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20/11/2012 | FRANCE | N°11BX03125

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 20 novembre 2012, 11BX03125


Vu la décision n° 328524 en date du 16 novembre 2011, enregistrée au greffe le 2 décembre 2011, par laquelle le Conseil d'Etat a attribué à la cour le jugement de la requête présentée pour le département de la Guadeloupe ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 20 avril 2009, présentée pour le département de la Guadeloupe représenté par le président du conseil général ;

Le département de la Guadeloupe demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700307 du 5 février 2009 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a annulé

le commandement de payer établi le 20 mars 2007 à l'encontre de M. B...A...par la paierie ...

Vu la décision n° 328524 en date du 16 novembre 2011, enregistrée au greffe le 2 décembre 2011, par laquelle le Conseil d'Etat a attribué à la cour le jugement de la requête présentée pour le département de la Guadeloupe ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 20 avril 2009, présentée pour le département de la Guadeloupe représenté par le président du conseil général ;

Le département de la Guadeloupe demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700307 du 5 février 2009 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a annulé le commandement de payer établi le 20 mars 2007 à l'encontre de M. B...A...par la paierie départementale de la Guadeloupe pour un montant de 1 602,89 euros dans le cadre du remboursement du prêt étudiant que l'intéressé avait signé avec le Président du Conseil Général de la Guadeloupe le 1er août 1996 ;

2°) de rejeter la requête présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Basse-Terre ;

3°) de condamner M. A...à lui payer la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 octobre 2012 :

- le rapport de Mme Déborah de Paz, premier conseiller ;

- les conclusions de M. David Katz, rapporteur public ;

1. Considérant que le payeur départemental de la Guadeloupe a émis le 20 mars 2007, à l'encontre de M.A..., un commandement de payer pour le recouvrement d'une somme de 1 602,89 euros, dont l'intéressé était redevable au titre du remboursement d'un prêt d'études qui lui avait été consenti le 1er août 1996 par le président du conseil général ; que, par le jugement attaqué du 5 février 2009, le tribunal administratif de Basse-Terre a fait droit à la demande de M. A... dirigée contre ce commandement ; que le département de la Guadeloupe interjette appel de ce jugement ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :

2. Considérant, d'une part, que le " contrat de prêt d'études " conclu par l'intéressé avec le président du conseil général de la Guadeloupe stipulait, notamment, dans son article 1er, que le prêt était consenti " aux clauses et conditions déterminées par le règlement départemental d'aide aux étudiants " et que l'emprunteur s'engageait " à se conformer aux prescriptions réglementaires pouvant résulter de décisions du président du conseil général postérieurement à la signature du présent acte " ; que l'existence d'une telle clause confère au contrat en cause le caractère d'un contrat administratif ; que, dès lors, et contrairement à ce que soutient le département de la Guadeloupe, la créance dont le comptable poursuivait le recouvrement à l'encontre de M. A... est, elle-même, de nature administrative ;

3. Considérant, d'autre part, que si M. A...a demandé devant les premiers juges l'annulation du commandement de payer établi le 20 mars 2007, il résulte de l'instruction que sa contestation portait sur l'existence de la créance, son montant et son exigibilité ; que, par suite, l'action présentée par M. A...devant les premiers juges relevait de la compétence de la juridiction administrative ;

Sur le bien-fondé du commandement de payer :

En ce qui concerne l'existence du titre de recettes :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales dispose que : " (...) 1° En l'absence de contestation, le titre de recettes individuel ou collectif émis par la collectivité territoriale ou l'établissement public local permet l'exécution forcée d'office contre le débiteur. Toutefois, l'introduction devant une juridiction de l'instance ayant pour objet de contester le bien-fondé d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local suspend la force exécutoire du titre. L'introduction de l'instance ayant pour objet de contester la régularité formelle d'un acte de poursuite suspend l'effet de cet acte. 2° L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite. L'action dont dispose le débiteur de la créance visée à l'alinéa précédent pour contester directement devant le juge de l'exécution visé à l'article L. 311-12 du code de l'organisation judiciaire la régularité formelle de l'acte de poursuite diligenté à son encontre se prescrit dans le délai de deux mois suivant la notification de l'acte contesté (...) 4° Le titre de recettes individuel ou un extrait du titre de recettes collectif est adressé aux redevables sous pli simple. Lorsque le redevable n'a pas effectué le versement qui lui était demandé à la date limite du paiement, le comptable chargé du recouvrement doit lui envoyer une lettre de rappel avant la notification du premier acte de poursuite devant donner lieu à des frais (...) " ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des pièces produites par le département de la Guadeloupe au cours de l'instance qui s'est déroulée devant le Conseil d'Etat, que le président du conseil général de la Guadeloupe a émis le 17 mai 2006 un titre de recettes numéroté 534 ; que la circonstance qu'il n'aurait pas fait l'objet d'une notification est sans influence sur l'existence de la créance et dès lors sur la légalité du commandement de payer ; que par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le commandement de payer reposerait sur un titre de recettes inexistant dès lors que celui-ci ne lui aurait pas été notifié ; qu'enfin, si M. A... soutient que des irrégularités entachent le commandement de payer tenant à l'erreur de date du titre de recettes et au défaut d'envoi préalable de la lettre de rappel prévue à l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, de telles contestations se rattachent à la régularité en la forme de cet acte et non au bien-fondé de la créance ; qu'il n'appartient en conséquence qu'au juge judiciaire d'en connaître ;

En ce qui concerne l'exigibilité et le montant de la créance :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 12 du règlement départemental relatif à l'aide aux étudiants, applicable au contrat de prêt d'étude de M.A... : " Le bénéficiaire d'une aide remboursable devra, sauf exception prévues aux articles suivants, commencer à s'acquitter de sa dette envers le Département au plus tard au cours du premier trimestre de la cinquième année civile qui suivra l'obtention du titre universitaire postulé, l'achèvement des études entreprises ou l'interruption de ces dernières. Le remboursement intégral devra être achevé au plus tard au cours de la dixième année civile qui suivra l'achèvement ou l'interruption des études. Ces délais seront majorés, le cas échéant, de la durée effective des services militaires " ; que le contrat de prêt consenti par le président du conseil général de la Guadeloupe à M. A...stipulait que : " l'emprunteur disposera d'un délai de dix années maximum à compter de la fin ou de l'interruption de ses études, pour se libérer des sommes qui lui auront été versées. Toutefois, il s'engage à commencer obligatoirement à rembourser, au plus, tard, au cours du premier trimestre de la cinquième année suivant la fin ou l'interruption de ses études. Le remboursement sera effectué à la convenance de l'emprunteur soit en une fois " ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A...a obtenu un prêt d'honneur d'un montant de 2 222,70 euros au titre de l'année universitaire 1996-1997 en vue d'obtenir un diplôme d'enseignement universitaire général de droit ; qu'il a arrêté ses études de droit à l'issue de la première année et s'est inscrit au titre de l'année scolaire 1998-1999 en première année de brevet technique supérieur " Communication des Entreprises " ; qu'après l'obtention de ce diplôme, il a réalisé une 3ème, puis une 4ème année et a obtenu en 2002 le diplôme de " responsable de communication " ; que le délai de dix ans à l'issue duquel son prêt d'honneur devait être remboursé, a commencé à courir, en application des dispositions règlementaires et des stipulations contractuelles précitées, à compter de la date d'interruption des études de droit entreprises pour la réalisation desquelles il avait postulé pour obtenir ce prêt, et non à compter de l'achèvement de ses études de communication ; que par suite, M. A...devait avoir entièrement remboursé son prêt étudiant au cours de l'année 2007 ; que, dès lors, ni l'article 12 du règlement départemental relatif à l'aide aux étudiants, ni les stipulations du contrat de prêt n'ont été méconnus ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A...a perçu trois mensualités de 740,90 euros, au cours de l'année universitaire 1996 et 1997, au titre du contrat de prêt qui lui a été consenti le 1er août 1996 ; qu'après deux remboursements effectués en avril 2006 et en mai 2006, d'un montant total de 444,54 euros, la créance dont il restait redevable auprès du département de la Guadeloupe s'élevait à la somme de 1555,89 euros, à laquelle s'ajoutent les frais liés à l'émission du commandement de payer contesté ; que par suite, la réalité de la créance est, tant dans son existence que dans son montant, établie ; qu'enfin, la circonstance que M. A..., qui n'a pas contesté la décision de la commission permanente du 2 avril 2007 rejetant sa demande de remise gracieuse de son prêt d'honneur, aurait des difficultés financières pour rembourser sa dette et la circonstance que d'autres étudiants se trouvant dans la même situation que lui auraient bénéficier d'exonérations, ne peuvent utilement être invoquées ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, que le département de la Guadeloupe est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Basse-Terre a annulé le commandement de payer du 20 mars 2007 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le département de la Guadeloupe qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M.A..., la somme qu'il réclame au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens ; que dans les circonstances de l'espèce, les conclusions du département de la Guadeloupe tendant au versement d'une somme de 2 500 euros doivent également être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Basse-Terre du 5 février 2009 est annulé.

Article 2 : La demande de M. A...est rejetée.

Article 3 : Les conclusions du département de la Guadeloupe tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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No 11BX03125


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme MARRACO
Rapporteur ?: Mme Déborah DE PAZ
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : SCP CELICE BLANCPAIN SOLTNER

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Date de la décision : 20/11/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 11BX03125
Numéro NOR : CETATEXT000027788702 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-11-20;11bx03125 ?
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