Vu la requête, enregistrée le 23 juin 2012 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 26 juin 2012, présentée pour Mme C... B...épouseA..., demeurant..., par Me D... ;
Mme B... épouse A...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1102513 du 24 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 octobre 2011 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance fixant la clôture de l'instruction au 28 septembre 2012 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la directive n°2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
L'affaire ayant été dispensée de conclusions du rapporteur public en application de l'article L 732-1 du code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 janvier 2013 :
- le rapport de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, premier conseiller ;
1. Considérant que Mme B... épouse A...est entrée irrégulièrement en France, selon ses dires, le 6 novembre 2009, pour y présenter une demande d'asile rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 21 juin 2010, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 27 septembre 2011 ; qu'elle relève appel du jugement du 24 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 octobre 2011 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que le signataire de la décision a reçu par arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 18 janvier 2010 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour, délégation à l'effet de signer, en cas d'absence ou d'empêchement du secrétaire général de la préfecture, " tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, documents et correspondances relevant des attributions de l'Etat dans le département ", à l'exception de certaines décisions au nombre desquelles ne figurent pas les arrêtés portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Pyrénées-Atlantiques et le secrétaire général de la préfecture n'aient pas été empêchés le jour de la signature de la décision litigieuse ; que, contrairement à ce que soutient Mme B... épouseA..., l'intervention de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité n'a pas rendu caduques les délégations de signature consenties avant son entrée en vigueur ; que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté litigieux doit, dès lors, être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'à l'appui de ses conclusions d'appel, Mme B... épouse A...se borne à reprendre, avec la même argumentation, les moyens soulevés en première instance et tirés de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué, de ce que le préfet se serait cru lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile et de ce qu'il se serait fondé sur l'absence de visa pour rejeter sa demande d'asile ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au jour de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République." ;
5. Considérant que Mme B... épouse A...fait valoir qu'elle est entrée en France le 6 novembre 2009 accompagnée de ses deux enfants majeurs et que son époux les a rejoints et attend la réponse à sa demande d'asile déposée le 5 août 2011 ; que, cependant, les deux fils de la requérante, dont les demandes d'asile ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, font eux aussi l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; que la circonstance que son époux a déposé une demande d'asile n'est pas de nature à donner à l'intéressée un droit au séjour ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré par la requérante de ce que le refus de titre de séjour attaqué porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaîtrait par suite les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que Mme B... épouse A...n'est pas fondée, au regard des circonstances qui viennent d'être rappelées, à soutenir que le préfet des Pyrénées-Atlantiques aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision attaquée sur sa situation personnelle ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens :
7. Considérant que, comme il vient d'être dit au point 5, l'époux de Mme B... épouse A...a déposé devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 5 août 2011 une demande d'asile qui était pendante le jour où le préfet des Pyrénées-Atlantiques a pris la décision litigieuse ; que dans ces circonstances, la vie familiale de l'intéressée ne pouvait se poursuivre en Arménie dans l'attente de la décision statuant sur la demande de son époux ; qu'il s'ensuit que Mme B... épouse A...est fondée à soutenir que la décision attaquée a porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquelles elle a été prise et a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée ; qu'il en va de même, par voie de conséquence, de celle fixant le pays de destination ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Considérant que le présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet des Pyrénées-Atlantiques délivre à Mme B... épouse A...un titre de séjour ni même ne réexamine sa situation ; que ces conclusions doivent dès lors être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée : " l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale peut demander au juge de condamner la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à lui payer une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. ... Si le juge fait droit à sa demande, l'avocat dispose d'un délai de douze mois à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée pour recouvrer la somme qui lui a été allouée. S'il recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'État ... " ; que Mme B... épouse A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me D...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de condamner l'État à payer à Me D...la somme de 1200 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les décisions du 24 octobre 2011 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont annulées.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Pau du 24 janvier 2012 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions d'annulation dirigées contre les décisions du 24 octobre 2011 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.
Article 3 : L'État versera la somme de 1200 euros à Me D...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me D...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.
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Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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N° 12BX01601