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30/05/2014 | FRANCE | N°13BX03322

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 30 mai 2014, 13BX03322


Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2013, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Boyance, avocat ;

M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302393 du 30 septembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 15 avril 2013 par laquelle le préfet de la Gironde a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le Maroc comme pays de renvoi ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code d...

Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2013, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Boyance, avocat ;

M. A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302393 du 30 septembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 15 avril 2013 par laquelle le préfet de la Gironde a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le Maroc comme pays de renvoi ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à défaut de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour dans un délai d'un mois sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mai 2014 :

- le rapport de M. Olivier Gosselin, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Christine Mège, rapporteur public ;

- et les observations de Me Boyance, avocat de M. A... ;

1. Considérant que M.A..., de nationalité marocaine, est entré irrégulièrement en France au début de l'année 2010 selon ses déclarations ; qu'il a bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour d'une durée de six mois, puis d'un titre de séjour au titre de son état de santé délivrés par la préfecture de Paris, dont il a demandé le renouvellement après son arrivée en Gironde ; que par décision du 15 avril 2013, prise après avis du médecin de l'agence régionale de santé, le préfet de la Gironde lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ; que M. A...relève appel du jugement n° 1302393 du 30 septembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de cette décision ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que le jugement attaqué s'est référé, pour écarter le moyen tiré de l'incompétence du médecin de l'agence régionale de santé pour signer l'avis au vu duquel le préfet a pris sa décision, à un arrêté de désignation en date du 15 juin 2010 qui n'avait pas été produit au dossier, n'a pas été communiqué aux parties et dont les premiers juges ne précisent pas qu'il ait été régulièrement publié, alors au demeurant que cet arrêté avait été retiré par un nouvel arrêté de désignation en date du 6 août 2012 ; que les premiers juges ont ainsi méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure en se fondant sur l'existence d'un arrêté dont la publication n'est pas avérée sans en ordonner préalablement la production au dossier ; que le jugement est ainsi entaché d'irrégularité et doit être annulé ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Bordeaux ;

En ce qui concerne l'arrêté dans son ensemble :

4. Considérant que l'arrêté du 15 avril 2013 a été signé par le secrétaire général de la préfecture de la Gironde, qui disposait d'une délégation à cette fin, consentie par un arrêté du préfet de la Gironde en date du 23 octobre 2012, régulièrement publié au recueil des actes administratifs n° 8 du mois d'octobre 2012, et joint au mémoire de première instance du préfet ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué manque en fait, sans que M. A...puisse utilement relever que l'arrêté de délégation n'était pas visé dans la décision attaquée ;

En ce qui concerne le refus de séjour :

5. Considérant que l'arrêté mentionne les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il fait application ; qu'il fait état de la demande de renouvellement du titre de séjour en qualité d'étranger malade déposée par M.A..., de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé et précise également les différentes attaches familiales de l'intéressé dans son pays et en France ; que cette décision de refus de titre de séjour comporte ainsi un énoncé suffisant et non stéréotypé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que le moyen tiré du défaut de motivation doit dès lors être écarté ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11º) A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;

7. Considérant que l'avis médical du 18 janvier 2013 concernant M. A... au vu duquel le préfet a pris l'arrêté du 15 avril 2013, a été émis par le Dr Bénédicte Le Bihan, médecin inspecteur de santé publique, régulièrement désignée par un arrêté de la directrice de l'agence régionale de santé d'Aquitaine en date du 6 août 2012, l'habilitant à rendre les avis sur les demandes de titre de séjour ; que cette désignation, produite en appel, ne revêt pas un caractère réglementaire et n'est donc soumise à aucune condition particulière de forme et de publicité pour entrer en vigueur ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le médecin de l'agence régionale de santé n'était pas compétent pour signer l'avis médical du 18 janvier 2013 doit être écarté ;

8. Considérant que le préfet de la Gironde a produit, dans le cadre de l'instance, l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique le 18 janvier 2013 ; que si M. A...soutient que cet avis avait été précédé d'un autre avis du 14 janvier, non produit au dossier, ainsi qu'en attestent les visas de l'arrêté préfectoral, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'agence régionale de santé n'a reçu communication du rapport médical établi par un médecin agréé concernant M. A... que le 16 janvier 2013 et que le médecin de l'agence n'a émis qu'un seul avis, en date du 18 janvier ; qu'il s'ensuit que le vice de procédure allégué n'est pas établi, l'erreur matérielle dans les visas étant sans incidence sur la légalité de l'acte litigieux ;

9. Considérant que le médecin de l'agence régionale de santé n'avait pas à motiver spécialement son avis du 18 janvier 2013 rendu contrairement à un premier avis antérieurement émis sur le cas du demandeur par un médecin désigné en région parisienne, ni à mentionner qu'il s'agissait d'une demande de renouvellement de titre de séjour ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que cet avis n'aurait pas pris en compte la persistance de sa maladie et son dossier médical dans son ensemble ;

10. Considérant que M. A... présente un syndrome dépressif depuis un accident de la circulation survenu dans son pays d'origine, dans lequel son cousin aurait été tué, syndrome pour lequel il a été suivi au Maroc à compter du 14 janvier 2009 jusqu'à son arrivée en France dans le courant de l'année 2010 ; que si l'état de santé de l'intéressé nécessite la prise régulière d'un traitement médicamenteux associée à une prise en charge par un psychiatre, le médecin de l'agence régionale de santé, dans son avis du 18 janvier 2013 a estimé que le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; que ni le certificat du psychiatre de la clinique intersectorielle de Libourne qui l'a examiné le 19 juin 2013 à la suite d'une chute ayant entraîné son hospitalisation, indiquant seulement que sa dépression risquerait de s'aggraver en l'absence de prise en charge et que la durée des soins était pour le moment imprévisible, ni le certificat d'un médecin généraliste indiquant qu'il doit suivre un traitement et que son état n'évolue pas, ne sont de nature à établir que le défaut de prise en charge pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé et que le préfet de la Gironde aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de renouveler le titre de séjour de M. A...;

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. " ; que toutefois les dispositions de l'article L.312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne font obligation au préfet de saisir la commission que du cas des ressortissants marocains qui remplissent effectivement les conditions pour obtenir le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui comme M. A...se prévalent de ces dispositions;

12. Considérant que M. A...fait valoir que l'un de ses frères vit en France sous couvert d'une carte de résident et qu'il bénéficie du soutien affectif de trois oncles et enfin qu'il a travaillé afin de subvenir à ses besoins et de ne pas devenir une charge pour la société ; que toutefois, il est entré récemment en France et n'y a séjourné que pour le temps des soins que sa maladie nécessitait ; qu'il n'établit pas avoir des attaches familiales fortes en France, alors qu'il ne réside pas chez son frère ; qu'il conserve des attaches familiales dans son pays d'origine, où résident ses parents et ses frères et soeurs ; que dans ces conditions, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de l'admettre au séjour ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi :

13. Considérant que, pour les motifs précédemment exposés, M. A... n'est pas fondé à soutenir que les décisions lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi seraient illégales du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour, ni à soutenir que le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;

14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ; que la circonstance, postérieure à la décision contestée, que M. A... a été hospitalisé du 18 au 23 juin 2013 à la suite d'une chute qui aurait été provoquée par ses troubles de santé, est sans incidence sur la légalité de ladite décision ; que la circonstance alléguée qu'il ne puisse entrer dans une automobile sans connaître des troubles anxieux n'est pas non plus de nature à établir que le préfet ne pouvait prendre la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté contesté ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

16. Considérant que le présent jugement, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A... n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par celui-ci ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande présentée par M. A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 30 septembre 2013 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Bordeaux est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M.A... présentées devant la cour, tendant à la condamnation de l'Etat au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

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13BX03322


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Olivier GOSSELIN
Rapporteur public ?: Mme MEGE
Avocat(s) : BOYANCE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Date de la décision : 30/05/2014
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 13BX03322
Numéro NOR : CETATEXT000029103214 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-05-30;13bx03322 ?
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