " Les vallées ", rue des Taillées sur le territoire de la commune de Bessines. Ils ont déposé le 8 novembre 2007 une demande de permis de construire une maison individuelle comportant un rez-de-chaussée et un étage édifiés sur un sous-sol encastré dans la pente du terrain et une piscine couverte accolée à la maison. Le permis de construire leur a été accordé par le maire de Bessines le 26 décembre 2007. Des agents de la direction départementale de l'équipement des Deux-Sèvres, après avoir constaté le 5 mars 2008 des différences entre les travaux exécutés et ceux qui avaient été autorisés, ont dressé un procès-verbal, sur la base duquel le maire de Bessines a pris, le 10 avril 2008, un premier arrêté interruptif des travaux. Ce premier arrêté étant entaché d'une erreur matérielle, un deuxième arrêté a été pris le 23 juin 2008, dans lequel le maire de la commune mettait en demeure M. et Mme B...de cesser immédiatement les travaux. Afin de régulariser leur situation, les époux B...ont sollicité, le 27 mai 2008, la délivrance d'un permis de construire modificatif. A défaut de réponse du maire de la commune dans le délai d'instruction qui leur avait été notifié, les pétitionnaires ont bénéficié d'un permis de construire modificatif tacite. Les travaux ont repris, le maire de la commune s'est rendu sur le chantier le 2 avril 2009, et il a relevé des non conformités qui ont justifié l'établissement d'un procès-verbal, sur la base duquel il a pris, le 15 avril 2009, un nouvel arrêté interruptif de travaux. Les recours formés par M. et Mme B...contre les arrêtés interruptifs de travaux ont été rejetés par le tribunal administratif de Poitiers par jugements en date du 2 décembre 2010, confirmés par deux arrêts de la cour de céans du 13 octobre 2011. Par ailleurs, en réponse aux recours gracieux exercés par des voisins, le maire de la commune a également retiré le 18 juin 2009 le permis de construire modificatif tacitement accordé aux épouxB.... Ce retrait a été annulé par un jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 2 décembre 2010. M. et Mme B...ont alors présenté le 4 juillet 2011 une nouvelle demande de permis de construire modificatif. Le 29 juillet 2011, la commune les a informés que le délai d'instruction de cette demande était porté à six mois en raison de la consultation nécessaire de l'architecte des bâtiments de France sur leur projet. Par un arrêté en date du 14 septembre 2011, le maire de la commune de Bessines a rejeté cette demande de permis de construire modificatif. M. et Mme B...relèvent appel du jugement du 23 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 septembre 2011.

Sur la légalité de l'arrêté du 14 septembre 2011 :

2. Aux termes de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " (...) Dès qu'un procès-verbal relevant l'une des infractions prévues à l'article L. 480-4 a été dressé, le maire peut également, si l'autorité judiciaire ne s'est pas encore prononcée, ordonner par arrêté motivé l'interruption des travaux. Copie de cet arrêté est transmise sans délai au ministère public. " Aux termes de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " Le permis de construire, d'aménager ou de démolir est périmé si les travaux ne sont pas entrepris dans le délai de deux ans à compter de la notification mentionnée à l'article R. 424-10 ou de la date à laquelle la décision tacite est intervenue. Il en est de même si, passé ce délai, les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année. "

3. Le délai de validité d'un permis de construire est interrompu lorsqu'un fait imputable à l'administration est de nature à empêcher la réalisation ou la poursuite des travaux. Le délai de validité court à nouveau dans son intégralité à compter de la date à laquelle le fait de l'administration cesse de produire ses effets. Il en va notamment ainsi lorsqu'un maire ordonne par arrêté l'interruption des travaux sur le fondement des dispositions de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme B...ont obtenu un permis de construire initial le 26 décembre 2007 et que le maire de la commune a pris deux arrêtés interruptifs de travaux le 10 avril 2008 et le 23 juin 2008, le premier de ces arrêtés étant entaché d'une erreur matérielle. Ces arrêtés sont motivés par la circonstance que les travaux entrepris ne sont pas conformes au permis de construire délivré. A la suite du dépôt d'une demande de permis de construire modificatif le 27 mai 2008, un permis tacite a été accordé le 27 juillet 2008 et un nouvel arrêté interruptif de travaux a été pris le 15 avril 2009 au motif que les travaux réalisés ne correspondaient pas avec ceux qui avaient été autorisés non seulement par le permis de construire du 26 décembre 2007 mais aussi par le permis de construire modificatif tacite. Il est constant qu'à la date à laquelle l'arrêté attaqué a été pris, le 14 septembre 2011, les arrêtés interruptifs de travaux, dont la légalité a été confirmée par le tribunal administratif, puis par deux arrêts de la cour de céans en date du 13 octobre 2011, demeuraient exécutoires. Ainsi, les autorisations de construire dont étaient titulaires M. et Mme B...n'étaient pas devenues caduques à la date de l'arrêté attaqué et le maire de la commune de Bessines ne peut sérieusement soutenir que les arrêtés interruptifs, lesquels portent sur la réalisation de travaux différents de ceux autorisés, n'auraient pas d'effet sur l'interruption du délai de caducité. Par suite, il ne pouvait légalement pour ce motif refuser de délivrer le permis de construire modificatif demandé le 4 juillet 2011 et M. et Mme B...sont fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur requête.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

4. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et MmeB..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Bessines demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Les conclusions de M. et MmeB..., tendant à l'application de ces dispositions, sont dirigées contre l'Etat, qui n'est pas partie au procès, le refus de permis de construire attaqué ayant été délivré au nom de la commune, qui est dotée d'un plan local d'urbanisme, par le maire. Par suite, ces conclusions ne peuvent être accueillies.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers n° 1102510 du 23 octobre 2014 et l'arrêté du maire de la commune de Bessines du 14 septembre 2011 sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...et à la commune de Bessines.

Délibéré après l'audience du 15 septembre 2016 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

M. Paul-André Braud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 octobre 2016.

Le rapporteur,

Jean-Claude PAUZIÈSLe président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Delphine CÉRON

La République mande et ordonne au ministre du logement et de l'habitat durable en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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No 14BX03695


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14BX03695
Date de la décision : 13/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PAUZIÈS
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SCP AD LITEM

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-10-13;14bx03695 ?
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